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Ce n’est ni par les élections, ni par les institutions étatiques, ni par les stratégies des appareils syndicaux que nous barrerons la route au fascisme

jeudi 4 mai 2017, par Robert Paris

Edito

Ce n’est ni par les élections, ni par les institutions étatiques, ni par les stratégies des appareils syndicaux que nous barrerons la route au fascisme

Tout est fait pour nous faire croire qu’il existe une France Macron et une France Le Pen, que la véritable division de la population serait entre ces deux pôles ! Beau choix ! Placer les milieux populaires entre deux maux et les diviser ainsi, quel meilleur moyen de les déstabiliser, de les déboussoler, des enfermer dans un piège, de permettre que les luttes à venir soient détournées par ce prétendu « choix » ! Beau résultat de la tromperie démocratique des élections bourgeoises !

On nous dit que Marine Le Pen doit être battue à l’élection présidentielle en France et la social-démocratie française en prend prétexte pour soutenir la mise en place d’un gouvernement ouvertement anti-ouvrier qui serait celui de Macron ! Mais qui a donné du grain à moudre à Le Pen sinon justement les Hollande, les Valls, les Cazeneuve, les Le Drian qui aujourd’hui nous parlent de dresser un mur contre l’arrivée au gouvernement de Le Pen.

Qui a donné raison à Le Pen sinon les gouvernants de droite et de gauche, en prétendant que le principal danger en France était le terrorisme et que celui-ci était le produit direct de l’Islam, de la fraction musulmane de la population des banlieues et notamment de sa jeunesse, que les migrants étaient en train d’envahir la France et qu’ils étaient imposés par l’ouverture de l’Europe. Ce sont les Hollande et Sarkozy et leurs acolytes de droite et de gauche, ces soi-disant ennemis mortels du lepénisme, qui ont crédibilisé ces mensonges, qui s’en sont servi à la fois pour justifier des guerres, pour bombarder des peuples, pour semer la mort en Orient, pour précariser et terroriser des peuples entiers, pour les pousser sur les routes et dans l’immigration forcée, pour en prendre prétexte ensuite pour annoncer que la population européenne était menacée d’envahissement. Ce sont eux qui ont crédibilisé l’idée que la France devait se défendre par le nationalisme économique, que les emplois chutaient parce que les entreprises françaises étaient concurrencées par celles de l’étranger.

C’est la droite et la gauche, au gouvernement français, qui ont crédibilisé l’idée que derrière chaque musulman se cachait un djihadiste potentiel, risquant de « se radicaliser » et d’intervenir, en Syrie ou en France. C’est pourtant eux qui, au gouvernement français, ont financé et armé des vraies armées s’affirmant djihadistes sous le prétexte de renverser les dictateurs d’Orient, en réalité pour combattre l’influence russe dans la région et pour faire face à la vague des révolutions arabes par la contre-révolution terroristes, une véritable terreur blanche ! C’est eux qui ont recruté partout des militaires pour intervenir militairement en Syrie et transformer ce pays en un cauchemar permanent, sans du tout libérer le peuple de la dictature, ce qu’il était lui-même en train de faire sans employer le terrorisme des bandes armées que les puissances occidentales ont armé et financé !

Ce sont eux qui ont affirmé que la France devait durcir sa répression intérieure sous prétexte de la menace terroriste. Hollande n’a fait qu’aggraver la politique de Sarkozy sur tous les plans et Macron n’a pas d’autre programme que de pousser encore plus loin la même politique, en tentant de s’appuyer sur les acquis des gouvernants précédents pour casser le droit du travail, les libertés, les services publics et on en passe des droits sociaux. Et, pour cela, il compte bien s’appuyer sur l’hostilité à Le Pen pour crédibiliser sont gouvernement exclusivement au service du grand patronat et des banquiers.

Sous prétexte qu’il faudrait d’abord s’assurer que Le Pen ne soit pas élue, ces gens-là nous disent maintenant qu’il faudrait, pour cela, pour « défendre la démocratie », crédibiliser un gouvernement de combat contre les travailleurs, contre les milieux populaires, de combat guerrier contre les peuples, de combat contre la démocratie et les services publics !

