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La lutte des travailleuses pour leurs droits

lundi 12 novembre 2012, par Robert Paris

1918-12 Avant-propos à « La lutte des travailleuses pour leurs droits » [Kollontaï]

Cette brochure n’est pas nouvelle, il s’agit d’une réimpression de mes articles publiés avant la guerre. Mais la question de l’organisation posée au Congrès des travailleuses met à l’ordre du jour de notre équipe de travail un moyen d’agitation parmi la masse des travailleuses afin de les attirer dans le parti et donc de préparer de nouvelles forces pour les communistes de Russie.

Dès lors que nous souffrons d’un manque cruel de matériel, cette brochure peut aider nos camarades, qui participent désormais à l’organisation de la Commission pour l’agitation et la propagande parmi les femmes, en leur donnant accès à une information sur l’histoire du mouvement socialiste des femmes travailleuses, ce qui a été fait, et comment, dans le domaine de l’organisation des femmes prolétaires dans d’autres pays. La pauvreté de notre littérature politique sur cette question spécifique m’oblige donc à accepter la réédition à la hâte de mes précédents articles, sans être en mesure de les retravailler. La guerre et la révolution mondiale ont apporté des changements importants de caractère et de forme aux mouvements ouvriers « communistes » ; le type idéal du Parti allemand, adapté exclusivement à l’action parlementaire pacifique, ayant cessé d’être un modèle pour nous. La lutte révolutionnaire a généré de nouveaux problèmes, de nouvelles méthodes de combat et de travail. La guerre et la révolution ont secoué ce qui semblait être les bases les plus stables de la vie. La position de la femme, elle aussi, a changé sous nos yeux.

Jusqu’à la guerre, le processus par lequel les femmes s’installaient dans l’économie populaire s’était effectué à une vitesse nettement inférieure à ce qu’il a été ces quatre dernières années et demi de développement fébrilement rapide et de croissance de la main-d’œuvre féminine dans tous les domaines de la vie industrielle. La famille traditionnelle, elle aussi, semblait ferme et inébranlable, le Parti a dû se battre contre son mode de vie et les traditions à chaque fois qu’elles entravaient la femme travailleuse dans la lutte des classes. Le fait que les travaux ménagers était en voie de disparition et la transition vers l’éducation publique des enfants, ont fait considérer les problèmes pratiques et vivants d’aujourd’hui non comme mûrs, mais comme une tendance « historique », comme un long processus. Les attentes des travailleuses sont les plus accentués encore dans le domaine économique – inégalité de rémunération entre hommes et femmes – et dans le domaine politique - absence de droit de vote et inégalité à la citoyenneté.

Cette inégalité, pour des raisons politiques et économiques, ainsi que l’asservissement de la femme à sa famille et à l’entretien de la maison, a créé une division psychologique entre les hommes et les femmes, et exige la croissance de ces organisations indépendantes de travailleurs des deux sexes qui sont surgies dans tous les pays aux côtés des partis socialistes, sous la forme de sociétés ou de syndicats de travailleurs des deux sexes, de clubs et ainsi de suite. Les partis socialistes les plus actifs se sont engagés dans les activités de propagande parmi les femmes travailleuses (…).

Mais seul un changement radical dans l’existence tout entière de la femme ouvrière, dans ses conditions à sa maison et dans sa vie familiale, autant que d’acquérir le statut d’égalité avec les hommes dans le droit civil ,va faire disparaître une fois pour toutes la barrière qui empêche à ce jour la travailleuse de laisser ses forces circuler librement dans la lutte des classes.

La guerre a donné un élan vers une rupture radicale dans la position sociale des femmes. Il reste à la révolution à accomplir cette tâche. La guerre a conduit la « nourrice » au front ; quatre-vingt dix pour cent des femmes ont été contraintes de subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants. Le problème devient aigu : Que faire avec les enfants de tous ces millions de femmes qui ont dû passer la plus grande partie de leur journée dans la préparation du matériel militaire – grenades, obus et balles ? C’est dans ce sens que la question devait être posée – non pas comme un problème théorique et non pas comme quelque chose de désirable dans un avenir lointain, mais comme une mesure concrète : la sécurité de l’État pour la maternité et l’enfance. Les gouvernements de la classe capitaliste ont été contraints de se soucier du sort des enfants soldats et, à contre-cœur et du bout des lèvres, ils ont créé une situation dans laquelle la garde des enfants est de la responsabilité de l’État.

