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Le QI mesure-t-il l’intelligence humaine ?

mercredi 14 septembre 2016, par Robert Paris

Le Quotient Intellectuel, ou QI, une mesure fausse et un calcul dangereux

« Il existe une thèse en vertu de laquelle on pourrait prétendument classer hiérarchiquement les êtres humains sur une échelle qualitative. Une thèse qui affirme qu’il est possible de caractériser abstraitement l’intelligence de chaque individu par un seul chiffre ; il s’ensuit que l’on pourrait ranger, en une gradation linéaire, tous les hommes en fonction de leur valeur mentale, laquelle serait, pour chacun d’entre eux, intrinsèque et interchangeable. »

Stephen Jay Gould, dans « La mal-mesure de l’homme »

« L’intelligence ne se résume pas à un chiffre. [...] on ne peut pas classer l’intelligence des gens de façon linéaire, [...] les tests de QI ne mesurent pas toutes les intelligences ni tous les secteurs de l’intelligence. »

Ilan M. Edelstein, « Mon quotient intellectuel »

« Nous constatons, bien sûr, que les habitants des quartiers chics paient cher de loyer et passent en moyenne deux semaines dans la neige ; les habitants de HLM de banlieue ont des loyers moins élevés et ne passent qu’un ou deux jours à la montagne : plus cher est le loyer, plus longue est en moyenne, la durée des vacances d’hiver ; il y a une très forte corrélation entre les deux nombres. Faut-il en conclure que le loyer est un « facteur » de la durée des vacances ? Cela amènerait à tripler les loyers de HLM pour permettre enfin aux ouvriers de faire de longs séjours à la montagne ! Il y a une erreur quelque part dans le raisonnement. Eh bien, c’est exactement la même erreur logique que commettent les quelques « psy » ou les quelques idéologues qui osent présenter le QI comme « facteur » de la réussite. Ils confondent innocemment, ou consciemment selon les cas, corrélation et cause. Certes, un QI de 90 permet de prévoir un manque de réussite, si les conditions restent ce qu’elles sont. Mais pourquoi le resteraient-elles ? Il n’y a là aucune fatalité. Tout au contraire, l’objectif de la mesure du QI doit être non le plaisir de prévoir l’échec, mais la possibilité de prendre les mesures qui permettrons de l’éviter ».

Albert Jacquard

« Lorsqu’on affecte à un individu, sur la base de son score à un test, un Q.I. donné, ou un âge mental donné, on est dans l’ignorance totale ... Le Q.I. n’est pas un instrument de travail scientifique. »

Michel Tort

Le Quotient Intellectuel (QI) est-il la véritable intelligence de l’intellect humain ?

En 1904, à la demande du gouvernement français, Alfred Binet publie une échelle métrique de l’intelligence qu’il a élaboré conjointement avec Théodore Simon. Cette échelle a pour but de mesurer le développement de l’intelligence des enfants en fonction de l’âge (âge mental). Il opte d’emblée pour une stratégie ouverte, c’est-à-dire qu’il n’écarte a priori aucun indicateur. Il s’intéresse ainsi notamment à la graphologie ainsi qu’à la céphalométrie ou encore la chiromancie. Il ne retient que les indicateurs suffisamment pertinents pour évaluer l’intelligence. Dans les années suivantes, il proposera des améliorations. Ce travail sera le point de départ de nombreux autres tests, en particulier le quotient intellectuel (QI).
Lire « L’étude expérimentale de l’intelligence » (1903), par Alfred Binet

Lire « Les Idées modernes sur les enfants » (1909), par Alfred Binet

Lire « Les révélations de l’écriture » (1906), par Alfred Binet

Le premier point que nous voudrions soulever contre le QI est tout simplement qu’il n’existe absolument aucune échelle numérique de mesure de l’intelligence humaine, ni approximative, ni insuffisante, ni même mauvaise parce que l’intelligence n’est en rien mesurable ni par un nombre ni par plusieurs vu que deux intelligences ne sont pas directement comparables numériquement car de nombreuses différences qualitatives, de plusieurs sortes, empêchent de telles comparaisons de grandeurs mathématiques d’aucune sorte.

Il faut absolument renoncer à établir une échelle de comparaison des intelligences et toute échelle de ce type ne peut que mener à dire et faire des absurdités et même à commettre des crimes contre l’intelligence humaine, en cataloguant faussement les capacités d’un enfant, et en le cantonnant dans des limites qu’il n’était nullement obligé de respecter au départ.

L’intelligence n’est pas un capital héréditaire que l’on fait prospérer en l’investissant astucieusement. On peut être peu brillant en étant d’enfant de parents brillants et inversement. On peut se révéler génial alors que cela n’apparaissait nullement lors de son cycle scolaire. On peut parfaitement réussir son existence social en ayant parfaitement échoué dans ses études et inversement. Etre doué dans les relations sociales et doué dans les études sont deux sortes d’intelligence tout à fait différentes et indépendantes.

Tout d’abord, il n’y a pas d’intelligence générale mais divers domaines et diverses capacités et non une seule forme d’intelligence. L’intelligence des nombres n’est pas celle de la chasse, ni celle des sentiments. L’intelligence nécessaire pour réussir dans le monde actuel des villes pour une personne n’est pas celle nécessaire à un pauvre d’un bidonville d’un pays pauvre ni celle nécessaire à un chasseur de la forêt amazonienne ou à un autre du désert du Kalahari.

