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Travailleurs, nous sommes une seule et même classe mondiale !

vendredi 17 mai 2013, par Robert Paris

Travailleurs, nous sommes une seule et même classe mondiale !

Quand les travailleurs se battent, ils sont la pire crainte des classes dirigeantes. Le nouveau capitalisme chinois en pleine offensive mondiale en est une parfaite illustration : il ne craint d’affronter ni le Japon, ni la Corée, ni l’Europe ou les Etats-Unis. Par contre, il est très craintif à l’égard de sa classe ouvrière qui ne lui ménage ni les émeutes ni les grèves ni les insurrections, qui multiplie ses tentatives d’interventions syndicales et politiques pour s’attaquer à un régime d’oppression des travailleurs sans pareil au monde. Aucune répression n’a fait taire la classe ouvrière chinoise, pas plus le goulag des ouvriers ou laogaï que les forces spéciales ou les condamnations à mort d’ouvriers. L’un des budgets les plus importants de la Chine reste les forces intérieures de répression et l’enrichissement du pays n’a amené aucune libéralisation des droits des salariés mais les travailleurs ont imposé de multiples augmentations de salaires et des modifications des conditions de travail. L’absence de syndicats libres a par contre permis aux travailleurs de s’auto-organiser et, même si ce n’est nullement ce qu’auraient souhaité les classes dirigeantes chinoises, cela leur a évité l’ossification et l’institutionnalisation de toutes les formes d’organisation qui, en occident, se réclament peu ou prou des travailleurs. Si les travailleurs occidentaux restent convaincus que l’Etat devrait les défendre, empêcher les patrons de licencier ou donner aux salariés des indemnités conséquentes, les travailleurs chinois n’ont pas ce type d’illusion et leur image l’Etat n’est pas un Etat social mais celui de la matraque, du policier et du camp de concentration. Moins d’illusion signifie plus de chance de ne pas tomber dans les pièges d’une bourgeoisie qui, dans le monde entier, n’est pas moins hostile aux travailleurs qu’elle l’est en Chine. Car la bourgeoisie ne souhaite pas spécialement frapper les travailleurs. Elle n’est pas méchante. C’est seulement que les conditions actuelles de l’effondrement du système lui imposent de les frapper et, pour cela, d’abord de les tromper, de les déboussoler et de les démoraliser.

Mais la première des boussoles pour la classe des travailleurs, et qu’il convient particulièrement de ne pas perdre dans l’effondrement économique et social actuel, n’est-elle pas la conscience que le prolétariat est le même à l’échelle internationale, par delà les différences des conditions historiques, économiques ou idéologiques locales ou régionales.

Semer l’hostilité entre les peuples est plus que jamais une bouée de sauvetage des gouvernants et classes dirigeantes menacées par la révolte des peuples face aux conséquences de la crise. On l’a vu par exemple au Japon où les gouvernants, en plus de la crise, ont dû assumer leurs crimes dans les catastrophes du tsunami et des centrales nucléaires. Détourner la colère populaire en peur d’une guerre avec la Chine et hostilité au peuple chinois les a momentanément sauvés. La droite la plus dure, la plus proche des milieux d’affaire, la plus favorable aux trusts du nucléaire l’a emporté alors que la population était plus que jamais hostile à la droite, aux milieux d’affaires, au nucléaire, simplement parce que la menace de guerre en mer de Chine a soulevé les haines nationales entre Chinois et Japonais.

A l’inverse l’unité de classe internationale est l’arme principale des prolétaires.

Elle nécessite que les militants ouvriers diffusent dans le monde du travail les informations sur la réalité de la division en classe de la planète et ne se contentent pas de dénoncer la mainmise des patrons étrangers en France.

Cela suppose qu’ils rapportent aux travailleurs français quand le patron du Bâtiment et de la Téléphonie Bouygues licencie les mineurs des mines d’or du Mali, les frappe pour avoir fait grève, donne des ordres au gouvernement malien à Bamako pour les faire arrêter parce qu’ils continuent leur grève et les emprisonne sous des accusations d’avoir fait brûler des locaux.

Cela suppose qu’ils rapportent aux travailleurs français qu’en ce moment même la banque française BNP-Paribas est en train d’étrangler les travailleurs algériens de l’entreprise Eter de Guelma, contraignant ses 245 employés à une grève de la faim dure parce qu’ils ne sont plus payés depuis plus de neuf mois…

Cela suppose qu’ils racontent comment les capitalistes français ont mis en coupe réglée la Grèce, détourné toutes les « aides européennes » pour renflouer leurs banques qui y spéculaient, racheté à bas prix tous les services publics pour rançonner ensuite la population, exigé qu’on aggrave encore les restrictions économiques et sociales qui étranglent le peuple grec.

Cela suppose qu’ils nous informent comment les travailleurs grecs des transports et de l’enseignement bravent l’interdiction des grèves par le gouvernement grec mis en place par les Etats de l’Europe dont la France d’Hollande !

