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Lire sur la grève générale

mercredi 25 septembre 2013, par Robert Paris

La Suisse en 1918

L’Angleterre en 1926

La France en 1936

La Belgique en 1960-61

La France en 1968

Lire et réfléchir sur la grève générale

D’habitude, les appareils syndicaux s’entendent à n’organiser que des actions entreprise par entreprise, secteur par secteur. Ces derniers temps, dans l’Europe frappée par les plans d’austérité, en Tunisie, au Brésil, on a entendu parler à nouveau de grèves générales mais il s’agissait seulement de journées d’action.

L’expression "grève générale" est employée souvent et à tort pour désigner des journées d’action, d’un secteur ou d’un pays. Un ou même deux jours de grève nationale, ne provenant d’aucune initiative ouvrière de base, ne sont nullement une grève générale. Il y a entre les deux toute la différence entre une protestation et une remise en cause de la mainmise des capitalistes sur l’économie et de l’Etat sur le pouvoir....

Demander (voire exiger) aux appareils syndicaux réformistes qu’ils organisent une vraie grève générale équivaut à demander (ou exiger) d’un bouc qu’il donne du lait !

Les centrales réformistes peuvent faire de ces fausses "grèves générales" des journées où l’activité économique est morte mais où l’activité ouvrière se résume en promenades et où l’organisation autonome, l’initiative et le dynamisme de la classe ouvrière sont morts eux aussi...

Loin de préparer la vraie grève générale, les journées d’action en dissuadent et fatiguent les mouvements et ceux qui font croire qu’elles permettent ou peuvent permettre de faire monter la mobilisation sont des trompeurs.

Mais même de vraies grèves générales (qui sont des crises de la domination sociale de le bourgeoisie) se distinguent entre elles par le caractère explosif ou pas de l’action de la classe ouvrière.

Un simple mot d’ordre de grève générale lancé d’en haut n’est pas identique à un mouvement des travailleurs allant d’une entreprise à une autre pour généraliser la lutte comme on peut citer l’exemple des "grèves de solidarité" en Pologne.

Il existe aussi des grandes grèves générales politiques menées par des nationalistes et dans lesquelles le prolétariat n’a nullement une politique indépendante en tant que classe. Même le caractère offensif et violent n’est alors nullement un gage de succès pour le prolétariat puisque celui-ci n’intervient pas alors sous son propre drapeau.

La grève générale vise à unir la classe prolétarienne, à lui permettre de sentir sa propre force face à ses adversaires, d’exprimer plus clairement ses aspirations, de transformer la défensive en offensive mais elle peut servir de butoir aux réformistes, permettant d’éviter la révolution. Il faut militer en sa faveur face aux tentatives de dispersions des luttes sur des objectifs partiels mais ne pas séparer la grève générale, qui serait purement défensive, de la nécessité de renverser l’appareil d’Etat de la bourgeoisie. Ne pas suivre les directions réformistes sous prétexte de grève générale et de front unique mais la relier à la nécessité de l’auto-organisation par des comités de travailleurs. Seuls ces comités peuvent être l’embryon d’un pouvoir aux travailleurs. C’est en leur sein qu’une politique révolutionnaire peut donner à la classe ouvrière les perspectives indispensables pour transformer l’action générale en révolution sociale.

Le slogan de grève générale ne doit pas se substituer à une politique ouvrière révolutionnaire. Certes le caractère général de la lutte a une grande importance mais le caractère de la conscience des travailleurs l’est encore bien plus et leur auto-organisation a une influence considérable. Il ne faut pas qu’il découle de ce slogan qu’une grève démarrant localement serait inutile ou nuisible. Il ne faut pas s’imaginer qu’une grève générale débouche plus facilement sur la révolution car alors les appareils réformistes seraient forcément débordés. Ce n’est nullement ce que nous enseigne l’Histoire....

L’idée que la révolution découle mécaniquement du fait de croiser les bras n’est pas révolutionnaire. Les travailleurs ne sont pas seulement une classe qui produit et certainement pas une classe qui peut se contenter de refuser de produire pour voir s’effondrer l’édifice bourgeois. Pour qu’il y ait crise révolutionnaire, il faut d’abord et avant tout que la classe dirigeante soit dans une impasse et que les travailleurs en soient conscients. C’est cette conscience qui est déterminante.

