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Dictature du profit pétrolier en Guinée équatoriale

vendredi 4 avril 2014, par Robert Paris

Un des pays les plus riches d’Afrique et, en même temps, un des plus pauvres !

Dictature du profit pétrolier en Guinée équatoriale

Le site officiel de la diplomatie française affirme pour la Guinée équatoriale :

« Les élections présidentielles du 29 novembre 2009 ont consacré la réélection du président Obiang par une majorité écrasante, avec 95,37% des suffrages. Ce scrutin s’est pourtant déroulé dans un contexte marqué par un effort de transparence et d’ouverture. L’ensemble des observateurs (Union africaine, CEEAC, OIF, Nations Unies) se sont accordés sur le fait que les élections s’étaient déroulées dans le calme, avec une forte participation des électeurs. L’opposition a pu s’exprimer plus librement que lors des précédents scrutins, même si la pression de l’appareil étatique est demeurée forte compte tenu d’une part de la domination de la commission électorale nationale par le ministère de l’Intérieur, et d’autre part de l’encadrement strict des accès accordés à la presse internationale… Le président Obiang bénéficie à titre personnel d’une forte légitimité et d’une réelle popularité en raison de la profonde transformation qu’a connue le pays sous son autorité. Agé de 70 ans, il semble préparer sa succession au profit de son fils aîné, M. Teodoro Nguema Obiang Mangue. Ce projet susciterait toutefois des réserves au sein du clan familial où certains mettraient en cause l’aptitude de ce dernier à diriger le pays. Depuis la découverte du champ pétrolier Zafiro en août 1996, l’économie équatoguinéenne est entièrement tournée vers l’exploitation d’hydrocarbures, qui représente 99% de ses exportations et 88,7% de son PIB, celui-ci ayant été multiplié par dix au cours de la dernière décennie grâce à la manne pétrolière. Malgré les incertitudes sur l’estimation de la population, on estime en général que la Guinée équatoriale détient le PIB par habitant le plus élevé d’Afrique subsaharienne. La production de pétrole brut – autour de 400 000 barils/jour – devrait se maintenir jusqu’en 2015-2016 avant de commencer à décliner. Outre le pétrole, la Guinée équatoriale produit du méthanol et du gaz naturel liquéfié. Le gaz et le pétrole sont exploités par les entreprises anglo-saxonnes (Hess, ExxonMobil, Marathon, Noble Energy) et, dans une moindre mesure, japonaises. De nouvelles réserves de pétrole pourraient être découvertes sur les blocs actuellement explorés par diverses sociétés étrangères (Gazprom, Repsol). Le potentiel gazier ne fait aucun doute. L’entreprise britannique Ophir Energy a annoncé la découverte de gisements portant à 70 Mdm³ le volume total de gaz récupérable. Les premières livraisons issues de cette exploitation pourraient être effectuées en 2016. Le BTP est le second secteur de l’économie équatoguinéenne (5,2% du PIB en 2011) ; son activité est largement soutenue par d’importants investissements publics dans les infrastructures. Les autres activités (agriculture, pêche, sylviculture) ont été marginalisées. Le gouvernement a lancé en 2007 un programme de diversification des sources de la croissance à l’horizon 2020, fondé sur le développement de l’énergie (raffinage et hydroélectricité), de la pêche, de l’agriculture, du tourisme et des services financiers. Mais le FMI dénonce l’absence totale de diversification de l’économie à ce jour. La croissance économique équatoguinéenne atteignait 7,8% en 2011 (FMI), avec une inflation de 6,3%. La croissance devrait se situer autour de 5,7% en 2012, avec une inflation de 5,4%. D’après l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA), les points forts de la Guinée équatoriale sont le transfert de propriété et l’exécution des contrats. Ses points faibles sont la création d’entreprise, le paiement des taxes et impôts et la résolution des cas d’insolvabilité. »

La diplomatie française fait ici de l’hypocrisie vis-à-vis du régime et voit tout l’intérêt des possibilités économiques. Quant à parler de « PIB par habitant le plus élevé d’Afrique subsaharienne », c’est vraiment une duperie de première !!!

La Guinée équatoriale affichait un des 60 revenus par habitant les plus élevés du monde en 2007 (environ 20 000 dollars), selon la Banque mondiale.

