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Luttes de classe en Afrique

jeudi 1er septembre 2011, par Robert Paris

Que se passe-t-il en Afrique ?

Depuis près d’une décennie, le continent africain connaît une expansion économique considérable, avec une moyenne de 5% de croissance annuelle au cours des dix ans qui ont précédé la crise économique de 2008. Selon une analyse de slateafrique, au fur et à mesure que la croissance s’accélérait et que les plus fortunés, qui sont d’ailleurs les plus corrompus, amassaient de gigantesques fortunes, l’écart entre ceux-ci et ceux qui doivent marcher derrière n’a fait que se creuser.

Un groupe de chercheurs indépendants basé à Johannesburg estime que les inégalités sont en fait pires qu’à la fin de l’apartheid en Afrique du Sud. Le coefficient du pays, qui mesure les inégalités, est de 0,65, ce qui en fait le deuxième pays le plus inégalitaire de la planète. Cette révélation qui, sans surprise, n’a pourtant pas empêché les 40 plus grosses entreprises de la place boursière du pays, d’augmenter le salaire médian de leurs dirigeants de 23% l’année dernière. Mais une croissance rapide et la consommation ostentatoire qui en découle immanquablement peuvent s’avérer risquées lorsqu’il n’existe que peu de soupapes de sécurité politiques. La conséquence, comme nous avons pu le voir en Égypte et ailleurs, est que les régimes autoritaires qui ont permis à leurs économies de s’ouvrir sont devenus mûrs pour la révolution. À travers tout le continent africain, cette dynamique, associée à des angoisses plus concrètes comme l’augmentation du prix du carburant et de la nourriture, a poussé les gens à descendre dans la rue dans une dizaine de capitales. Voici des pays où le printemps arabe est en passe de devenir un long, chaud, et potentiellement incendiaire été africain.

Le Malawi

Depuis le 20 juillet dernier, des manifestations secouent ce pays d’Afrique australe sans accès à la mer, quand, le ressentiment engendré par les problèmes économiques du pays, qui couvait depuis un bon moment a fini par exploser. Des dizaines de milliers de personnes ont investi les rues de la capitale commerciale du pays, ainsi que d’autres grandes villes, pour dénoncer les pénuries de carburant, le manque de devises étrangères et l’augmentation du coût de la vie. Le président Bingu Wa Mutharika, ancien économiste de la Banque mondiale de plus en plus impopulaire à cause de sa mauvaise gestion des finances du pays, a réagi avec toute la subtilité typique d’un homme fort, en ordonnant à l’armée d’écraser les manifestations dans trois principales villes, provoquant la mort de plus de 18 personnes. La réaction du président aux troubles lui a valu d’être condamné par la communauté internationale. Et récemment, en réponse à ces violences, un consortium a suspendu un financement de plus 162 milliards de Fcfa, destiné à améliorer la fourniture en électricité du pays. Début juillet, avant que n’éclatent les manifestations, la Grande-Bretagne avait suspendu son aide au Malawi en réaction, entre autres, à des violations persistantes des droits humains.

Des manifestations secouent ce pays d’Afrique australe sans accès à la mer depuis le mercredi 20 juillet, quand le ressentiment engendré par les problèmes économiques du pays et qui couvait depuis un bon moment a fini par exploser. Des dizaines de milliers de personnes ont investi les rues de Blantyre, la capitale commerciale du pays, ainsi que d’autres grandes villes, pour dénoncer les pénuries de carburant, le manque de devises étrangères et l’augmentation du coût de la vie.
Le président Bingu wa Mutharika, ancien économiste de la Banque mondiale de plus en plus impopulaire à cause de sa mauvaise gestion des finances du pays, a réagi avec toute la subtilité typique d’un homme fort : en ordonnant à l’armée d’écraser les manifestations dans trois principales villes, provoquant la mort d’au moins 18 personnes.
« Les corps présentaient des fractures, des coupures profondes, des côtes cassées et avaient perdu beaucoup de sang », a décrit le porte-parole du ministère de la Santé Henry Chimbali lors d’une interview accordée à l’AFP.