Il ne faut donc pas attendre la grève générale pour

 généraliser les luttes

 les organiser par des assemblées générales interprofessionnelles

 pousser à la formation de comités, de conseils, de coordinations, ...

 et surtout militer dans le sens de la conscience de classe et de l’organisation de classe

Il ne faut pas que l’idée du nombre nous mène à la passivité. Au contraire, la grève doit avoir un caractère dynamique, autocontrôlé par les travailleurs eux-mêmes, s’étendant par eux-mêmes et non par les appareils, décidant elle-même de ses mots d’ordre, de ses objectifs et de ses moyens d’action.

Il convient d’abord que la force de la lutte entraîne et enthousiasme le prolétariat lui-même... Une grève peut être générale et ressembler à une kermesse, à une promenade ou à un enterrement si elle est menée par des adversaires cachés de la lutte des classes.

Une grève générale qui n’est pas dirigée par des comités de base est certaine d’être trahie...

Une grève générale fondée sur des conceptions de collaboration de classe n’est nullement un renforcement de la classe ouvrière...

Une grève générale fondée sur l’idée que la classe ouvrière peut se contenter d’avertir seulement la classe capitaliste ou son gouvernement est une duperie...

Une grève générale qui diffuse l’idée qu’on peut s’entendre avec la bourgeoisie et qu’une "bonne réforme" est possible ne fait que mener droit à l’échec et que détruire la confiance en elle-même de la classe ouvrière....

Une grève générale qui diffuse l’idée qu’un gouvernement bourgeois de gauche va nous sauver fait naufrage...

Une grève générale à durée limitée n’est qu’une manière de secouer le carcan mais en annonçant par avance quel jour on le reprend...

Une grève générale illimitée qui diffuse l’idée que l’appareil d’Etat de la bourgeoisie va rester l’arme au pied mène au bain de sang....

Pelloutier

Pouget

CGT, 1906

Commission des grèves et de la grève générale de la CGT - la grève générale révolutionnaire - réponse à Jaurès

Quand la CGT était pour la lutte des classes révolutionnaire

Jean Jaurès

Guesde

Rosa Luxemburg

Lénine, 1899

Lénine, 1906

Trotsky, 1905

Trotsky, 1932

Gramsci

Malatesta

Jack London

Le rêve de Debs

Emile Armand
Aristide Briand

Victor Serge

Barta

Stéphane Just

Broué, la grève générale dans la révolution hongroise

Un point de vue anarchiste

Le point de vue de Rosa Luxembourg

Le point de vue de Lénine

La grève générale belge de 1902

L’expérience d’Octobre 1905

L’expérience de novembre 1905

L’expérience de décembre 1905

La grève générale insurrectionnelle

Leçon de décembre 1905

La grève générale belge de 1913

La grève générale suisse de 1918

La grève générale en Allemagne contre le putsch de Kapp en 1920

La grève générale anglaise de 1926

La grève générale en Espagne en 1931

La grève générale de mai-juin 1936 en France

La grève générale de 1960-61 en Belgique

A lire : la brochure de Serge Simon, La Grève générale belge : (20 décembre 1960-20 janvier 1961)

Lire aussi

Lire encore

La grève générale de mai 68 en France et la politique des révolutionnaires

Le point de vue de Pouvoir Ouvrier

Le point de vue de Organisation Communiste Libertaire

Quand les réformistes ou les staliniens parlent de grève générale prétendant ainsi empêcher la montée fasciste en Allemagne

La grève générale et le soviet

La grève générale de 1926 en Angleterre

La grève générale de 1936 en France

Les retraites en France en 2010 : quand les centrales syndicales ne voulaient pas aller à la grève générale

Le mythe de la grève générale pacifique et uniquement revendicative pour éviter la révolution sociale et politique pour renverser l’Etat et éradiquer l’exploitation

La grève générale, panacée universelle ?