La capacité à comprendre une situation, à effectuer les diffrentes hypothèses qui sont crédibles, à trouver les diverses voies possibles dans chaque cas, à savoir s’y préparer et à se rendre capable d’y répondre, à être capable dans l’action comme après l’action, tout cela nécessite des intelligences très différentes suivant le type de situation dont il s’agit.

Les tests du QI ne sont adaptés, et dans des limites étroites, qu’au mode de vie occidental, dans un pays riche, dans la situation d’une personne aisée, qui suit un cursus classique des études vers l’emploi, en vue d’un emploi classique, et d’une situation sociale et familiale classique, celle de la petite bourgeoisie moyenne occidentale. Pas étonnant que ces tests favorisent ce type de personne. Un indien d’Amérique ou un paysan africain ne risque pas d’y briller. Par contre, une personne à très fort QI risque d’être sérieusement handicapée si elle doit vivre par ses propres moyens dans une forêt vierge, chasser par elle-même ou trouver des racines pour manger et des plantes pour se soigner.

On ne demandera jamais dans un test de QI ce que l’on peut soigner avec du plantain, comment on peut fabriquer une flèche ou faire du feu avec du bois, ni encore comment transformer un tronc d’arbre en pirogue. On ne demandera pas non plus comment enduire ses pieds pour les protéger des blessures des lianes de la forêt vierge ni comment éviter d’avoir les pieds gelés dans ses chaussures dans le grand nord ni comment tailler une flèche ou préparer son empenage. Les technologies qui sont favorisées dépendent à l’évidence du mode de vie, des mœurs, de la région, de la culture, etc.

Un homme qui se débrouillerait parfaitement bien pour se retrouver dans une ville moderne n’a pas une intelligence générale d’orientation qui lui permettrait nécessairement de se repérer dans une forêt, dans une montagne, dans un désert, dans le brouillard ou dans le feu. L’intelligence relationnelle n’obéit pas non plus à un critère général, quel que soit le milieu, le pays, le type de société, la classe sociale, l’ethnie, la culture, la région, etc. L’intelligence nécessaire quand on est enfant n’est pas la même qui l’est quand on est adolescent, adulte ou âgé. La phase de la vie change les tâches et les objectifs, les capacités et les nécessités. On ne peut pas dire qu’un même être humain ait une continuité de l’évolution de ses tests intellectuels au cours de sa vie puisqu’on n’attend pas de lui les mêmes choses aux différents stades et dans diverses situations.

Les métiers divers nécessitent eux aussi des formes d’intelligence très différentes et qu’il serait bien difficile de cataloguer fût-ce au sein d’une seule branche professionnelle. Il n’y a même pas une seule forme d’intelligence du garagiste, une seule du mathématicien, une seule de l’interprète musical, une seule du compositeur ni une seule du médecin ou du chirurgien.

On peut être génial pour réparer des serrures et des horloges comme l’était le roi français Louis XVI et nul relationnellement et politiquement comme il l’était. On connaît des grands mathématiciens qui étaient à la limite de la folie et de l’enfermement. Il en va de même de certains grands compositeurs. On est parfois étonné des bêtises sociales ou intellectuelles que peuvent proférer certains personnages qui se sont élevés très haut dans la hiérarchie universitaire, administrative, politique, intellectuelle ou sociale et qui ont été très reconnus par la « bonne société ».

Une société donnée, à une époque donnée, dans un pays donné privilégie certaines tâches et les considère comme primordiales, valorisent ceux qui sont capables de s’y adonner avec réussite, sans pour autant que cela signifie que ces personnes soient, en soi, plus intelligentes que les autres. C’est l’exemple des mathématiques et de l’informatique qui frappent actuellement puisqu’une personne qui dispose de grands moyens dans ce type de domaine sera plus facilement considérée comme intelligente que si elle a un sens aigu des zones de cueillette en forêt ou un sens de l’orientation très poussé pour se retrouver dans le brouillard ou pour se retrouver en pleine mer et naviguer sur un radeau de fortune, et pourtant ces dernières tâches sont parfois vitales.

Répondre aux tests de QI nécessite de savoir lire, écrire et compter mais est-ce que cela signifie que les peuples qui ne connaissaient aucune de ces compétences n’avaient qu’une intelligence proche de zéro ? Poser la question, c’est déjà voir que le QI est une grosse bêtise. J’ai personnellement, avec ma grand-mère, eu l’occasion de mesurer qu’une personne ne sachant ni lire ni écrire pouvait être la personne la plus intelligente que j’aie pu fréquenter. J’ai pu constater qu’elle pouvait avoir l’ouverture intellectuelle la plus grande, l’expérience personnelle la plus large et la capacité à juger par elle-même la plus grande de toutes les personnes que j’aie connu.

Les fabricants de tests de QI ou de leurs interprétations ne font que comparer leur propre intelligence et celle des autres. En répondant aux tests, vous vous confrontez à ce que le producteur de test estime comme question intelligente. C’est tout à fait arbitraire et toute autre personne peut trouver d’autres tests qui ne donneront nullement les mêmes résultats.