La réaction de Mutharika aux troubles lui a valu d’être condamné par la communauté internationale. Mardi 26 juillet, en réponse à ces violences, la Millenium Challenge Corporation (MCC) a suspendu un financement de 350,7 millions de dollars (247 millions d’euros) destiné à améliorer la fourniture en électricité du pays.

Le porte-parole de la MCC a exprimé la « profonde inquiétude » que lui inspiraient les récents événements, et souligné tout particulièrement les états de service du président —loin d’être brillants— dans les domaines « du pluralisme politique, du respect des droits humains et de l’état de droit », rapporte Bloomberg.

Début juillet, avant que n’éclatent les manifestations, la Grande-Bretagne avait suspendu son aide au Malawi en réaction, entre autres, à des violations persistantes des droits humains et à des tendances « toujours plus autocratiques », à en croire une fuite de câble diplomatique.

La Guinée-Bissau

Cette petite nation d’Afrique de l’Ouest, connue pour s’être aventurée dans la cour des grands dans le secteur du narcotrafic mondial, a été aussi secouée les par une vague de manifestations. Les protestations qui ont fait descendre plus d’un millier de personnes dans la rue en deux occasions ont été organisées par une coalition de 13 partis d’opposition. Le Premier ministre Carlos Gomes Jr., largement soupçonné de tremper dans une série d’assassinats politiques datant de 2009, est la principale cible des manifestants qui réclament sa démission. L’ancien président Joao Bernardo Vieira et le chef des armées, le général Batista Tagme Na Waie, ont été assassinés à moins de 12 heures d’intervalle en mars 2009, et deux autres éminents politiciens ont été tués quelques mois plus tard. Les enquêtes diligentées par le gouvernement actuel n’ont rien donné, faisant naître le soupçon que Gomes lui-même serait derrière les assassinats. Les négociations qui se sont tenues le mardi 26 juillet entre le président de Guinée-Bissau, Malam Bacai Sanha, et les leaders de l’opposition, ont, dit-on, quelque peu apaiser les tensions.
Petite nation d’Afrique de l’Ouest, la Guinée-Bissau, surtout connue pour s’être aventurée dans la cour des grands dans le secteur du narcotrafic mondial, a été secouée les deux dernières semaines de juillet par une vague de manifestations. Selon l’AFP, les protestations qui ont fait descendre plus de 10.000 personnes dans la rue en deux occasions ont été organisées par une coalition de 13 partis d’opposition. Le Premier ministre Carlos Gomes Jr., largement soupçonné de tremper dans une série d’assassinats politiques datant de 2009, est la principale cible des manifestants qui réclament sa démission.

L’ancien président Joao Bernardo Vieira et le chef des armées, le général Batista Tagme Na Waie, ont été assassinés à moins de 12 heures d’intervalle en mars 2009, et deux autres éminents politiciens ont été tués quelques mois plus tard. Les enquêtes diligentées par le gouvernement actuel n’ont rien donné, faisant naître le soupçon que Gomes lui-même serait derrière les assassinats.
Les négociations qui se sont tenues le mardi 26 juillet entre le président de Guinée-Bissau, Malam Bacai Sanha, et les leaders de l’opposition, ont quelque peu apaisé les tensions —en tout cas pour l’instant. Comme l’a déclaré Braima Sori Djalo, chef du principal parti d’opposition du pays à l’AFP :
« Le président nous a demandé de lui laisser du temps ; nous allons faire une pause. Mais si rien n’est fait, nous reprendrons les manifestations. »

Le Sénégal

Les manifestations continuent de façon sporadique dans le pays, depuis le 23 juin, date où le président Abdoulaye Wade a proposé des amendements constitutionnels qui lui permettraient d’effectuer facilement un troisième mandat alors que la Constitution sénégalaise ne permet d’effectuer que deux mandats présidentiels. Il a également proposé de faire passer le seuil de victoire de 50% à 25% des voix au premier tour et de créer un poste de Vice-président, qu’il serait occupé par son fils Karim, lui succéder automatiquement en cas de décès. Les critiques du président protestent que ces amendements garantiraient presque à coup sûr la réélection de Wade tout en ouvrant à son fils la voie de sa succession. Après une semaine de manifestations qui ont culminé avec l’incendie de plusieurs bâtiments gouvernementaux, notamment de Senelec, la compagnie d’électricité d’État, l’armée a été déployée pour ramener l’ordre.

