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Sans cesse divisés par leurs ennemis, les peuples du Sahel ne se libéreront pas sans s’unifier. Ce qui unifiera les peuples du Sahel, ce ne sera pas les Etats ! Pas les frontières ! Pas les classes dirigeantes ! Pas l’"aide" intéressée des impérialismes et de l’ONU derrière lequel ils se cachent ! Pas les bandes armées officielles ou prétendument rebelles ! Pas l’idéologie dominante, qu’elle soit religieuse, ethnique, nationaliste ou autre ! Pas les institutions ! Pas la fausse démocratie des élections et des partis politiciens ! Pas les intérêts des économies « nationales » ! Non, ce qui les unifiera, ce sont leurs aspirations, leurs existences, leurs souffrances, leur exploitation, leur oppression, leur organisation autonome et leur combat contre leurs ennemis communs !

mardi 26 février 2013, par Robert Paris, Tiekoura Levi Hamed

L’unité du Sahel sera le fait des travailleurs et des peuples, pas de leurs ennemis !

Opposer populations touarègues et noires, le Nord et le Sud, les nomades et les sédentaires, les bergers et les paysans, les ethnies entre elles, les esclaves aux hommes libres, les traditionalistes et les autres, les groupes religieux, les gens des villes et les gens des champs, ceux du désert et les autres, les hommes et les femmes, etc, tout cela fait partie intégrante de la politique des classes dirigeantes dans tout le Sahel et la dernière guerre du Mali n’en est encore que l’illustration comme elle montre que ces politiques n’auront jamais comme résultat de libérer les peuples de la misère, de la dictature et de la tutelle des forces des grandes puissances, au contraire.

La guerre du Mali, concernant à la fois le Niger, la Mauritanie, l’Algérie, la Libye, le Tchad et autres pays de la région, a rappelé un fait : le Sahel, malgré les frontières héritées du colonisateur a une unité.

Et un autre fait : depuis quelques années, la misère du Sahel en a fait une région socialement explosive car le capitalisme n’y a apporté que souffrances et misère.

Enfin un troisième fait : la zone sahélienne est la dernière roue du carrosse de chacun des pays qui le bordent et, même s’ils y prélèvent des richesses, ils n’y investissent aucun effort.

Dernier point : ces dernières années, la révolte des populations a pris un tour aigu, menaçant pour les Etats et les classes dirigeantes, et ce n’est nullement dû à des terroristes. C’est le fait des peuples eux-mêmes et pas de quelconques guerriers ou bandits. Qu’ils soient bergers nomades, qu’ils soient touarègues ou noirs, qu’ils soient de n’importe quelle origine, religion ou région, tous les habitants du Sahel ont ressenti l’abandon, le mépris, la misère, le désespoir lié à la politique des classes dirigeantes et des Etats.

Les peuples du Sahel ont, du coup, appris à se débrouiller entre eux, en se passant des lois et des règles de ces Etats et en passant par dessus leurs frontières factices. Moins que quiconque en Afrique, ils ne se sont reconnus dans les barrières des Etats africains qui ne leur ont jamais rien apporté.

Le Mali n’est nullement le seul à avoir délaissé sa région sahélienne. Tous ces Etats l’ont fait.

Le Mali n’est nullement le seul à avoir délaissé les relations économiques avec ses voisins en passant par le Sahel pour se concentrer sur les relations avec les grands pays impérialistes. Tous les Etats de la région l’ont fait. Le néo-colonialisme a amené les pays « indépendants » à n’échanger qu’avec les pays impérialistes et pas entre eux et ils n’ont même pas développé des relations politiques entre eux.

Avec la guerre du Mali, les gouvernants ont fait semblant d’avoir brusquement retrouvé le chemin de l’unité, comme le rappelle le journal "Jeune Afrique" :

