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Félins ou Disneynature

lundi 12 mars 2012, par Robert Paris

Les "gentils" lions ou guépards face aux "méchants" crocodiles ou hyènes.

Le film « Félins » de Disney : une tentative étonnante pour plaquer une morale bourgeoise et chrétienne sur les animaux de la savane africaine

La disneynature, ce n’est nullement la nature, mais c’est la morale de type religieux et confite de conformisme social de Disney ! Sous prétexte de s’adresser à de jeunes enfants, on a droit à de multiples poncifs sur l’enfance, les relations avec les parents, l’amour filial, la lutte pour la vie, les relations entre les sexes...

Voilà une présentation : « Félins, le royaume du courage raconte l’histoire émouvante et captivante de deux familles de lions et de guépards dont les destins s’entrecroisent dans un même but : survivre ! » Le réalisateur Keith Scholey déclare : « Un grand film suppose de grands rôles, et les fauves africains sont de véritables héros qui traversent des épreuves d’une extraordinaire intensité dramatique. Ce sont des stars de cinéma en puissance ! Dans ce film, nous avons pu montrer la vraie vie d’un « roi lion » avec autant d’émotion, d’humour et de rebondissements que dans n’importe quel film hollywoodien. »

Dans ses notes de production, Disney écrit : « Le courage quotidien dont font preuve ces mères de famille inspirera naturellement chacun d’entre nous dans nos combats. »

Sur de très belles images de reportage animalier prises dans un parc du Kenya, Disney a plaqué un texte étonnant de bêtise, de préjugés, d’anthropocentrisme ridicule, de moralisme réactionnaire plaqué sur la vie animale.

Exemples de bêtises du texte off : "Sita [la mère guépard] devient ainsi une des mères les plus méritantes de la plaine" ou alors "le lion Machin règne désormais sur les deux rives du fleuve" alors qu’il a eu une rare occasion de la traverser / on lui prête l’intention de ’conquérir’ l’autre rive. Disney affirme : « Au nord du fleuve, le lion Kali et ses quatre fils rêvent d’étendre leur territoire. »

On peut citer dans ce moralisme :

 la femelle lionne Mara, toute jeune, s’était « dévouée à sa mère » en abandonnant le groupe… Keith Scholey explique : « Se retrouver isolé du groupe est la pire chose qui puisse arriver à un lionceau, mais sa mère est aussi sa protectrice et sa meilleure alliée. C’est un terrible dilemme ! » Layla était autrefois la plus expérimentée des chasseuses de la troupe de la rivière, mais une blessure diminue ses capacités physiques. Elle souffre et certains jours, elle peine à suivre le groupe. Mais sa nature vaillante reste la plus forte ! Layla offre une protection totale à sa fille Mara, notamment face à Kali et ses fils. Parallèlement, elle met tout en œuvre pour lui assurer une place au sein du groupe. Puis, elle rejoint le groupe et deviendra une des femelles dévouées aux mâles. Désormais elle se sent « prête pour l’expérience de la maternité ».

 Sita, la mère célibataire guépard qui a accompli son « travail » jusqu’au bout en élevant seule ses enfants et en se dévouant pour eux, peut, nous dit Disney, disparaître ensuite en laissant ses « enfants », devenus grands, se débrouiller seuls.

 les lions qui veulent à tout prix protéger le clan familial et ne vivent que pour cela. En fait, ce clan n’est rien d’autre que l’ensemble des femelles, dont leurs petites, constitué en harem…

Ce que Disney prétend être « la loi de la savane » n’est rien d’autre que les préjugés sociaux humains de quelques réactionnaires :

 le principal but dans la vie des femelles est de concevoir et d’élever des enfants

 pour cela, elles doivent se dévouer et se livrer au mâle et se sacrifier ainsi

 les rivalités entre fauves et la vie de groupe de ces mêmes fauves est illustrée par une histoire où les animaux ont des noms et je dirais un pays, le pays du Nord contre le pays du Sud séparés par un fleuve......

Pour un documentaire qui a donc vocation, nous dit-on, à éduquer et faire connaître, « Les félins » est un échec cuisant et sanglant pour qui s’attend à en apprendre sur la vie des félins et les animaux qui les entoure, ne serait ce que leurs noms ! Le choix du réalisateur est de tourner les images de façon a y conter une histoire insufflée de valeurs et de sentiments humains qui ne correspondent que très peu à la réalité du fonctionnement des relations inter espèces. On entend donc une énormité comme « le bonheur de la maternité » concernant l’arrivée à maturité d’une lionne qui se prépare à enfanter, tandis que les scènes montrant des lions en train se lécher mutuellement sont commentées comme étant de simples signes d’affections.