Le gouvernement « socialiste » de Hollande-Valls-Cazeneuve-Le Drian a pris une responsabilité particulière dans la dérive vers l’extrême droite des politiques d’Etat ! C’est lui qui a commencé à placer le pays sous occupation militaire, sous surveillance du contre-espionnage, sous « état d’urgence » avec restriction des droits démocratiques, alors que ces mesures n’ont nullement combattu le terrorisme qu’en même temps ce gouvernement soutenait en Libye, en Syrie, en Irak, au Yémen, etc. Ainsi, le gouvernement se félicitait des victoires militaires d’Al Nosra, filiale d’Al Qaïda, un groupe terroriste soutenu par la France et les USA en Syrie !

Et c’est ce gouvernement qui a lancé la campagne contre les Roms, donnant le plus de publicité politique possible à tous les démantèlements forcés de camps Roms, au discours raciste contre les Roms, qui n’auraient pas vocation à vivre en France selon ces gouvernants « socialistes » !!!

C’est encore ce gouvernement qui a présenté les migrants venus des pays détruits par ces guerres comme un danger pour la population européenne et française, envoyant ses forces de police contre le camp de réfugiés de Calais, le démantelant, jetant les réfugiés dans la détresse. Et puis, ensuite, par un retournement d’une parfaite hypocrisie, c’est encore ce gouvernement qui a contribué à orchestrer la grande déclaration « Bienvenue aux migrants » de Hollande-Merckel-Juncker qui a entraîné une vague brune dans toute l’Europe !! Ces mêmes dirigeants ont ensuite parfaitement démontré que ce n’était nullement une intention réelle d’accueillir les migrants et que la France, l’Allemagne et toute l’Europe leur sont restées fermées ! Il s’agissait donc bel et bien d’une opération démagogique pour détourner la colère sociale vers le nationalisme exacerbé, vers le racisme, vers le fascisme ! Exactement comme la campagne de propagande pour faire croire que le terrorisme provenait des peuples musulmans. Il s’agit d’une manière de faire face aux risques sociaux et politiques liés à la crise du capitalisme dans lequel le système mondial s’enfonce sans cesse davantage, même s’il prétend parfois s’être sorti de la crise de 2007-2008.

Bien sûr, certains se disent que ce n’est pas crédible : ce ne serait pas l’intérêt politicien de la gauche ni de la droite, du PS ni de LR, de favoriser leurs adversaires de l’extrême droite. Pensent-ils que c’est vraiment par conviction « de gauche » que le gouvernement « socialiste » aurait désigné du doigt les musulmans et l’islam, matraqué les migrants, cassé les campements roms, cassé le droit du travail, interdit ou encadré policièrement des manifestations environnementalistes, syndicales et sociales, que c’était l’intérêt politicien du parti socialiste d’attaquer les travailleurs et les milieux populaires, encore plus que la droite sarkozyste qui l’avait précédée ?!! Non, par contre c’était l’intérêt des classes dirigeantes d’agir ainsi et les partis bourgeois ont justement la caractéristique essentielle d’être prêts à se sacrifier dans l’intérêt des classes possédantes. Non, un politicien bourgeois et un parti bourgeois n’agissent pas seulement dans leur intérêt particulier mais dans l’intérêt général de la grande bourgeoisie.

On l’a bien vu avec la crise de 2007. On y a vu un président américain, George Bush, agir complètement dans le sens contraire de son idéologie politique, du libéralisme, en faisant intervenir comme jamais dans l’Histoire, l’Etat et la banque centrale dans l’économie, en rachetant des trusts, des assurances et des banques, en injectant des milliers de milliards de dollars dans l’économie, au point que les membres de son parti n’en croyaient pas leurs yeux ! Cela l’a cassé politiquement, ainsi que son parti républicain, mais cela a permis à la classe possédante de ne pas s’effondrer en 2008 et au système de durer faute de pouvoir sortir de sa crise. On a vu ensuite Obama lancer les USA dans plus de guerres que jamais alors que ses engagements et ceux de son parti allaient complètement en sens inverse, au point que la candidature de Clinton qui a suivi est apparue surtout une candidature en faveur de l’entrée dans la guerre mondiale ! Et on a vu ensuite un président américain, Trump, qui avait donné à sa candidature un sens anti-guerre se lancer dans des provocations guerrières, face à la Syrie, à la Russie, à la Chine, à la Corée du nord, à l’Iran, comme jamais un président américain ! Quitte à devenir le président américain le plus impopulaire au stade des cent jours !