Cela suppose qu’ils rapportent comment les trusts textiles français sont parmi les responsables des horreurs que subissent les travailleurs du textile, non seulement au Bangladesh où une usine s’est effondrée sur les ouvriers, mais aussi en Inde, en Indonésie, au Vietnam ou au Canbodge où d’autres usines ont brûlé avec leurs ouvriers à l’intérieur ou encore où les travailleurs ont été matraqués, molestés, arrêtés parce qu’ils faisaient grève pour ne pas travailler pour une miette de pain ! Tout cela pour le plus profit des grandes marques textiles qui vont ensuite caracoler en tête des palmarès des profits mondiaux !

Cela suppose qu’ils rapportent comment les trusts occidentaux continuent de profiter en Afrique du sud où ils ont en fait maintenu l’apartheid que subit la population noire, en achetant les leaders de l’ANC et du mouvement syndical et en les faisant travailler à leur profit.

Cela suppose qu’ils informent des grandes luttes menées par les mineurs maliens, par les ouvriers togolais, par les travailleurs guinéens, contre des bourgeoisies africaines aux ordres des trusts et gouvernants français.

Cela suppose qu’on cesse de se solidariser avec les buts de « notre » industrie nationale, qu’on cesse de trouver profitable le nucléaire qui assassine les familles de mineurs du Niger, provoque le renversement des gouvernants du Niger pas assez accommodants avec Areva, les guerres du Mali ou de tout le Sahel, arrose les gouvernants et fait taire les média sur les risques et les crimes commis.

Notre classe existe à l’échelle internationale, elle a des intérêts à l’échelle internationale, elle mène des luttes à l’échelle internationale. Mais, et il y a un grand MAIS, elle n’est pas organisée à l’échelle internationale et cela change tout. C’est un énorme risque dans la situation mondiale que nous connaissons, celle de l’effondrement historique du système capitaliste, pas l’effondrement d’une politique, pas une crise passagère, pas un cycle qui se terminera en reprise, non dans la fin d’une ère…

Car cette fin ne peut être un début pour l’humanité que si cette classe mondiale développe ses perspectives ouvertement, montre ses capacités à offrir une alternative, se révèle capable de voir que, là où les prolétaires débutent une révolution comme en Tunisie et en Egypte, il faut au maximum de nos forces les relayer, les encourager, les soutenir, entrer en lutte nous-mêmes !

En ce sens, les fonctionnaires d’Etats de plusieurs régions américaines ou les révoltés israéliens, en se revendiquant de la révolution égyptienne, ont fait une importante démonstration et ils ont affirmé vouloir renverser leurs propres Moubarak locaux, qu’il s’agisse de gouverneurs des Etats américains ou de l’Etat israélien qui les matraque à coups d’austérité, de misère et de hausses de prix.

Oui, les classes dirigeantes du monde ne craignent rien tant que notre conscience internationale. Ils ne souhaitent qu’une seule chose : que nous accusions les travailleurs étrangers des emplois qu’on nous vole, que nous nous battions pour « être plus concurrentiels » qu’eux, au lieu de nous battre ensemble contre les mêmes patrons.

Ce n’est pas un hasard si celui qui a le plus œuvré pour que les travailleurs défendent leurs perspectives de classe propres et s’organisent eux-mêmes dans ce but, le révolutionnaire Karl Marx, est aussi celui qui a œuvré à la formation de deux grandes organisations politiques internationales des travailleurs et qu’il ne cessait de rappeler que les travailleurs ne devaient pas se contenter du syndicalisme mais devaient offrir à la société humaine leurs perspectives politiques et notamment celles d’un monde sans frontières, sans propriété privée des moyens de production, sans oppression d’aucune sorte, sans exploiteurs et exploités, sans classes sociales, sans oppression étatique et sans vie d’esclave moderne au travail.

Bien sûr, la lutte des classes, c’est loin d’être le plus souvent les travailleurs qui la mènent. On le voit aux vagues de licenciements qui touchent actuellement les salariés de l’Automobile au Bâtiment, de la Pharmacie à la Téléphonie, des Banques aux services publics. Car les suppressions d’emplois touchent aussi bien public que privé, les précaires et prestataires que les CDI des grands trusts ou les salariés des petites entreprises.

Là aussi, la force, c’est de les unir et pas de les laisser se battre séparément et dos au mur. Eh bien, à l’échelle internationale il en va de même. Les grandes confédérations syndicales n’unissent rien du tout. Elles n’informent même pas les salariés sur la réalité de la lutte des classes qui se déroule dans le monde. Loin de vouloir aider les salariés à briser leurs chaînes nationales, idéologiques, celles de l’entreprise, celle du boulot, celle de la corporation, elles les renforcent. Elles poussent les salariés à croire qu’ils doivent se défendre pays par pays, avec juste de temps en temps une petite participation syndicaliste à une promenade européenne pour la forme.

L’organisation internationale dont les travailleurs ont besoin ne viendra pas des centrales syndicales trop liées aux bourgeoisies nationales et aux Etats (qui les financent pour l’essentiel) pour s’en détacher fût-ce lors du naufrage de l’ensemble du navire mondial.
Et effectivement, le Titanic, ce n’est pas l’économie ou la production en France (ou en Europe), c’est le capitalisme mondial et personne ne parviendra à se sauver seul.

« Travailleurs de tous les pays, unissez-vous » disait Karl Marx et cette union doit venir de la capacité des prolétaires à s’organiser et à décider par eux-mêmes.

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