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Tous précaires et paupérisés ou tous libérés de l’exploitation capitaliste, pas d’autre choix pour la classe ouvrière

mardi 9 janvier 2018, par Robert Paris

Edito

Se résigner à devenir des salariés précaires ou supprimer l’esclavage salarié, telle est l’alternative !

Etes-vous uber ou auto-entrepreneur, intérimaire ou en contrat de projet, entre deux inscriptions à Pôle Emploi, vous êtes dans l’ère du tout précaire du capitalisme actuel !

On connaît, partout dans le monde, des programmes anti-sociaux, imposés par tous les gouvernements pour déréglementer les codes du travail. On connaît les chiffres du chômage et de la précarité triomphants, on connaît les sommets de l’intérim (10.000 intérimaires pour le seul trust automobile Renault en France !), on connaît l’apparition de nouveaux modes d’exploitation sans contrat fixe, sans salaires fixe, sans garantie quelconque d’emploi, de site de travail, d’horaires, de charge de travail, de retraite, de santé et on en passe des précarités de toutes les sortes.

Patronat et gouvernement clament : vive la précarité, du coup, vive la flexibilité, vive l’auto-exploitation sans contrat, vive, le CDD, vive l’intérim, vive la surexploitation d’un côté et le chômage permanent de l’autre !

Tous précaires, du moins tous les salariés, tel est le programme social de la classe capitaliste ! Ce n’est pas un pays, ce n’est pas une région, c’est le monde entier qui la programme, la précarité des travailleurs et des peuples ! Car la classe capitaliste ne veut surtout pas que son règne le devienne, précaire, et elle est prête à tous les sacrifices, pour les prolétaires et même pour la petite bourgeoisie, pour tenter de rendre « durable » sa domination et son exploitation… Or il y a danger, depuis 2007, le système craint les « dangers systémiques », c’est-à-dire des crises d’un genre tout à fait nouveau. Le capital a atteint de tels niveaux qu’une part croissante de celui-ci ne peut pas être investi dans le secteur productif et que l’autre part devient un véritable poison pour le fonctionnement du système, un prédateur qui détruit toutes les économies, qui ponctionne toutes les banques centrales, obligées de racheter ces titres pourris.

Il est remarquable que la situation des classes laborieuses se dégrade considérablement et partout dans le monde, en termes de précarité comme de niveau de vie, de niveau de soins médicaux, de niveau de sécurité, de niveau culturel y compris. Toutes les mesures gouvernementales de tous les pays vont dans le même sens. Quelles que soient les luttes syndicales qui ont été menées, elles ne mènent… qu’à des échecs remarquables alors que, dans les pays riches au moins, ce même type de lutte menait généralement à des petits reculs patronaux et gouvernementaux savamment négociés…

On peut s’en prendre aux directions bureaucratiques des centrales syndicales mais il faut reconnaître aussi qu’elles étaient tout aussi réformistes, bureaucratiques et diviseuses des luttes prolétariennes auparavant, quand elles obtenaient quand même quelques résultats. Ce qui a changé, ce n’est pas le radicalisme ni l’efficacité des syndicats, c’est l’état du système lui-même.

Si les classes possédantes refusent désormais toute amélioration de la situation de la classe travailleuse, ce n’est pas simplement pour profiter davantage de l’exploitation du travail, ce n’est pas seulement pour accumuler du capital, ce n’est pas seulement parce que c’est leur nature de vivre du travail des autres : c’est parce qu’elles ne cherchent plus, même dans les métropoles impérialistes, à négocier le calme social mais à enfoncer politiquement et socialement le prolétariat, visant ainsi à démoraliser les travailleurs en vue des échéances à venir dans lesquelles ils estiment que la situation économique (effondrement du système suite à un nouveau krach) ne pourra qu’entraîner des risques révolutionnaires et des événements historiquement importants pour l’humanité : la sortie du capitalisme pour tout dire en peu de mots.

Dans les périodes où le capitalisme avait un fonctionnement social, la lutte syndicale faisait partie du système. C’est Marx qui l’exposait en disant que les grèves ouvrières menaient à l’établissement d’un salaire moyen, tout comme la concurrence bourgeoise menait à une valeur d’échange moyenne des marchandises et comme la concurrence capitaliste menait à l’établissement d’un taux de profit moyen des capitaux investis. La lutte syndicale n’allait pas à l’encontre du fonctionnement du capitalisme, de la valeur de la force de travail, mais visait simplement à l’établir.