Mais les estimations en matière de revenus par habitant varient sensiblement en fonction des statistiques démographiques, qui, selon les organisations internationales, ont été manipulées par le gouvernement en 2001, pour des raisons électorales. Les chiffres varient de 600 000 habitants à plus d’un million.

Selon les estimations du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), moins de la moitié de la population a accès à l’eau potable, et 20 pour cent des enfants meurent avant l’âge de cinq ans.

Le coût moyen d’une consultation médicale est d’environ 60 dollars, alors même que le salaire minimum mensuel, fixé par le gouvernement s’élève à seulement 186 dollars. « Le pétrole n’a fait que nous rendre encore plus pauvres », selon Antonio Buecheku, fermier de l’île de Bioko.

« Regardez où nous vivons : dans des cabanes sans eau ni électricité », a ajouté son voisin Juan Mba, fonctionnaire, qui vit dans le bidonville de New Building, à Malabo. « Avant l’apparition du pétrole, on vivait bien sans que les nouveaux riches nous narguent avec leurs nouvelles richesses ».

Il est interdit aux journalistes internationaux de prendre des photos dans les centaines de bidonvilles de la capitale et des alentours sans une accréditation spéciale, délivrée par le gouvernement.

D’après Global Witness, organisme de surveillance de la corruption, la plupart des habitants de ce pays vivent encore dans la pauvreté.
« La Guinée équatoriale est la dictature dont personne ne parle. Le gouvernement empoche des milliards chaque année grâce au pétrole, pourtant 60 pour cent de la population vit avec moins d’un dollar par jour », a expliqué à IRIN Sasha Lezhnev, conseiller de Global Witness en matière de politiques, qui exerce aux Etats-Unis.

Selon M. Lezhnev, le gouvernement n’a pas dévoilé où il conservait plus de deux milliards de dollars de revenus nationaux, placés à l’étranger, dans des banques privées.

« Cela soulève de sérieuses questions quant à l’engagement du gouvernement en faveur de la transparence », a indiqué M. Lezhnev. Selon la Banque des Etats de l’Afrique centrale, la Guinée équatoriale a vendu 1,8 milliard de barils de pétrole en 2007 pour 4,3 milliards de dollars, soit environ 90 pour cent de l’économie du pays.

Selon l’Indice 2008 de perception de la corruption publié par Transparency International, la Guinée équatoriale est le huitième pays perçu comme le plus corrompu au monde.

« Le pays présente des symptômes du syndrome. La gestion et la répartition des revenus pétroliers est le principal problème », a estimé l’économiste, qui prévoit « un système de pillage et de monopolisation des ressources, la progression de la corruption […] un phénomène d’améliorations publiques inutiles, et finalement, les conditions susceptibles de provoquer une instabilité politique, voire un conflit armé ».

Quant à la démocratie....

Arrivé au pouvoir le 3 août 1979 à la suite d’un coup d’État, Teodoro Obiang Nguema est régulièrement reconduit par lui-même à la tête du pouvoir :

1982 : nommé chef d’État pour sept ans par le conseil militaire

1989 : élu avec 99,99 % des voix comme candidat unique

1996 : élu avec 97 % des voix comme candidat unique, dans un scrutin officiellement multipartite

2003 : élu avec 97,1 % des voix dans un scrutin multipartite (5 candidats autorisés).

2009 : élu avec 95,19 % des voix dans un scrutin multipartite (5 candidats autorisés).

Manuel Ruben N’dongo, un opposant équato-guinéen en exil à Paris, qui dirige le collectif des partis démocratiques d’opposition résume ainsi l’exercice du pouvoir : « Le pouvoir est aujourd’hui entre les mains d’une dizaine de personnes, toutes proches de la famille du président. Vous avez d’un côté le président Obiang, sous l’influence de sa femme dont la volonté manifeste est de propulser à tout prix son fils au sommet de l’État. De l’autre côté, Armengol et le général Mba Nguema, les frères du président, qui considèrent Teodorin comme incapable, voire dangereux »

Jacint Creus dénonce ici le silence complice sur la dictature en Guinée équatoriale

La publication de câbles Wikileaks par le quotidien espagnol "El País" a révélé, par exemple, l’indulgence intéressée des Etats-Unis à l’égard de la dictature à Malabo. En 2009, le diplomate américain en poste en Guinée équatoriale, Anton K. Smith, qualifiait ainsi Teodoro Obiang Nguema de "mec sympa", dirigeant le pays de manière "sereine et bienveillante". Autrement dit, tout va bien dans le "Koweit de l’Afrique", pays sans libertés mais important fournisseur de pétrole pour les entreprises américaines.