Le départ des époux et fiancés à la guerre, la peur de la femme sur le sort de son bien-aimé, ont naturellement favorisé une augmentation du nombre d’enfants nés hors mariage. Et une fois de plus l’État bourgeois capitaliste a été contraint, sous la pression de la guerre, de se porter un coup à lui-même, d’abîmer l’un de ses droits les plus sacrés - celui des prérogatives du mariage légal. Il a été contraint pour ses soldats d’instaurer l’égalité devant la loi des mères et des enfants extra-conjugaux. L’Allemagne, la France et l’Angleterre ont été finalement été contraintes à cet acte révolutionnaire.

La guerre n’a pas seulement bouleversé la sainteté et la stabilité du mariage religieux indissoluble, mais a aussi empiété sur un autre des fondements de la famille traditionnelle. La hausse des prix, les files d’attente qui ont épuisé la ménagère, les retards de livraison de fournitures, tout cela a conduit à une situation dans laquelle les femmes se sont hâté d’en finir avec le foyer domestique, préférant utiliser les installations communales.

L’œuvre de démolition de l’esclavage social des femmes comme on disait alors, a été réalisée par le biais de la grande révolution ouvrière. Les travailleuses et les paysannes ont participé à la grande lutte de libération sur un pied d’égalité avec les hommes. Les spécialisations cantonnées au sexe féminin ont diminué, car la structure sociale reposait sur ses deux piliers, la propriété privée et le gouvernement de classe. Le grand incendie de l’insurrection du prolétariat mondial a appelé la femme à laisser ses moules à gâteaux pour entrer dans l’arène des barricades, la lutte pour la liberté. La femme a cessé de se sentir en sécurité dans sa propre maison, aux côtés des berceaux, quand tout autour les balles sifflaient et, oh surprise, elle entendit le cri des travailleurs combattants : – « Aux armes, camarades ! Tous ceux qui chérissent la liberté, qui ont appris à haïr les chaînes de l’esclavage et de la privation des droits civils ! Aux armes, travailleurs, aux armes, les femmes avec nous ! … »

La révolution a enseigné aux travailleuses les grands mouvements de masse, la lutte pour la réalisation du communisme. La révolution en Russie a conquis la pleine égalité politique et l’égalité dans la citoyenneté pour les femmes. La révolution a comblé les exigences des femmes travailleuses de tous les pays : un salaire égal pour un travail égal. La révolution a rendu impossible pour les femmes d’être dorénavant dépendantes de leur famille. La révolution a également supprimé les anciennes formes de mouvements de travailleurs marquées par l’époque du régime parlementaire pacifique. Nous sommes séparés de la période de la Deuxième Internationale , non seulement par quatre années, mais aussi par tout un un changement dans le domaine des relations sociales et économiques.

Et de ce point de vue, la plupart des articles publiés ici sont mis à jour. Mais la question principale n’est pas mise à jour. Elle est encore très vivante. Ce thème fondamental dont j’ai essayé de faire le fil conducteur à travers ces articles, à savoir la nécessité d’un travail spécifique au sein du prolétariat féminin, distinct dans le cadre du parti, et la mise en place dans le Partie de quelque-chose de spécifique – une commission , un bureau ou un groupe – à cette fin.

Si profonds que soient les changements accomplis sous nos yeux dans la vie et la structure économique de notre pays, provoqués par la guerre et la révolution, si loin qu’avance la Russie soviétique sur la route au communisme, l’héritage de l’ordre capitaliste n’a toujours pas été éradiqué, les conditions de vie, la façon de vivre de la famille ouvrière, les traditions qui maintiennent captif l’esprit de la femme, la servitude des tâches ménagères, – tous ces facteurs n’ont toujours pas disparus. Et dans la mesure où tous les facteurs qui ont empêché la femme de la classe ouvrière de prendre une part active dans le mouvement de libération du prolétariat avant la guerre sont toujours en vigueur, dans la mesure où aujourd’hui encore, le parti doit encore prendre en compte tant le retard politique des femmes que le lien de servitude de la femme travailleuse à sa famille, la nécessité d’un travail intensif au sein du prolétariat féminin, avec l’aide d’une structure du parti mis en place spécifiquement à cet effet, est plus urgente que jamais.

