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La révolution égyptienne est loin d’être terminée...

mardi 22 novembre 2011, par Robert Paris

Dehors Maréchal Tataoui ! Dehors le Pharaon ! L’armée dehors du pouvoir !! Le pouvoir au peuple ! Dégage ! Dégage !!!

« Le peuple veut la chute du Moushir [maréchal] ! » entonnaient hier matin quelques centaines d’entre eux, visant directement le maréchal Tantawi, à la tête du conseil militaire et pendant vingt ans ministre de la Défense sous Moubarak. D’autres pointaient du doigt les policiers. « Ils emploient les mêmes méthodes que sous Moubarak. "Le régime militaire est mort, est mort", crient les manifestants. "Liberté, liberté !" entend-on aussi. "Dégage !", "Que tombe le gouvernement des militaires !", "Révolution, révolution, jusqu’à la victoire !" et "Ni Tantawi, ni Ganzouri !".

Ce qu’est l’armée égyptienne et quelle démocratie fonder en Egypte ?

« Dégage ! » « Le peuple veut la chute de Tantaoui. » Des slogans analogues à ceux chantés en janvier, à la différence que ce n’est plus Hosni Moubarak mais l’armée et son chef d’état major qui sont visés. Si la foule est plus concentrée à cet endroit, c’est que cette partie de la place donne sur la rue Mohammed-Mahmoud, où se trouve le ministère de l’Intérieur, 500 m plus loin. Dans cette artère très étroite, depuis quarante-huit heures, des affrontements très violents opposent sans discontinuer les révolutionnaires aux forces antiémeutes. Les manifestants, pour la plupart très jeunes, se relaient jour et nuit pour jeter des pavés ou des cocktails Molotov en réponse aux coups de matraque et aux balles en caoutchouc. Les révolutionnaires peinent à avancer mais « leur front » résiste tant bien que mal, faisant preuve d’un courage presque suicidaire tant l’étroitesse de la rue est favorable aux forces de l’ordre. En première ligne, on retrouve les ultras des clubs de foot d’Ahly et de Zamalek, coutumiers des affrontements avec la police.

Le fait que les combats se déroulent en dehors explique le calme relatif de la place, qui sert de base logistique. C’est surtout là que sont amenés les blessés, dans des hôpitaux de fortune installés sous des tentes ou à même la chaussée. Les blessés se succèdent, ramenés du « front » par des scooters ou portés par des proches. Un manifestant explique qu’il n’a aucune confiance dans les ambulanciers : « Ils vont les amener directement à la police. » Lorsque les blessures sont trop graves, certains deux-roues escortent les véhicules de santé pour s’assurer de leur destination. Sur la seule journée de dimanche, Ayman, 25 ans, qui vient d’achever ses études de médecine, a pris en charge une centaine de blessés. « Il y a de tout, beaucoup de suffocations, des coups, des impacts de balles réelles », affirme-t-il. « Ce n’est pas une deuxième révolution, c’est la même qui se poursuit ! » clame Rami, qui envoie des sms et se repose un peu. Voilà trois jours qu’il ne dort presque plus et ne quitte pas la place. Ce quadra n’est pas surpris par ce qui se passe : « Aujourd’hui, on voit que les militaires n’étaient pas du côté du peuple mais ont seulement cherché à protéger le système en place. Ils sont pires que Moubarak, l’insécurité est plus grande, la crise économique plus dure, les procès militaires plus injustes. » Il croit tellement en cette révolution que, pour s’y consacrer pleinement, il a abandonné son métier d’analyste stratégique dès janvier, « pour que le rêve devienne vrai ».

L’armée a assuré lundi qu’elle ne prenait pas parti entre les manifestants et la police et qu’elle n’avait pas tenté d’évacuer les manifestants de la place Tahrir.

Les généraux, qui sont l’essentiel de la classe bourgeoise égyptienne, comptent conserver l’essentiel du pouvoir politique afin de préserver leur pouvoir économique.
Mais le secrétaire au Foreign Office, William Hague, a déclaré que l’Egypte vivait "un moment dangereux".

Les manifestants qui ont relancé le mouvement en Egypte contestent le pouvoir militaire. Le Conseil suprême des forces armées a présenté au début du mois une proposition constitutionnelle accordant à l’armée une autorité exclusive sur la gestion de ses affaires et de son budget.