Il faut remarquer également que les tests, qu’ils soient intellectuels ou psychologiques, favorisent ceux qui s’y retrouvent aisément devant ce type d’examen et de logique, au détriment de ceux qui préfèrent soit ne pas être examiné et jugé, ou qui préfèrent les situations réelles ou les méthodes orales, par exemple. C’est comme pour les concours : ceux qui y réussissent le mieux ne sont pas forcément ceux qui réussissent le mieux dans la vie sociale ou dans la recherche ou dans la technique, etc.

Des tests, même très adaptés à un type de société ou à un type de situation, ne sont pas des tests d’intelligence générale et il n’en existe d’ailleurs pas.

Il a été démontré que l’intelligence était reliée à la sensibilité, au caractère relationnel, à la psychologie personnelle. Il a également été démontré que l’intelligence se construisait de manière individuelle et n’était nullement un simple produit de l’hérédité.

Aucune mesure de QI ne peut préjuger de l’avenir d’un enfant, du type de formation qu’il devrait adopter, des études longues ou courtes qui seraient plus adaptées pour lui, sauf dans de rares cas d’extrême difficulté.

La mesure de QI ne doit pas servir à orienter un enfant, à l’amener à arrêter ses études, à les réduire ni à les orienter ni encore à faire sauter des classes à un enfant ou à le faire redoubler. Le test de QI ne dira jamais rien de plus que l’avis des professeurs qui ont travaillé avec l’enfant et interagit avec lui ! Quant à décider de l’orientation des études ou de l’orientation professionnelle, le QI n’est pas un moyen d’éviter toute erreur mais plutôt d’en commettre.

Aucune mesure n’évite de discuter avec l’enfant, de lui donner sa chance de faire ce qui lui fait envie car cette motivation est un élément fondamental du succès. Le QI ne peut pas dire qu’un enfant ne pourra jamais réussir dans tel ou tel domaine, sauf des exceptions extrêmes.

Un instrument scientifique de mesure est relié à une mesure de la sensibilité, de la justesse et de la précision. En ce sens, le test de QI, quelle que soit l’école ou la méthode, n’est pas un instrument de mesure scientifique.

Les partisans du QI se servent du fait qu’un individu a en gros toujours le même QI au cours de son existence pour affirmer que cela donne un test de ses capacités qui seraient permanentes alors que les travaux, les études, les activités se modifieraient au cours de l’existence. Cela montre au contraire que cela mesure de manière quasi fixe une habilité aux tests mais pas une intelligence, qui elle change suivant les activités effectuées par l’individu. Si on prenait à la lettre le QI, il serait inutile de travailler, d’étudier, de pratiquer avec répétition des activités puisque cela ne change pas le QI !!!

Les raisons pour lesquelles un individu peut avoir un mauvais QI ou de mauvaises réponses aux tests intellectuels peuvent être variées et l’essentiel des raisons n’en est pas la bêtise ni l’ignorance. Par exemple, Einstein échouait facilement aux tests intellectuels mais cela ne prouvait nullement qu’étant jeune il était plus bête. C’était seulement qu’il n’aimait pas répondre rapidement et de manière succinte aux questions posées et préférait y réfléchir longuement et posément. Du coup, il ne donnait aucune réponse et préférait continuer à y réfléchir quitte à avoir de sales notes !!! Il n’était pas non plus assez conformiste pour donner les réponses qu’il savait être souhaitées ni assez soucieux de se conformer aux demandes des autorités, tous défauts qui allaient se transformer en qualités, dès lors qu’il allait développer des idées personnelles en physique plutôt que de devoir réussir aux examens et autres tests…

Bien des gens discutent du « QI d’Einstein » alors que la plupart des tests de QI consistent en questions auxquelles il faut répondre en moins de deux minutes. Dans ces conditions, rien ne prouve qu’Einstein aurait voulu y répondre et quel aurait été son QI !!!

Le plus catastrophique dans les conséquences des galimatias autour du QI, ce sont les idéologies réactionnaires qui se sont greffées sur le quotient intellectuel et tout particulièrement une d’entre elles : l’eugénisme qui vise à démontrer que l’intelligence serait héréditaire et que cela suffirait à justifier de donner un bon niveau d’études aux enfants des classes dirigeantes et pas à ceux des classes pauvres. Car les études pour les classes pauvres serait tout à fait inutile puisque le fait d’avoir réussi prouverait un haut niveau intellectuel qui serait également attribué à la descendance. Plus de mensonges que de mots dans le charabia des eugénistes et, au bout, un crime social consistant à tuer les intelligences dans la majorité de la population.

Rappelons que l’eugénisme justifiait l’élimination des classes et des individus traités d’inférieurs ou de nuisibles et que le critère d’intelligence faisait partie des moyens de mesure des personnes et races à éliminer !!!

Quant aux QI très élevés, ce sont de véritables absurdités qui n’indiquent rien de spécial. Les bêtises des partisans du « haut QI » ne peuvent être toutes rapportées. Citons seulement cette banque de sperme d’individus à haut QI !!!

