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Des virus, vivants ou non-vivants ? Des virus d’une espèce seulement ? A la fois les deux et ni l’un, ni l’autre !!!

lundi 25 janvier 2016, par Robert Paris

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Des virus, vivants ou non-vivants ? Des virus d’une espèce seulement ? A la fois les deux et ni l’un, ni l’autre !!!

Vivant ou non-vivant, cela semble bien une dichotomie très claire et pourtant…

La première des erreurs de la dichotomie consiste à établir des barrières étanches entre les catégories ainsi distinguées. Par exemple, vous êtes un homme ou une femme mais ce n’est pas toujours aussi simple. Autre exemple, ou une molécule fait partie du vivant ou elle n’en fait pas partie. Mais le virus n’est vivant qu’au sein du vivant…
La séparation des deux parties peut nuire à la compréhension du mode d’existence dynamique. Par exemple, la vie et la mort. La plupart des gens opposent diamétralement les deux, rendant le passage de l’inerte au vivant complètement magique et incompréhensible. La dynamique de la cellule vivante est un mécanisme fondé autant sur les gènes et protéines de la mort que sur les gènes et protéines de la vie et sur leur combat permanent, combat déterminé également par les messages des cellules voisines.

La dichotomie entre l’inerte et le vivant a soi-disant été fondée sur la capacité autonome de se répliquer mais on a constaté, avec les virus, que cela n’était pas valable et on a changé pour une dichotomie présence ou absence de l’ADN (ou d’un autre acide nucléique) et on a constaté, avec les prions, que la séparation en deux entités diamétralement opposée n’était non seulement pas justifiée par l’ADN mais ne pouvait pas fonctionner.

Le fondement du vivant est, semble-t-il bien connu, mais nous étudions les virus et nul n’est capable de dire s’ils sont ou non du domaine du vivant. Qu’est-ce qui est le fondement du vivant : l’ADN, l’ARN, les protéines ou d’autres encore ? On ne le sait pas vraiment.

On croit savoir établir des frontières étanches entre concepts comme vivant et mort, comme entre une espèce et une autre, mais les virus franchissent allègrement toutes ces frontières.

Qui plus est, ils pourraient bien avoir précédé les macromolécules du vivant…

Une part non-négligeable de nos gènes et de notre matériel génétique ont pour origine historiquement notre interaction avec de multiples virus.

Ce sont notamment les virus qui permettent aux gènes de passer d’une espèce à une autre.

On a constaté que notre matériel génétique contient en permanence, et pas en cas de maladie seulement, des virus inactifs. Et de nombreux scientifiques supposent maintenant que doment ainsi en nous les moyens d’un éventuel changement évolutif qui pourrait s’activer en cas de stress environnemental. Ces virus inactifs seraient les moteurs internes de l’évolution des espèces.

Chez toutes les espèces étudiées, depuis la levure jusqu’à l’homme, en passant par les insectes et les végétaux, on trouve des génomes rétroviraux intégrés dans toutes les cellules, y compris dans les cellules germinales. Ils ressemblent tout à fait aux génomes de leurs « frères » infectieux, sauf qu’ils sont inactifs. Ils ne peuvent donc plus se multiplier et ne sont absolument pas pathogènes. Ces rétroviraux représentent 8% du matériel génétique chez l’homme…
Ces rétroviraux internes au matériel génétique ne sont pas seulement inactifs et dormants. Ils ont parfois un rôle et même un rôle important !!!

Depuis près d’un siècle, la communauté scientifique n’a cessé de changer sa façon de voir les virus. D’abord considérés comme des poisons, ils ont ensuite été assimilés à des formes de vie, puis à des substances biochimiques ; aujourd’hui, les virologues les placent à la limite entre le vivant et l’inerte. Les virus ne se répliquent pas sans l’aide des cellules vivantes qu’ils infectent, et dont ils perturbent notablement le fonctionnement. Parce qu’ils les assimilaient à des objets inertes, la plupart des biologistes ont négligé les virus quand ils étudiaient l’évolution, mais, aujourd’hui, il s’avère que les virus ont été des acteurs essentiels de l’histoire de la vie.

Pourquoi les virus ont-ils été si difficiles à classer ? Parce qu’ils semblent changer en fonction du point de vue sous lequel on les examine. Les virus ont été associés de longue date aux maladies – la racine du mot virus est le mot latin qui signifie poison. À la fin du XIXe siècle, des médecins avaient constaté que certaines maladies, telles la rage et la fièvre aphteuse, étaient dues à des particules qui semblaient se comporter comme des bactéries, quoique bien plus petites (la majorité des virus ont une taille environ 1 000 fois inférieure à celle des bactéries). Ces particules étant à l’évidence de nature biologique et se transmettant d’une victime à l’autre, les biologistes admirent qu’elles représentaient la plus simple de toutes les formes de vie pourvues de gènes.