La Guinée équatoriale occupe la 167e place, sur 178 pays, dans le classement mondial 2010 de la liberté de la presse publié par Reporters sans frontières. Son président, Teodoro Obiang Nguema, figure depuis plusieurs années parmi la liste des prédateurs de la liberté de la presse publiée par l’organisation. Mainmise sur l’économie, culte de la personnalité, corruption, absence de pluralisme, presse strictement encadrée, le chef de l’Etat dirige le pays d’une main de fer depuis 1979.

La Guinée Conakry et la Guinée Bissau sont bien connues, beeaucoup plus que la Guinée Equatoriale, au sud du Gabon.

Le site Global Witness a révélé que le fils ainé de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, projetait la construction d’un yacht de luxe d’une valeur de 275 millions de d’euros…

L’indécence a rarement de limite pour les dictateurs. Selon le site Global Witness, Teodorin Obiang, le fils aîné du président de la Guinée équatoriale Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, qui fait régner la terreur sur son pays depuis 1979, projette la construction d’un super-yacht de luxe d’une valeur estimée à 275 millions d’euros, soit… trois fois le budget des ministères de la santé et de l’éducation de ce petit pays d’Afrique équatoriale, dont le sous-sol regorge de pétrole. Pour la petite histoire démocratique, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo a été réélu en 2009 à son poste de président de la République à plus de 97% des voix et la télévision d’Etat a bien sûr veillé à ne diffuser aucun programme sur les révolutions tunisiennes et égyptiennes… Mais revenons à notre yacht de luxe, qui donne une idée de la richesse accumulée par les dirigeants de ce pays à la population pourtant considérée comme l’une des plus pauvres du monde.

Selon Global Witness, le fils prodigue a contacté la compagnie allemande Kusch Yachts pour l’élaboration d’un modèle top-secret. En décembre 2009, le projet - qui porte le nom de code de Zen – a été budgétisé à 275 millions d’euros par la firme germanique. De quoi concurrencer la dernière construction en date de Kusch, l’Al Mirqab, 133 mètres d’acier et de luxe, un véritable palais flottant appartenant au Premier ministre qatari Hamad bin Jassim bin Jaber Al Thani…. Pour son yacht de luxe, le « ministre de l’Agriculture » de la Guinée équatoriale voulait le dernier cri en matière de high tech, avec une salle de cinéma, une piscine, un restaurant, un bar… et un système de sécurité avec détecteurs de mouvement et barrières photoélectriques. Le Service information et presse du Bureau du gouvernement de la Guinée équatoriale a annoncé que la construction du yacht avait été abandonnée et que ce dernier – s’il avait été fabriqué, l’aurait été uniquement grâce à des fonds privée. Malgré ce pas de retrait, personne n’est dupe. Comme le souligne Gavin Hayman, de Global Witness, le fait-même de commander un yacht de 380 millions de dollars est « une scandaleuse extravagance de sa part ».

En novembre 2009, Global Witness avait déjà mis à jour le train de jour fastueux de Teodorin Obiang aux Etats-Unis. Ce dernier avait ainsi acheté un jet 33 millions de dollars privé, une maison de 35 millions de dollars à Malibu, un hors-bord et une flotte de voitures de luxe, avec de l’argent provenant de la manne pétrolière sur laquelle sont assis les membres du clan au pouvoir. Selon les documents du ministère de la Justice et de l’Immigration and Customs Enforcement (ICE) des Etats-Unis, Teodorin, qui gagne 7000 dollars par mois en tant que ministre dans le gouvernement de son père, a transféré environ 75 millions de dollars dans les banques américaines entre 2005 et 2007, via des virements traitées par Bank of America, Wachovia, UBS, Union Bank of California et First American Trust. Forbes estimait la fortune du père à 600 millions de dollars, alors même qu’une grande partie des 620 000 habitants de son pays vivent dans la misère.

