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Fukushima, premier bilan

mercredi 14 novembre 2012, par Robert Paris

Bilan économique

Le coût du traitement de l’accident nucléaire de Fukushima, comprenant la décontamination et les dédommagements des victimes, pourrait atteindre 100 milliards d’euros, le double de la somme prévue, selon la compagnie gérante de la centrale, ruinée par le tsunami du 11 mars 2011.

La catastrophe de Fukushima, la plus grave du secteur depuis celle de Tchernobyl (Ukraine) en 1986, a entraîné d’importantes émissions radioactives dans l’air, les sols et les eaux de la région, et obligé une centaine de milliers d’habitants à quitter leur logement.

La somme de 10.000 milliards de yens (100 milliards d’euros), qui relève pour l’heure de l’hypothèse, ne comprend toutefois pas les charges liées au démantèlement des quatre réacteurs ravagés sur les six que compte le site. Ces opérations dureront quelque 40 ans et nécessiteront le développement de nouvelles technologies ainsi que la formation de milliers de techniciens.

"Nous devons discuter avec le gouvernement des besoins selon plusieurs scénarios", a répondu mercredi le président de Tepco, Kazuhiko Shimokobe, à un journaliste l’interrogeant sur le risque d’un doublement du montant de 5.000 milliards de yens précédemment évoqué par le groupe.

"Nous ne savons pas à l’heure actuelle quel sera le coût total, car nous révisons les chiffres pour la décontamination et les compensations chaque trimestre, mais si cela dépasse 5.000 milliards de yens, l’entreprise aura du mal", a-t-il prévenu.

Tepco indique en outre dans un document qu’une rallonge du même ordre de grandeur sera nécessaire en cas de volonté de nettoyer une zone plus étendue que celle définie initialement, ainsi que pour la construction de sites de stockage temporaires de détritus radioactifs.

Comme gage de bonne conduite, la compagnie a promis d’économiser plus de 3.300 milliards de yens (près de 33 milliards d’euros) en une décennie.

Et d’ajouter que des fonds supplémentaires de l’Etat allaient de toute façon être requis pour le retrait du combustible fondu et autres interventions liées à la déconstruction du site, Tepco n’ayant mis de côté que 1.000 milliards de yens (10 milliards d’euros), une somme nettement insuffisante.

Il est néanmoins probable que le groupe revoie plusieurs fois ses évaluations, sachant notamment que rien n’a encore été décidé ni pris en compte concernant les deux réacteurs épargnés de Fukushima Daiichi et les quatre de la deuxième centrale, Fukushima Daini, de cette préfecture du nord-est du Japon.

Tepco a de surcroît insisté mercredi sur la nécessité de repenser le schéma actuellement en vigueur pour financer les réparations nécessaires.

Il prévoit par ailleurs de créer dans la région de Fukushima un siège dédié à la gestion de ce sinistre historique, une option qui devrait permettre de faire des économies de fonctionnement.

Un centre de recherche sera également mis en place pour concevoir les techniques requises pour le nettoyage du site et des environs.

La compagnie, nationalisée cet été, est incapable d’assumer seule le coût de la catastrophe.

Elle est non seulement contrainte d’indemniser plus d’un million et demi de victimes et de procéder à des dépréciations massives d’actifs, mais elle doit également continuer à alimenter l’est du Japon, dont Tokyo. Elle doit pour cela faire tourner à plein régime ses centrales thermiques et dépenser de ce fait des sommes astronomiques en achat de gaz et pétrole.

Le coût global du drame de Fukushima dépassera dans tous les cas et de loin ce qui sera effectivement pris en charge par Tepco ou l’Etat japonais. Car il faudrait en théorie y inclure tous les effets collatéraux, sur le commerce, l’industrie, le secteur touristique, etc. pas seulement dans la préfecture de Fukushima mais dans l’ensemble du Japon.

Bilan des risques

Dès le début de l’accident, les informations disponibles avaient permis à l’IRSN de conclure que le combustible des trois réacteurs avait partiellement fondu du fait de la perte de refroidissement survenue. Même si aucun élément ne permettait de conclure à une rupture très importante des cuves après la relocalisation vraisemblable de corium au fond de celles-ci, l’IRSN estimait que l’étanchéité des cuves et des enceintes n’était plus garantie.

Les analyses menées par TEPCO ont depuis conclu :

► pour le réacteur n° 1, à la fusion totale du coeur et à la percée de la cuve, avec épandage de corium dans le fond de l’enceinte de confinement ;

► pour les réacteurs 2 et 3, à une dégradation importante des coeurs, avec la possibilité d’une relocalisation significative de corium dans le fond de la cuve et d’un écoulement faible de ce corium dans le fond de l’enceinte de confinement.

