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La royauté française, revue et corrigée par Alexandre Dumas au travers de ses romans

jeudi 27 octobre 2016, par Robert Paris

Alexandre Dumas, fils du haïtien noir, le général Thomas Dumas de la révolution française

La royauté française, revue et corrigée par Alexandre Dumas au travers de ses romans

Henri II dans « Les deux Diane » tome 1

Henri II dans « Les deux Diane » tome 2

Charles IX et Catherine de Médicis dans le premier roman de la trilogie des Valois - La Saint Barthélemy dans « La reine Margot »

Commentaire de « La reine Margot »

Henri III dans le deuxième roman de la trilogie des Valois - « La dame de Montsoreau »

Commentaire de « La dame de Montsoreau »

Henri III et Henri de Navarre dans le troisième roman de la trilogie des Valois dans « Les quarante-cinq » tome 1

Troisième roman de la trilogie des Valois dans « Les quarante-cinq » tome 2

Troisième roman de la trilogie des Valois dans « Les quarante-cinq » tome 3

Commentaire de « Les quarante-cinq »

Louis XIII dans « Les trois mousquetaires »

Commentaire de « Les trois mousquetaires »

Louis XIV enfant, Richelieu et Mazarin dans « Vingt ans après »

Commentaire de « Vingt ans après »

Louis XIV dans « Le vicomte de Bragelonne »

Commentaire de « Le vicomte de Bragelonne »

Louis XV et les débuts de Marie-Antoinette dans « Joseph Balsamo »

Commentaire de « Joseph Balsamo »

Marie-Antoinette dans « Le collier de la reine » tome 1

Louis XVI et Marie-Antoinette dans « Le collier de la reine » tome 2

Commentaire de « Le collier de la reine »

Louis XVI et les débuts de la révolution dans « Ange Pitou »

Commentaire de « Ange Pitou »

Louis XVI dans « La comtesse de Charny »

Commentaire de « La comtesse de Charny »

Marie-Antoinette dans « Le chevalier de Maison-Rouge

Commentaire de « Le chevalier de Maison-Rouge

La révolution dans « La femme au collier de velours »

Commentaire de « La femme au collier de velours »

Le régent de France Philippe d’Orléans dans « Le Chevalier d’Harmental »

Lettre d’Alexandre Dumas à Victor Hugo :

[9 mai 1850]

Mon cher Victor,

Le vote d’urgence a passé ! Demain vous prendrez la parole, n’est-ce pas ?

Vous êtes là-bas le représentant de l’intelligence universelle. Parlez donc au nom de cette intelligence qui vous accepte pour son représentant.

Dites-leur qu’ils sont insensés, que la lutte qu’ils entreprennent est folle. Comment, c’est au moment où le peuple, sage dans sa force, patient dans sa légalité, remporte, sans bruit, sans jactance, sans insulte, sa première victoire, c’est quand cette première victoire consacre le triomphe de l’intelligence sur la matière, de la plume sur le papier, de la pensée sur la mécanique, c’est à ce moment [même] que l’on dit au peuple : « Tu attends depuis huit siècles – tu croyais être arrivé ! Attends peuple, attends encore… Nous allons changer la loi, puisque tu es resté dans la légalité. »

Ces gens-là n’ont donc rien vu dans le passé, n’ont donc rien entrevu dans l’avenir ? Démocratie, ils n’ont donc pas vu d’où tu viens et où tu vas ?

Le jour où un homme a crié Commune, c’est-à-dire Liberté, sur la place de Cambrai, et où cet homme a eu la langue coupée pour avoir, dit Guibert de Nogent, prononcé ce mot exécrable, la démocratie est née – née comme de la poussière jetée au ciel par le dernier des Gracques est né Marius.

Eh bien ! cette goutte de sang – c’est la source, source invisible à tout autre regard qu’à celui du poète, du philosophe et de l’historien. Suivez cette source dans son cours à travers les siècles et vous la verrez tour à tour se faire ruisseau, torrent, rivière, fleuve, lac et océan.

Aujourd’hui nous sommes en plein océan. L’erreur du pouvoir est de se croire une île, lorsqu’il n’est qu’un vaisseau.

L’océan viendra mourir contre lui – croit-il. Non, l’océan le soulèvera ; non, l’océan le brisera ; non, l’océan l’engloutira.

Pourquoi donc demandent-ils des lois, des armées, des généraux – une dictature, un dictateur – quand il ne leur faut qu’un pilote qui sache naviguer selon le vent ?

Vous n’avez peut-être jamais songé à une chose, mon cher Victor, c’est à la complaisance que Dieu a mise à prouver à la France qu’elle était arrivée à la fin de son ère monarchique, et que toute monarchie nouvelle était impossible.

Ainsi, voyez – en 1793 nous tranchons violemment la question. – Nous conduisons la royauté pieds et poings liés sur l’échafaud, nous la courbons de force sous le fer de la guillotine, et la tête de Louis XVI tombe à la grande terreur de toute l’Europe et de la moitié de la France.