Ce qui caractérise la situation actuelle, ce n’est pas la chute de la valeur de la force de travail suite à l’établissement d’un chômage de masse permanent, c’est plutôt l’arrêt du fonctionnement classique du capitalisme : la chute irrémédiable des investissements productifs, où le grand capital se jette sur toute la main d’œuvre disponible pour produire des marchandises et, en exploitant les producteurs, pour produire de la plus-value. Aujourd’hui, une part sans cesse croissante du capital mondial se détourne de cette production de plus-value alors qu’il n’existe aucun autre moyen réel d’accroître l’échelle des richesses capitalistes, les cadeaux sur fonds publics ne créant pas plus de richesses réelles que la spéculation ou les tripotages financiers de toutes sortes auxquels se livre une part croissante du grand capital. Le nouveau rôle productif de la Chine ou de quelques pays capitalistes émergents » ne suffisent pas à expliquer la chute de la production des pays riches et le chômage permanent de masse de ces pays et encore moins à expliquer la chute de la valeur-travail. La baisse massive des salaires et des conditions de travail ne suffisent pas à motiver le grand capital à s’investir dans la production et dans l’exploitation du travail productif. C’est cela qu’il faut expliquer et la seule interprétation nous semble que le mécanisme qui a caractérisé pendant tant d’années le fonctionnement capitaliste est bel et bien cassé.

Bien sûr, tous les travailleurs, qui raisonnent à partir de la dégradation de leur propre situation et non de la rupture au sein du système qui a été dévoilée en 2007-2008, même si elle date de bien avant, ne voient que leur misère et la richesse des capitalistes, qui continue de croître, boostée par les profits incroyables de la sphère financière. Ils en oublient que les banques, les bourses, les assurances, les spéculations, les échanges ne produisent pas de plus-value et ne font que distribuer la richesse produite dans une autre sphère économique : celle de la production. Ils se disent, à la suite des discours réformistes, notamment ceux des syndicats, que les patrons les volent plus que jamais, qu’ils sont donc plus forts que jamais, plus soutenus que jamais par les gouvernants capitalistes. Mais cela est faux : les capitalistes ont toujours été aussi rapaces, ils ont toujours été aussi soutenus par les gouvernants, ils ont toujours été aussi servis par les trahisons réformistes, dont celles des appareils syndicaux.

Tout cela n’a rien de neuf et, par contre, la situation du monde est entièrement nouvelle. C’est la première des choses qu’il faut comprendre pour commencer à réfléchir sur l’état du monde capitaliste. Les capitalistes eux-mêmes, surtout quand ils discutent entre eux, par exemple dans la presse bourgeoise, voient en noir l’avenir du capitalisme. Dès qu’il s’agit de s’adresser au grand public, ils tiennent un tout autre discours, parlent de relance, de reprise, de politique de développement national et international. Mais il suffit de suivre l’actualité, politique comme économique ou sociale, pour remarquer qu’on entend et qu’on sent de plus en plus de fissures du navire, de plus en plus d’événements tout à fait inenvisageables dans le passé. Ainsi, on avait déjà remarqué combien était nouvelle la décision en 2008, suite à la chute de la banque Lehman Brothers, de sauver toutes les entreprises capitalistes dites « systémiques », c’est-à-dire ayant une taille telle que leur chute pouvait, par effet boule de neige, entraîner la chute généralisée de l’économie capitaliste. Jamais, dans aucune crise, cet argument systémique n’avait été envisagé pour sauver un trust ou une banque !

Si le monde capitaliste, même dans ses plus riches métropoles, est amené à paupériser massivement ses prolétaires, ce n’est pas parce qu’il s’est appauvri, parce que ses capitalistes sont devenus plus rapaces, ni par méchanceté pure, c’est, du fait de la chute de son fonctionnement normal, par choix politique, par choix social, pour détruire la confiance des travailleurs dans leurs propres forces, dans leurs perspectives propres. C’est pour détruire, par avance, les travailleurs dans leurs propres capacités à transformer la société.