La vie sentimentale est ce qui intéresse le plus l’histoire, peut-être plus que la question de la survie, un sentiment qui me semble assez inapproprié pour des animaux. Le montage se charge de créer de la tension et d’orienter les regards pour aller dans le sens du texte, ce qui enlève toute particularité à la vie du monde animal et nous ramène à des préoccupations bien en phase avec celles d’un film d’animation du studio Disney. C’est un choix très regrettable qui enlève au film toute prétention de documentaire et donc d’éducation.
Malgré l’importance de l’amour, pas de sexe de présent à l’espace. L’image ne va pas jusqu’à nous cacher les parties génitales des animaux en train de se balader, ce qui aurait été le comble de la bêtise, mais nous découvrons à la fin du film la naissance de lionceaux sans avoir vu aucun moment d’accouplement entre mâle et femelle ou aucune scène de naissance. Un spectacle que les enfants n’auraient pas supportés ? Pourtant on voit bien des animaux en train de chasser et de se nourrir de la carcasse de zèbres que l’on voyait galoper l’instant d’avant. Il y a donc encore là l’illustration de l’éternel question du rapport contradictoire entre le sexe et la violence. L’un est impropre à montrer au tête blonde tandis que l’autre ne pose aucun problème.

Les studios Dysney comprendront-ils un jour que des explications lénifiantes d’images autour d’une histoire qui l’est tout autant n’a aucune valeur pédagogique, même et surtout pour les enfants que l’on prend ici pour des débiles. A la fin, vous saurez que la morale, c’est que les mères défendent leurs petits et les males sont dominants. Affligeant ! Gag. Pendant plus d’une heure et demie, vous assistez à une chasse permanente pour manger (ou une fuite et pour éviter de l’être). Par contre, vous ne saurez jamais comment ces félins mangent leurs proies tuées. Aucune goutte de sang qui risquerait de traumatiser n’apparaît. Les petits américains doivent sûrement s’imaginer que les proies sont servies lyophilisées, en barre, en soupe ou que sais-je encore. A préférer mille fois la remarquable série " L’aventure de la vie", série anglaise diffusée sur Arte ! Il y a au moins une cohérence entre les images TV de guerre choquantes accessibles à tous ou sur Internet, (dont les enfants), et la réalité permanente animale. Manger ou être dévoré de la façon la plus crue.

Les commentaires favorables sont plus vrais que… nature :

- Belle histoire éducative qui nous montre que malgré la ferosite les félins peuvent être aussi très câlin et sont même très famille...

 Le fait que ce sont de réelles scènes entre les animaux et non des montages me prend aux tripes, car nous pouvons vraiment nous reconnaitre parfois dans leur manière d’agir (surtout quand la mère protège ses petits). Les scènes sont belles et les paysages magnifiques, les animaux sont vraiment touchants et les petits des félins sont trop attachants. Moi je veux les mêmes boules de poil chez moi !!

 Belles histoires d’amour. Beaucoup de similitudes entre les mères et les enfants par rapport aux êtres humains. Bravo.

 Il y a beaucoup de solidarité entre ces félins qui n’existe même pas chez l’homme ! Ces félins nous touchent en plein coeur ! Et la personne qui commente est excellente ! C’est comme si nous étions avec eux ! C’est prenant, grandiose ! Mais, hélas, à cause de la bêtise humaine, cette délicieuse faune sauvage va finir par disparaître ! Alors que ce sont eux les héros ! Et quelque part, ils sont plus humains que les humains !!!

 Les animaux sauvages nous donnent une belle leçon : ne prélever que pour vivre puis s’occuper de sa famille. Go !

 Les animaux sont saisissants de naturel et la tendresse des meres est absolument fabuleuse.

 Le film est magnifiquement filmé,les animaux ont un regard qui émeut jusqu’à la gêne, et si cela reste un documentaire, il donne néanmoins une bonne leçon aux hommes, de comportement, soit en bande, soit en solitaire - Tous consacrent tout leur temps à élever, éduquer leurs petits, afin de les laisser vivre leur vie quand ils sont prêts - Aptitude à leur faire reconnaître leurs ennemis, à leur apprendre à chasser pour se nourrir, et non pas pour le plaisir - Et lorsqu’il faut quitter ce monde, ils le font avec une belle discrétion –

Messages

  • Parmi tant d’autres, le film commet une erreur élémentaire : il prétend que les femelles ont mangé les premières la proie et ont dû se dépêcher ! Ce n’est JAMAIS le cas. Mais peu importe lequel tue la proie en premier, c’est toujours le mâle qui commence à manger, suivi par les femelles, et enfin les plus jeunes.

  • Autre contresens suggéré par le film : la mère guépard se retrouverait seule à élever ses petits. Comme si cette mère guépard avait ainsi une charge plus lourde que d’habitude.