Peut-être y a-t-il eu erreur de la part de la Convention. – Peut-être la haine des hommes s’est-elle substituée à la volonté de Dieu. – Peut-être l’heure fatale de la monarchie n’était-elle pas sonnée encore. – Peut-être le jour inaugurateur de la République s’est-il trouvé intempestivement venu ?

C’est un doute que Dieu ne veut pas laisser dans l’esprit des hommes.

Il leur permettra donc de faire trois nouveaux essais de royauté. Et, par la courte durée de chacun de ces essais, l’Europe verra que, pour la France, la fin de la Royauté est venue.

La Royauté du génie avec Napoléon. Dans Napoléon, Dieu donnera à la France quelque chose comme Alexandre, César et Charlemagne réunis. Avec Napoléon, elle conquerra l’Italie, l’Egypte, L’Allemagne, l’Autriche, l’Espagne, la Russie. Sous Napoléon, elle étendra ses bras de Cadix à Moscou, de la mer de Bretagne à la mer de Marmara.

La Royauté du Génie durera dix ans.

Cette fois encore les Français s’étaient trompés. Ils ont été dupes d’un Corse, d’un aventurier, d’un homme qui ne s’appelait même pas Napoléon, d’un homme qui s’appelait Nicolas. Ecoutez comment 1815 traite le vaincu que déifiera 1830.

Ce n’est plus la Royauté du génie qu’il faut : c’est la Royauté du droit divin. Le malheur a instruit l’exilé de Mitau – et l’hôte de l’Angleterre, Louis XVIII régnera et, après Louis XVIII, Charles X.

Dans ces deux hommes la France aura un spécimen de sa vieille monarchie. Dans Louis XVIII – impuissant, cauteleux, rusé, avare, impitoyable – elle retrouvera un Louis XI au petit pied.

Dans Charles X – prodigue, bon, courtois, loyal, brave, imprévoyant – elle retrouvera un diminutif de François 1er.

Louis XVIII régnera neuf ans ; Charles X six ans – puis viendra la Révolution de 1830. La Royauté du droit divin aura duré quinze ans – cinq ans de plus que la Royauté du génie.

Ecoutez 1830 comme vous avez écouté 1815. Ce ne sont plus ces émigrés qui n’ont rien appris, rien oublié, qu’il nous faut. Ce n’est plus cette Charte octroyée avec son article 14 – éternelle épée de Damoclès suspendue sur la tête du peuple. Non, c’est la charte vérité, c’est la meilleure des républiques incarnée dans la personne du roi Louis-Philippe. C’est la Royauté des intérêts matériels.

Celle-là, c’est la Royauté populaire. Celle-là doit se substituer à l’autre. Celle-là repose sur la sanction de la France toute entière. Elle est soutenue par cinq fils, cinq jeunes gens élevés avec nous, vivant avec nous, combattant avec nous.

C’est ici que la main de la Providence est visible. De ces cinq fils, elle tue l’aîné. Elle éloigne les deux autres, les plus populaires, les vainqueurs de Mogador et de la Smala. Elle laisse seulement auprès du vieux roi ceux-là qui, au jour de la tempête, ne sauraient le soutenir. Aussi, quand la tempête vient, à son premier souffle elle emporte tout, – père, fils, petits-fils, – triple génération qui comptait mourir sur le trône.

Ainsi la Royauté du génie a duré dix ans. La Monarchie de droit divin a duré quinze ans. La Monarchie des intérêts matériels a duré dix-huit ans.

En tout quarante-trois ans – la durée du règne de Louis XV.

Vous voyez donc bien, aveugles que vous êtes, que là où ont échoué Napoléon, Louis XVIII, Louis-Philippe, il y a un abîme – que là où se sont englouties trois monarchies, il n’y a plus de monarchies possibles.

Voilà, non seulement ce que je dis, mais ce que j’écris depuis vingt ans. Dites-leur donc la même chose à la tribune, puisque Dieu vous a donné, à vous le premier de nous tous, cet honneur de parler au nom de nous tous.

A vous, frère par la pensée ; à vous, ami par le coeur.

Alexandre Dumas

Messages

  • Même le conservateur Alexandre Dumas se révèle capable de parler des situations révolutionnaires. Voici ce qu’il écrit dans « Le collier de la reine » :

    « L’heure était propice. Il y a des instants dans l’âge des peuples, ceux qui touchent aux époques de transformation, où la nation tout entière s’arrête comme devant un obstacle inconnu, hésite et sent l’abîme au bord duquel elle est arrivée, et qu’elle devine sans voir. La France était dans un de ces moments-là ; elle présentait l’aspect d’une société calme, dont l’esprit était agité ; on était en quelque sorte engourdi dans un bonheur factice, dont on entrevoyait la fin… L’avenir ! ce grand mot de tous les temps, ce grand intérêt de tous les esprits, solution de tous les problèmes. En effet, qu’était le présent ? »

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