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La République Soviétique de Hongrie (1919) : un texte d’Alan Woods. 3ème partie : l’année 1918 : de la grève du 18 janvier à la révolution des Asters du 31 octobre

jeudi 2 septembre 2010

L’équivalent des journées de la révolution de Février 17 en Russie est la Journée des Asters le 31 octobre 1918 en Hongrie, qui aboutira à la proclamation de la République. Dans cette 3ème partie du texte d’Alan Woods la logique de la dynamique des événements est encore bien exprimée. Mais lorsqu’on approche de la journée du 31 octobre, le vocabulaire devient un peu vague.

Par exemple vers la fin du texte il écrit une phrase avec laquelle on ne peut pas être d’accord : L’appareil d’Etat s’écroulait sous son propre poids. A Budapest le gouvernement était suspendu en l’air. Le pouvoir était dans la rue. puis La classe dirigeante, prise par surprise et n’ayant aucune base réelle, n’offrit pas de résistance. Ce fut un soulèvement spontané des masses come la Révolution de Février en Russie, sans direction et sans programme clair.

On sait que c’est une illusion que peuvent avoir les travailleurs en confondant un changement de la forme du gouvernement et le changement de la nature de l’Etat, l’écroulement du gouvernement et l’écroulement de la domination d’une classe sociale.

Tout parait facile dans la phase unitaire et fraternelle du début d’une révolution, puis vient l’échec, la terreur blanche (par exemple février puis juin 1848 à Paris). Ce sont les « erreurs » des révolutionnaires, leur inexprérience qui est invoquée (ce que fera Wood dans la suite du texte). Les révolutionnaires ont intérêt à montrer que dès les débuts de la révolution les classes dirigeantes, au travers des partis qui la représentent, ont souvent une stratégie. Il faut savoir la repérer et la comprendre.

Or divers partis du centre ou de gauche dont le Parti Social-Démocrate de Hongrie avaient une stratégie très définie en Octobre 1918 en Hongrie. Cette gauche représentait la bourgeoisie et ses alliés féodaux, la classe dirigeante. Ceci va à l’encontre de ce que dit Alan Woods.

De plus, un élément fondamental qui explique le fait que les classes dirigeantes de Hongrie ont été moins déboussolée que les classes dirigeantes russes est le fait que le scénario de la révolution en Hongrie est quasiment un remake de la révolution russe, car le paysage des classes sociales était analogue dans les deux empires (faim de terre des paysans, oppressions des nationalités).
Mais ceci les socio-démocrates, le savaient, ils avaient compris comment les soviets, avaient après être passés aux bolcheviks, avaient renversé Kerenski. Ils avaient constamment tout au long de l’année 18 en mémoire l’année 17 en Russie.

Dès le lendemain de la révolution d’Octobre 17, les dirigeants aux service de la bourgeoisie savent qu’un petit parti méprisable, « sectaire », de « maximalistes » qui polémiquent pendant des décennies sur le matérialisme dialectique sont capable de prendre le pouvoir et de le garder à la tête de soviets. La Hongrie est le premier cas ou cette leçon bien apprise a été appliquée.

Dans le texte d’Ataulfo Riera « La Révolution hongroise de 1919 » (voir sur ce site) le problème sur l’analyse de cette journée est évoqué : Le 31 octobre, sans pratiquement tirer un seul coup de feu, les Conseils de soldats et d’ouvriers renversent le régime. La monarchie est abolie et le mariage forcé avec l’Autriche est rompu. Le 16 novembre, la République de Hongrie est proclamée. Dans l’euphorie des premiers jours, on ne s’aperçois pas qu’une situation de dualité de pouvoir s’instaure entre le nouveau gouvernement, composé de bourgeois et de social-démocrates - et avec à sa tête le comte Karolyi - et les conseils d’ouvriers et de soldats. Le premier acte de la Révolution hongroise commence.
La complexité de la situation, c’est-à-dire une dualité de pouvoir qui est peu claire dans la tête de certains, est bien évoquée ici.
Mais le « on » est un terme beaucoup trop vague. Un arrêt sur cette Journée des asters parait donc indispensable.

Lors de ce type de « journées révolutionnaire » il faut bien distinguer les classes dans leur ensemble, les fractions de chacune des classes qui sont vraiment dans l’action, les partis (avec des noms précis) qui les représentent, la notion d’Etat, de gouvernement. C’est cette élaboration de notions très précises qui a permis aux révolutionnaires comme Lénine de s’orienter à travers le maquis d’évements complexes que sont les révolutions pour identifier les acteurs, les tâches politique de la classe ouvrière, les mots d’ordre en lesquels elles se traduisent.

Comprendre clairement le scenario de telles journées est indispensable pour les révolutionnaires. C’est la condition pour être capable de s’orienter dans les futures événements ou de tels scenarios se reproduiront.

Dans un prochain article intitulé « La Révolution des Asters » nous proposerons quelques faits sur la chronologie de cette journée, qui permettront de clarifier le déroulement de cette journée, qui fut beaucoup moins spontanée les journées du Février 17 russe.

Voici donc la suite du texte d’Alan Woods.

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L’effervescence dans les usines conduit à la grève générale contre la guerre à Budapest le 18 janvier 1918 qui se transforma en rapidement en meetings de masses auxquels de nombreux soldats participèrent. La grève de janvier se répandit comme une trainée de poudre en Autriche, Hongrie et Allemagne. C’était précisément le souffle brulant de la révolution sur leurs arrières qui obligea les représentant de l’Autriche à Brest-Litovsk, Czernin, à adopter une attitude conciliante vis-à-vis du gouvernement bolchévique, bien que l’Allemagne s’y oppose en la personne du Général Hoffman.