Prédateur de la liberté de la presse pour « Reporters sans frontière », Teodoro Obiang Nguema règne sans partage sur la Guinée équatoriale en organisant à intervalle régulière des simulacres d’élections présidentielles, qu’il remporte aisément face à des candidats fantoches qu’il désigne lui-même. En novembre dernier, la Cour de cassation avait relancé les poursuites judiciaires sur les biens mal acquis concernant les logements de luxe et les avoirs bancaires détenus en France par trois présidents africains : Ali Bongo (Gabon), de Denis Sassou Nguesso (Congo-Brazzavile) et Teodoro Obiang, après une plainte déposée par l’organisation Transparency International. Une enquête de police de 2007 avait recensé l’achat de nombreuses limousines de luxe achetées par la famille du dictateur de la Guinée-équatoriale. Cela n’a guère troublé le régime. Lors du 16e sommet de l’Union africaine, il a été choisi par les présidents africains pour présider l’organiser jusqu’en 2012, décision considérée comme une provocation par les organisations des droits de l’Homme. Selon « Africa Intelligence », il aurait fêté cette nomination par l’achat d’un second Boeing 737 pour son usage personnel…

Sous Obiang, les Equato-Guinéens engagés politiquement sont malheureusement habitués à ces pernicieuses mésaventures. Depuis trente-trois ans, Obiang règne sur ce pays de 700.000 habitants, en sortant vainqueur de chaque « élection », avec plus de 95% des suffrages.

Il avait promis la démocratie à son peuple, en 1991, mais contrôle toujours l’ensemble des organes de presse et a toujours recours à la torture, à l’emprisonnement extrajudiciaire et à la censure pour empêcher les leaders de l’opposition d’organiser une campagne contre lui.

Obiang a affiné cette prodigieuse capacité à torturer et à emprisonner pendant sa jeunesse, durant les onze années de règne de son oncle Francisco Macias Nguema, dans les années 1970.

Le règne sanglant de Macias a provoqué la fuite d’un tiers de la population du pays, et il a fait de nombreuses victimes, parmi ceux qui sont restés. Pendant cette période, Obiang s’est fait la main à la prison de Black Beach, où des milliers de membres de l’opposition furent torturés et exécutés sommairement ; en 1979, il finit par ravir le pouvoir à son oncle à la suite d’un coup d’Etat.

Malgré les innombrables éléments de preuves rassemblés à la fois par des organisations non-gouvernementales indépendantes et par des observateurs basés en Guinée équatoriale, le président Obiang jure encore que « les leaders politiques ne sont persécutés en aucune manière ». Et de poursuivre :

« La presse ne subit aucune forme de censure, quelle qu’elle soit. »
Si l’on ajoute ces propos aux précédentes déclarations du gouvernement (selon qui le pays ne connaîtrait « ni misère, ni pauvreté »), la Guinée équatoriale, qui dispose de vastes réserves de pétrole, passerait presque pour une utopie féérique, où l’ensemble des citoyens seraient libres et où personne ne souffrirait de la faim.
Certes, le pays dispose d’un PIB par habitant de 35.000 dollars, comparable à celui de la Grande Bretagne. Mais plusieurs informations révèlent ce qu’il en est de la situation réelle de cette nation d’Afrique.

La réalité, c’est que les deux-tiers de la population équato-guinéenne vit avec moins d’un dollar par jour, qu’un enfant sur cinq meurt avant son cinquième anniversaire, et que le pays arrive en cinquième position dans la liste des pays où la presse est la plus censurée, non loin de la Corée du Nord —le plus (tristement) célèbre des Etats fermés.

De toute évidence, le président Obiang ne quitte jamais les environs de Sipopo, qui a tout d’un village Potemkine (selon une légende, des façades luxueuses en carton-pâte avaient été érigées, à la demande du ministre russe Potemkine, afin de masquer la pauvreté des villages lors d’une visite de l’impératrice russe Catherine II, en Crimée, vers la fin du XVIIIe siècle).

