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En Bolivie, le face à face entre prolétaires en armes et contre-révolution militaire, policière et capitaliste

jeudi 14 novembre 2019, par Robert Paris

En Bolivie, le face à face entre prolétaires en armes et contre-révolution militaire, policière et capitaliste

La démission d’Evo Morales face au coup d’Etat de l’armée et de la police a laissé les deux vraies forces l’une en face de l’autre, c’est-à-dire le prolétariat et les forces armées de la bourgeoisie.

Le 11 novembre, sous prétexte de pillages dans la capitale et, en fait, face à des révoltés politiques qui, pro-Morales ou pas, s’opposaient au coup d’Etat, l’armée a rejoint la police pour imposer le calme dans le rues mais les fermes intentions des forces de répression, et leurs méthodes ultraviolentes n’ont pas suffi ni à calmer les émeutiers ni à écraser l’émeute, ni en une heure, ni en un jour, la révolte étant trop massive et trop profonde pour cela. La révolte contre la nouvelle dictature militaire n’est pas l’action d’infimes minorités mais une action de masse. Qui plus est de masses prolétariennes en armes ! El Alto, ville prolétarienne et minière a des fameuses traditions de combat et ne craint pas la lutte prolétarienne armée.

Si l’armée tire dans les rues, ne croyez pas que c’est pour tuer, non c’est pour… faire le moins de morts officiels possibles mais le plus de cadavres !!! « Le commandement militaire a décidé que des opérations conjointes seront menées avec la police pour éviter le sang et le deuil dans la famille bolivienne », a déclaré le commandant en chef de l’armée, William Kaliman, dans une déclaration télévisée. Il a appelé ses troupes à utiliser « la force de manière proportionnée contre les actions de groupes de vandales qui provoquent la terreur dans la population ». L’armée a décrété : « nous ne tirons pas sur le peuple mais sur les ennemis du peuple » et il ne reste plus que de savoir qui est l’ennemi des peuple et qui sont ses amis !!! Ce débat ne se tranchera pas par la parole mais par les armes ! L’armée tire dans les rues, se prétendant seulement sur la défensive et étant attaquée par les révoltés, et déclare tirer sur des bandits et des pillards « en rappelant à la population que les forces armées n’ouvriront jamais le feu contre elle ». Chacun appréciera la nuance : si on lui tire dessus, c’est qu’il est considéré comme un bandit. La plupart des gens ne sortent donc plus de chez eux. Allez savoir ce que cela signifie sur leur position face au coup d’Etat ?!!! Cela montre en tout cas que l’armée avait peur que son intervention violente ne pousse le peuple bolivien dans le camp des révoltés.

Les principaux points de la révolte armée étaient à El Alto, à La Paz (la capitale) et à Cocabamba, là où le militantisme radical qui est le plus hostile au coup d’Etat s’est le plus développé, organisé et armé, prêt à en découdre dans le sang s’il le faut mais nullement prêt à reculer même face à l’armée bolivienne. Et celle-ci ne les minimise pas, ne les néglige pas.

Personne ne pouvait négliger la menace d’El Alto d’envahir La Paz, ce type de menace du quartier le plus prolétarien de déferler sur la capitale a toujours fait trembler la classe possédante…

Dès le premier jour de cette révolte contre le coup d’Etat, de très nombreux commissariats de police ont flambé du fait des actions des manifestants. C’est ce qui a justifié l’appel officiel du chef de la police au chef de l’armée et la tentative de faire passer le coup d’Etat en simple opération de maintien de l’ordre contre des « pillards » !

Durant les semaines d’affrontement entre Morales et ses opposants, un grand nombre de policiers avaient démissionné ou disparu, ce qui a augmenté le chaos, les partisans des deux camps se battant physiquement et s’armant…

Quatre forces sociales se sont unies pour combattre la mise en place de la dictature militaire : les prolétaires, les démunis des villes, les paysans et les Amérindiens ! Il en résulte que l’insurrection n’est nullement une protestation finale de défenseurs de Morales mais des combattants d’une lutte que ce dernier a choisi de ne pas mener et a fui… Si la fuite de Morales a affaibli moralement ses partisans, comme ses méthodes de gouvernement les avait discrédités dans les milieux populaires, elle a aussi attisé leur colère et les a amenés à rejoindre les plus pauvres et les ouvriers radicaux, constituant un camp révolutionnaire pas ridicule du tout.

Non seulement Morales a fui le combat mais il a appelé son camp à la cessation des violences, en somme à se laisser faire et à compter sur l’Organisation des Etats américains pour refuser la dictature militaire en Bolivie !!

