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Marche arrière toute au Mali

mardi 29 octobre 2013, par Robert Paris, Tiekoura Levi Hamed

Marche arrière toute au Mali

"Je n’attendrai pas deux mois pour nous réconcilier avec le nord", promettait IBK alors qu’il venait de voter à l’élection qui allait lui donner la présidence. Il a à peine attendu quelques jours pour déchirer l’accord de paix avec le nord et reprendre la guerre...

Mais ce n’est pas la principale guerre : celle contre la révolte de la population civile, des femmes, des jeunes, des travailleurs et des petits soldats est menée activement. « Le front des agitateurs et autres ennemis est averti : l’armée française n’est pas venue pour amuser la galerie et aucune autre manifestation ne devra être tolérée à Bamako avant la libération du nord. » déclarait l’ambassadeur de France Christian Rouyer lors des débuts de l’intervention militaire française. (Jeune Afrique, 28 janvier 2013)

Interdire le droit de manifester, de protester que l’on soit travailleur ou soldat, voilà ce qui est en train de se réaliser...

Non seulement les accords de paix nord-sud sont déchirés, non seulement la guerre a repris, non seulement le nouveau pouvoir plus pro-occidental, plus pro-impérialiste, s’offre de nouveaux accords sur mesure avec les compagnies minières, non seulement l’intervention française et étrangère s’apprête à durer et le pays à être durablement occupé militairement, non seulement la reconstruction tarde au nord et les instituteurs de Gao (où l’électricité est toujours absente) sont contraints de faire grève pour réclamer une paie correcte, non seulement tous les secteurs sont successivement contraints à la grève de la santé aux impôts et des enseignants au personnel de Total-Mali sans parler du rail de l’aéronautique et des douanes, non seulement les soldats révoltés qui ont renversé ATT sont pourchassés ou menacés mais le nouveau président rénove l’image de l’ancien dictateur Moussa Traoré. Et les révoltés se retrouvent l’un avec une balle, l’autre disparu, le troisième arrêté…

Après la mutinerie au camp de Kati contre le général Amadou Sanogo, chef de l’ex-junte, Amnesty International avait demandé aux autorités maliennes l’ouverture d’une enquête impartiale suite à la disparition et à la mort de plusieurs militaires qui s’étaient rebellés, le 30 septembre 2013. L’organisation évoque une « purge » menée par un groupe « qui se considère au-dessus de la loi ». Le ministère malien de la Défense a annoncé l’ouverture d’une enquête. Plus de trois semaines après les faits, les familles de militaires morts ou disparus s’inquiètent et demandent des nouvelles de leurs proches.

Parmi les militaires maliens disparus, il y a Youssouf Traoré, membre de l’ex-junte au pouvoir. Son épouse Traoré Saaba Sissoko est aujourd’hui très inquiète : « Je le cherche. Depuis qu’il a quitté la maison, la nuit du 30 septembre, je n’ai plus de nouvelles de mon mari. Je sais qu’à ce moment-là, ce sont des éléments de Kati qui sont venus le chercher. »

Après la mutinerie de Kati, au moins quatre militaires maliens ont été retrouvés morts, certains par balle. Le pouvoir veut faire croire à « l’hypothèse » d’un règlement de compte entre militaires auteurs du coup d’Etat du 22 mars 2012. Parmi eux, certains sont actuellement aux arrêts.

Devant les enquêteurs, ils auraient fait des déclarations accablantes contre leur ancien mentor, le général Amadou Sanogo. Ce dernier a été contraint de quitter le camp militaire de Kati et selon certaines sources, on l’oblige à être très discret. Il pourrait être rapidement entendu sur les évènements de fin septembre survenus au camp militaire de Kati et sur les cas de disparitions et de morts de militaires.

Rappelons que l’élection présidentielle a été possible grâce à un engagement mutuel de la révolte des soldats de Kati et de l’encadrement qu’ils avaient combattu.
Le nouveau gouvernement d’IBK vient donc de rompre les deux engagements qui ont permis la mise en scène de la présidentielle comme « sortie de crise » : les accords avec la rébellion du nord et l’accord avec la révolte des petits soldats.
Rien d’étonnant de la part du politicien roublard IBK qui avait déjà montré ses talents dans de nombreux ministères et fonctions au service des classes dirigeantes et en liaison avec la France.

IBK est le directeur adjoint de la campagne d’Alpha Oumar Konaré pour l’élection présidentielle en avril et mai 1992. Après son élection, le nouveau président le nomme en juin 1992 conseiller diplomatique, porte-parole du président de la République du Mali. En novembre 1992, il est nommé ambassadeur du Mali auprès de la Côte d’Ivoire, du Gabon, du Burkina Faso et du Niger.

En novembre 1993 il devient ministre des Affaires étrangères, des Maliens de l’extérieur et de l’Intégration africaine. Quelques mois plus tard, le 4 février 1994, le président Alpha Oumar Konaré le nomme Premier ministre. Il occupe cette fonction jusqu’en février 2000.

C’est dire qu’IBK a eu l’occasion de montrer combien il est capable de tous les retournements d’un politicien bourgeois et de la fidélité à l’ancien colonisateur français...