    C’est inexact : mâle et femelle ne restent qu’un ou deux jours ensemble au moment de l’accouplement, et la mère a la charge des petits.

  • Le texte en rajoute 10 tonnes dans le pathos ou le mielleux ("Pour ce bébé tigre, Fang est le meil-leur, de, tous, les, pa-pas !") et dans la sur-interprétation fielleuse des réactions des animaux, auxquels le montage fait dire ce qu’il veut (notamment avec des champs contre-champs fallacieux : une lionne mourante s’éloigne du clan, contrechamp sur une autre lionne qui regarde "attristée" dans sa soi-disant direction...). Le cinéma-vérité tout en plan-séquences d’André Bazin prend une grosse gifle avec ce montage mensonger et traitre signé Disney et cette dramatisation à outrance, qui gâche un film qui aurait pu simplement raconter ce qui se passe et être plus instructif quant au comportement de ces putains de gros chats.

    • je te trouve très antipathique su tu n’aime pas les animaux que fait tu sur ce forum. c’est putain de chat comme tu les appelle valent beaucoup mieux que toi, eux au moins ils ont le sens de la vie.

    • Aimer les animaux ne signifie pas aimer leur présentation par Disney, cher lecteur.

      C’est une thèse de propagande que diffuse la firme et pas simplement de jolies images...

      Il s’agit de mettre dans la tête des jeunes qui voient ces films une conception du rôle de la femme, de l’homme, de l’enfant, de l’obéissance à un ordre établi qui n’existe nullement dans la nature mais dans celle des hommes qui dirigent Disney !

  • Et pour les fameux "montages", je pense qu’ils ont tout simplement collé entre elles des images différentes et tournées à trois jours d’intervalle (ou trois semaines, ou trois ans), pour servir leur récit "une journée dans la Savane". On nous prend pour des cons de gnou !

  • Félins n’échappe pas à l’univers rose bonbon de l’oncle Walt. Évidemment, chaque fauve est affublé d’un nom afin de faciliter l’identification avec les spectateurs – surtout les enfants – et si on voit bien lions et guépards courir après leur proie, aucune mise à mort n’est filmée. Le commentaire, aussi grandiloquent que creux, n’ajoute rien : "Tous les jours, au coeur de l’Afrique, se jouent d’incroyables destins…" Ah, bon. Pour résumer, Félins est une superbe carte postale dont il ne faudrait pas lire le texte.

  • Le commentaire (en VF Pascal Elbé, qui ne fait pas certaines liaisons) est très anthropomorphique : on met en scène les animaux en leur donnant des prénoms, des statuts et des rapports humains, en leur prêtant des sentiments, en leur attribuant des attitudes. C’est du Disney tout craché, sensé être fait pour les enfants. On parle du père, des fils, de la fille et de sa mère, de la sœur (femelles ? retirez-moi ce mot !), on ne les voit jamais s’accoupler, on évite les zooms sur la barbaque sanguinolente, on ne dit pas que des interventions vétérinaires ont (certainement) eu lieu ; bref, c’est anti-scientifique, rêveur, infantilisant au possible.

  • La scène de confrontation du lion et du crocodile est magnifiée exagérément. Le lion domine sur terre et le crocodile en eau profonde. Aucun ne sa hasarde hors de la situation où il est sûr de gagner.

  • Comme le relèvent nos lecteurs, les contresens et aprioris idéologiques du film sont légion :

    1°) présenter comme des qualités exceptionnelles de courage, de dévouement, d’intelligence ce qui est le mode de vie classique de l’espèce (ou encore comme une méchanceté exceptionnelle). Par exemple, le dévouement filial de l’une à sa mère, le dévouement de la mère au petits, le fait que la mère s’occupe seule des petits, etc...

    2°) humaniser toutes les interprétations de comportements du genre des lions qui ont un territoire et veulent conquérir l’autre, qui sont les rois de leur région, comme si les autres animaux leur obéissaient

    3°) mettre en avant une morale qui est censée influencer la jeune génération en prenant comme exemple des comportements animaux ou prétendus tels

  • Il faudra que Disney m’explique comment de façon anthropomorphique et sentimentaliste on peux expliquer qu’un lion qui arrive à conquérir un groupe en chassant l’ancien chef de clan (souvent en le tuant) commence par tuer tout les petits qui ne sont pas de lui (c’est à dire tous sans exception) et ce devant leur mères ’dévoués’. La deuxième action du vainqueur sera bien sur d’engrosser les femelles fécondes.

  • Disney doublé sur sa droite : l’intégriste Kevin Swanson a accusé le film de Disney d’« encourager les enfants à l’homosexualité ». Pour lui, BD veut dire bande du diable !

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