A la suite de la répression meurtrière des manifestations pacifiques contre le pouvoir militaire de ces dernières 48 heures sur la place Tahrir, au Caire, avec ses morts et ses milliers de blessés, le gouvernement égyptien a présenté lundi soir sa démission au Conseil suprême des forces armées (CSFA).

La confusion régnait dans la soirée quant à la suite donnée par le pouvoir militaire à cette offre. Selon la chaîne qatarie Al-Jazira, citant des sources anonymes, le CSFA, au pouvoir depuis la chute, le 11 février, du président Hosni Moubarak, aurait accepté la démission du gouvernement d’Essam Charaf. Une information immédiatement contredite par la télévision d’Etat qui, citant une source militaire, a indiqué que le CSFA aurait refusé cette démission. Le ministre de l’information, Osama Haikel, cité par l’agence Mena, a ensuite déclaré que l’armée ne s’était pas encore prononcée, laissant planer l’incertitude sur cette vacance à une semaine du premier scrutin législatif depuis le départ du raïs.

La démission du gouvernement d’Essam Charaf constituait l’une des principales revendications des mouvements encadrant les manifestants présents place Tahrir, au Caire, à l’instar de la Coalition des jeunes de la révolution du 25 janvier ou du Mouvement du 6 avril, en réponse aux affrontements meurtriers entre manifestants et forces de l’ordre. Ils ont appelé lundi les Egyptiens à se rendre place Tahrir, mardi 22 novembre à 16 heures, pour une "Marche du million pour le salut national" afin d’obtenir la démission du gouvernement et la constitution d’un gouvernement de salut national.

Depuis samedi 19 novembre, les affrontements ont fait au moins vingt-quatre morts selon le responsable de la morgue du Caire, qui a revu son bilan à la baisse, lundi en milieu d’après-midi. Parmi les personnes tuées, certaines sont mortes par balle, les autres par asphyxie après que la police eut utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants. Plus de 750 personnes ont également été blessées dans la capitale et des dizaines arrêtées.

A la tombée de la nuit, des dizaines de milliers de personnes se massaient toujours lundi soir sur la place Tahrir. Les manifestants ont fait échec dans la matinée à une nouvelle tentative de dispersion des forces de l’ordre, qui s’en sont pris à un hôpital de fortune. Les policiers anti-émeute tiraient avec des grenades lacrymogènes sur des milliers de manifestants répartis en petits groupes. Les contestataires ont riposté en lançant des morceaux de béton arrachés à la chaussée. Des accrochages étaient signalées lundi soir dans les rues adjacentes à la place et des témoins, pas nécessairement liés aux manifestants, ont fait état de pillages à l’Université américaine du Caire et ailleurs.

Les affrontements entre police et manifestants réclamant la fin du pouvoir militaire ont fait quatre morts dimanche au Caire, portant à six le bilan des décès après deux jours d’affrontements en Egypte, à une semaine du premier scrutin législatif depuis le départ d’Hosni Moubarak.

En début de soirée, des milliers d’Egyptiens occupaient la place Tahrir après avoir repoussé la police, tandis que les affrontements se poursuivaient dans les rues adjacentes à la place emblématique, foyer de la révolte qui a provoqué le départ du président Moubarak en février, où un homme a péri samedi.

Deux personnes ont été tuées et des centaines d’autres blessées dans la nuit du samedi 19 au dimanche 20 novembre en Egypte au cours de violents affrontements entre police et manifestants, à moins de dix jours du premier scrutin législatif depuis le départ d’Hosni Moubarak. Les heurts ont éclaté à proximité du Parlement et du ministère de l’intérieur lorsque les force de l’ordre ont tenté d’évacuer les quelque 500 manifestants qui se trouvaient toujours sur l’emblématique place Tahrir au lendemain d’une grande manifestation qui avait réuni 50 000 personnes, essentiellement des islamistes.