Pour certaines raisons le gouvernement Hongrois s’empressa d’étendre le droit de vote. Comme toujours, la classe dirigeante est prête à accorder de sérieuse réformes quand elle se sent menacée de la perte de son pouvoir et ses privilèges.

La bourgeoisie était terrifiée, de même que les dirigeants de l’aile droite du mouvement ouvrier qui avaient soutenu la guerre et s’étaient opposés à toute résistance des travailleurs. Les dirigeants socio-démocrates, débordés par l’extension rapide de la grève générale, se hatèrent d’y mettre fin le 21 janvier, quatre jours après qu’elle ait commencé. Cette trahison ne servait qu’à aggraver les divisions au sein du PSD et intensifier la force de l’opposition de l’aile gauche.

La profondeur de la vague révolutionnaire peut se voir dans l’éveil des couches les plus opprimées et arriérées , notamment les femmes ouvrières dont le rôel héroique dans ces événements apparait dans une circulaire du Ministère de la guerre, en date du 3 mai 1918 : Les femmes ouvrières non seulement perturbent fréquemment les usines en tentant d’arrêter le travail, mais de plus elles tiennent des discours enflammés, participent aux manifestations, marchant aux premiers rangs avec leurs bébés dans les bras, avec un comportement insultant envers les représentants de la loi.

Le 20 juin 1918, une nouvelle guerre éclata suite à des tirs contre les les ouvriers. Des soviets, ou conseils ouvriers furent créés pour défendre les revendications ouvrières : la paix le suffrage universel, le pouvoir aux soviets. La grève s’étendit de Budapest aux autres centres industriels. Mais encore une fois elle fut stoppée après dix jours par sa direction.

Les masses étaient prêtes à se battre pour le pouvoir, mais furent contrecarrées à chaque paspar leurs propres leaders. Mais les conditions insupportables pour les masses, l’accumulation de mécontentement et de frustration. Conduit inexorablement à une nouvelle explosion à l’automne 1918.

Avec l’effondrement du front bulgare, la vague de désertions se transforma en flot qui submergea le pays. Il y avait des révoltes sporadiques dans l’armée et la marine. Des bandes armées de déserteurs rentraient en relations avec des grévistes et des paysans rebelles dans des affrotements avec la police et participaient à la saisie des terres. Quand il devint claire que les puissances centrales allaient perdre la guerre, ces mutineries se généralisèrent.

L’appareil d’Etat s’écroulait sous son propre poids. A Budapest le gouvernement était suspendu en l’air. Le pouvoir était dans la rue.

Face aux grèves, mutineries et manifestations, la classe dirigeante était divisée. Il y eut des scènes orageuses au parlement. Le 17 Octobre un comte Tisza démoralisé annonça : nous avons perdu la guerre. L’oligarchie bourgeoise des grands propriétaires, sentant le pouvoir lui filer entre les mains, cherchait désespérément à s’abriter derrière une deuxième ligne de défense et la trouva dans son ennemi d’hier : Karoly.

Le 28 octobre il y eut une manifestation de masse à Budapest en faveur de l’indépendance de la Hongrie. Le 20 octobre la Hongrie fut déclarée une République et le 30 octobre il Budpaest dut le théâtre d’ un soulèvement des ouvriers , soldats, marins et étudiants.
Le gouvernement tomba comme un château de cartes sans tirer un coup de feu pour se défendre. Les rues furent occupée par des insurgés criant des slogans tels « longue vie à la Hongrie indépendante et démocratique ! », « A bas les comtes ! », « non à la guerre », « seul le conseil des soldats donne des ordres ». Au soir du 31 octobre les insurgés avaient occupé les points stratégiques et libéré tous les prisonniers politiques.

La révolution avait triomphé rapidement et sans douleur. La classe dirigeante, prise par surprise et n’ayant aucune base réelle, n’offrit pas de résistance. Ce fut un soulèvement spontané des masses come la Révolution de Février en Russie, sans direction et sans programme clair. Les dirigeants ouvriers ne firent rien, ou bien entravèrent la révolution dont il n’avaient pas voulu, qu’ils redoutaient comme de la peste.

La masse des ouvriers, soldats, paysans, manquant d’un parti révolutionnaire et d’un programme, étaient aspiraient néanmoins à un tel programme. Peut-être ne savaient-ils pas ce dont ils voulaient, mais ils savaient très bien ce dont ils ne voulaient plus. Ils ne voulaient plus du pouvoir et des privilèges d’une oligarchie corrompue, ils ne voulaient plus de la monarchie ou d’un de ses substituts, ils ne voulaient plus de rapports féodaux pour les terres ni d’oppression nationale.

Mais en se battant pour ces questions brûlantes, les masses comprirent vite l’impossibilité de solutions partielles à leur problèmes et l’inévitabilité d’un coup de balai pour reconstruire une société selon de nouveaux principes pour éliminer les séquelles de siècles d’oppression et d’humiliation nationale.

Les travailleurs demandaient une république. Les politiciens bourgeois libéraux du Parti de 1848 et des dirigeants ouvriers de l’aile droite résistèrent à leur demande autant qu’ils purent. Les « révolutionnaires » malgré eux avaient été emportés et poussés au gouvernement par le mouvement de masse.

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