Le radicalisme du slogan

Méthodes de lutte des centrales syndicales et méthodes ouvrières

D’autres lectures sur ce thème dans Matière et Révolution

Quelle politique doivent défendre les révolutionnaires face à la crise sociale actuelle et à venir ?

Le nombre ne fait rien à l’affaire

Les grèves générales dans l’actualité sociale mondiale

Le point de vue de Voix des Travailleurs

Bernard Thibaut se préparant sans doute au mouvement des retraites de 2010. Le 5 octobre, Bernard Thibaut déclare à l’AFP : « Personne ne peut prétendre faire participer sous la même forme plusieurs dizaines de millions de personnes, de la signature d’une pétition à la participation à une multitude d’initiatives locales, voire aux manifestations lors des journées interprofessionnelles. Qui dit mouvement social dit de multiples formes pour y participer ».

Bernard Thibaut le 7 octobre 2010 sur RTL : "Cela ( la grève générale) n’a jamais été pratiqué dans l’histoire sociale de notre pays (...) C’est un slogan pour moi tout à fait abstrait, abscons. Cela ne correspond pas aux pratiques par lesquelles on parvient à élever le niveau du rapport de forces."

Messages

  • La fin de la grève générale des mineurs (1963).

    ILS ONT ETE BATTUS PARCE QU’ILS ONT ETE TROMPES !

    Après huit semaines de grève, les mineurs ont été contraints de reprendre le travail, sans qu’aucune de leurs revendications ait été satisfaite. Fidèle à la politique de blocage des salaires, inaugurée par De Gaulle-Thorez-Bidault, le gouvernement Queuille n’a reculé devant rien pour contraindre les mineurs à capituler "sans conditions".

    Cependant, huit semaines durant, par leur combativité et leur héroïsme – car il fallait de l’héroïsme pour opposer, sans armes, une résistance acharnée à un ennemi armé jusqu’aux dents – les gueules noires se sont classées à l’avant-garde de tout le mouvement ouvrier. Une fois de plus, il est donc prouvé que la volonté de lutte et même l’héroïsme des ouvriers ne suffisent pas pour qu’ils obtiennent la victoire.

    Les mineurs ont été héroïques, mais leurs dirigeants les ont trompés.

    N’était-ce pas une escroquerie que de faire croire aux mineurs qu’ils pouvaient, par leur seule grève, arracher le Minimum Vital, qu’une grève de 2 ou 3 millions de travailleurs (Y COMPRIS LES MINEURS), en Novembre-Décembre 47, n’avait pu obtenir ?

    N’était-ce pas de la poudre aux yeux que de prétendre organiser la solidarité avec les mineurs en demandant aux autres travailleurs de verser des sommes suffisantes pour permettre aux mineurs de tenir indéfiniment, alors que tous les travailleurs, qui déjà avec leurs salaires n’arrivent pas à joindre les deux bouts, ont à supporter les pertes de salaires occasionnées par leurs propres combats grévistes ?

    Voilà pourquoi les mineurs ont été battus !

    Quand aujourd’hui, par conséquent, B. Frachon prétend que c’est "la faim qui a entamé le bloc des mineurs", il ne fait que continuer à tromper les ouvriers. Si J. Moch et les capitalistes sont arrivés à affamer les mineurs, c’est que B. Frachon les avait engagé, dès le début, dans une impasse.

    Nous en avions d’ailleurs averti les travailleurs dès le 19 Octobre (n° 50) : "Seule une GREVE GENERALE peut faire aboutir la revendication des travailleurs, un SALAIRE VITAL GARANTI PAR L’ECHELLE MOBILE. Mais la C.G.T. est impuissante à conduire la classe ouvrière dans une telle lutte. Et comment le pourrait-elle, quand c’est elle qui a été depuis la "libération" le principal garde-chiourme de la bourgeoisie ("produire d’abord"), quand c’est elle qui a été le principal briseur de grève de Mai à Septembre 47, et quand c’est elle qui en Novembre-Décembre 47, a mené à la défaite la grève générale, en éloignant, par son attitude bureaucratique, la majorité des ouvriers de la lutte ? Cette incapacité de la C.G.T. de mener la grève générale, qui a déjà contraint les travailleurs de l’Est de finir leur lutte par un compromis dérisoire, rend inévitable le "pourrissement de la grève des mineurs elle-même, isolée devant la coalition capitaliste nationale et internationale".