Après 1935, les virus furent rétrogradés au rang de substances chimiques. À cette époque, Wendell Stanley et ses collègues, de la future Université Rockefeller, à New York, cristallisèrent pour la première fois un virus, celui de la mosaïque du tabac. L’observation montra qu’il s’agissait d’un assemblage de substances biochimiques complexes, auquel il manquait toutefois des systèmes essentiels nécessaires aux fonctions métaboliques, l’activité biochimique de la vie. En 1946, Stanley reçut, pour ce travail, le prix Nobel de chimie... mais pas celui de physiologie et de médecine.

Depuis 2009, les recherches d’une équipe de l’Institut Gustave Roussy à Villejuif ont confirmé le génome des rétroviraux humains contient 3 gènes nécessaires à la réalisation d’un cycle viral complet. L’un d’eux est le gène env qui permet la synthèse d’une protéine de l’enveloppe virale. Cette protéine a 2 fonctions :

1) elle permet de fusionner la membrane virale avec la membrane des cellules hôtes, fonction essentielle pour le virus car c’est ce qui lui permet de pénétrer dans les cellules, mais la même fonction peut permettre aussi la fusion de deux cellules entre elles,

2) elle diminue des défenses immunitaires de l’hôte, facilitant ainsi l’infection par le virus.

Il se trouve que 2 gènes du génome humain spécifiquement exprimés au niveau du placenta permettent la synthèse de protéines appelées syncytines ayant aussi ces 2 fonctions. D’une part, elles sont capables de provoquer la fusion de cellules entre elles ; d’autre part, elles sont immunosuppressives. La première fonction permet la formation du placenta, zone d’interface étroite entre l’embryon et l’utérus maternel, la seconde fonction empêche que l’embryon ne soit rejeté par les défenses immunitaires de la mère.

Or, d’après toutes les données expérimentales, il apparaît que ces gènes humains sont des gènes env de rétrovirus endogènes. Ils sont installés depuis très longtemps dans les génomes car ils se retrouvent chez tous les primates (dont nous sommes). Ils sont donc là depuis l’origine de cette lignée, il y a quelques 20 millions d’années. D’autres gènes analogues se retrouvent chez les rongeurs, et d’autres encore chez les carnivores, toujours d’origine rétrovirale.

Pour expliquer l’ensemble des données connues, les auteurs proposent le scénario suivant. Il y a environ 150 millions d’années, chez des mammifères encore ovipares, l’utilisation par l’espèce hôte de gènes env de rétrovirus endogènes, aurait rendu possible l’acquisition des fonctions indispensables à la formation d’une interface mère-foetus même si celle-ci était au départ très rudimentaire. Au cours des âges, ce système aurait évolué par le remplacement de ces premiers gènes par d’autres env issus d’autres rétrovirus nouvellement intégrés dans les chromosomes. Ceci, ajouté à des innovations propres à l’hôte, aurait permis des perfectionnements favorisés par la sélection naturelle.

On pourrait aussi résumer les choses, de façon plus lapidaire et humoristique en disant que tous les mammifères placentaires ont pris naissance à partir d’une transgenèse entre un rétrovirus et un ancêtre de l’ornithorynque, ce petit mammifère canularesque qui est couvert de poils, allaite ses petits, mais a un bec de canard et pond des œufs.

Notre système immunitaire combat les virus actifs considérés par notre corps comme invasifs. Les cellules sentinelles déclenchent la production de lymphocytes T, eux-mêmes produisant des lymphocytes B qui produisent des anticorps.

C’est le processus classique en cas d’agression extérieure par des virus étrangers. Mais les virus peuvent aussi être acceptés et assimilés par l’hôte… Ces virus, s’ils ne sont pas mortels, peuvent modifier le matériel génétique.

Un être vivant est un système en mesure de régénérer ses propres composantes internes en utilisant les matériaux de son environnement. C’est un système dont les interactions des sous-systèmes qui le composent ont pour effet de le maintenir en tant que système.

Selon cette définition, un virus n’est pas vivant car même s’il produit une copie de lui-même dans certaines conditions, chaque virus ne reproduit pas ses propres composantes internes.

Certes, comme les êtres vivants, les virus possèdent un génome, des protéines et une enveloppe qui protège tout ce matériel. Alors, qu’est ce qui les distingue du vivant ?

Le virus ne possède aucune des enzymes nécessaires pour produire de l’énergie, ni pour se multiplier seul. Bref, il est un parasite intracellulaire obligatoire. Pour se reproduire, il doit donc pénétrer dans une cellule, détourner sa machinerie enzymatique afin qu’elle produise les protéines du virus, puis quitter cette cellule et en infecter une autre.

Cette définition paraît simple, mais en réalité, les limites du vivant sont plus floues que cela.
D’abord, il existe des virus qui possèdent de l’ARN et de l’ADN. Ensuite, des petites bactéries appelées rickettsies sèment le doute car leur mode de vie se rapproche énormément de celui des virus : elles ne peuvent vivre qu’à l’intérieur d’une cellule hôte. Elles ont d’ailleurs perdu une partie de leur matériel génétique et de leurs fonctions, utilisant ceux de leur hôte. Ces très petites bactéries font des ravages : le typhus en est un exemple.
Enfin, des chercheurs du CNRS ont découvert, en 2005, un virus géant, nommé mimivirus, qui possède, dans son génome, des gènes codant pour des enzymes associées à la fabrication des protéines. Autrement dit, mimivirus a les outils pour se multiplier seul, même s’il ne s’en sert pas.