Un homme de 23 ans est mort et 750 personnes ont été blessées dans les échauffourées qui sont produites dans la capitale égyptienne, selon le porte-parole du ministère de la santé. Selon la télévision d’Etat, 40 policiers ont été blessés et 18 "fauteurs de trouble" ont été arrêtés. L’agence Mena fait état d’un autre manifestant tué à Alexandrie, la deuxième ville du pays, où quelque 800 personnes s’étaient rassemblées devant le siège des services de sécurité en scandant "les responsables du ministère de l’intérieur sont des voyous." A Suez, dans l’est du pays, un millier de manifestants se sont également massés devant un commissariat de la ville avant de jeter des pierres et de tenter de pénétrer à l’intérieur du bâtiment.

"Tout ce qui arrive est la preuve que les militaires veulent garder le pouvoir", a estimé Ahmed Abou el-Enein, militant de 30 ans, interrogé sur la place Tahrir, foyer de la révolte populaire qui a conduit à la chute de Hosni Moubarak en février. Des médecins ont par ailleurs indiqué avoir prodigué des soins à plusieurs personnes touchées aux yeux par des tirs de balles en caoutchouc, précisant que certaines avaient été transportées dans des hôpitaux.

Au moins trois manifestants sont morts, ce dimanche, lors d’affrontement avec la police sur le lieu symbolique de la rébellion contre Moubarak. Le premier vote législatif depuis sa chute est dans une semaine.

Les tensions restent vives au Caire. De nouveaux heurts se sont produits, dimanche dans la capitale et dans d’autres villes d’Egypte. Au moins trois personnes sont mortes à la suite de violents affrontements avec la police, alors que le premier scrutin législatif depuis le départ d’Hosni Moubarak doit se tenir dans huit jours.

Après une nuit d’affrontements, des heurts ont continué tout au long de la journée de dimanche aux abords de la place Tahrir, occupée par quelques milliers de manifestants. La police anti-émeutes tire régulièrement des gaz lacrymogènes pour contenir la foule près du ministère de l’Intérieur, à proximité de la place. La scène rappelle, avec une moindre ampleur, la révolte anti-régime du début de l’année.

"Trois personnes sont mortes d’asphyxie lors des affrontements" avec la police anti-émeutes et la police militaire, a déclaré Abdallah Abdelrahmane, qui dirige un hôpital de campagne sur l’emblématique place Tahrir au Caire. La place est le foyer de la révolte qui a provoqué le départ du président Hosni Moubarak en février.

Un appel à une manifestation de masse a également été lancé pour la fin de l’après-midi à Suez, sur la mer Rouge, où des affrontements ont déjà eu lieu samedi, selon un correspondant de l’AFP. Des manifestants ont également défilé dans la ville d’Ismaïlia, sur le canal de Suez, selon une source de sécurité.

Dans des hôpitaux improvisés dans les mosquées aux abords de la place Tahrir, des manifestants étaient soignés pour des intoxications au gaz lacrymogènes et d’autres après avoir été touchés par des balles en caoutchouc ou des plombs de chasse.

Sur la place, des groupes de manifestants scandaient des slogans hostiles au pouvoir militaire, réclamant la chute du maréchal Hussein Tantaoui, à la tête du Conseil suprême des forces armées (CSFA) qui dirige le pays depuis le départ du président Moubarak, chassé par une révolte populaire en février.

"Le Conseil des forces armées poursuit la politique de Moubarak, rien n’a changé après la révolution", a déclaré Khaled, 29 ans, alors qu’il installait une tente au centre de la place Tahrir. "A bas Tantaoui", scandaient également des manifestants hostiles à ce militaire septuagénaire, qui fut pendant vingt ans le ministre de la Défense de Hosni Moubarak et l’un de ses plus proches collaborateurs.

Egypte : le maréchal Tantaoui, nouveau pharaon d’Egypte, prétend interdire les grèves ouvrières mais l’Egypte entière est en train de se mettre en grève. Il veut manipuler les soldats contre le peuple travailleur et il faut que les soldats, eux aussi, entrent en grève...

Messages

  • De violents affrontements ont opposé mercredi au Caire et dans plusieurs grandes villes du pays, pour le cinquième jour, la police à des milliers d’Egyptiens réclamant le départ des militaires au pouvoir, malgré la promesse du chef de l’armée, le maréchal Tantaoui, d’organiser une élection présidentielle mi-2012 pour un retour au pouvoir civil.