Et, dans un premier temps, cela a nécessairement une certaine efficacité. Le syndicalisme réformiste, incapable d’aller au-delà de luttes au sein du système, contribue, volontairement ou pas, dans cette situation à piéger les travailleurs, à leur laisser penser que ce sont leurs faiblesses qui les font perdre les luttes sociales.

Le réformisme est incapable d’imaginer que le capitalisme soit en bout de course, que ce soit la classe capitaliste qui n’ait plus d’avenir et ainsi il contribue à faire croire à la classe prolétarienne que c’est son avenir à elle qui est bouché !

En réalité, plus le capitalisme s’avère incapable d’offrir un emploi aux travailleurs, plus il s’avère seulement capable d’esclavagiser les salariés, plus il se montre rapace, plus il ramène les travailleurs, y compris dans les pays riches, à l’opposition classe contre classe. Même si, dans un premier temps, cette situation aggravée, où chaque salarié est individualisé, où il ne voit pas d’issue dans la collectivité, dans l’action collective, cette situation signifie que l’opposition de classe, entre grand capital et travail, s’est considérablement accrue.

Cela n’améliore certes pas les succès des luttes syndicales réformistes mais cela élève le niveau de l’explosion sociale qui ne peut manquer d’être déclenchée dès que le capitalisme, maintenu artificiellement en vie par des aides publiques, s’effondrera sous les prochains krachs financiers.

Les premières conséquences de la chute capitaliste de 2007-2008 n’ont pas été très loin. Les « printemps » arabes ou africains ont été limités dans leurs conséquences prolétariennes, les syndicats égyptien comme tunisien parvenant encore à canaliser la classe ouvrière révolutionnaire. Mais il faut dire que ce qui a surtout limité l’ampleur des réactions ouvrières, c’est le fait que les gouvernants capitalistes, à la suite de Bush et des dirigeants chinois, européens et japonais, aient décidé de « sauver » banques et trusts à coups de milliers de milliards de fonds publics, quitte à aggraver l’échelle réelle de la crise, c’est-à-dire à augmenter le surplus de capital, et donc la part de celui-ci incapable, par son propre fonctionnement, d’être attiré par l’investissement productif, producteur de plus-value extraite du travail humain.

Pour casser les perspectives prolétariennes, il ne suffira pas que le grand capital détruise les illusions des travailleurs dans les luttes syndicales, il ne suffira pas qu’il précarise les salariés, il ne suffira pas qu’il individualise les conditions de travail ou les contrats. Tout cela n’empêchera pas la révolution sociale de se produire. Le grand capital sait qu’il doit avoir peur de la classe laborieuse. C’est ce qui explique qu’il fasse basculer le monde dans toutes sortes de violences, terroristes, guerrières, ethniques, racistes, fascistes, sexistes et autres… C’est ce qui explique que, même dans les métropoles des pays riches, la classe capitaliste détruise elle-même la démocratie bourgeoise qu’elle avait mise en place, qu’elle détruise elle-même le consensus social, le calme social, le bien-être social, l’entente sociale.

Les années qui viennent verront triompher soit l’esclavagisme, faisant revenir en arrière l’humanité, soit le socialisme avec, comme première étape, la prise du pouvoir par les comités de travailleurs, alliés aux femmes, aux jeunes et aux habitants des quartiers populaires.

Il n’y a pas de possibilité intermédiaire. On ne reviendra pas au capitalisme calme des périodes passées. On ne pourra pas « sauver » les « acquis sociaux » du passé : ni les services publics, ni les codes du travail, ni les droits sociaux, ni l’ « Etat de droit », ni la démocratie bourgeoise, ni le consensus social, ni le réformisme, syndical ou politique. Tout cela est définitivement dépassé par l’Histoire. Celle-ci mène à une seule alternative : socialisme ou barbarie. Pour les travailleurs, cela signifie fin du salariat ou retour de l’esclavage !

Et la réponse prolétarienne à ce programme de destruction, à cette attaque anti-sociale violente et mondiale est : vive la suppression de l’esclavage salarié ! Vive la fin de toute forme d’exploitation de l’homme ! Vive la fin du capital-roi ! Assez de la propriété privée des moyens de production ! Vive la suppression des classes sociales et de l’Etat au service de la classe exploiteuse ! Ce n’est pas irréaliste de se donner une telle perspective. C’est de refuser de nous la donner aujourd’hui qui ne mène qu’à des impasses sanglantes !!!

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