La réalité des penseurs dits géniaux n’a rien à voir avec une échelle de mesure d’intelligence. Il s’agit plutôt d’une originalité de la démarche intellectuelle et de la capacité à développer des critères de choix qui ne sont pas ceux des personnes justement qualifiées comme intelligentes par la bonne société, ce sont des penseurs révolutionnaires. Ils deviendront ensuite des personnes reconnues mais, tant qu’ils n’ont pas encore fait triompher leurs thèses, ils sont taxés de joyeux farfelus et personne ne leur ferait crédit sur leurs thèses iconoclastes. On a pu trouver par des tests des gens qui allaient réussir dans les études mais pas des génies !

Parmi les idéologies nuisibles qui ont été justifiées par le QI, il faut particulièrement noter le racisme !!!

Les tests ont surtout des résultats sociaux : les classes pauvres sont plus mauvaises et, bien entendu, les races opprimées aussi. De là à justifier l’oppression et l’exploitation par la supériorité de QI des prétendues races et classes supérieures, il n’y a qu’un pas qui a été très vite franchi…

Citons un adepte du QI pour mesurer les différences entre les races, Henry Fairfield Osborn, administrateur de la Columbia University et président du Museum américain d’histoire naturelle. Ce dernier écrivait en 1923 : « Je pense que ces tests ont permis à notre peuple de se faire une idée exacte de l’intelligence que l’on trouve dans ce pays et des degrés d’intelligence des différentes races qui nous arrivent… Nous avons ainsi appris que le Noir n’est pas comme nous. Quant aux nombreuses races et sous-races d’Europe, nous avons découvert que certaines d’entre elles [comme les Juifs] dont nous avions cru qu’elles possédaient une intelligence peut-être supérieure à la nôtre nous étaient en fait de beaucoup inférieurs. » !!!!

Un épisode de cette justification raciste par le QI sans fin a débuté en 1969, lors de la publication d’un article d’Arthur Jensen intitulé "Le QI et la réussite scolaire", dans la Harvard Educational Review. On y prétend de nouveau que de nouvelles informations désagréables sont apparues et que la science doit exposer la "vérité", même si elle va à l’encontre des idées les plus chères à la philosophie libérale. En réalité Jensen ne possède absolument aucune information nouvelle et ce qu’il propose ne résiste pas à l’analyse.

Jensen suppose que le quotient intellectuel mesure correctement quelque chose que l’on peut appeler l’"intelligence". Il essaye ensuite de distinguer les facteurs génétiques et environnementaux susceptibles de provoquer des différences dans les résultats. Pour y parvenir, il se fonde sur la seule expérience naturelle que nous possédions : les jumeaux élevés séparément, puisque les différences de QI entre des individus génétiquement identiques ne peuvent provenir que de l’environnement. Se fondant sur les recherches effectuées sur les jumeaux identiques, Jensen fait une estimation de l’influence de l’environnement. Il conclut que le caractère héréditaire du QI est d’environ 0,8 (80%) chez les blancs d’Amérique et d’Europe. La différence de QI moyenne entre les Blancs et les Noirs d’Amérique est d’environ 15 points (écart généralement admis). Il affirme que cette différence est trop importante pour provenir de l’environnement, étant donné le taux de transmission du QI. De peur que l’on ne croie que Jensen écrit dans la tradition de la scolastique abstraite, je citerai la première ligne de son livre : "On a essayé par une pédagogie adaptée de compenser l’infériorité scolaire, mais cela a manifestement échoué."

En 1994, les racistes ont à nouveau frappé à l’aide du QI : Charles Murray et Richard Herrnstein ont publié « The Bell Curve » dans laquelle les auteurs prétendent s’appuyer sur une masse de « données chiffrées » pour prouver que « l’intelligence des noirs est de 15 points de QI inférieure à celle des blancs », que l’intelligence est héréditaire, que les personnes intelligentes sont celles qui détiennent une bonne position sociale, que c’est gaspiller de l’argent de vouloir augmenter l’intelligence de ceux qui en sont, selon ces auteurs, dépourvus !!!

Ces tests dits de « quotient intellectuel » sont fondés sur les critères d’adaptation au monde occidental et à ses valeurs et non sur des tests universels d’intelligence, pour la simple raison que cela n’existe pas. Pour vivre dans l’enfer vert de la forêt tropicale, il faut bien d’autres capacités intellectuelles que pour s’en sortir dans l’enfer des métropoles capitalistes. Le test ne permet que de vérifier ce qu’on a enseigné comme adaptation en testant ceux à qui on l’a enseigné, par les études mais aussi y compris au travers de la vie sociale… La génétique n’y est pour rien. Chercher des résultats de QI sur les Noirs américains est absurde car on ne fait que mesurer l’effet de la différence sociale entre deux milieux socio-économiques et non l’effet des gènes raciaux qui n’existent pas, ni encore la prédétermination intellectuelle des gènes…

Comment se fait-il que le QI donne des réponses très divergentes sur des critères raciaux ?

Effectivement, le QI semble racial. Les résultats divergent suivant le type de population. En fait, ce n’est pas tant une question de races que de modes de société et de mode de vie. Le QI sert à mesurer les capacités de l’individu à réussir dans l’école de la société bourgeoise occidentale adaptée au mode de vie capitaliste. Plus une population en est lin, plus elle répond difficilement à ce type de sollicitations.