Composée de demeures immaculées, de parcours de golf à dix-huit trous et de stations balnéaires cinq étoiles, cette ville demeure fermée aux Equato-Guinéens ordinaires ; triste ironie. Obiang se pense si supérieur au commun des citoyens qu’un ministre de son gouvernement est allé jusqu’à le qualifier de « dieu » sur une radio d’Etat.

Obiang a également tenté de convaincre le reste du monde de la réalité de cette fiction délirante. Il s’est offert les services de cabinets de relations publiques pour plusieurs milliers de dollars. Objectif : lui façonner une nouvelle image, et le faire apparaître comme un leader bienveillant œuvrant pleinement pour la démocratisation de son pays.
Nous avons contacté Greg Lagana, employé chez Qorvis, l’un des cabinets américains employés par la Guinée équatoriale ; il nous a répondu que le gouvernement Obiang ne leur avait « jamais demandé de faire de la propagande, jamais demandé de mentir », et a déclaré que « l’image du pays n’appartenait pas à ses détracteurs »).
Obiang est même allé jusqu’à faire plusieurs dons à une association caritative américaine, la Sullivan Foundation, avant de profiter de leur sommet africain pour mettre en avant la croissance et le « développement » de la Guinée équatoriale.

Mon organisation a tenté d’attirer l’attention du public sur ces remises de fonds effectuées par le leader équato-guinéen ; la Sullivan Foundation a répondu par une lettre. Cette dernière dénonce les « pseudo-organisations des droits de l’homme », et affirme que « le président Obiang a modernisé son pays et y a mis en place des réformes politiques majeures. »

Le passé de Nsue illustre clairement la dure réalité de la vie sous le joug d’Obiang. Cet avocat fait partie du seul parti d’opposition autorisé, Unión Popular (UP). Il a défendu Weja Chicampo, ancien prisonnier d’opinion et fondateur d’un parti d’opposition déclaré « illégal ».

Nsue a également plaidé la cause de quatre membres de l’UP, accusés d’avoir orchestré une attaque du palais présidentiel en 2009 ; les quatre hommes en question étaient pourtant en exil au Bénin au moment de l’attaque. Ils furent pourchassés, rapatriés en Guinée équatoriale, torturés et exécutés. L’avocat et défenseur des droits de l’homme équato-guinéen a lui-même été emprisonné et torturé à Black Beach en 2002. (Lors de son récent séjour dans la fameuse prison, on l’a « seulement » menacé de violences physiques).

Nsue voulait s’entretenir avec son client, Augustín Esono, depuis le 16 octobre. Le 22 du même mois, le commissaire de police Liborio Mba (qui a déjà été impliqué dans d’autres disparitions) lui a donné l’autorisation de rencontrer son client.

Les médias d’Etat accusent Esono d’avoir changé des euros en monnaie locale pour un citoyen français ; selon le gouvernement, ce dernier serait un collaborateur de Daniel Lebègue, directeur pour la France de l’ONG Transparency International.

Transparency International mène une enquête des plus sérieuses sur les accusations de corruption formulées contre Teodorín Obiang, le fils du président. Le gouvernement français a récemment saisi un hôtel particulier parisien et onze voitures de luxe appartenant à ce dernier.
Le président Obiang a réagi en nommant son fils second vice-président, poste inexistant jusqu’alors, dans le but —transparent— de lui conférer l’immunité diplomatique. Teodorín est aujourd’hui recherché pour blanchiment d’argent par les autorités françaises.

L’arrestation d’Esono, qui n’a commis aucun acte illégal, fait bien évidemment figure de représailles. (Nsue a déclaré qu’il avait eu l’occasion de s’entretenir brièvement avec Esono, lors de son séjour à Black Beach, et qu’Esono lui avait montré les marques de plusieurs blessures ; il se pourrait donc qu’il ait été torturé au cours de son incarcération. Malgré la libération de Nsue, Esono est toujours en prison).

Et comme si tout cela ne suffisait pas, le gouvernement Obiang vient d’émettre un mandat d’arrêt contre Lebègue, de Transparency International, l’accusant d’avoir « diffamé et calomnié des personnalités et des institutions de la République de Guinée équatoriale ».

