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Pour repousser l’assaut de la classe dirigeante, Les travailleurs indiens ont besoin d’un programme socialiste

lundi 25 février 2013, par Robert Paris

Pour repousser l’assaut de la classe dirigeante, Les travailleurs indiens ont besoin d’un programme socialiste

Par le comité de rédaction du WSWS

Des dizaines de millions de travailleurs dans toute l’Inde vont participer à une grève générale de deux jours aujourd’hui et demain contre les politiques socio-économiques du gouvernement de l’Alliance progressiste unie (United Progressive Alliance - UPA) dirigée par le Parti du congrès, parmi celles-ci, les augmentations des prix des carburants, la préférence accordée au travail temporaire, les concessions massives sur les impôts des grandes entreprises, et les privatisations.

La classe dirigeante indienne, comme ses homologues en Europe, en Amérique du Nord et ailleurs en Asie, est déterminée à faire payer la classe ouvrière et les paysans pauvres pour la plus grande crise du capitalisme mondial depuis la grande dépression des années 1930. En septembre dernier, le Premier ministre Manmohan Singh a justifié l’imposition par son gouvernement de « réformes big-bang, » dont des réductions des subventions aux prix des denrées essentielles et l’ouverture du commerce de détail aux géants multi-enseignes étrangers comme Walmart, en déclarant que les Indiens doivent faire des « sacrifices » pour attirer les investisseurs nationaux et étrangers.

Par la suite, le ministre des finances Chidambaram a imposé des coupes drastiques dans les dépenses sociales, les réduisant de plus de 6,5 pour cent comparé au budget de 2012-13. Dans un entretien accordé récemment au Financial Times, Chidambaram a juré que le gouvernement dirigé par le congrès fera des coupes supplémentaires, y compris dans les subventions aux prix, dans le budget du mois prochain.

Le grand patronat a accueilli favorablement ces pas, mais il en réclame déjà d’avantage, dont l’abandon des restrictions sur les licenciements massifs et les fermetures d’usines. Espérant pousser le gouvernement encore plus vers la droite, de nombreux géants d’India Inc.[terme courant dans la presse indienne pour décrire l’économie officielle publique et privée face au marché noir très développé dans ce pays, ndt] soutiennent le Premier ministre de l’état fédéré du Gujarat, Narendra Modi, comme candidat au poste de Premier ministre fédéral pour les élections de 2014. Ils s’extasient devant les états de service de ce chauvin ultra-hindou qui se présente comme un « homme fort, les pieds sur terre » dans la promotion des grandes entreprises – c-à-d dans la lutte contre les grèves et pour leur fournir des terrains et d’autres concessions gratuitement.

La grève massive d’aujourd’hui atteste de la détermination des travailleurs à lutter contre l’assaut des élites indiennes contre leurs conditions de travail et de vie. Mais les travailleurs doivent se méfier. Les syndicats ont appelé à cette action non pour développer une contre-offensive de la classe ouvrière, mais pour maintenir leur contrôle sur la classe ouvrière, divertir sa colère croissante et son militantisme vers des manifestations sans conséquence, et la rattacher politiquement aux partis de la bourgeoisie, y compris au Parti du congrès au pouvoir et à l’opposition officielle, le Bharatiya Janata Party (BJP) du suprématisme hindou.

La direction politique de la grève est largement entre les mains du Congrès des syndicats panindien (All India Trades Union Congress - AITUC) et du Centre des syndicats indiens (CITU), qui sont respectivement les pendants syndicaux des deux partis staliniens au Parlement indien – me Parti Communiste d’Inde (CPI) et le Parti communiste d’Inde (marxiste) ou CPM.

Les staliniens feignent de s’opposer à la tendance de la bourgeoisie à transformer l’Inde en un producteur à la main d’œuvre bon marché pour le capitalisme mondial. Ils ont périodiquement organisé des grèves d’un jour affirmant que le gouvernement actuel et celui dirigé par le BJP avant lui pouvaient être poussés à adopter des politiques « en faveur du peuple ».

Leur rôle va cependant bien au-delà de la propagation de la notion dangereuse et réactionnaire selon laquelle la classe ouvrière devrait consacrer son énergie à faire pression sur les principaux partis de la classe dirigeante pour les contraindre à « servi le peuple. » Le CPI et le CPM ont joué un rôle central dans l’application des programmes de réformes libéraux de la classe dirigeante indienne. Ils ont soutenu une série de gouvernements de droite, dont le gouvernement du Parti du congrès de Narasimha Rao qui a lancé la « nouvelle politique économique » de l’Inde et, de 2004 à 2008, le gouvernement UPA actuel. De plus, dans les états fédérés où ils ont fait partie du gouvernement, le Bengale occidental et le Kerala, le PCI le PCM et leur Front de gauche ont poursuivi ce qu’ils admettent eux-mêmes être des politiques « pro-investisseurs. », y compris des réductions des dépenses sociales, des interdictions de grèves dans le secteur des télécommunications, et des répressions violentes contre les manifestations de paysans contre l’expropriation de leurs terres pour installer de grandes entreprises.