L’armée s’est retranché derrière son « devoir constitutionnel », suite à son départ et au vide du pouvoir, pour justifier la mise en place d’une nouvelle dictature sanglante soutenue par les USA que la population civile ne souhaite absolument pas, y compris la plupart des opposants à Morales qui étaient descendus dans les rues…

Les forces de répression sont le seul reste du pouvoir d’Etat, tous ses responsables ayant démissionné, le président, le vice-président, la présidente et le vice-président du Sénat ainsi que le président de la Chambre des députés. C’est le vide institutionnel. Tous les dirigeants politiques de la bourgeoisie reconnaissent se sentir incapables de gouverner un peuple en révolution !

Bien sûr, le chef de l’armée affirme que ce vide n’est que provisoire et que l’armée ne supprime pas le gouvernement civil. Il cherche à rassurer dans un pays où la dictature militaire est de sinistre mémoire !

Les forces de soutien au coup d’Etat essaient de faire croire que c’est Evo Morales qui a manipulé la révolte armée mais c’est complètement faux puisqu’il a appelé au contraire publiquement ses partisans à abandonner le combat !

Loin de lancer des appels révolutionnaires, Morales a essayé d’éteindre le feu pour « ne pas tomber dans la violence de groupes qui cherchent à détruire l’État de droit ». « Nous ne pouvons pas nous battre entre frères boliviens. J’appelle urgemment à résoudre les divergences par le dialogue et la consultation. »

Le pacifiste Morales ne pouvait empêcher l’occupation des rues par l’armée et la police qui tirent dans la foule. Il pouvait seulement achever de désarmer politiquement ses militants et une partie du camp des plus démunis, montrant une fois de plus qu’il n’a fait que tromper les pauvres et les Indiens opprimés !

Impossible de se méprendre : la révolte, ce n’est pas Morales contre le coup d’Etat, c’est bel et bien une guerre civile entre prolétariat des villes et des campagnes et bourgeoisie !

Les prolétaires d’El Alto et La Paz ont tenu des barricades défendues par de la dynamite fournie par les ouvriers mineurs ! Comme ils ne craignaient pas de sauter avec, les militaires et policiers n’étaient pas trop désireux de se confronter directement à eux !

L’armée bolivienne a affirmé ne pas défendre des intérêts de personnes mais « la constitution bolivienne » mais cela ne trompe personne : la nouvelle dictature est soutenue par les éléments les plus racistes et fascistes des classes possédantes ainsi que par le président Trump !

Le général Kaliman, devenu le nouveau pouvoir, prétend ne pas l’être et ne servir qu’à ramener l’ordre mais cela ne trompe personne.

Des combats acharnés ont eu lieu alors que des milliers de paysans et de travailleurs d’El Alto et d’autres régions environnantes de La Paz se sont mobilisés dans la capitale pour protester contre le coup d’État en scandant « Maintenant, l’heure de la guerre civile ». Plusieurs bâtiments de la police ont été occupés puis incendiés à El Alto.

Les forces armées ont réagi en activant « Plan Sebastián Pagador » pour « rétablir la paix et la stabilité », ce que la police applique en tirant des manifestants à coups de balles réelles et de grenades.

Même une fois que nombre de ses partisans étaient engagés dans la lutte armée contre le coup d’Etat, Morales s’est gardé de prendre leur parti dans le conflit. Il s’est contenté, avec son parti le MAS, d’appeler l’Organisation des États américains (OEA), qui avait déjà demandé un deuxième tour avant les résultats finaux, à effectuer un « audit contraignant » sur les élections ! Une dérobade ridicule ! L’OEA a annoncé que Morales avait triché et exigé une nouvelle élection et Morales le a suivis, s’inclinant devant cette décision. Mais ce n’est pas l’OEA qui va empêcher l’armée d’instaurer une dictature militaire avant toute élection et même sans élection, et d’écraser violemment le peuple travailleur. N’en déplaise à Morales, pour cela il ne faut certainement pas compter sur l’OEA !

Les fausses extrêmes gauches du monde qui semaient des illusions sur Morales en sont pour leurs mensonges ! Les ouvriers, les paysans, les femmes, les jeunes qui ont cru en Morales et dans le MAS ont appris rapidement qui étaient leurs faux amis et quelles étaient leurs vraies forces.

C’est l’armée bourgeoise bolivienne, que Morales n’a jamais dissoute bien entendu, et qui s’est ainsi montrée fidèle à ses traditions fascistes !
C’est une véritable guerre civile qui a eu lieu en Bolivie, les troupes tirant à balles réelles et avec des grenades contre des manifestants qui bloquaient des rues et des autoroutes. Les paysans de Cochabamba ont subi les tirs d’hélicoptères tirant dans la foule !

Désormais, c’est l’ensemble du commandement militaire qui détient le pouvoir absolu en Bolivie et les exactions et vengeances contre leurs opposants se sont multipliées…

Messages

  • La résistance populaire monte contre le coup d’État bolivien...