Obiang a lancé sa machine à désinformer à pleine vapeur, déclarant que Lebègue exerçait des « activités commerciales de type mafieux ». Voilà que le dirigeant équato-guinéen accuse ses accusateurs de méfaits semblables à ceux qui lui sont reprochés. Comble de la farce : le président de la Guinée équatoriale a formulé une demande de notice rouge auprès d’Interpol, afin de faire arrêter Lebègue. Interpol a fait l’objet de nombreuses critiques récemment ; on lui reproche d’utiliser l’organisation internationale de la police pour rapatrier de force des dissidents en fuite.

Pour cette famille au train de vie extravagant, les accusations de blanchiment d’argent ne sont que la partie émergée de l’iceberg. Selon plusieurs observateurs, le clan Obiang aurait amassé une immense fortune en détournant les profits des champs pétrolifères du pays. Ils auraient utilisé l’argent pour s’acheter des maisons, de luxueuses voitures de course, des jets privés et des yachts sur —au moins— trois continents.

Ces largesses ont été d’une grande aide à Obiang dans sa quête visant à imposer au monde sa propre version de la réalité.
Teodoro Obiang a fait toute la démonstration de ses talents d’illusionniste dans une récente interview accordée à la correspondante de CNN, Christiane Amanpour.

Lorsque Amanpour lui a demandé s’il comptait nommer son fils pour lui succéder à la présidence, Obiang a répondu :

« Ce choix n’est pas le mien. C’est celui du peuple. C’est le peuple qui décide. »

Et de répéter que la Guinée équatoriale n’était « pas une monarchie, mais une République. »

Lorsque la journaliste de CNN a laissé entendre que cette immense richesse pétrolière pourrait être mise à profit pour tirer la majorité de la population de la pauvreté, Obiang répondit :

« Nous ne pouvons utiliser l’argent obtenu grâce aux ressources naturelles pour faire des cadeaux de Noël au peuple. »

Pour les Equato-Guinéens, la remarque a dû sonner comme une moquerie cruelle : chacun sait qu’Obiang couvre famille et amis de cadeaux onéreux, tout en empêchant son propre peuple d’accéder aux services de base.

Obiang est même allé jusqu’à nier connaître la leader de l’opposition birmane, Aung San Suu Kyi —fait résumant, à lui seul, la nature de sa réalité parallèle. Mais il est vrai que dans l’utopie présidentielle, les opposants n’existent pas. Dès lors, comment pourrait-il connaître l’une des dissidentes politiques les plus célèbres du vingtième siècle ?
Le président Obiang ne quitte plus son monde parallèle, cette Guinée équatoriale prospère, caractérisée par sa liberté de la presse, sa liberté d’expression, son système électoral en parfait état de fonctionnement, et son gouvernement transparent en tout point.
Cette illusion n’a rien à voir avec la réalité. Face à Amanpour, il a déclaré qu’il ne « pourrait jamais [se] présenter comme Dieu en personne » —mais, peut-être, se prend-il vraiment pour une divinité.
Quelque chose me dit qu’il aura bien du mal à persuader Esono, Nsue et leurs amis de le voir un jour sous cet angle.
Pedro Pizano et Jamie Leigh Hancock

Qui dirige la Guinée équatoriale

Messages

  • La Guinée Equatoriale, Etat de 720 000 habitants, avec 76,8% de la population en dessous du seuil de pauvreté et 51 ans d’espérance de vie, est le troisième producteur de pétrole d’Afrique subsaharienne. En avril 2013, le pays a été exclu de l’Initiative pour la Transparence dans les Industries Extractives (ITIE). C’est un fournisseur important des Etats-Unis, mais aussi de pays européens dont la France, l’Italie, et l’Espagne qui appuient actuellement le régime. La relation entre les Etats français et équato-guinéen est marquée par l’histoire de la Françafrique, et ses pratiques qui perdurent comme le montrent les récents voyages de Claude Guéant à Malabo. La famille de Teodoro Obiang Nguema, arrivé au pouvoir par un coup d’Etat en 1979 et plus ancien chef d’Etat africain en activité, possède de nombreux biens immobiliers en Europe. Dans l’affaire des Biens Mal Acquis, la justice française a saisi l’hôtel particulier à Paris de son fils Teodorin, estimé à plus de 100 millions d’euros.