    La grève générale, c’est du reste ce que désirent les travailleurs depuis le mouvement gréviste commencé en Avril 47. Car, comme en Juin 1936, seul un mouvement englobant simultanément la majorité écrasante de la classe ouvrière peut faire capituler les capitalistes.

    Mais les sacrifices qu’exige une telle lutte ne peuvent être assumés par les travailleurs que s’ils savent qu’ils ne seront pas abandonnés dans la lutte, qu’on ne leur tirera pas dans le dos, qu’à l’intérieur du mouvement les opinions et les personnes seront respectées.

    Or les agissements anti-démocratiques des bureaucrates, C.G.T., F.O., C.F.T.C. ont, au contraire, divisé les travailleurs et avili leur volonté de combat.

    La lutte héroïque des mineurs, l’effort qu’elle a coûté à toute la classe ouvrière, auront été loin d’être inutiles si les travailleurs en tirent définitivement la leçon. Car c’est depuis bientôt 15 ans, depuis Février 1934, que la classe ouvrière voit mener à la défaite par les bureaucrates incontrôlés ses efforts héroïques d’améliorer son sort ou de résister à la politique de famine des gouvernements capitalistes. Et cependant ce n’est que très lentement qu’elle comprend qu’il faut, sous peine de mort, rebâtir de nouvelles organisations prolétariennes. Plus tôt la classe ouvrière apportera une aide décisive à la création de nouvelles organisations ouvrières, sous le contrôle de la base, plus tôt ses luttes seront couronnées de succès.

    BARTA

  • Les grandes grèves générales de l’Histoire :

    La grève de 1886 aux USA

    La grève générale de 1905 en Russie

    Les grèves générales de 1905-1906 en France

    La grève générale de 1917 en Espagne

    La grève générale de 1918 en Suisse

    La Grève générale de 1919 à Seattle

    La grève générale de 1926 au Royaume-Uni

    La grève générale de 1932 à Genève

    La série de grèves générales, du 6 au 25 mai 1936 en France

    La grève de 1946 aux USA

    La grève générale de la fonction publique en 1953 en France

    La grève générale de l’hiver 1960-1961 en Belgique

    Les grèves de 1962-1963 en Espagne

    La grève générale de mai-juin 1968 en France

    Jeudi noir (Tunisie) de 1978 en Tunisie

    La Révolution orange de 2004 en Ukraine

    La grève générale des Antilles française de 2009

    La grève générale de novembre 2012 en Argentine

    La grève générale de mai 2013 en Bolivie

    La grève se généralisant actuellement en Afrique du sud

    et cette liste n’est pas exhaustive...

  • « Vous me rebattez les oreilles avec votre liberté de travailler. Tel est votre leitmotiv depuis des années. Les travailleurs ne commettent aucun crime en organisant cette grève générale. Ils ne violent aucune loi. Cessez de geindre, Hanover. Depuis trop longtemps, vous trompez le peuple. Vous avez opprimé la classe ouvrière en serrant la vis. Maintenant, c’est elle qui vous tient, elle serre à son tour, et vous poussez de grands cris […]. Combien de grèves avez-vous gagnées en réduisant les ouvriers à la famine ? Eh bien, les ouvriers ont trouvé le moyen de vous soumettre à leur tour. Et s’ils ne peuvent y arriver qu’en vous affamant, vous crèverez de faim, voilà tout ! »

    Jack London

  • Des articles de Barta et Pierre Bois sur la grève générale le 15 octobre 1947 :

    VIVE LA GREVE GENERALE !

    A l’heure où nous écrivons, la solidarité qui se manifeste parmi les ouvriers à l’égard des grévistes du métro, montre que toute la classe ouvrière est prête à livrer à nouveau une grande bataille.

    Après des mois de luttes partielles, les conflits qui ont éclaté ou qui menaçaient d’éclater chez les ouvriers du gaz et de l’électricité, des chemins de fer, des mines, couronnés maintenant par la grève générale du métro, montrent que la classe ouvrière est résolue à entamer un mouvement général pour mettre fin à une politique qui a réduit des millions d’hommes au désespoir.