    Des dizaines de milliers de travailleurs ont défilé jeudi de la ville d’El Alto, ville à prédominance ouvrière et indigène, à la capitale, La Paz, sur une distance de 24 km, réclamant le renversement du régime qui a pris le pouvoir par un coup d’Etat dans ce pays, le plus pauvre d’Amérique latine. Les manifestants ont continué à faire face à la répression militaire jusque dans la nuit.

    La Fédération des Conseils de quartier (FEJUVE) de la ville, qui a largement dirigé les manifestations anti-coup d’État.

    Les dirigeants du MAS proposent un projet de loi ordonnant à l’armée de retourner dans ses casernes - une tentative de nourrir l’illusion que l’armée obéira aux forces qu’elle vient de renverser.

    Le régime du coup d’État a déployé des bombardiers pour survoler des rassemblements de masse, des chars et des 4x4 militaires pour patrouiller dans les centres-villes, ainsi que des policiers anti-émeute et des hélicoptères qui ont tiré à balles réelles et avec des gaz lacrymogènes lors de manifestations. Les caravanes de l’armée et de la police ont terrorisé les quartiers populaires. Les médias locaux ont rapporté sur les médias sociaux que beaucoup d’autres ont été tués dans les villes autour de La Paz et que plusieurs stations de radio et de télévision nationales et locales ont été coupées.

    Le parquet a reconnu que trois manifestants ont été tués depuis lundi. Au total, dix personnes sont mortes et au moins 400 ont été blessées depuis l’élection présidentielle du 20 octobre qui laissait paraître que Morales l’emportait avec l’avance nécessaire pour éviter un second tour.

    Des escadrons d’extrême droite ont attaqué des manifestants indigènes et des passants dans plusieurs villes. Il faut les désarmer !

    Les dirigeants de l’armée n’ont pas l’intention de remettre en place la fausse démocratie du passé : ils veulent le pouvoir !

    Ce qu’il faut, ce n’est pas le retour de l’armée dans les casernes mais la dissolution du corps des généraux, la formation de comités de petits soldats avec droits démocratiques et politiques, et l’armement du peuple !!!

  • Le prolétariat bolivien prend les armes, se barricade, relève le défi de la contre-révolution et cela dans un continent enflammé : voilà qui ouvre un nouvel avenir !!!

  • Les manifestations se poursuivent dans tout le pays alors que le MAS se soumet au coup d’État...

    La Confédération syndicale COB, qui avait soutenu le gouvernement du MAS jusqu’au 10 novembre, date à laquelle elle avait exigé la démission de Morales, a renoncé à la menace de grève générale contre le gouvernement Áñez et a rencontré ses représentants. Le 15 novembre, elle a publié une déclaration dans laquelle elle disait : « Nous appelons à la pacification du pays et à un dialogue sincère avec tous les secteurs afin de trouver immédiatement une paix sociale véritable et honnête entre tous les Boliviens. »

    Alors que l’armée continuait à abattre des manifestants, protégée par un décret du 14 novembre accordant une impunité totale aux soldats, le chef de la COB, Carlos Huarachi, a été encore plus clair lundi se disant « très inquiet » du décret et demandant à Áñez « d’entamer un dialogue avec les secteurs en conflit ». Il a ajouté : « Je demande à ceux au pouvoir et à l’opposition de se serrer la main. »

    Le bureau du médiateur bolivien a annoncé mercredi soir que huit personnes avaient été tuées dans une opération de la police militaire visant à démanteler un siège par des manifestants anti-coup d’État autour de la centrale de gaz d’État de Senkata à El Alto. Plus de 30 autres personnes ont été blessées, dont beaucoup par balle. Cependant, après que la police a escorté 40 citernes à essence hors de l’installation, les manifestants l’ont courageusement bloquée à nouveau.

    Les dernières tueries ont porté le nombre total de victimes du coup d’État à au moins 32. Le bureau du médiateur a rapporté le 16 novembre que plus de 500 manifestants avaient été arrêtés. Parmi eux, « un nombre important présentait des signes notoires de traitement cruel », à savoir des actes de torture, depuis le 10 novembre.

    Le rapport du médiateur met également en évidence un autre massacre qui s’est produit le 15 novembre dans la banlieue de Cochabamba alors que des milliers de travailleurs marchaient pacifiquement vers La Paz : « Ce qui s’est passé hier à Huayllani n’était pas un affrontement, mais une répression policière et militaire qui a fait que sept personnes sont mortes, une personne est sur le point de perdre la vie, cinq personnes doivent subir des chirurgies délicates et plus de cent personnes sont blessés, la plupart d’entre elles blessées par balle. » Deux autres personnes sont décédées depuis.

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