  • Des dizaines de milliers de manifestants ont pris d’assaut les rues de Brazzaville, au Congo, dimanche, pour crier "Sassou dehors". Le président, âgé de 72 ans, entend réformer la Constitution, ce qui lui permettrait de se représenter en 2016.

    L’opposition congolaise a tenu, dimanche 27 septembre à Brazzaville, la capitale du Congo, son plus grand rassemblement depuis le retour au pouvoir du président Denis Sassou Nguesso en 1997. Aux cris de "Sassou dehors" et "Le Congo n’appartient pas à Nguesso", des dizaines de milliers de manifestants ont affirmé leur opposition à une réforme constitutionnelle, assimilée à un "coup d’État", qui permettrait au chef d’État de briguer un troisième mandat en 2016.

  • Deux journalistes, dont un correspondant de l’AFP, ont été interpellés vendredi à Malabo, capitale de la Guinée équatoriale, pendant un rassemblement de l’opposition.
    Les deux journalistes ont été interpellés lors d’un rassemblement du parti d’opposition, Convergence pour la démocratie sociale (CPDS), et libérés rapidement.
    Lors de ce meeting vendredi, ce parti a annoncé la formation d’une coalition aux prochaines élections sénatoriales, législatives et municipales, au côté d’un autre parti d’opposition, l’Union du centre droit (UCD).

    La Guinée équatoriale est un cas d’école en matière d’impact de la corruption sur les droits humains. Comme le montre le rapport que Human Rights Watch vient de publier, il existe un lien direct entre l’enrichissement personnel des responsables politiques et les indicateurs lamentables du pays en matière de santé publique et d’éducation. Le manque de transparence et de mise en concurrence dans le processus de choix et d’allocation des contrats publics permet aux agents du gouvernement de transformer facilement des projets d’infrastructures en vaches à lait, à leur propre bénéfice. L’argent public est ainsi détourné, pendant que s’effondrent les systèmes de santé et d’éducation

    Ainsi, bien que la Guinée équatoriale soit dotée de richesses considérables, le gouvernement n’investit qu’entre 2 % et 3 % de son PIB dans la santé et l’éducation – bien moins que les autres pays dans la même tranche de revenus. De plus, la majeure partie des dépenses du gouvernement sert à financer des hôpitaux trop chers pour la plupart des habitants et une université réservée à quelques privilégiés. Seule la moitié de la population a accès à l’eau potable, le taux de vaccination a chuté et est maintenant l’un des pires au monde, et la proportion d’enfants qui ne vont pas à l’école, en augmentation depuis le début du boom pétrolier, est la septième plus importante du monde

    Pendant ce temps-là, le gouvernement dépense des sommes faramineuses dans des projets d’infrastructures. Entre 2009 et 2013, environ 80 % des dépenses publiques ont été consacrées à ces projets, et ce malgré l’inquiétude du Fonds monétaire international (FMI). Le gouvernement défend ces dépenses en affirmant que ces infrastructures sont nécessaires au développement du pays et à la diversification de l’économie dans la perspective de l’épuisement des ressources pétrolières.
    Le projet le plus coûteux et inexplicable est celui de nouvelle capitale, Oyala, au beau milieu de la jungle. Il s’agit de la troisième capitale dans ce pays d’un million d’habitants. Après avoir dépensé des milliards dans la construction de bâtiments ministériels à Malabo, l’actuelle capitale insulaire, et à Bata, l’autre capitale sur la partie continentale, le gouvernement a budgété 8 milliards de dollars (plus de 7 milliards d’euros) supplémentaires pour Oyala, selon le FMI, qui estime que cela représente la moitié du budget du pays pour 2016.
    Des éléments troublants laissent penser que cette dépense massive en infrastructures donnera probablement lieu à des opérations à des fins personnelles. Il apparaît par exemple que le président, la première dame et Teodorin détiennent conjointement l’entreprise de construction, avec un monopole sur les importations de ciment. La construction de la nouvelle capitale a aussi attiré des entreprises étrangères, dont françaises, comme le groupe Egis, chargé de sa conception.

