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L’élection législative en Allemagne : le parti Die Linke assure la classe dirigeante de son allégeance

samedi 17 août 2013, par Robert Paris

L’élection législative en Allemagne : le parti Die Linke assure la classe dirigeante de son allégeance

Par Peter Schwarz

Dans sa campagne électorale pour les législatives de septembre, le parti Die Linke concentre surtout ses efforts à montrer à la classe dirigeante allemande qu’elle peut se fier à lui et qu’il peut jouer un rôle indispensable dans la mise en œuvre de la nouvelle série d’attaques sociales à venir. Ces derniers jours, d’influents membres du parti ont submergé le Parti social-démocrate de propositions de participation à un futur gouvernement fédéral qui serait dirigé par le candidat tête de liste du SPD, Peer Steinbrück.

La présidente de Die Linke, Katja Kipping, a déclaré au journal Abendzeitung de Munich : « Le SPD doit décider s’il veut un changement de politique ou faire en sorte qu’Angela Merkel reste chancelière. » Kipping et son co-président, Bernd Riexinger, avaient « indiqué dès le début : nous sommes intéressés à des pourparlers au sujet d’un gouvernement de gauche. »

Kipping a ensuite énuméré une poignée de vagues revendications minimales comme par exemple l’introduction d’un salaire minimum et que Die Linke veut négocier avant d’entrer au gouvernement. Elle a souligné : « Il ne s’agit pas d’une utopie. Nous n’avons pas dit vouloir l’abolition du capitalisme. »

Le candidat tête de liste de Die Linke, Gregor Gysi, a été encore plus explicite. Il a dit au journal Bild am Sonntag qu’il existe « un important chevauchement » entre le SPD et Die Linke. « Le SPD peut le mieux mettre en pratique son programme avec nous, » a-t-il dit. « Sans nous, le SPD n’aura jamais de chancelier issu de ses rangs, » a-t-il précisé au journal. « Des pourparlers [concernant un gouvernement commun] n’échoueront pas à cause de nous. »

Pour quiconque a suivi la politique allemande de ces 15 dernières années, le message est clair : Die Linke a donné un blanc-seing au SPD et aux Verts en soutien de leur politique droitière.

Le SPD et les Verts ont joué le rôle principal dans les attaques contre les acquis sociaux et les droits des travailleurs tout en renforçant en même temps, depuis l’arrivée au pouvoir il y a 15 ans de la coalition SPD/Verts menée par Gerhard Schröder (SPD) et Joschka Fischer (les Verts), l’appareil d’Etat et la participation allemande à la guerre.

En tant que ministre des Finances dans le premier gouvernement Merkel (2005-2009), le candidat chef de file du SPD, Peer Steinbrück, avait été responsable du renflouement à hauteur de plusieurs centaines de milliards d’euros des banques en difficulté – de l’argent qui est actuellement récupéré au moyen de coupes sociales draconiennes.

Au cours de ces quatre dernières années, le gouvernement Merkel a bénéficié du vaste secteur à bas salaire et de prestations sociales en baisse créé par la politique des sociaux-démocrates et des Verts. Dans le même temps, elle a implacablement transféré le fardeau de la crise de l’euro sur les populations de Grèce, de l’Espagne, du Portugal et d’autres pays d’Europe méridionale et d’Europe orientale – avec le soutien sans réserve du SPD et des Verts.

Ce n’est un secret pour personne qu’en raison de la crise financière et économique en cours, une nouvelle ronde d’attaques sociales est à l’ordre du jour pour après les élections – indépendamment de qui se trouvera à la tête du gouvernement, Merkel, Steinbrück ou quelqu’un d’autre. C’est à cette fin que Die Linke offre son soutien à la classe dirigeante.

Les demandes minimales que le parti présente sur ses affiches – salaire minimum, revenu minimum de retraite, impôt sur la richesse, pas d’intervention dans les guerres – ne sont qu’une feuille de vigne visant à masquer sa politique anti-ouvrière. Partout où Die Linke ou son prédécesseur, le PDS (Parti du socialisme démocratique) a participé à des gouvernements régionaux – en Saxe-Anhalt, à Berlin, en Mecklembourg-Poméranie et actuellement au Brandebourg, – il a appliqué une politique diamétralement opposée à son actuelle propagande électorale.

Le Land de Berlin, que Die Linke a gouverné de 2002 à 2011 en coalition avec le SPD, a joué un rôle précurseur dans les attaques à l’échelle nationale contre les emplois et les salaires du secteur public et dans la réduction des dépenses publiques. A une question posée à ce sujet lors d’une interview accordée à la station de radio Deutschlandfunk, Gysi s’est plaint avec son cynisme habituel qualifiant d’« ignominie » le fait que Die Linke obtenait toujours beaucoup de voix là où régnait la pauvreté. « J’aimerais bien aussi gouverner un Land riche, » a-t-il dit.