Les manifestations n’ont pas cessé à Dakar, la capitale, depuis le 23 juin, date où le président Abdoulaye Wade a proposé des amendements constitutionnels qui lui permettraient d’effectuer facilement un troisième mandat (la Constitution sénégalaise ne permet d’effectuer que deux mandats présidentiels, mais leur durée a été réduite de sept à cinq ans sous Wade, ce qui, pour ses partisans, l’autorise à effectuer un troisième mandat).

Wade a proposé de faire passer le seuil de victoire de 50% à 25% des voix au premier tour et de créer un poste de vice-président —dont on se doute qu’il serait occupé par son fils Karim— qui lui succéderait automatiquement en cas de décès. Les critiques du président protestent que ces amendements garantiraient presque à coup sûr la réélection de Wade tout en ouvrant à son fils la voie de sa succession.
Après une semaine de manifestations qui ont culminé avec l’incendie de plusieurs bâtiments gouvernementaux, notamment de Senelec, la compagnie d’électricité d’État, l’armée a été déployée pour ramener l’ordre.
Mais les membres de la principale coalition d’opposition sénégalaise, Benno Siggil Senegal, continuent de s’agiter contre le président vieillissant et son fils, tout en donnant à leur mouvement populaire le cadre d’une lutte visant à protéger l’héritage démocratique du pays.

L’Ouganda

Déçus par des conditions économiques désastreuses et endurcis par la réponse brutale du régime, des manifestants ont affronté les forces de sécurité loyales au président Yoweri Museveni en Avril dernier. Ils ont brûlé des pneus et jeté des cailloux sur les policiers, qui ont répondu à coup de gaz lacrymogène, de balles en caoutchouc et parfois réelles, causant au moins 10 morts et des centaines de blessés. En juin, il semblait que la réaction violente de Museveni avait atteint le but recherché. Besigye a été arrêté et accusé d’incitation à la violence pour son rôle dans les marches de travailleurs. Certains analystes craignent toujours que les troubles aient aggravé les conditions de vie des Ougandais, parce que, Museveni, au pouvoir depuis un quart de siècle, a juré de traquer les manifestants. Mais avec la détérioration continue des conditions économiques, il continue à s’enorgueillir obstinément de sa propre gestion de l’économie ougandaise.

Le mouvement de « marche des travailleurs » a débuté en avril en Ouganda quand une poignée de politiciens —notamment le leader de l’opposition Kizza Besigye— a commencé à se rendre au travail à pied pour protester contre l’augmentation des prix du carburant et de la nourriture. Il n’a pas tardé à attirer des milliers d’Ougandais mécontents dans les rues.

Éperonnés par des conditions économiques désastreuses et endurcis par la réponse brutale du régime, les manifestants ont affronté les forces de sécurité loyales au président Yoweri Museveni pendant la plus grande partie des mois d’avril et de mai. Ils ont brûlé des pneus et jeté des cailloux sur les policiers, qui ont répondu à coup de gaz lacrymogène, de balles en caoutchouc et parfois réelles, causant au moins 10 morts et des centaines de blessés.
En juin, il semblait que la réaction violente de Museveni avait atteint le but recherché. Besigye a été arrêté et accusé d’incitation à la violence pour son rôle dans les marches de travailleurs (accusations qui depuis ont été abandonnées), et le mouvement s’est enlisé.

Aujourd’hui, certains analystes craignent que les troubles aient aggravé les conditions de vie des Ougandais : Museveni, au pouvoir depuis un quart de siècle, a juré de dévorer les manifestants « comme des samossas » et il serre encore un peu plus la vis à l’opposition politique déjà étouffée de ce pays d’Afrique de l’Est.
Mais avec la détérioration continue des conditions économiques —et Museveni qui continue à s’enorgueillir obstinément de sa propre gestion de l’économie ougandaise— qui sait ce que le long et chaud été africain a en réserve.