    Il est difficile pour les investisseurs étrangers d’éviter les conflits d’intérêts en Guinée équatoriale, car la loi du pays exige que les entreprises étrangères aient un partenaire local détenant une participation d’au moins 35 % dans tout projet développé localement. Deux anciens cadres d’entreprises de construction agissant en Guinée équatoriale affirment en outre que s’associer à des responsables influents peut s’avérer crucial pour accomplir quoi que ce soit dans le pays, particulièrement pour décrocher des contrats publics lucratifs.
    Les mesures prises par la France pour empêcher des responsables de blanchir leurs biens mal acquis sont un bon début. Mais le gouvernement devrait à présent aller plus loin et s’assurer que les entreprises françaises n’aident pas ces individus à aspirer les fonds publics de leur pays. L’accès de la population à la santé et à l’éducation en dépend.

  • L’Union nationale des travailleurs de la Guinée-Bissau (UNTG) a observé mercredi le deuxième jour de ses trois jours de grève générale décrétée pour paralyser l’administration publique.

    La grève a reçu le soutien du leader du syndicat du Parlement bissau-guinéen qui a appelé la plus grande centrale syndicale à ne pas abandonner sa lutte équitable de défense et de promotion des valeurs sociales en particulier la stabilité juridique des fonctionnaires de l’Etat.

    Le président de la commission négociations des grévistes, Alfredo Mendonça, a promis de soumettre un nouveau préavis de grève dès vendredi, juste à la fin des trois jours de grève.

    On rappelle que la plupart des ministères ont fermés leurs portes suite à la grève de trois jours décrétée par l’UNTG.

    Les familles des patients, déçus par le silence du gouvernement ...

  • Une grève des taxis sans précédent paralyse les transports urbains en Guinée équatoriale, petit pays africain pétrolier gouverné d’une main de fer depuis 1979 par le président Teodoro Obiang où les conflits sociaux sont rares.

    Les taxis, seul mode de transport collectif en l’absence d’un réseau public, ne circulent plus depuis mardi dans la capitale Malabo, a constaté jeudi un correspondant de l’AFP.

    Les grévistes demandent au gouvernement “une baisse des prix” des documents administratifs que les autorités leur demandent pour exercer leur métier, ainsi que leur nombre.

  • Dans le cadre de la poursuite judicaire contre les « biens mal acquis », Teodorin Obiang, fils du président équato-guinéen (ancien ministre de l’Agriculture et des Forêts, promu en juin dernier vice-président par son père) est jugé depuis le 19 juin par le tribunal correctionnel de Paris pour « blanchiment d’abus de biens sociaux, détournement de fonds publics, abus de confiance et corruption ». Une enquête menée depuis 2008 par deux associations internationales, Sherpa et Transparency International, a mis au jour le patrimoine considérable du vice-président équato-guinéen : immeuble luxueux et immense sur l’avenue Foch à Paris, estimé à 107 millions d’euros ; voitures de luxe et de sport (Porsche, Ferrari, Bentley, Bugatti) ; collections d’œuvres d’art, de bijoux et de vêtements de marque. Les deux organisations ont donc déposé plainte. Les juges ont estimé que ce patrimoine ne pouvait avoir été financé par les seuls revenus officiels de Teodorin Obiang, mais était issu « des détournements de fonds publics et de la corruption ». Le 5 juillet dernier, ce fils à papa immensément riche a écopé de trois ans de prison, avec 30 millions d’euros d’amende et la confiscation de biens dépassant largement les 100 millions d’euros, dont l’immeuble de l’avenue Foch. Ce jugement est attendu pour le 27 octobre. Tout le monde sait que tout cet argent provenant principalement des ressources pétrolières, a été détourné des caisses de l’État de la Guinée équatoriale. Les chefs d’État africains, « élus, réélus » ou non, se dépêchent de s’enrichir, d’enrichir leurs familles ou leurs clans au détriment des travailleurs et de la population pauvre. D’habitude les autorités françaises ferment les yeux sur ce genre d’affaires illicites surtout lorsqu’il s’agit de leurs protégés en Afrique. Mais de temps en temps, elles laissent les mains un peu plus libres aux juges lorsque certaines affaires éclatent au grand jour et que la presse en parle. C’est le cas de l’affaire Teodorin Obiang.

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