Et, quand on étudie de plus prêt, la différence entre virus et matériel vivant ne saute plus du tout aux yeux. La seule différence objective entre une bactérie et un gros virus, double brin ADN, c’est l’absence d’appareil de traduction propre. Ribosome en particulier (bien que beaucoup code pour tout ou partie des tRNA). Pour le reste : transcription, réplication, et souvent divers métabolismes, ils sont aussi "autonomes" que plein de bactéries parasites. L’argument de la nembrane ne tient pas, puisque certains d’entre eux sont enveloppés d’une structure membranaire. La taille pareil, la complexité pareil : aucune ne permet de distinguer clairement d’un côté le vivant et de l’autre le non-vivant, d’un côté clairement une bactérie et de l’autre un virus. Bref prenez un mycoplasme (bactérie très simplement organisée), enlevez lui tout ce qui code pour les ARNr et les protéines ribosomales, et vous obtenez a peu de chose de prêt un virus. Le vivant pourrait donc se composer de deux entités :

 D’une part les êtres cellulaires divisés en 3 domaines monophylétiques

 D’autre part les êtres viraux, composés d’une constelation de petits groupes monophylétiques incluant divers élément génétique mobile tels que transposons ou plasmides.

Le tout formant le vivant : des éléments génétiques autoréplicatifs et doués de capacité évolutive.

Les virus existent sous une forme extra-cellulaire (unité matérielle indépendante appelée alors virion) ou intra-cellulaire (virus intégré sous forme dormante ou détournant activement la machinerie cellulaire au profit de sa réplication). Sous la forme intracellulaire (à l’intérieur de la cellule hôte), les virus sont des éléments génétiques qui peuvent se répliquer de façon indépendante par rapport au chromosome, mais non indépendamment de la cellule hôte. Sous la forme extracellulaire, les virus sont des objets particulaires, infectieux, constitués au minimum d’un acide nucléique englobé dans une capside de protéines.

Autrefois, les virus étaient seulement considérés comme vecteurs de maladie. Aujourd’hui, ils sont des moyens d’intervention et d’étude du vivant.

Les virus présentant en général un matériel génétique simpliste, ce sont d’excellents outils dans l’étude de la biologie moléculaire et la biologie cellulaire. Ils permettent la manipulation de fonctions cellulaires, ce qui permet d’en approfondir notre compréhension et d’éluder certains mécanismes moléculaires de la génétique comme la réplication de l’ADN, la transcription, les modifications post-transcriptionnelles de l’ARN, la traduction, le transport des protéines et l’immunologie.

Les virus peuvent être utilisés (virothérapie) comme vecteur de gène au sein de cellules cibles. Outil utilisé par exemple pour faire acquérir à une cellule la capacité de produire une protéine d’intérêt ou pour étudier l’effet de l’introduction du nouveau gène dans le génome.

Certains virus sont utilisés en thérapie génique pour soigner diverses maladies génétiques, par exemple pour remplacer un gène défectueux provoquant des troubles fonctionnels ou mécaniques.

Les virus sont également utilisés dans la lutte contre le cancer. Certains virus peuvent être en quelque sorte programmés pour détruire spécifiquement des cellules cancéreuses.

La suite

Conférences de l’Université de tous les savoirs sur les virus

Lire aussi :

Le virus franchit la « barrière des espèces »

Le virus Ebola

Le virus du Sida

Le virus de la Rage

Le virus de la grippe A

Messages

  • Des chercheurs canadiens et américains sont actuellement en train d’élaborer un vaccin pour contrer le virus Zika.

    Des efforts sérieux pour un vaccin n’ont été envisagés qu’à partir du moment que des populations de pays riches comme Brésil et USA étaient frappées !

    Voilà ce qui se produit dès qu’on confie la santé des hommes au grand capital !

    Pourtant le virus zika est ancien !

    Le virus est détecté la première fois en avril 1947 chez un singe macaque rhésus utilisé comme sentinelle lors d’une étude de la fièvre jaune dans la forêt Zika, au bord du lac Victoria sur la presqu’île d’Entebbe en Ouganda. Il est à nouveau isolé dans la même forêt en 1948 chez un moustique Aedes africanus. Sa spécificité sérologique est décrite en 1952. La transmission vectorielle par un moustique du genre Aedes est par ailleurs prouvée expérimentalement en laboratoire en 1956.

    Le premier cas humain est décrit en 1954. En 1968, puis à nouveau entre 1971 et 1975, le virus est isolé chez l’Homme au Nigeria. Entre 1951 et 1981, des preuves d’infections, par isolement de virus ou par la recherche de traces sérologiques chez l’Homme, sont détectées dans plusieurs pays africains (Ouganda, Tanzanie, Égypte, République centrafricaine, Sierra Leone, Gabon et Sénégal) et asiatiques (Inde, Malaisie, Philippines, Thaïlande, Viêt Nam et Indonésie). Le génome du virus est séquencé pour la première fois en 2006.

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