Par contre, l’intelligence humaine est tout autre chose que la réussite individuelle et abstraite demandée par le monde bourgeois. L’intelligence est la capacité d’évoquer par la pensée des situations imaginaires afin d’examiner comment on risquerait d’y réagir au cas où on y serait confronté. Cela suppose l’imagination des possibles et l’imagination des réactions. C’est un processus contradictoire puisque cela suppose d’écarter les hypothèses improbables. Mais, selon les modes de vie, les situations et les manières d’y faire face sont très diverses. Tel peuple peut se concentrer sur les relations au sein du groupe et sur les capacités à s’orienter et se comporter par exemple en forêt. Tel autre cherchera à résoudre des problèmes mathématiques ou à s’adresser à son chef.

A l’opposé de ces absurdités, Howard Gardner a détecté huit sortes différentes d’intelligences au moins :

• Musicale : avec des aires se situant dans l’hémisphère droit qui jouent un rôle important dans la perception et la production de musique ;

• Kinesthésique : capacité à exprimer une émotion, faire un sport ou produire un bien par le biais de son corps ;

• Logico-mathématique aussi appelée capacité à penser ;

• Langagière : avec l’aire de Broca qui est dédiée à la production des constructions grammaticales ;

• Spatiale : avec une spécificité hémisphérique à droite ;

• Interpersonnelle : capacité à repérer ce qui distingue les individus et notamment les différences d’humeur, de tempérament, de motivation et d’intention ; le lobe frontal joue un rôle prépondérant dans cette compétence ;

• Intrapersonnelle : ou connaissance introspective de soi, voire la faculté à transcender la satisfaction pulsionnelle ;

• Naturaliste : expertise pour reconnaître et classer les différentes espèces mais aussi rôle au sein de la culture.

Pour Gardner, ces intelligences sont indépendantes mais cohabitent au sein d’un même individu.

Le test de QI ne mesure pas ni ne prétend mesurer :

• l’ouverture d’esprit ;

• la créativité (ou inventivité), bien que les sujets à fort QI se montrent souvent imaginatifs ;

• la capacité à dépasser un problème pour le placer dans une perspective plus générale.

Ces points jouent néanmoins un rôle important dans beaucoup de travaux intellectuels. D’autres tests existent pour ces détections spécifiques.

Il est en revanche très influencé par la motivation : les problèmes posés sont souvent fastidieux en raison de leur caractère répétitif et coupé dans une certaine mesure du réel. Le problème se complique du fait que l’intelligence « peut répugner à la répétition » : Évariste Galois refusait de répondre à une question au motif qu’il la trouvait trop facile et inintéressante.

Il concerne des « problèmes clos » posés de façon « explicite », ce qui ne correspond qu’à une partie limitée des questions où ce que nous nommons « intelligence » se montre utile. Il est fréquent que la vraie difficulté intellectuelle d’une tâche soit d’arriver à bien poser le problème plutôt que le résoudre une fois posé ; cette dernière tâche peut même dans certains cas être accomplie par une machine.

Il apparaît très difficile d’estimer le réel potentiel des personnes manifestant un QI très élevé (ou très bas, dans une moindre mesure). La principale raison réside dans la faiblesse de l’échantillon disponible à ce niveau. Quand un enfant sur 3000 environ obtient un QI supérieur à 150 au WISC, il devient très difficile d’établir un nouveau test pour ceux-ci (il faudrait d’abord constituer un échantillon valable, ce qui est très délicat). Ainsi, les bêta-testeurs des tests réservés aux THQI (personnes à très haut QI) se sont-ils, en fait, auto-évalués. Si les tests de QI donnent des résultats qui ont une apparence de Loi normale (Courbe de Gauss), c’est parce que les tests sont « étalonnés » de façon à en donner une : on y trouve en effet quelques rares questions destinées à dépister très vite des sujets exceptionnellement retardés ou brillants, et l’immense majorité des questions ne sert qu’à départager plus finement les autres, qui sont aussi la majorité, entre eux.

Après avoir mené la plus grande enquête en ligne sur l’intelligence, avec plus de 100 000 participants, l’étude dirigée par une équipe de recherche de l’Université de l’Ouest canadien a conclu que la notion de mesure du quotient intellectuel, ou QI, à l’aide d’un singulier test standardisé, est très trompeuse.

Stephen Jay Gould écrit, dans « La mal-mesure de l’homme » :