► Les éléments disponibles (contrôles vidéo de l’intérieur des piscines et mesures de la contamination de l’eau) confortent l’hypothèse selon laquelle il n’y aurait pas eu de dégradation importante des combustibles entreposés dans les piscines. En revanche, des matériaux sont tombés dans les piscines des réacteurs 1, 3 et 4 à la suite des explosions, ce qui compliquera l’extraction des combustibles présents.

Pollutions

Les niveaux de radioactivité des poissons pêchés sur la côte est du Japon restent élevés, surtout au large de Fukushima, 19 mois après la catastrophe de la centrale nucléaire de Daiichi, selon une étude effectuée par un expert américain et publiée ce vendredi dans la revue Science.

Ken Buesseler, chimiste à l’Institut océanographique de Woods Hole (Massachusetts, nord-est des Etats-Unis), a analysé des mesures du gouvernement japonais et conclu qu’il pourrait y avoir une source persistante de radioactivité dans l’océan Pacifique venant soit d’une faible fuite du réacteur de la centrale accidentée, soit de sédiments marins contaminés.

40% des poissons pêchés dans les environs de Fukushima ne sont pas consommables selon les normes établies par les autorités nippones.

Le scientifique souligne en outre que les niveaux de contamination dans presque toutes les espèces de poissons et crustacés ne diminuent pas. Mais ces niveaux varient selon les espèces, ce qui complique la réglementation par les pouvoirs publics.

Pour Ken Buesseler, qui avait conduit en 2011 une mission internationale de recherche sur un navire afin d’étudier la dispersion des radionucléides provenant de Fukushima, « il faudra faire plus qu’étudier les poissons pour prédire comment évolueront ces différents niveaux de contamination. » « Nous avons surtout besoin de mieux comprendre les sources de césium et d’autres radionucléides qui continuent à maintenir ces niveaux de radioactivité dans l’océan au large de Fukushima », insiste-t-il.

Pour celà, le scientifique et son collègue Mitsuo Uematsu, de l’Université de Tokyo, organisent un symposium dans la capitale nippone les 12 et 13 novembre. Ils présenteront les dernières estimations disponibles sur les émissions de radioactivité de la centrale Daiichi, ainsi que leur impact sur l’océan, la vie marine, les poissons et fruits de mer.

Le scientifique précise qu’au large de la côte nord-est du Japon, la vaste majorité des poissons pêchés restent en-dessous des limites autorisées pour la consommation, même si les autorités japonaises les ont resserrées en avril 2012.

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Messages

  • Près de deux ans après l’accident nucléaire de Fukushima provoqué par un violent séisme au Japon, les experts de l’Organisation mondiale de la santé estiment que le risque de cancers a bien augmenté dans les zones les plus touchées.
    Selon un rapport rendu public ce jeudi à Genève, le risque de cancer de la thyroïde chez les femmes et les enfants est passé de 0,75% à 1,25% dans un rayon de 20 km autour de la centrale japonaise.

    Des chiffres que Greenpeace conteste, l’organisation accusant les auteurs de ce rapport de « sous-estimer honteusement » l’impact des radiations. « Ce rapport est à considérer comme une déclaration politique pour protéger l’industrie nucléaire et non pas comme un travail scientifique axé sur la santé des personnes », accuse l’organisation. « Le rapport de l’OMS sous-estime honteusement l’impact des premières radiations de la catastrophe de Fukushima sur les personnes présentes à l’intérieur de la zone d’évacuation d’un rayon de 20 km, et qui n’ont pas été capables de partir rapidement », estme le Dr Rianne Teule, expert de Greenpeace en matière de radiation nucléaire.

  • L’agence japonaise de l’énergie atomique (JAEA) a annoncé lundi 27 mai que 30 chercheurs avaient été exposés à des radiations lors d’un incident dans un laboratoire nucléaire, qui s’est produit jeudi au laboratoire de physique nucléaire de Tokaimura.Dans un premier temps, l’agence avait seulement évoqué l’exposition de quatre chercheurs aux radiations.

    L’incident s’est produit au moment où des scientifiques envoyaient un rayon à proton sur de l’or, dans le cadre d’une expérience d’accélération de particules. Au total, 55 employés travaillaient alors sur le site lorsque le problème s’est déclaré à cause d’une surchauffe.

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