    Aux revendications des grévistes du métro, le gouvernement répond aujourd’hui par des menaces et en employant la force policière – honteuse atteinte au droit de grève ! Plus la situation est intenable pour les ouvriers, et plus le gouvernement aux ordres des capitalistes se montre dur. Ramadier ne veut pas délibérer "sous la menace de la grève". Il ne sait délibérer qu’à la solde des capitalistes : il y a quelques jours à peine dans un discours sur les nouvelles mesures financières, il n’était question que d’un nouveau tour de vis pour les masses travailleuses et les petites gens de la ville et de la campagne ; il n’y avait pas un mot qui envisage même de loin un impôt sur le grand capital.

    Mais il serait impossible au gouvernement d’opposer la force à l’action unifiée de tous les travailleurs dans une grève générale "tout de suite et dans toute la France".

    C’EST LE MOMENT DE FAIRE CAPITULER LE GOUVERNEMENT !

    Tous les travailleurs ont, à l’heure actuelle, les mêmes revendications. S’ils mènent simultanément la lutte, ils imposeront les solutions qui seules peuvent nous sortir de la situation actuelle :

    Le contrôle ouvrier sur l’établissement des prix.

    Un salaire minimum vital garanti contre la hausse du coût de la vie, par l’échelle mobile.

    Application des 40 heures.

    Faire payer les impôts aux riches.

    Dans toutes les usines, l’action des ouvriers doit s’organiser. Les événements de Verdun, la grève du métro, montrent que le gouvernement est prêt aujourd’hui à verser le sang ouvrier pour défendre les privilèges des capitalistes. Il faut faire face aux attaques de la police et des bandes fascistes que le gouvernement est disposé à laisser agir contre les travailleurs. Les ouvriers doivent rester maîtres des usines en grève, en occupant les lieux, en élisant démocratiquement des comités de grève et des piquets qui doivent organiser et chercher les moyens matériels pour être capables de résister à toute attaque.

    VIVE LA GREVE GENERALE !

    "CE QUE LA CLASSE OUVRIERE VEUT, ELLE LE PEUT"

    Déclenchée par le "Syndicat autonome de traction" et le "Syndical général autonome", la grève du métro était, le premier jour, pour les dirigeants de la C.G.T. une nouvelle occasion de déverser les calomnies habituelles sur les grévistes et leurs organisations.

    Le troisième jour cependant, changement complet dans l’attitude de ces mêmes dirigeants. L’Humanité publie un ordre du jour dans lequel les grévistes décident une procédure entièrement démocratique pour l’élection d’un comité central de grève, et consacre l’unité d’action de toutes les organisations syndicales, C.G.T. et syndicats autonomes.

    Voilà la deuxième grande victoire ouvrière depuis juin 1936, décisive s’il en fut, car c’est à cette seule condition que le mouvement ouvrier peut non seulement battre les capitalistes, mais simplement exister !

    Le début de la grève du métro (voir compte rendu 5° colonne) prouve jusqu’à l’évidence que la nouvelle attitude des dirigeants cégétistes n’est pas due à une conversion miraculeuse à la démocratie, qu’ils ont toujours bafouée, mais à la volonté des ouvriers de ne pas se laisser mener aveuglément et de décider eux-mêmes de leur propre sort.

    Mais ceux qui ont pris l’habitude, pendant de trop longues années, de bafouer la volonté ouvrière ne manqueront pas de la bafouer à nouveau, si la vigilance des travailleurs à leur égard se relâchait, ne fût-ce qu’un instant.

    Ne pas se laisser griser par la victoire, c’est donc la première condition pour en cueillir les fruits. Pas un instant il ne faut faire confiance à ces loups déguisés en bergers !

    Si les dirigeants cégétistes sont sincèrement avec les grévistes du métro et pour l’aboutissement de ses revendications, ils ne peuvent être que pour la solidarité de toute la classe ouvrière avec ces travailleurs. Or les dirigeants cégétistes restent des briseurs de grève. Aujourd’hui, mardi, ils se sont opposés par tous les moyens en leur pouvoir à la grève de solidarité déclenchée par les ouvriers du secteur Collas, pour l’empêcher de s’étendre aux trente mille ouvriers de l’usine Renault.