Le parti Die Linke a clairement fait comprendre qu’elle ne voulait pas limiter son rôle à simplement tolérer un gouvernement de coalition SPD/Verts comme il l’avait fait de 2010 à 2012 en Rhénanie-du-Nord/Westphalie. Il espère occuper des postes ministériels.

« Ou bien vous faites partie du gouvernement ou bien vous êtes dans l’opposition, » a dit Gysi à la chaîne de télévision allemande ZDF. Selon un article paru dans le Süddeutsche Zeigung, le comité exécutif de Die Linke projette d’adopter, lors de sa réunion du 17-18 août, une résolution excluant explicitement une tolérance au niveau fédéral pour préconiser une participation directe au gouvernement.

Dans le journal Bild am Sonntag, Gysi a même évoqué la possibilité d’assumer la fonction de futur ministre allemand des Affaires étrangères. Gysi reconnaît qu’il ne s’agit pas d’une éventualité immédiate étant donné que le SPD a récemment encore rejeté publiquement toute intention de former une coalition avec Die Linke après les élections. Mais Gysi n’exclut pas une telle promotion à l’avenir.

Ce qui est plus important, c’est le message politique que Gysi envoie par le biais de cette proposition. Il rappelle la nomination du dirigeant du parti des Verts, Joschka Fischer, comme ministre des Affaires étrangères il y a 15 ans. A l’époque, personne ne pensait que l’ancien combattant de rues qui avait abandonné ses études et s’était fait chauffeur de taxi obtiendrait le prestigieux poste de ministre occupé précédemment par des membres hautement instruits et triés sur le volet de l’élite dirigeante.

La nomination de Fischer avait symbolisé la totale intégration de la génération protestataire de 1968 dans l’Etat bourgeois et la transformation ultime des Verts en parti droitier pro-impérialiste. La prise de fonction de Fischer avait été directement liée au soutien des Verts à la toute première participation de l’armée allemande à une guerre impérialiste après la Deuxième Guerre mondiale, le bombardement de la Serbie par l’OTAN.

Un autre membre fondateur des Verts qui était passé des Verts au SPD, le ministre de l’Intérieur, Otto Schily, avait été responsable du plus massif renforcement de l’appareil d’Etat depuis la création de la République fédérale.

En offrant ses services en tant que future ministre des Affaires étrangères, Gysi a indiqué que Die Linke était prêt à jouer un rôle identique à celui des Verts – mais dans des conditions d’une crise économique bien plus grave et de tensions sociales et internationales bien plus profondes.

Les dirigeants de Die Linke sont parfaitement conscients que la prochaine période sera marquée par de forts conflits de classe. Dans un récent article publié dans l’organe du parti, Neues Deutschland, le président de Die Linke en Basse-Saxe, Manfred Sohn, a écrit : « Non seulement des symptômes individuels mais un examen plus attentif de ce système révèlent qu’en raison de ses propres limitations ce système atteindra dans les décennies à venir un point de rupture. »

Sohn cite l’ancien chef économiste de la Banque centrale européenne, Jürgen Stark, qui a déclaré : « Je pense que la crise atteindra son point culminant à la fin de l’automne. Nous entamons une nouvelle phase de la gestion de la crise. »

Die Linke est non seulement disposé à soutenir le réactionnaire agenda 2020 du SPD lors de la « nouvelle phase de gestion de la crise, » il propose aussi ses services pour réprimer de force l’opposition contre les coupes sociales et pour mener des guerres dans l’intérêt de l’impérialisme allemand.

Le parti Die Linke se prépare à jouer un rôle contre-révolutionnaire au sens littéral du mot comme c’est énoncé sur sa première affiche électorale grand format collée partout dans le pays. On y lit le mot « Révolution ? » en lettres énormes accompagnées d’un point d’interrogation. En-dessous on peut lire en petits caractères la réponse très claire qui est : « Non ».

En réalité la révolution sociale est le seul moyen pour des millions de travailleurs de briser la mainmise exercée par une petite élite financière sur la vie sociale contemporaine. Pas le moindre problème social ne peut être résolu sans révolution. Die Linke rejette catégoriquement une telle révolution et fera tout son possible pour la réprimer – tel est le message central inscrit sur son affiche électorale.

Sa position rappelle la déclaration de l’ancien président du SPD, Friedrich Ebert : « Je hais la révolution comme le péché. » Ebert, alors chancelier a, aux côtés de son collègue Gustav Noske écrasé dans le sang les premiers soulèvements des travailleurs qui s’étaient élevés contre le capitalisme après les crimes de la Première Guerre mondiale.

L’unique parti participant à l’élection avec un programme socialiste permettant à la classe ouvrière de lutter contre le capitalisme est le Parti de l’Egalité socialiste, (Partei für Soziale Gleichheit, PSG). Durant sa campagne, le PSG mènera une lutte politique irréconciliable contre Die Linke et les nombreux groupes de la pseudo-gauche actifs en son sein et dans son entourage.

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