L’Afrique du Sud

L’Afrique du Sud, où plus d’un millier de mineurs ont observé une grève en juillet dernier, était déjà secouée par des troubles civils intermittents bien avant le début des troubles dans les pays arabes, cette année. Les problèmes économiques, les pénuries d’eau et la menace d’une crise du logement, ont été les causes de ce soulèvement. Au mois de février 2011, les tensions ont atteint leur apogée quand la police a tiré à balles réelles sur des manifestants qui brûlaient des pneus, lançaient des pierres et tiraient sur la police anti-émeute dans la province du nord-est de Mpumalanga. L’incident s’est produit suite au discours du président Jacob Zuma, dans lequel la population s’est sentie flouée lorsqu’il s’est félicité de l’augmentation du nombre d’emplois créés et prétendait que le pays était sur la voie de la reprise économique. Ces différents troubles et manifestations ont touché d’autres pays africains, notamment le Burkina Faso, où des manifestations ont paralysé récemment le pays pour cause d’augmentation du prix des denrées de tous ordres et une mutinerie généralisée occasionnée par les forces de sécurité. En réaction à cette insubordination, le président Blaise Compaoré a dissous le gouvernement et a fait des concessions à l’armée, un geste qui a un peu contribué à l’apaisement. Malheureusement avec la marche des commerçants dans les rues des principales villes du pays, le premier Magistrat du pays a du lever le ton en faisant réprimer les manifestations et 566 soldats mis au dehors du fait de leur participation aux différents troubles. Le Zimbabwe aussi a connu ses moments de troubles et de contestations. Mais Robert Mugabe, très prompt, a ordonné l’arrestation de 46 activistes et mis le grappin sur le leader de l’opposition Morgan Tsvangirai, accusés de fomenter un soulèvement semblable à celui de l’Égypte en février...

L’Afrique du Sud ne pourrait créer que 4 millions d’emplois d’ici 2025. Cela ne suffira pas pour vraiment faire baisser le chômage. C’est ce qu’a affirmé Pravin Ghordan, le ministre des Finances. Selon les chiffres officiels, plus du quart de la population est sans emploi et chez les jeunes, le taux d’inactivité atteint les 50%.

Alors, selon le ministre, il va certainement falloir revoir les lois du travail. Il s’agit peut-être de créer un marché plus flexible pour attirer les investisseurs.

Dans la province du Kwazulu-Natal, 10 000 emplois dans le textile sont menacés. Les chefs d’entreprises disent vouloir déplacer leurs usines au Botswana ou au Lesotho, s’ils doivent payer un salaire minimum.

Et le reste de l’Afrique ?

Alarmés à juste titre par l’avalanche de troubles civils qui a déferlé sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord en début d’année, un certain nombre de dirigeants africains ont été prompts à anticiper ou écraser les protestations dans leur pays avant qu’elles n’atteignent leur masse critique.

Au Burkina Faso, les manifestations qui ont explosé en mars, suscitées par l’augmentation des prix de la nourriture et la rapacité des forces de sécurité se sont transformées en avril en mutinerie militaire généralisée. En réaction, le président Blaise Compaoré, qui dirige ce petit pays d’Afrique de l’Ouest depuis 24 ans, a dissous son gouvernement et accordé toute une série de concessions à l’armée. Ce geste a peu contribué à l’apaisement, cependant, car les commerçants ont continué de défiler dans les rues. Compaoré a rapidement changé de ton, réprimé les manifestations et renvoyé 566 soldats qui avaient participé aux protestations.

Le Zimbabwe a lui aussi vu ses rêves de révolution anéantis quand le président Robert Mugabe a ordonné l’arrestation de 46 activistes —notamment d’un allié du leader de l’opposition Morgan Tsvangirai— accusés de fomenter un soulèvement semblable à celui de l’Égypte en février. Une campagne Internet appelée FreeZimActivists a échoué à se gagner le soutien contre le dictateur chevronné plusieurs semaines plus tard, et le mouvement de contestation s’est réellement éteint. Mis à part quelques confrontations en avril, le gouvernement férocement autoritaire n’a eu à gérer que très peu de troubles depuis.
Le gouvernement éthiopien a lui aussi eu recours à la stratégie « J’incarcère mes opposants » pour étouffer toute agitation. En mars, au moins 64 membres ou supporters du Mouvement démocratique fédéraliste Oromo et du Congrès national Oromo ont été arrêtés et emprisonnés à Addis Abeba.