« Sept pays du Sahel ont participé à une conférence de coordination de la lutte contre le terrorisme à Alger mardi 16 mars. [...] Après les divisions exposées au grand jour entre les pays du Sahel sur le délicat sujet du terrorisme, la conférence qui s’est tenue à Alger mardi 16 mars était l’occasion de serrer les rangs dans la lutte contre Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). [...] Le communiqué final insiste sur la responsabilité de chaque Etat de mener une lutte efficace contre le terrorisme et la nécessité d’ un renforcement d’une coopération bilatérale et régionale structurée, exclusive et de bonne foi. (…)Les opérations seront dirigées par un Centre de coordination multinational basé à Ouagadougou (Burkina). [...] Elles interviennent en effet une semaine après l’installation, le 21 avril, à Tamanrasset, d’un poste d’état-major conjoint entre les armées algérienne, malienne, mauritanienne et nigérienne, fruit d’un accord de coopération militaire né de la conférence régionale sur la sécurité au Sahel, qui s’est tenue le 16 mars à Alger. (…) La question du développement a également été abordée. Les participants à la conférence ont souligné que la situation restait marquée par un dénuement économique et fragilisée par la pauvreté. Sécurité et développement doivent pourtant aller de pair dans la région. Etant donné la situation de paupérisation et d’instabilité politique dans laquelle se trouvent la plupart des pays concernés, ce sont surtout l’Algérie et la Libye, dotées de moyens et surtout d’influence, qui risquent d’être sollicités pour assister leurs voisins et les aider à sécuriser la bande frontalière. Finalement, il a été décidé que les réunions des services de renseignement et des chefs d’Etat major des sept pays devraient se tenir dans quelques semaines. Les ministres ont aussi souhaité l’organisation de la conférence des chefs d’Etats sur la paix et la sécurité et le développement annoncée depuis des mois. »

Rien dans ce qui s’est passé dans la guerre du Mali ne témoigne pourtant d’une intervention commune de ces différents pays, bien au contraire et il y a fort à parier que, les mêmes causes produisant les même effets, ces pays continuent à sous-développer la région, produisant misère et révolte pour mieux se concentrer sur les profits à gagner à ne s’occuper que de vendre les richesses minières et agricoles aux pays riches.

Les interventions de pays comme le Tchad ou le Niger se sont faites uniquement sous l’égide de la France, de même que la prise de position de l’Algérie.

C’est même l’impérialisme qui a recommandé à ces pays de s’unir pour que le Sahel ne devienne pas le ventre mou du capitalisme par lequel les adversaires pourraient s’infiltrer.

Et les adversaires ne sont pas seulement les terroristes se revendiquant de l’Islam mais aussi la révolte des peuples, des chômeurs, des femmes, des jeunes et des travailleurs, des maures comme des noirs…

Certes, l’intervention militaire française a momentanément uni apparemment tout le monde contre les terroristes en question. Mais elle n’a rien réglé des problèmes des peuples du Sahel…

Et ce n’est qu’une unité de façade. En réalité, tout oppose les intérêts des classes dirigeantes locales. Tout d’abord leurs alliances avec des grandes puissances n’ont en commun, parfois, que la dépendance à la France qui s’effrite de plus en plus, en faveur parfois des USA et toujours de la Chine…

L’unité sur des bases ethniques, religieuses, régionales est tout aussi trompeuse et porteuse de nouveaux affrontements entre les peuples.

La seule unité qui ne soit pas trompeuse, c’est celle du peuple travailleur qui est le même par delà les frontières même s’il n’en a pas nécessairement conscience.

Qu’est-ce qui unifie les peuples du Sahel ? Pas les Etats ! Pas les frontières ! Pas les classes dirigeantes ! Pas l’idéologie dominante, qu’elle soit religieuse, ethnique ou autre ! Pas les institutions ! Pas les intérêts des économies « nationales » !

Non ce qui les unifie, ce sont leurs existences, leurs souffrances, leur exploitation, leur oppression, leurs aspirations. Ils ont les mêmes ennemis et les mêmes intérêts profonds. Les classes dirigeantes sont les mêmes. Les exploiteurs mondiaux sont les mêmes. La misère, le chômage, le mépris, l’abandon, le désespoir… sont les mêmes. Les compagnies minières sont les mêmes. Les mécanismes de dépendance sont les mêmes. Les catastrophes sanitaires, écologiques, sociales, humaines, politiques sont les mêmes.

N’oublions pas que les peuples de la zone sahélienne sont parmi les plus pauvres du monde !

Ils ne peuvent s’en sortir tant qu’ils penseront que la source de leur malheur est dans le peuple voisin et qu’il restera possible à l’oppresseur de présenter ce voisin comme l’ennemi à abattre.

Leur union est donc la clef indispensable de leur libération.

Leur révolte est la même et pourtant il est encore possible aux responsables de leurs souffrances de les opposer entre eux. Il est toujours possible de remonter les Maures contre les Noirs (comme en Mauritanie où prévaut l’apartheid), les Noirs contre les Touarègues, les gens du nord contre les gens du sud et inversement.

En finir dans les consciences avec ces oppositions factices est un élément indispensable de la prise de conscience du rôle révolutionnaire des opprimés.