    Pour la première fois, des médecins ont fait état de décès par balles réelles au cours de ces violences dans lesquelles trois personnes ont péri dans la matinée, portant le bilan à au moins 33 morts depuis samedi.

    Les incidents se poursuivaient en début de soirée, heure locale.

    Après la démission du gouvernement lundi, le Conseil suprême des forces armées (CSFA), l’instance de l’armée qui dirige de fait le pays, est toujours à la recherche d’une nouvelle équipe et d’un Premier ministre.

  • De nombreuses personnes prétendent qu’il s’agit d’une révolte d’islamistes voulant prendre le pouvoir, ce qui est aberrant : il s’agit d’une révolte du peuple égyptien contre la violence policière et le régime militaire.

  • Les prévisions les plus pessimistes étaient devenues monnaie courante. Après le printemps venait l’automne arabe, la contre-révolution était en marche, et, pour certains, la révolution n’avait même pas eu lieu. Ce sentiment était sans doute d’autant plus prégnant que le renversement des régimes tunisien et égyptien s’était opéré avec une apparente facilité, créant l’illusion que les transformations seraient simples. Dès que le processus sembla ralenti, les augures annoncèrent que la révolution avait perdu. Pourtant, toute l’histoire des révolutions, de la révolution anglaise à la révolution française, de la révolution bolchevik à la révolution algérienne, prouve que les transformations nécessitent du temps, de l’énergie, souvent des affrontements violents. Rarement les classes dominantes cèdent sans combattre. Mais si la contre-révolution est une réalité, rien n’indique qu’elle doive nécessairement l’emporter.

    La chute du président Hosni Moubarak n’avait été qu’une première étape, suivie de la nomination d’un nouveau gouvernement, puis de l’arrestation du président et de membres de sa famille et du début de leur procès, dont le conseil suprême des forces armées (CSFA) ne voulait pas. D’autres mesures avaient été imposées par la rue, notamment la dissolution du Parti national démocratique (PND, le parti de Moubarak), puis la nomination d’une direction provisoire au syndicat officiel.

    Mais, partout, les responsables de l’ancien régime luttaient pied à pied pour maintenir leurs privilèges. L’exemple le plus frappant était celui des médias d’Etat, presse officielle et télévision. Malgré quelques petits changements, ces médias diffusaient le point de vue du CSFA, n’hésitant pas à user du mensonge et de la calomnie, comme du temps de l’ancien président. Dans chaque entreprise, dans chaque université, dans chaque administration, se maintenaient aussi des « petits Moubarak » qui avaient participé aux malversations de l’ancien régime. Et partout des grèves et des luttes se multipliaient pour obtenir à la fois le changement de direction et une amélioration des conditions de vie des salariés. D’autant que les mobilisations ouvrières avaient préparé l’actuelle révolution.

    Cette activité, comme les grèves et les mobilisations locales contre la corruption ou contre des dirigeants de l’ancien régime encore en place n’étaient pas spectaculaires, et se trouvaient en partie dissimulées par le jeu des appareils politiques, les interminables discussions entre les partis et les forces armées sur le calendrier électoral, le futur contenu de la Constitution, etc.

    Plus que tout autre chose, ce qui va perdre le CSFA — qui disposait, au moins au début d’une certaine crédibilité —, c’est le maintien de sa politique répressive à l’égard de tous les opposants, et plus largement de l’ensemble de la population : mêmes arrestations arbitraires, mauvais traitements, tortures... ; usage des tribunaux militaires pour juger des civils ; refus d’enquêter sur les cas de torture voire de mort dans les prisons. La poursuite de ces pratiques a discrédité l’armée non seulement auprès de la jeunesse intellectuelle mobilisée depuis le 25 janvier, mais également dans toutes les couches populaires. La participation active aux affrontements des ultras, ces groupes de supporteurs des clubs de football, dont la haine des forces de l’ordre n’est pas sans rappeler la haine de la jeunesse des banlieues françaises pour les brigades anti-criminalité (BAC), témoigne du ras-le-bol général face à l’autoritarisme et l’arbitraire.

    La Fédération des syndicats indépendants a également invité les travailleurs à marcher sur Tahrir. Une autre organisation syndicale a lancé un mot d’ordre de grève générale en signe de solidarité avec les manifestants.

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