En Guinée équatoriale, le président Teodoro Obiang Nguema —dont le règne a commencé lors du coup d’État de 1979 qui renversa son oncle, l’ancien président Macias Nguema— n’a pas perdu une minute pour décréter l’illégalité des manifestations quand des troubles ont commencé à perturber le nord du pays. Il craignait, à juste titre, que la masse des Équato-guinéens désespérément pauvres ne finisse par se dresser contre la corruption vorace de sa famille. Étant donné que le sommet de l’Union africaine était programmé pour le mois de juin à Malabo, la capitale, il ne pouvait se permettre de faire mauvaise figure. Le sommet s’est déroulé sans anicroche, ce qui a sans doute un rapport avec le fait que plus de 100 activistes aient été rassemblés et emprisonnés avant l’événement.

Yaoundé (Cameroun) : Les instituteurs qui observaient un sit-in hier devant le Minedub ont fait face à la riposte des gendarmes et policiers.

Les forces de l’ordre sillonnaient encore la cour du ministère de l’Education de base (Minedub) jusqu’en fin d’après-midi hier, mardi 16 août 2011. Quelques heures après avoir dispersé la cinquantaine d’instituteurs contractuels et contractualisés (Ic) qui observaient un sit-in depuis la matinée devant ce département ministériel. « Vous avez vos réclamations. Tout ce que nous vous demandons, c’est de ne pas barrer l’accès aux usagers. Que tout se passe dans le calme », avait indiqué le commissaire Amougou du premier arrondissement, aux grévistes qui réclament leur intégration à la Fonction publique. Une consigne qui va être scrupuleusement respectée par les manifestants qui avaient ainsi répondu à l’appel à la grève lancé par le Comité national d’intégration 2011 des instituteurs contractuels et contractualisés (Comité I11).

La présence des éléments de la gendarmerie et de la police, qui veillaient au grain, a semblé refroidir les ardeurs des manifestants qui brandissaient de pancartes sur lesquelles on pouvait lire « Concours=source de corruption, de parrainage et frustration », « 15 ans de galère comme Ivac, maîtres des parents et Ic » ou encore « Quelle éducation de qualité pour des enseignants frustrés ? ». Pourtant, avant l’arrivée des forces de l’ordre, les manifestants installés des deux côtés de l’entrée donnant accès au Minedub, reprenaient en choeur le refrain d’une musique bien connue du parti au pouvoir, adapté à leur façon : « Nous sommes au Minedub pour notre intégration… Intégration, oui, oui ! Intégration aujourd’hui ou rien ! ». Ceci, sous les regards des curieux qui, à travers la grille de la clôture ou même dans la cour de ce département ministériel, observaient le spectacle qui s’offrait à leurs yeux depuis 11h30.

« Nous sommes décidés à faire entendre notre voix », fulmine le vice-président du Comité national I11 (Intégration en 2011), Paul Tchatcha, ses camarades assis à même le sol. Des instituteurs venus des quatre coins du pays, apprend-on. « C’est déplorable de traiter les personnes qui sont à la base de l’éducation de cette manière. C’est à se demander quel avenir pour notre pays. C’est l’enfance qui est sacrifiée », rouspète un homme dans la foule qui se fait de plus en plus dense autour des instituteurs contractuels et contractualisés. Quelques heures avant le début du sit-in, les membres du bureau du Comité I11 ont tenté de rencontrer les responsables du ministère de la Fonction publique et de la Réforme Administrative (Minfopra) pour une énième négociation.
« Il n’y a pas eu d’issue avec le ministre Emmanuel Bond qui a promis d’étudier notre cas. Nous savons que c’est en réalité pour faire gagner du temps au gouvernement jusqu’à la date limite de dépôt des dossiers pour le concours de 200 instituteurs lancé par la Fonction publique le 16 juin dernier », indique le président du comité, Thomas Messanga Ngono, soulignant que les Ic soit que le nombre de candidats soit revu à la hausse. Un autre sit-in est prévu ce mercredi 17 août devant le Minfopra.

Gabon : les enseignants du secteur public entrent en grève

Les enseignants du secteur public au Gabon ont entamé lundi une grève pour réclamer notamment les salaires “suspendus” de neuf leaders syndicaux, a appris l’AFP auprès d’un responsable syndical.