« En 1904, Binet fut chargé par le ministère de l’Instruction publique (en France) de réaliser une étude dans un but pratique bien spécifique : mettre au point des techniques permettant de dépister les enfants qui, réussissant mal dans les classes normales, semblaient nécessiter un recours à quelque forme d’éducation spécialisée. Binet opta pour une démarche purement pragmatique. Il rassembla un éventail très large d’épreuves brèves, en relation avec les problèmes de la vie quotidienne (compter des pièces, décider quelle est « la plus jolie » de deux dames, par exemple), mais qui, supposait-il, faisaient appel à des processus fondamentaux du raisonnement, tels que « la direction, la compréhension, l’invention et la censure » (Binet, 1909). Les techniques apprises, comme la lecture, n’étaient pas utilisées directement. Des examinateurs ayant suivi une formation préalable faisaient passer individuellement cette série de tests classés dans un ordre de difficulté croissante. Contrairement aux tests précédents, conçus pour mesurer des « facultés » de l’esprit spécifiques et indépendantes, l’échelle de Binet était un amas hétéroclite d’activités diverses. Il espérait qu’en mélangeant un nombre suffisant de tests d’aptitude différents, il parviendrait à en abstraire, en un résultat unique, les potentialités générales d’un enfant. Il insista, du reste, sur le caractère empirique de son travail dans une phrase célèbre (1911) : « On pourrait presque aller jusqu’à dire « Peu importe les tests pourvu qu’ils soient nombreux ». Binet publia trois versions de son échelle avant sa mort en 1911. L’édition originale de 1905 se borne à classer les épreuves dans un ordre croissant de difficulté. La version de 1908 établit les critères utilisés dans la mesure de ce qu’on appelle maintenant le Q.I. Binet attribua un niveau d’âge à chaque épreuve, qui se définissait comme l’âge le plus jeune auquel un enfant d’intelligence normale devait être capable de l’accomplir avec succès. L’enfant commençait le test de Binet par les épreuves de l’âge le plus jeune et poursuivait la série jusqu’à ce qu’il ne puisse plus remplir les tâches demandées. L’âge associé à ces dernières épreuves devenait son « âge mental » et son niveau intellectuel général était calculé en soustrayant son âge mental de son âge chronologique. Après avoir repéré les enfants dont l’âge mental était nettement inférieur à l’âge réel, on pouvait les diriger vers des filières d’éducation spécialisée, ce qui correspondait à la mission que le ministre avait confiée à Binet. En 1912, le psychologue allemand W. Stern proposa que l’âge mental soit divisé par l’âge chronologique plutôt que soustrait de celui-ci le quotient intellectuel ou Q.I. était né. (…) Binet se refusa à dégager la signification du chiffre qu’il attribuait à chaque enfant. L’intelligence, affirmait-il avec force, est trop complexe pour qu’un seul nombre puisse la définir. Ce chiffre, que l’on appelleraplus tard Q.I. , n’est qu’un guide empirique, grossier, conçu dans un but pratique bien limité. « Cette échelle permet, non pas à proprement parler la mesure de l’intelligence – car les qualités intellectuelles ne se mesurent pas comme des longueurs, elles ne sont pas superposables. » (1905) (…) Les réticences de Binet étaient aussi d’ordre social. Il redoutait particulièrement que cet instrument, si l’on en faisait une entité, puisse être perverti et utilisé comme une étiquette indélébile, plutôt que comme un guide permettant de sélectionner les enfants ayant beson d’aide. (…) Plaquer une étiquette sur un enfant peut entraîner son instituteur à prendre une certaine attitude et l’enfant lui-même à adopter un comportement conforme à la prévision. (…) Non seulement Binet s’interdisait d’assimiler Q.I. et intelligence innée, mais encore il refusait de le considérer comme un moyen de classer les élèves selon leur valeur mentale. Il conçut son échelle métrique dans le seul cadre de la mission dont on l’avait chargé le ministère de l’Instruction, c’est-à-dire pour reconnaître les enfants ayant subi des échecs scolaires et qui relevaient de systèmes d’éducation spécialisée – ceux que l’on appellerait aujourd’hui des dyslexiques ou des arriérés mentaux légers. « Nous sommes d’avis, écrivait Binet en 1908, que les plus précieuses applications de notre échelle ne seront pas pour le sujet normal, mais bien pour les degrés inférieurs de l’intelligence. » Quant aux causes de ces faibles résultats, Binet refusait d’échafauder des théories sur ce sujet. Ses tests, en tout cas, ne pouvaient pas apporter de lumières là-dessus. Binet écrit en 1905 : « Notre but est, lorsqu’un enfant sera mis en notre présence, de faire la mesure de ses capacités intellectuelles, afin de savoir s’il est normal ou si c’est un arriéré. Nous devons à cet effet étudier son état actuel, et cet état seulement. Nous n’avons à nous préoccuper ni de son passé ni de son avenir ; par conséquent nous négligerons son étiologie, et notamment nous ne ferons pas de distinction entre l’idiotie acquise et l’idiotie congénitale. (…) En ce qui concerne l’avenir, même abstention, nous ne cherchons point à établir ou à préparer un pronostic, et nous laissons sans réponse la question de savoir si son arriération est curable ou non, améliorable ou non. Nous nous bornons à recueillir la vérité sur son état présent. » Mais Binet était certain d’une chose : quelle que soit la cause des faibles résultats obtenus an classe, le but de son échelle était de détecter afin d’apporter de l’aide et des améliorations, non de cataloguer pour imposer des limitations. Certains enfants pouvaient bien être congénitalement incapables d’une réussite normale, mais tous pouvaient s’améliorer s’ils bénéficiaient d’une aide spéciale… Binet écrit en 1909 : « Si on ne fait rien, si on n’intervient pas activement et utilement, il va continuer à perdre son temps, et (…) il finira par se décourager. L’affaire est très grave pour lui, et comme il ne s’agit pas ici d’un cas exceptionnel, mais que les enfants qui ont une compréhension défectueuse sont légion, on peut bien dire que la question est grave pour nous tous, pour la société ; l’enfant qui perd en classe le goût du travail risque fort de ne pas l’acquérir au sortir de l’école. » Binet s’emporta contre la devise « Quand on est bête, c’est pour longtemps » et contre les « maîtres sans critique » qui « se désintéressent des élèves qui manquent d’intelligence ; ils n’ont pour eux ni sympathie ni même de respect, car leur intempérance de langage leur fait tenir devant ces enfants des propos tels que celui-ci : « C’est un enfant qui ne fera jamais rien… il est mal doué… il n’est pas intelligent du tout »… Binet raconte en 1909 qu’en passant son baccalauréat, l’examinateur lui déclara qu’il n’aurait jamais « l’esprit philosophique » : « Jamais ! Quel gros mot ! Quelques philosophes récents semblent avoir donné leur appui moral à ces verdicts déplorables en affirmant que l’intelligence d’un individu est une quantité fixe, une quantité que l’on ne peut pas augmenter. Nous devons protester et réagir contre ce pessimisme brutal ; nous devons essayer de démontrer qu’il ne se fonde sur rien. » Les enfants que signalait Binet devaient être aidés, et non étiquetés de manière indélébile… Binet recommandait de petites classes de quinze à vingt élèves… Il était partisan de méthodes éducatives spéciales comprenant un programme préparatoire… permettant d’augmenter la capacité individuelle de l’attention, de la discipline, de la volonté, de la concentration comme préalables nécessaires à l’étude des sujets scolaires. »