    "Ce que la classe ouvrière veut, elle le peut !", écrivait La Voix, il y a quelques semaines. Elle a pu déclencher ses luttes revendicatives contre la volonté des dirigeants officiels de la C.G.T. passés au service de la bourgeoisie, elle a pu aujourd’hui leur imposer la démocratie. Elle pourra tout, si elle le veut vraiment.

    Et ce qu’il lui faut vouloir aujourd’hui, c’est s’organiser tout entière pour la bataille, fraternellement unie, en rangs serrés et disciplinés – une discipline librement déterminée et librement consentie !

    Pierre BOIS

    VIGILANCE !

    La grève du métro est générale. La C.G.T., après avoir désavoué le mouvement déclenché à son encontre, vient de s’y joindre.

    Cette grève, dont l’importance est comparable, par ses répercussions, à celle des cheminots, intéresse tous les ouvriers et trouve leur sympathie.

    Devant les légitimes revendications des travailleurs du métro, le gouvernement prend l’attitude "forte". La radio et la presse de service déversent leurs mensonges, tandis que Ramadier fait appel à la police pour expulser les piquets de grève et les ouvriers qui occupent les locaux. Les événements de Verdun, de Nancy et d’ailleurs nous ont déjà montré de quoi un gouvernement, qui ne touche pas un cheveu des trafiquants et des milliardaires, est capable contre les masses travailleuses dans la misère.

    La lutte engagée doit être menée à bien. Pour cela elle a besoin non seulement de la ferme résolution des travailleurs du métro, mais de l’appui actif et éclairé de toute la classe ouvrière.

    Il faut que les ouvriers sachent d’abord comment a été déclenchée la grève du métro.

    C’est le syndicat autonome des conducteurs (groupant la majorité des travailleurs de cette catégorie : environ 1.250 sur 1.700 à 1.800) qui, par vote secret, en assemblée générale, le vendredi 10, décide de déclencher la grève pour l’aboutissement de ses revendications.

    Le lendemain, à 10 h. 30, le Syndicat général autonome du métro, après s’être mis d’accord avec le Syndicat des conducteurs sur le cahier de revendications, décide à son tour la grève. Ainsi, dès le matin du 11 octobre, la grève du souterrain paralyse le trafic du métro, mais en partie seulement. Car la C.G.T. (de même que la C.F.T.C.) désavoue le mouvement. Elle donne l’ordre à ses adhérents de travailler et, qui plus est, de renforcer leur service sur les lignes dissidentes. Comme dans la grève Renault, elle essaie de briser le mouvement, non seulement en faisant faire à ses membres un travail de jaunes, mais en le discréditant par la calomnie et les falsifications. L’Humanité du 11 octobre écrit que c’est une minorité qui a déclenché la grève et s’insurge contre le fait que l’action de cinq cent trente-cinq employés paralyse l’activité d’une corporation de trente-quatre mille agents. Après ce petit calcul, au moyen d’une arithmétique de son cru, elle assimile aux gens de L’Epoque les grévistes qui auraient, d’après elle, mis en avant la réintégration des collaborateurs, alors que rien de pareil ne figure dans leur cahier de revendications. La section du P.C.F. de Billancourt publie un tract ronéotypé où elle accuse le syndicat autonome d’être lié avec le gouvernement pour provoquer des troubles que celui-ci réprimera par les gaz lacrymogènes...

    Cependant, comme chez Renault, "cette minorité qui paralyse" est en réalité la majorité, non seulement chez les conducteurs, mais dans le métro en général. Les ouvriers en grève dès le matin du 11, et dont le nombre dépasse trois mille, représentent la volonté de tous leurs camarades pour les mêmes revendications. Dès le 11, certaines lignes d’autobus voient leur trafic ralenti, surtout celles qui dépendent du Point-du-Jour.