“La grève a bien débuté ce matin (lundi)”, a déclaré Simon Ndong Edzo, modérateur de la Convention nationale des syndicats du secteur éducation (Conasysed), groupement de neuf syndicats ayant appelé à la grève.

Louis Patrick Mombo, rapporteur général adjoint de la Conasysed a confirmé qu’une grève d’”une semaine reconductible (et qui) pourrait devenir illimitée” avait été lancée.

Interrogé sur la participation au mouvement, il a indiqué qu’il était trop tôt pour se faire une idée. “Nous n’avons pas fini de faire le tour” des établissements, a-t-il dit.

M. Ndong Edzo a expliqué que les enseignants réclamaient “le rétablissement des salaires de neuf leaders syndicaux qui ont été suspendus arbitrairement par le ministre de l’Education (Séraphin Moudounga)”. Selon lui, ils ont été suspendus “sans notification et cela depuis trois mois”.

“Nous voulons que la prime d’incitation (au métier d’enseignant) soit versée dans les bulletins de salaires et qu’on ne nous la paye plus à la main”, a-t-il ajouté.

La Conasysed revendique enfin que des “postes budgétaires soient affectés aux jeunes (enseignants) gabonais”. Les promotions depuis 2006 “n’ont pas de postes budgétaires et de salaires”, a-t-il affirmé.

Dans un communiqué publié dans la presse lundi, le ministère de l’Education nationale rappelle qu’”un ensemble de réformes sont envisagées et mises en oeuvre depuis fin 2009 début 2010″, dénonce “une baisse sans précédent du niveau et du rendement scolaire” lié selon lui aux grèves rythmant “de façon intempestive” la vie du système éducatif, et reproche aux “auteurs et instigateurs” de la grève de vouloir “perturber les examens de fin d’année”.

Depuis 2008, l’éducation publique et la santé ont été affectées pendant plusieurs mois par des mouvements sociaux.

La rentrée de 2010 avait été perturbée par une grève de deux semaine des enseignants qui réclamaient des arriérés de salaires, primes et promotions administratives.

Des mouvements populaires naissants ont été réprimés au Gabon, à Djibouti et au Cameroun, révélant à quel point la dissociation des développements politiques et économiques alimente l’instabilité dans la région. Pour l’instant, des hommes forts maintiennent une paix fragile dans les trois capitales, mais s’il y a une leçon à tirer du printemps arabe, c’est celle ci : ce n’est pas parce que rien ne bouge aujourd’hui que rien ne bougera demain.

C’est même le contraire : c’est parce que rien ne change que cela explosera demain !

La suite du texte

Luttes de classe en Afrique

Messages

  • Nous organisons une réunion ouvrière, dimanche 17 fevrier, pour discuter entre exploités de notre avenir.

    Vous pouvez prendre contact en me laissant un message à cette adresse : g.beaugin@gmail.com

  • Les conditions actuelles en Afrique sont peut-être la plus grande remise en cause du capitalisme moderne. Considérons les points faits dans le dernier rapport de la Banque mondiale : le revenu total de l’ensemble des 48 états africains sub-sahariens est à peu près égal à celui d’un pays aussi petit que la Belgique. En moyenne, chaque état a un revenu avoisinant $2 milliards par an, c’est-à-dire à peu de chose près ce dont dispose une petite ville occidentale de 60.000 habitants. Si l’on fait le calcul, cela revient à moins d’un dollar par jour.

    Le produit intérieur brut de ce vaste continent représente moins d’un pour cent du produit intérieur brut mondial. Les conditions sociales se sont détériorées par rapport aux gains minimes faits après l’indépendance dans les années soixante. Si on exclut l’Afrique du Sud, il y a moins de routes dans toute l’Afrique qu’en Pologne et il n’y a que 5 millions de téléphones. On peut présumer que ces statistiques consternantes ne sont pas exagérées étant donné que la Banque mondiale doit admettre au moins une part de responsabilité pour ce qui est arrivé.