Petite chronologie

1869

Sir Francis Galton, biologiste anglais, publie L’intelligence héréditaire — dont le but est de prouver que l’intelligence est héréditaire, comme l’indique le titre. En 1883, il invente l’eugénisme, science de la sélection biologique de l’espèce humaine, qu’il définit comme « l’étude des éléments contrôlables socialement qui peuvent améliorer ou détériorer les qualités raciales des futures générations physiquement ou mentalement ».

1904

En 1904, l’Anglais Charles Spearman reprend les travaux de Galton, et par l’analyse factorielle découvre un « facteur général » qu’il nomme « intelligence générale » (il s’agit du facteur g, avec g en basse casse italique). En 1905, les Français Alfred Binet et Théodore Simon, travaillant à la demande de l’État sur un moyen de détecter d’avance les élèves faibles scolairement, mettent au point le premier test utilisable, l’Échelle métrique de l’intelligence.

1905

Alfred Binet s’intéresse à la question du retard mental chez les enfants : il met au point une « échelle métrique de l’intelligence » qui compare le “niveau intellectuel” et l’âge réel de l’enfant.

1912

En 1912, l’Allemand William Stern a l’idée de faire le rapport entre les résultats obtenus au Binet-Simon et l’âge réel, et invente le terme de « quotient intellectuel. » Le problème est bien sûr que ce QI n’est applicable qu’aux enfants et, à la limite, aux adultes handicapés mentaux. En 1926, la psychologue Catherine Morris Cox (en) utilise les informations biographiques sur l’enfance de personnes célèbres pour estimer a posteriori leur QI (Voltaire, 170 ; John Stuart Mill, 190 ; Goethe : 210). Cette étude informelle n’est qu’amusante mais sera souvent citée.

1920

Henry Herbert Goddard, psychologue américain, réinterprète les tests de Binet. Il tente de démontrer que l’intelligence est innée et que la débilité est l’expression d’un gène unique. Citation : « Par exemple, voilà un homme qui dit : “Je porte des chaussures à 12$ et voici un manœuvre qui porte des chaussures à 3$ ; pourquoi me permettre de dépenser 12$ alors que lui ne peut en dépenser que 3 ? Je vis dans une maison qui est décorée de façon artistique, avec des tapis, des meubles coûteux, des tableaux de valeur et d’autres objets de luxe ; voilà un manœuvre qui vit dans un taudis, sans tapis, sans tableaux et avec les meubles les plus grossiers. Ce n’est pas équitable, ce n’est pas juste.” En réalité, il se peut que cet ouvrier ait une intelligence correspondant à un âge mental de 10 ans, alors que la vôtre correspond à un âge mental de 20 ans. »

1921

Yerkes fait des tests auprès des conscrits américains. Il aboutit à la conclusion suivante : l’âge mental moyen des Américains est de 13 ans. Yerkes y voit trois explications majeures : « la rapide croissance de la population noire, l’augmentation des flux d’immigrés en provenance d’Europe centrale et d’Europe du Sud et, enfin, la libre reproduction des pauvres et des faibles d’esprit ».