Les hommes politiques sont au service de la grande bourgeoisie, du capital et ce n’est ni Macron ni Le Pen qui nous démontreront le contraire, même s’ils semblent défendre des programmes opposés sur le plan économique, pro ou anti Européen, pro ou anti euro, pro ou anti franc, pro ou anti austérité, etc. Car chacun d’eux peut faire exactement le contraire de ce qu’affirmait son programme, pour peu que la grande bourgeoisie capitaliste l’exige.

Ce n’est pas les programmes des partis bourgeois, ce n’est pas les élections, ce n’est pas les luttes politiciennes qui déterminent les choix essentiels des Etats et encore moins en période de crise historique mondiale, de menace globale pour la domination capitaliste, d’effondrement des investissements productifs privés, de destruction de la dynamique capitaliste, que nous connaissons depuis 2007.

La lutte prétendue entre Macron et Le Pen n’est là que pour prendre les travailleurs et les milieux populaires entre deux feux, pour casser le moral de la classe ouvrière, pour déboussoler aussi la petite bourgeoisie. Mais le succès de Le Pen, ce ne serait pas seulement le fait d’être élue présidente. C’est déjà d’être celle qui est présentée comme l’alternative au choix d’un président des banquiers et des capitalistes ! C’est déjà, sur la base d’une démagogie national-socialiste renouant avec la France vichyste et raciste, de construire un vaste mouvement qui a du poids dans les milieux populaires et même dans la classe ouvrière. C’est déjà un des crimes des politiques de droite et de gauche d’avoir mené à une telle situation !

Oui, les partis de droite et de gauche se sont eux-mêmes tirés une balle dans le pied au cours de ses élections comme dans leurs politiques menées au gouvernement. Il faut bien remarquer que c’est de la droite (de Sarkozy et Dati, ou d’Estrozy, notamment) que sont venues les attaques contre le candidat de droite Fillon, que c’est de la gauche (de Hollande, de Valls et de Le Drian) que sont venues les attaques contre le candidat de gauche Hamon ! Oui, ceux qui ont fait la campagne de l’extrême droite, c’est la gauche et la droite qui nous intiment maintenant l’ordre d’aller voter Macron !

C’est sur le terrain purement électoral que les partis « démocratiques » prétendent s’opposer au fascisme !

C’est sur le terrain purement légaliste que tous les réformistes prétendent attaquer le danger fasciste, que ce soient des réformistes politiques ou syndicaux ! Bien sûr, ces derniers ont parfois affirmé dans la rue le premier mai qu’ils ne comptaient pas sur les élections mais sur la rue pour changer les choses. Mais on ne peut oublier que les mêmes syndicats avaient fait la campagne de Hollande, selon eux chargé de nous sauver du risque Sarkozy, suite au mouvement des retraites et qu’ils avaient constaté en silence que celui-ci aggravait encore l’attaque de son prédécesseur.

C’est parce que la classe ouvrière est politiquement muselée par les appareils syndicaux que la bourgeoisie est à l’offensive, que les gouvernants qui se succèdent ne font qu’attaquer de plus en plus les travailleurs, les milieux populaires, les droits sociaux, les services publics, les libertés et l’immense majorité de la population. Mais, s’ils le font s’est d’abord et avant tout parce que le capitalisme ne se sort pas de sa crise mondiale.

Aucun des partis politiques ne nous avertit là-dessus, aucun ne parle même de l’état du système capitaliste, aucun n’envisage plus de le réformer, aucun ne proteste quand le gouvernement prévoit que les banques mettent la main sur la totalité des sommes dans les comptes et les épargnes privés (loi Sapin II), aucun n’a rien à dire sur ce qu’ilo fera face à la prochaine crise financière et bancaire ! Et pour cause ! Non seulement ils savent qu’alors ils feront le contraire de ce qu’ils ont promis, mais ils savent qu’alors les couteaux seront tirés et ce n’est pas pour « défendre la France » qu’ils agiront mais pour défendre le grand capital. Et pour cela, droite comme gauche ou extrême droite seront prêts au fascisme. Comme ils l’ont été dans la crise des années trente en Allemagne comme en Espagne et en France !