La mise en place d’une commission d’agitation et de propagande parmi les femmes qui travaillent dans le centre et dans les provinces accélérera sans aucun doute ce travail. Il fut un temps où l’idée d’un travail spécialisé au sein du parti, que j’avais préconisée dès 1906, rencontrait de l’opposition même parmi mes propres camarades. Mais maintenant, après la décision prise par le Congrès panrusse des travailleuses et approuvée par le Parti, il ne reste plus qu’à la mettre en œuvre. Notre Parti ne compte pas avec un mouvement des femmes, des syndicats indépendants ou des sociétés de femmes travailleuses, mais il n’a jamais nié l’efficacité d’une division du travail au sein du Parti et de la mise en place de secteurs spécialisés pour augmenter le nombre de ses membres ou approfondir son influence parmi les masses.

À l’heure actuelle la Russie soviétique a besoin de beaucoup de nouvelles forces fraîche à la fois dans la lutte contre l’ennemi et pour la construction de la société communiste. Bâtir et éduquer ces forces de plusieurs millions de femmes travailleuses – telles sont les tâches de la Commission du partie pour l’agitation et la propagande parmi les femmes.

J’espère que cette brochure pourra donner quelques conseils à celles de mes camarades qui ont l’intention de se consacrer plus particulièrement au travail au sein du prolétariat féminin. J’espère qu’elles en tireront la certitude qu’en prenant à sa charge ce travail difficile et parfois ingrat, elles servent non pas l’idée d’une « spécialisation » des femmes, une entreprise strictement féminine, mais la tâche de construction d’un Parti des travailleurs du monde entier uni et fort, réalisation sous nos yeux du nouveau monde du communisme international.

A. Kollontaï

1° décembre 1918

Messages

  • Décès d’une femme enceinte en Irlande : des milliers de manifestants 18/1 Manifestation le 17 novembre 2012 devant le Parlement à Dublin après la mort d’une femme enceinte dans un hôpita Plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi en Irlande pour protester contre la mort d’une Indienne dans un hôpital irlandais où des médecins ont refusé d’interrompre sa grossesse alors qu’elle faisait une fausse couche, au motif que l’avortement est interdit par la oi Plus de 10 000 personnes ont défilé à Dublin, selon la police. Les manifestants ont observé une minute de silence avant des interventions de militants qui ont réclamé un changement de la loi Plusieurs centaines de personnes portant des bougies se sont recueillies à Galway, sur la côte ouest de l’Irlande, où vivait la jeune femme, Savita Halappanavar, décédée dans un hôpital de cette ville Les manifestants ont placé leurs bougies devant un poster représentant la jeune Indienne et portant l’inscription "plus jamais ça". "Je suis venue ici pleine de colère, de tristesse et de déception. Ma propre mère est morte dans les mêmes circonstances il y a cinquante ans" confie Margaret Geraghty, protégeant la flamme de sa bougie du vent glacial"Je ne peux pas croire que cela puisse encore arriver de nos jours", a-t-elle ajouté, saluant’attitude du mari de la jeune femme, Praveen, qui a "eu le courage d’en parler" La jeune femme, enceinte de 17 semaines, s’était présentée le 21 octobre à l’hôpital en raison d’importantes douleurs dans le dos. Après avoir été informée qu’elle était en train de faire une fausse couche, elle a demandé à plusieurs reprises que l’on mette un terme à sa grossesse, a rapporté son mari au Irish Times. Mais le médecin a refusé et la jeune femme est morte de septicémi

  • Il aura fallu attendre la fin du XXème siècle – et encore – pour casser cette idée reçue selon laquelle, avoir mal au ventre pendant ses règles, c’est « normal ». Si des douleurs abdominales ne sont pas systématiquement synonyme d’endométriose, cette maladie chronique, pourtant diagnostiquée dès 1860, commence enfin à être reconnue, et prise en considération. L’endométriose toucherait jusqu’à une femme en âge de procréer sur 10. Elle est encore diagnostiquée très tardivement, jusqu’à 7 voire 10 ans après les premiers symptômes et la recherche biomédicale bute encore sur un traitement efficace et définitif.
    Qu’est-ce que l’endométriose ? Quels sont les traitements adaptés à l’endométriose ? Quelles sont les pistes de recherches scientifiques pour mieux comprendre cette pathologie ? L’endométriose est-elle encore un tabou ?
    Emission radio à écouterici.

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