1939

En 1939, l’Américain David Wechsler invente la mesure par rang (utilisation de la loi normale) qui permet l’utilisation sur les adultes. Le terme « quotient » est cependant conservé. La même année, l’Américain Louis Leon Thurstone remet en cause la thèse de Spearman en soulevant sept facteurs principaux qui font partie d’une multitude de facteurs : Facteur Spatial (représentation des configurations), Facteur Perception (saisie de détails dans une configuration), Facteur Verbal (compréhension des données), Facteur Lexical (mobilisation du vocabulaire), Facteur Mémoire (faculté de mémorisation), Facteur Numérique (réalisation de calculs), et Facteur Raisonnement (définir et trouver des liens entre des éléments). En reprenant les analyses de Spearman, Thurstone conclut que ces sept facteurs sont orthogonaux, c’est-à-dire représentent autant de types d’intelligence et n’ont pas de lien entre eux. Le g de Spearman serait donc inexistant. Les conclusions de Thurstone sont que l’existence même de l’intelligence générale, comme entité mesurable, ne reposerait sur aucune base empirique réelle, ni ne pourrait être quantifiée de manière rigoureuse et logique (sauf évidemment dans le cas particulier de deux individus dont l’un surpasserait l’autre dans « tous » les types mentionnés). En 2006, le débat reste ouvert et on attend beaucoup de la neurologie et des sciences cognitives pour le faire avancer. Des revues comme « Scientific American : Mind » ou en France Cerveau et psycho publient régulièrement des articles sur le sujet.

1955

En 1955, le psychologue de l’éducation Cyril Burt publie sa première enquête (qui se révélera falsifiée) sur l’héritabilité du QI apportant la justification des classes sociales en Angleterre, son test servira jusqu’en 1971 à l’orientation des élèves anglais de 11 ans. L’année suivante, en 1956, l’un des plus grands QI mesurés est obtenu par une femme, Marilyn vos Savant.

1964

Un généticien américain : « Nul ne constesterait qu’il soit souhaitable et scientifiquement sain d’encourager la reproduction de personnes intelligentes qui constituent un capital bénéfique à la société. C’est ainsi, par exemple, qu’il serait tout à fait raisonnable de diminuer les impôts des professeurs d’université d’après le nombre de leurs enfants. »

1980

En 1980, Robert Klark Graham, généticien eugéniste américain, crée le Dépôt pour le Choix Germinal, une banque de sperme réservée aux hauts QI.

1994

Richard Herrnstein et Charles Murray publient The Bell Curve, ouvrage tendant à démontrer que les pauvres sont pauvres parce que cons. « Chez les spécialistes, le stade des batailles entre experts est maintenant dépassé sur le point de savoir s’il existe réellement un facteur général sous-tendant les aptitudes cognitives, de grandeur variables selon les individus. Il existe également un consensus pour reconnaître que ce facteur générable est mesuré raisonnablement bien par divers test standardisés, les meilleurs de tous étant les tests de Q.I., qui ont été mis au point spécialement dans ce but. » Forts de cette théorie, Herrnstein et Murray affirment que les habitants pauvres et dangereux, à faible Q.I., doivent être “pris en charge” : « En bref, par prise en charge, nous pensons à des sortes de réserves d’Indiens, aménagées avec d’avantage de “high-tech” et de moyens, destinée à une partie importante de la population, tandis que le reste de l’Amérique continuerait de s’occuper de ses affaires à l’ordinaire. » Séduit par cette thèse, Newt Gringinch, le président républicain de la Chambre des députés, prône la baisse des dépenses sociales — à quoi bon donner aux pauvres, s’ils sont moins intelligents par nature ?

Lire encore :

wikipedia

Science et Avenir

Le QI est-il synonyme d’intelligence

Pourquoi votre QI ne dit pas grand chose de votre intelligence

Quel type d’intelligence mesurent vraiment les tests de QI

Lire encore sur le quotient intellectuel

Lire encore sur l’intelligence humaine

Messages

  • Stephen Jay Gould dans « Darwin et les grandes énigmes de la vie » :

    « Qui sait vraiment ce que mesure le QI ? Il permet de prévoir le « succès » scolaire, mais ce succès résulte-t-il de l’intelligence ou de l’aptitude à assimiler les valeurs favorites des classes dominantes ? »

  • Stephen Jay Gould dans « La mal-mesure de l’homme » :

    « Le danger des tests d’intelligence réside dans le fait qu’au sein d’un système global d’éducation, les moins raffinés, ou ceux qui ont les préjugés les plus forts, s’arrêteront dès qu’ils auront procédé à leur classification et oublieront que leur devoir est d’éduquer. Ils placeront l’enfant arriéré dans une catégorie au lieu de combattre les causes de son retard. Car toute la propagande sur les tests d’intelligence amène peu à peu à penser que les personnes à faible quotient d’intelligence sont congénitalement et irrémédiablement inférieures et à agir en conséquence. »

  • « Dans une étude, Terman a rassemblé un échantillon de 256 « vagabonds et chômeurs », provenant d’un centre d’accueil pour sans-logis de Palo Alto. Il s’attendait à ce que leur Q.I. fût le plus bas de toute sa liste [des différentes professions] ; cependant, bien que la moyenne de 89 obtenue par les clochards ne témoignât pas de dons prodigieux, elle plaçait tout de même ceux-ci au dessus des conducteurs de tramway, des vendeuses, des pompiers et des policiers. Pour venir à bout de cette situation gênante, Terman présenta son tableau de résultats de manière curieuse. La moyenne des clochards était désespérément élevée, mais, au sein de celle-ci, on enregistrait aussi des variations plus importantes que dans aucun autre groupe et on y trouvait un bon nombre de notes assez basses. Terman fit donc figurer sur son tableau les notes de 25% les plus faibles de chaque groupe, ce qui eut pour effet de faire redescendre les vagabonds dans les bas-fonds. »

    « La mal-mesure de l’homme », Stephen Jay Gould

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