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Fukushima, le nucléaire m’a tué

18 juin 2016, 15:16

La compagnie Tepco a sciemment menti sur la gravité de l’accident de Fukushima les premiers jours, c’est désormais officiel. Il faudra plus de 40 ans pour démanteler la centrale ravagée de Fukushima et peut-être autant voire davantage pour connaître la vérité sur ce désastre, mais un nouveau rapport rendu public cette semaine apporte cette révélation sur le drame qui a traumatisé une nation et jeté hors de chez elles 160 000 personnes.

Le patron de Tokyo Electric Power (Tepco) à l’époque, Masataka Shimizu, a demandé à ses équipes de « ne pas employer » dans les premiers jours l’effrayant terme de « fusion des cœurs de réacteur », indique le document de 70 pages en japonais publié jeudi soir et commenté par les trois avocats qui l’ont rédigé. Des employés de Tepco entendus par ces rapporteurs qui ont interrogé 70 protagonistes ont expliqué que Masataka Shimizu avait notamment transmis cette instruction à son bras droit par le biais d’une note apportée par un responsable de la communication avant une conférence de presse le 14 mars 2011. Le directeur adjoint en question, Sakae Muto, a reconnu les faits qui sont aussi visibles sur des enregistrements vidéo.

« Nous avons interrogé M. Shimizu en personne, mais il n’a pas tout gardé en mémoire et c’est compliqué d’avoir sa version », a précisé devant les journalistes le président du comité rapporteur, Yasuhisa Tanaka. « Toutefois, M. Muto a confirmé avoir reçu ce mémo. »

Cette instruction a conduit à minimiser ce qu’il se passait dans les entrailles de la centrale en furie, saccagée par le tsunami du 11 mars et où se sont succédé des explosions. Le tout a ralenti ou mené sur la mauvaise voie les opérations d’évacuation des populations alentour, les exposant à des dangers plus grands qu’elles ne l’imaginaient et que ne le pensaient les élus locaux en manque total d’information, soulignent les experts.

La plupart des spécialistes se doutaient que la fusion des cœurs de trois réacteurs (sur six) était en cours dès le début et cela aurait dû être annoncé comme tel. Mais tant Tepco que l’autorité de sûreté nucléaire de l’époque et le gouvernement ont évité ces mots, ne parlant jusqu’au mois de mai 2011 que de « combustible endommagé ». Les nouveaux dirigeants de la compagnie ont avoué en mars dernier qu’elle aurait pu diagnostiquer plus tôt la fusion, mais sans expliquer les dessous de ce couac. D’où l’enquête demandée aux avocats, qui ne se sont donc pas saisis seuls du dossier.

Depuis le début, la cacophonie dans la communication a été à maintes reprises soulignée et le déni d’informations soupçonné. Si une preuve nouvelle se dégage ici, elle reste incomplète et laisse le lecteur du rapport sur sa faim, car in fine le document ne dit pas qui est responsable du mensonge.

Le patron de Tepco a, certes, en personne exigé de ses troupes de travestir la vérité, mais il a, selon les témoignages et les conclusions du rapport, cité « le bureau du Premier ministre » comme étant à l’origine de ces instructions, exonérant ainsi en partie Masataka Shimizu (donc la direction de Tepco). « Nous n’avons pas pu établir qui précisément avait donné cet ordre », a reconnu l’avocat Tanaka. La responsabilité est ainsi de façon floue rejetée sur le chef du gouvernement au moment du drame, Naoto Kan, et son entourage. Les intéressés se sont illico rebiffés.

« Je n’ai jamais donné de telles instructions. À l’époque s’étaient regroupés dans les locaux du Premier ministre des politiques, des bureaucrates et même des personnes de Tepco. Qui parmi ces gens a fait cette injonction, si on ne le dit pas clairement, c’est trompeur », s’est offusqué vendredi Naoto Kan.

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