    Dans le domainde de la santé, une plus grande partie de la population meurt maintenant de maladies infectieuses qu’à aucun autre moment depuis le début du vingtième siècle. L’impact du sida en Afrique est absolument dévastateur. Les chiffres des Nations unies estiment à 24,5 millions le nombre de personnes infectées par le virus du sida en Afrique, dont 4 millions rien qu’en 1999. Le sida a tué 2,2 millions de personnes en Afrique l’an dernier, 80 pour cent du total de morts dans le monde. Dans certains pays, comme au Zimbabwe et au Botswana, les écoles et les usines ne peuvent plus fonctionner en raison de l’énorme taux de mortalité parmi les travailleurs. Comme nous l’avons précisé dans nos articles sur le sida, il n’existe pas, à l’heure actuelle, la possibilité de prendre les mesures d’urgence qui s’imposent et de mobiliser les ressources et les médicaments nécessaires pour empêcher ces millions de personnes de mourir, et encore moins de mener une discussion sérieuse au sein des gouvernements occidentaux.

    En cherchant une explication dans les médias de ce qui s’est passé en Afrique, nous sommes immédiatement confrontés à des préjugés réactionnaires qui ont plus ou moins cours. La Banque mondiale et les politiciens occidentaux prétendent que l’Afrique a été socialement dévastée à cause de la corruption de ses dirigeants qui à ce jour n’ont toujours pas appliqué les règles de la « transparence » et de « bon gouvernement ». Ces dirigeants se sont engagés à des « dépenses gouvernementales excessives », etc. Aucune explication n’est cependant avancée quant à savoir pourquoi cette espèce particulière de dirigeants n’est un problème qu’en Afrique. Lorsque des tentatives sont faites en vue d’élucider le problème de régimes corrompus, celles-ci se font généralement en des termes pseudo-sociologiques de la « domination des structures tribales ». Par conséquent, au lieu des valeurs de la classe moyenne urbaine que nous trouvons en Occident, ce sont les coutumes locales qui prédominent. La conclusion essentielle à tirer de ces considérations est que l’Afrique a besoin d’une « mission civilisatrice », ce qui revient essentiellement aux conceptions racistes avancées pendant la période victorienne.

  • C’est, je crois, en examinant ces luttes pour l’indépendance que l’analyse de Trotsky se révèle être la plus perspicace. Sa mise à nu de la trahison de la révolution chinoise dans les années 1920 par les dirigeants staliniens contient une des plus importantes leçons stratégiques de notre mouvement. En opposition totale à l’analyse de Trotsky, Staline avait soutenu que le mouvement nationaliste en Chine, le Guomindang, mènerait une révolution démocratique contre les propriétaires terriens féodaux et la domination impérialiste. Une énorme campagne avait également été menée pour dénigrer les idées de Trotsky et de ses partisans.

    Staline a ordonné au parti communiste chinois d’entrer dans le Guomindang et de se soumettre à sa discipline. Le résultat a été un désastre complet, finissant avec la défaite de la révolution et l’assassinat de milliers de communistes chinois par les nationalistes en 1927.

    Le genre de nationalisme bourgeois qui s’était développé en Chine est devenu l’inspiration politique des futurs dirigeants panafricains qui allaient établir plus tard leurs régimes en Afrique après la Seconde Guerre mondiale. Il y a, en fait, un lien très direct. Si vous lisez l’autobiographie d’Azikiwe, le premier président du Nigeria, vous verrez que durant ses études menées à l’Université de Howard aux Etats-Unis au début des années 1930, soit après le massacre des communistes chinois, il a expliqué combien il a été impressionné par Sun Yatsen et Tchang Kaï-chek, les dirigeants du Guomindang.

    Azikiwe a étudié à Howard où les intellectuels noirs comme Tubman (le futur Président du Liberia), et Kwame Nkrumah (le futur Président du Ghana) ont développé les idées panafricanistes. L’influence de l’Antillais George Padmore est indubitable, il est peut-être l’un des dirigeants intellectuels du panafricanisme le plus connu et qui, après l’indépendance, s’est établi au Ghana comme conseiller de Nkrumah.