Les petits soldats de Kati, qui avaient mené la révolte et sont aujourd’hui sujets de menaces sur leur vie, ont déjà payé leur confiance à Sanogo, qui s’est retourné et est devenu général. Ils ont ainsi payé leur choix de ne pas mener la révolution jusqu’au bout, jusqu’à se lier à la révolution populaire et prolétarienne…

Quand la révolte des petits soldats commençait

Et comment elle finit

Messages

  • Après avoir arrêté les leaders de la rébellion, le pouvoir malien fait arrêter Sanogo.

    Les autorités militaires Maliennes affirment trois jours après l’annonce de l’arrestation du général Amadou Aya Sanogo, l’auteur du putsch du 22 mars, que ce dernier est simplement entendu sur des " faits graves" mais n’est pas en détention.

    Suite à l’annonce vendredi de l’arrestation du général Amadou Aya Sanogo, le commandant Modibo Nama Traoré de la Direction des informations et des Relations Publiques de l’Armée Malienne (DIRPA) explique qu’il est juste question d’entendre le général Sanogo sur des " faits graves " s’en donner plus de détail.

    Cependant,le général Sanogo qui se faisait discret depuis les événements de Kati fin septembre devait être entendu par les autorités Maliennes à ce sujet.

    Selon le porte-parole militaire Malien, le général Sanogo n’a jamais été arrêté et ne se trouve pas en résidence surveillée " C’est faux. Il n’a pas été arrêté. Il est chez lui et je l’ai même quitté à 14h (samedi). Vous pouvez aller voir de visu. Mais il n’est pas possible de le voir en personne" a-t-il confié.

  • Les élections législatives ont lieu au Mali dans une complète désillusion. Le Nord, prétexte de l’intervention et de l’occupation françaises, est toujours dans la même situation catastrophique au point que les écoles ne peuvent pas vraiment rouvrir et que leurs élèves ne sont pas revenus ni leurs parents...

  • Dernière étape : l’arrestation et le jugement de Sanogo !!

    L’ex-capitaine Amadou Haya Sanogo a chuté. L’officier, ancien chef des putschistes qui ont renversé le président Amadou Toumani Touré, dit ATT, en mars 2012, a été arrêté mercredi à Bamako. Il est emprisonné désormais dans le camp principal de la gendarmerie, dans le sud de la capitale malienne. « Il a été mis en examen pour “enlèvements et séquestrations” et placé sous mandat de dépôt », a simplement annoncé Daniel Tossogué, le procureur général de la République. La justice malienne lui reproche son implication dans de nombreuses affaires de meurtre et de disparition qui ont émaillé son règne à Kati, un camp militaire situé sur les hauteurs de Bamako et dont la junte avait fait son QG.

    L’épilogue a surpris, tant Sanogo, bombardé général d’armée en août dernier, faisant de lui le plus haut gradé du pays, semblait intouchable. « C’est une excellente nouvelle, le premier signe que l’impunité n’existe plus au Mali », souligne un diplomate. Adama Dramé, un journaliste qui a longuement enquêté sur « le capitaine », se félicitait, lui aussi : « C’est enfin un aboutissement normal. C’est très bien pour tout le monde, y compris pour le président Ibrahim Boubacar Keïta. » Dans l’entourage d’IBK, on assurait seulement « ne pas commenter une décision de justice » tout en reconnaissant que cette arrestation donnera un peu d’air au pouvoir au moment où il « traverse une période difficile ». La presse émettait des critiques de plus en plus acerbes sur la tranquillité dont bénéficiait le général, sur ses refus de répondre aux convocations des magistrats, ressuscitant les rumeurs, toujours niées, de collusion entre l’ex-junte et le président Keïta.
    Mercredi matin, l’ex-putschiste, qui a perdu son influence dans l’armée, a été interpellé de force chez lui par des gendarmes, appuyés par les forces spéciales maliennes. Le juge Yaya Karembé, qui l’a interrogé pendant six heures, enquête sur deux dossiers. Le premier concerne la tentative ratée de contre-putsch conduite le 30 avril 2012 par les parachutistes qui formaient la garde rapprochée d’ATT. Une vingtaine d’entre eux avaient été arrêtés. Quatorze devaient disparaître à jamais. Des témoins font état de tortures et d’exécutions sommaires. Dans une vidéo circulant à Bamako, on voit sept de ces disparus, l’air las, aux côtés de plusieurs sous-officiers considérés comme proches de Sanogo. Le juge entend aussi demander des comptes sur la mort étrange de soldats aux lendemains de la mutinerie qui a secoué le camp de Kati, le 30 septembre dernier. Sept militaires, réputés faire partie du premier cercle du général, manquent depuis à l’appel.
    « Le 4 octobre, mon père a reçu un coup de téléphone du bras droit de Sanogo lui disant de venir chez le général. Il est parti en moto et on ne l’a plus revu. On s’est inquiété. On l’a cherché partout mais sans le trouver », raconte Ousman, le fils de l’adjudant Dramane Sissoko. Le corps du sous-officier a finalement été retrouvé quatre jours plus tard à la morgue, la nuque brisée. « Il avait été déposé sous un faux nom par des militaires », affirme Ousman.

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