    Parmi les employés adhérant à la C.G.T., l’indignation grandit contre cette organisation qui leur fait faire des heures supplémentaires pour remplacer les grévistes, en échange d’un litre de vin offert par le gouvernement. Au dépôt du Point-du-Jour par exemple, le responsable cégétiste déclare publiquement, dans une réunion du syndicat autonome, qu’il est d’accord avec les revendications de celui-ci et prend l’engagement de défendre la position en faveur de la grève à la réunion de la C.G.T., qui doit avoir lieu le soir même à la Bourse du Travail.

    A la réunion de la Bourse du travail, convoquée par la C.G.T. le 11 au soir, de nombreux délégués se prononcent en faveur de la grève et déplorent que la C.G.T. ait attendu que le syndicat autonome déclenche le mouvement. Les bonzes essaient de remettre de l’ordre en accusant le syndicat autonome d’être à la solde de Truman ! Mais l’assemblée ne se sépare qu’après avoir dû voter une résolution par laquelle la C.G.T. s’engage à donner le mot d’ordre de grève que si satisfaction n’est pas accordée aux revendications avant lundi midi.

    Le lendemain, 12 octobre, L’Humanité écrit : "Durant la journée d’hier, l’esprit de lutte des travailleurs du métro et des autobus s’est manifesté avec force." (Beau travail d’une minorité !) Par un grand titre, elle annonce l’éventualité de la grève générale. La C.G.T. cherche à reprendre la grève à son compte. Après avoir désavoué le mouvement, la C.G.T. se déclare prête à l’envisager et déplore seulement la division ! Mais, tout en déplorant la division, elle continue à faire faire à ses adhérents, pendant la journée du dimanche et du lundi, le travail de briseurs de grève.

    Comme au moment de la grève Renault, la C.G.T. se déclare aussi d’accord avec les revendications des travailleurs en lutte et entame, en leur nom, des négociations avec le gouvernement. En fait, elle essaie de limiter les objectifs de la grève. C’est ainsi que la C.G.T. ne fait figurer, dans ses revendications, ni l’application effective des quarante heures, ni la revalorisation des salaires, garantie par l’échelle mobile, qui figurent dans le cahier de revendications du syndicat général autonome et qui, seules, permettraient au mouvement d’obtenir des résultats durables.

    Il est important, pour les ouvriers, de connaître comment ont agi les dirigeants de la C.G.T. pour savoir à quoi s’attendre, non seulement de la part d’ennemis déclarés de la classe ouvrière, mais aussi de la part des "amis de la dernière heure".

  • Jean Jaurès :

    « D’ailleurs, c’est là surtout qu’est l’illusion d’un grand nombre de militants, il n’est pas démontré du tout que la grève générale, même si elle prend un caractère révolutionnaire fasse capituler le système capitaliste »

    « Il est absolument chimérique d’espérer que la tactique révolutionnaire de la grève générale permettra à une minorité prolétarienne hardie, consciente, agissante de brusquer les évènements »

    « il n’y a aujourd’hui pour le socialisme qu’une méthode souveraine : conquérir légalement la majorité »

  • Léon Trotsky :

    « La grève générale ne peut avoir d’influence décisive que si elle est le prélude d’un conflit entre le prolétariat et la force armée de l’ennemi, c’est-à-dire d’une insurrection. Le prolétariat ne peut trancher le problème du pouvoir, problème fondamental de toute révolution, qu’en brisant la volonté de l’armée qu’on lui oppose. La grève générale entraîne des deux côtés la mobilisation et permet une première appréciation sérieuse des forces de résistance de la contre-révolution, mais seuls les développements ultérieurs de la lutte, après le passage à l’insurrection armée, déterminent le prix de sang que doit coûter au prolétariat la conquête du pouvoir. Mais qu’il faille payer avec du sang, que dans sa lutte pour conquérir le pouvoir et le conserver, le prolétariat doive savoir mourir et savoir tuer, de cela nul révolutionnaire véritable n’a jamais douté. Déclarer que le fait de la plus âpre lutte du prolétariat et de la bourgeoisie, une lutte à mort, "prend toute l’évolution à rebours", c’est tout simplement montrer que les têtes de certains idéologues respectés ne sont que des chambres obscures - camera obscura - dans lesquelles les choses apparaissent à l’envers. »

    "Terrorisme et communisme"

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