Le danger fasciste n’est pas un danger purement électoral. Ce n’est pas les élections, ce n’est pas l’opinion publique qui en décidera. C’est la classe capitaliste et cela dépendra non d’échéances politiciennes mais de la crise économique. En prévision d’un effondrement, les capitalistes préparent partout des dérives fascistes, pour diviser les prolétaires et pour disposer, si besoin est, de bandes armées violentes, capables de s’en prendre au mouvement ouvrier.

La classe ouvrière, frappée par les échecs des mouvements dirigés par les syndicats et par les contre-réformes imposées par les gouvernants autant que par les « plans sociaux » de suppressions d’emplois et de sacrifices soi-disant acceptés par les syndicats majoritaires, se croit complètement à la merci des gouvernants et des patrons, mais ce n’est que l’impression que ses ennemis veulent lui donner et dont la responsabilité revient essentiellement à ses faux amis politiques et syndicaux. Dans la réalité, c’est la classe capitaliste qui est au bord du gouffre et les événements ne peuvent que le montrer, même si on va d’abord subir de lourdes attaques avant que les prolétaires soient amenés à remettre en cause la domination bourgeoise sur le monde. Malgré tous les pessimisme avec lesquels ont veut écraser le moral des travailleurs, l’avenir appartient au prolétariat et à la révolution sociale !

Messages

  • Macron est élu mais Le Pen a quand même un score non négligeable. Et ce n’est pas l’arrogance sociale de la grande bourgeoisie qui nous sauvera du fascisme ! On peut prédire que Macron sera très vite très impopulaire mais cela ne veut pas dire que cela règlera le problème car Le Pen est apparue comme la principale opposante, sur le terrain social, au candidat des capitalistes ce qui n’a rien de bon pour l’avenir !

  • Pour le moment, Le Pen a surtout servi à faire élire Macron, ce qui est déjà un mal assez important mais ensuite le FN peut devenir un mal bien plus considérable et pas seulement sur le terrain des urnes…

  • Comme en France, la montée des forces d’extrême droite et fascistes, telles que Pegida et l’AfD en Allemagne, est l’expression d’un virage vers la droite de l’ensemble de l’establishment au pouvoir. En Allemagne, cela trouve son expression la plus forte dans une tentative de réécrire l’histoire, et même de minimiser les crimes des nazis et de réhabiliter Hitler.

    Voici une citation récente d’un professeur allemand : « J’ai comparé Hitler à Staline. Staline était un psychopathe, Hitler ne l’était pas. Staline aimait la violence, Hitler ne l’aimait pas. Hitler savait ce qu’il faisait. Il fut un gratte-papier qui ne voulait pas connaître les conséquences sanglantes de ses actes. »

    Déjà en 2014, cette même personne a déclaré au magazine hebdomadaire le plus lu d’Allemagne, Der Spiegel : « Hitler n’était pas un psychopathe, il n’était pas cruel. Il ne voulait pas parler de l’extermination des Juifs à sa table. »

    Ces déclarations monstrueuses concernant le chef des nazis et plus grand meurtrier de masse dans l’histoire ne proviennent pas d’un homme qui est principalement actif dans les mouvances extrémistes de droite ou néo-fascistes. L’auteur dans les deux cas est Jörg Baberowski, qui occupe la chaire d’histoire de l’Europe de l’Est à l’Université Humboldt de Berlin. Il a des liens étroits avec l’armée allemande et le gouvernement allemand, et il est même invité à parler et promu en tant que grand intellectuel par les dirigeants du Parti de gauche (Die Linke, le parti allemand avec lequel Jean-Luc Mélenchon s’associe).

  • L’appareil répressif déjà passé au fascisme ?

    Il paraît que Macron nous aurait sauvés du fascisme. Mais son appareil d’Etat, comme celui de Hollande-Valls, est déjà passé à l’extrême-droite en majorité ! Depuis l’encadrement militaire, quelques généraux en tête, qui se passerait de la démocratie pour gouverner directement par la force armée, et jusqu’aux policiers qui sacrifieraient volontiers le contrôle judiciaire sur leurs actes. Et les élections présidentielles l’ont encore mesuré avec plus de 50% des forces armées et policières en faveur de Le Pen, en accroissement notable et largement supérieur à l’opinion dans toutes les autres couches de la population !!! Et on ne compte pas les pointes à 52% dans la gendarmerie et 65% dans la garde mobile ! Les forces de répression sont prêtes pour le fascisme. Il ne manque plus que la décision de la classe possédante !

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