De la même manière qu’est indispensable la liaison entre la lutte sociale, la lutte politique, la lutte des femmes, la lutte des jeunes, la lutte des chômeurs et la lutte des travailleurs. Tant que ces luttes seront divisées, les exploiteurs n’auront pas de crainte à avoir.

L’intérêt des peuples du Sahel est dans leur unité autant que les peuples du Maghreb, ceux du Moyen-Orient, ceux du monde arabe, ou ceux d’Asie.

L’unité du peuple travailleur est indispensable pour combattre l’impérialisme sans se jeter des mains d’un impérialisme dans celles d’un autre, des mains d’une bourgeoisie dans celles d’une autre.

Mais l’unité des peuples travailleurs n’est pas un mot d’ordre moral. C’est un mot d’ordre politique qui fait partie intégrante de l’ensemble du programme révolutionnaire. Il est inséparable des autres objectifs révolutionnaires du prolétariat.

Il ne s’agit nullement d’une unité au travers de laquelle et au nom de laquelle on prétende imposer à une quelconque partie de ces peuples comment ils doivent vivre, ce qu’ils doivent faire ni comment ils doivent s’organiser. Bien au contraire ! L’unité dont il s’agit est celle des peuples travailleurs s’auto-organisant ! C’est celle de peuples travailleurs qui ne délèguent à personne de décider ce qui est bon ou pas bon pour eux. C’est celle de comités des masses pauvres, de comités de travailleurs et de chômeurs, de jeunes, de femmes, de paysans, de bergers, de salariés, de mineurs...

Cette organisation n’est pas fondée sur ce qui oppose les opprimés mais sur ce qui les unit : pas sur la religion, la région, l’ethnie ou la nationalité ! Et, pour cela, elle refuse toute allégeance aux classes dirigeantes ou à leurs représentants politiques, syndicaux, idéologiques ou religieux. L’indépendance de classe des opprimés, c’est cela la base de cette auto-organisation....

Oui, dans ces conditions, les classes exploiteuses, les dictatures régnantes et les pays impérialistes auront de quoi s’inquiéter et bien autrement que de bandes armées qu’elles ont d’ailleurs elles-mêmes armées.

Pour les peuples travailleurs du Sahel,

 unité n’est pas interdiction de la diversité

 démocratie n’est pas alternance d’individus représentant la dictature des classes dirigeantes (locales et impérialistes) et appareils militaires

 développement n’est pas enrichissement de quelques exploiteurs

 lutte contre le terrorisme n’est pas renforcement des forces d’armées et de police mais armement des prolétaires sous le contrôle permanent de la collectivité des travailleurs organisée en permanence

 crise économique ne signifie pas tendance panicarde à renforcer l’économie capitaliste, crise terroriste et effondrement de l’Etat ne signifie pas tendance panicarde à renforcer l’Etat des classes dirigeantes ni acclamations des interventions militaires et politiques impérialistes. Leur effondrement n’est rien d’autre que l’occasion de les faire disparaître définitivement.

 pour le peuple travailleur du Sahel, il n’y a pas « de solution » dans la crise de l’oppression capitaliste qui chapeaute toutes les formes d’oppression anciennes. Il n’y a pas de "solutions" dans des tracés de frontières, dans des unités nationales, dans des constitutions, dans des règlements, dans des arrangements entre Etats. Tous les fournisseurs de « solutions » à la place de celles établies par les opprimés eux-mêmes sont à combattre énergiquement. La révolution des travailleurs, des femmes, des jeunes, de tous les opprimés, victimes de toutes oppressions, d’ethnie, de nation, de sexe, de genre, de région, de tradition, d’esclavage, de classe est l’union de tous ces opprimés pour en finir avec toutes les formes d’oppression.

Sans cesse divisés par leurs ennemis, les peuples du Sahel ne se libéreront pas sans s’unifier. Ce qui unifiera les peuples du Sahel, ce ne sera pas les Etats ! Pas les frontières ! Pas les classes dirigeantes ! Pas l’"aide" intéressée des impérialismes et de l’ONU derrière lequel ils se cachent ! Pas les bandes armées officielles ou prétendument rebelles ! Pas l’idéologie dominante, qu’elle soit religieuse, ethnique, nationaliste ou autre ! Pas les institutions ! Pas la fausse démocratie des élections et des partis politiciens ! Pas les intérêts des économies « nationales » ! Non, ce qui les unifiera, ce sont leurs aspirations, leurs existences, leurs souffrances, leur exploitation, leur oppression, leur organisation autonome et leur combat contre leurs ennemis communs !

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