    Padmore était un dirigeant international du Parti communiste et un partisan dévoué de Staline. Son travail à Moscou au début des années 1930 était de servir dans un comité spécial qui enquêtait sur le Parti communiste chinois pour trouver des « trotskistes » et opposants à la ligne stalinienne. Ceux qui soutenaient que le parti devrait se baser sur la classe ouvrière en furent chassés. Padmore a entièrement accepté la « théorie des deux étapes », qui est devenue la politique stalinienne officielle dans les pays sous-développés. Selon cette théorie il y aurait, dans ces pays, d’abord une révolution nationale démocratique, ce qui signifiait que les communistes devaient soutenir toute une série de mouvements paysans et nationaux bourgeois, le socialisme ne venant qu’à une date non spécifiée (et d’habitude lointaine). Padmore n’a rompu avec le parti communiste qu’à la fin des années 1930, lorsqu’il est devenu évident que Staline n’avait aucun intérêt véritable dans la croissance des mouvements nationalistes en Afrique ou ailleurs, sauf en tant que pions dans les accords qu’il essayait de conclure avec l’impérialisme. Mais les idées de Padmore sur le nationalisme, qui dérivaient du stalinisme, sont demeurées essentiellement inchangées.

    Padmore a influencé la plupart des futurs dirigeants africains à la fin de la Seconde Guerre mondiale, y compris Nkrumah, Kenyatta et Nyerere qui devaient devenir les dirigeants des anciennes colonies britanniques. Nombre d’entre eux étaient présents à la conférence panafricaine tenue à Manchester en 1945. Des développements analogues ont eu lieu en France où des dirigeants formés par les staliniens, comme Sekou Touré en Guinée, commençaient à être connus.

    L’idée fondamentale de Padmore était que la lutte nationale pour l’indépendance servirait à contenir dans d’étroites limites le mouvement de la classe ouvrière qui se développait rapidement en Afrique au lendemain de la guerre. Une petite élite d’Africains noirs, qui aspirait à devenir une bourgeoisie noire, serait appelée sur cette base à prendre le pouvoir politique. A cette époque, il existait déjà d’énormes agglomérations de travailleurs en Afrique, spécialement dans l’industrie minière, et l’on comptait déjà nombre de grandes grèves. Des milliers de mineurs en Afrique du Sud s’étaient organisés contre les propriétaires des mines britanniques. Au Congo, jusqu’à un million de mineurs travaillaient dans les mines de cuivre et de diamants, et c’est aussi là que l’uranium pour la bombe atomique était extrait. Ce mouvement faisait partie d’une vague révolutionnaire internationale qui a déferlé tout de suite après la guerre et s’est étendue à l’Inde, à la Chine et à des parties entières de l’Europe.
    Comme le disait Padmore : « La seule force capable de retenir le communisme en Asie et en Afrique est le nationalisme dynamique se basant sur un programme socialiste d’industrialisation... » [1]. C’est sur cette base qu’il a appelé les pouvoirs impérialistes à accorder l’indépendance.

    Le socialisme dont il parlait, ainsi que Nkrumah, Nyerere et d’autres, signifiait une espèce d’interventionnisme et d’Etat-providence, idées qui étaient considérées d’un il favorable par les capitalistes dans les conditions de la crise d’après-guerre, et qui ont été reprises, par exemple, par le Parti travailliste en Grande-Bretagne. Cela n’avait rien à voir avec le socialisme, dans la tradition du marxisme pour lequel Trotsky s’était battu. Trotsky avait toujours insisté sur le fait que le socialisme signifiait la construction d’un mouvement ouvrier indépendant et politiquement conscient pour renverser l’impérialisme. Les panafricanistes y étaient opposés et, quand ils sont parvenus au pouvoir dans les années 1960 partout en Afrique, ils ont étouffé les grèves et réprimé l’opposition ouvrière.

  • Une nouvelle année scolaire hachée par les grèves des enseignants s’achève en Guinée-Bissau. Face à la faillite du système, des parents d’élèves mobilisent leurs maigres ressources pour sauver ce qui peut encore l’être.
    La dernière grève des professeurs pour réclamer le paiement d’arriérés de salaires à un Etat en perpétuelle difficulté budgétaire s’est achevée début juin dans ce pays pauvre d’Afrique de l’Ouest.

  • " L’histoire de toute société se résume dans le développement des antagonismes de classes, antagonismes qui ont revêtu des formes différentes à de différentes époques."

    Karl Marx, "Le Manifeste du parti communiste"

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