Pour l’AITUC et le CITU comme pour leurs mentors politiques du PCI et du PCM, la grève des 20 et 21 février représente une tentative d’approfondir leur collaboration avec toute une série de forces politiques de droites.

Ils considèrent comme « historique » le fait que le pendant syndical du Parti du congrès, le Congrès national indien des syndicats (Indian National Trades Union Congress - INTUC) et celui qui est aligné sur le BJP, le Bharatiya Mazdoor Sangh (BMS) soutiennent cette grève. En réalité, en obtenant le soutien des laquais syndicaux des principaux partis de la classe dirigeante, les staliniens rendent parfaitement clair le fait que la manifestation de cette semaine n’est pas un défi lancé aux élites. Les appareils discrédités et droitiers de l’INTUC et du BMS, quant à eux, accueillent favorablement l’offre de collaboration des staliniens. Dans ces conditions où le mécontentement populaire s’agite, cela leur permet de rafraîchir leurs prétentions à être des « représentants des travailleurs » et de donner du crédit aux prétentions de leurs partis d’être concernés par le sort des aam adami (gens du commun).

Le fait que les staliniens cherchent à lier la classe ouvrière aux forces de droite est souligné par les actions du secrétaire général de l’AITUC et des parlementaires du CPI Gurudas Dasgupta. Dasgupta s’est vanté d’avoir obtenu « un soutien moral » pour la grève de la part du Premier ministre du Karnataka, Jagdish Shettar, et de celui de l’Odisha, Naveen Patnaik. Shettar dirige un gouvernement du BJP, et Patnaik et le chef du BJD, un parti régionaliste qui a appliqué des réformes néo-libérales et qui a participé à l’alliance gouvernementale NDA dirigée par le BJP durant les six où il a été au pouvoir. Après la déclaration sans intérêt de « soutien moral » par Patnaik, Dasgupta l’a publiquement remercié « pour son gracieux soutien et l’intérêt qu’il a montré pour les gens du commun et les souffrances des pauvres. »

Dasgupta s’est également rendu à Bombay pour rencontrer Uddhav Thackeray et obtenir de lui une déclaration de soutien pour la grève de la part de son parti, le Shiv Sena, un parti fasciste qui s’est fait connaître en alimentant le chauvinisme des peuples Marathi et Hindou et en organisant des briseurs de grève, notamment lors de la grève du textile à Bombay en 1982.

En conséquence des politiques favorables au grand patronat appliquées par les gouvernements des Fronts de gauche au Bengale occidental et au Kerala, le CPI et le CPM ont subi une série de débâcles électorales. Aux élections nationales de 2009, leur délégation au Lok Sabha (la chambre basse du Parlement indien) a diminué de moitié. Aux élections des états fédérés de 2011, ils ont perdu le pouvoir au Bengale occidental et au Kerala.

En accordant, par la grève de protestation de cette semaine, une démonstration de leur utilité à la classe dirigeante pour contenir le mécontentement social et de leur disposition à travailler à la fois avec des forces alignées sur le Parti du congrès et le BJP, les staliniens cherchent à convaincre l’élite politique indienne qu’ils restent des joueurs importants dans la politique bourgeoise et qu’ils devraient être bien accueillis dans les tractations politiques qui entoureront les élections législatives de l’an prochain.

Exprimant la perspective procapitaliste des syndicats et des partis staliniens, Dasgupta s’est lamenté au début du mois, « le gouvernement ignore les syndicats, qui sont une des parties prenantes de l’économie. »

En prenant la mesure des staliniens, les travailleurs devraient noter qu’au Bengale occidental, le CPM a invoqué un prétexte particulièrement mauvais pour justifier la limitation de cette grève à un seul jour. Ce faisant il cherche à plaire au monde des affaires qui considère que le nouveau Premier ministre Mamata Banerjee n’a pas agi assez vite pour se débarrasser de la pose populiste qu’elle avait adopté pour prendre la place du CPM. Le journal Telegraph de l’état de Kolkata a cité un dirigeant du CPM qui expliquait, « étant donné la situation de l’état et les déclarations répétées [de l’ex-premier ministre CPM Buddhadev Bhattacharjee] sur l’industrie, une Bandh (grève) de deux jours affecterait très mal l’image de la Gauche. »

Le capitalisme est un échec. Dans les pays capitalistes avancés, l’élite dirigeante mène une véritable contre-révolution sociale, cherchant à détruire les services publics et à limiter les droits sociaux que les travailleurs ont gagnés par des luttes intenses au siècle dernier. EN Inde, après vingt ans de réformes libérales qui ont permis à une toute petite élite du monde des affaires de s’approprier une richesse fantastique tout en condamnant la grande majorité à la pauvreté et à l’insécurité économique, la bourgeoisie insiste maintenant sur des « sacrifices ». qui menacent d’entraîner des millions de gens dans la faim et la misère.

Pour défendre leurs emplois et leurs salaires et pour garantir le droit à un système de santé et une éducation publique décents, la classe ouvrière doit présenter un programme socialiste – la lutte, en conjonction avec les travailleurs de toute l’Asie du Sud et du monde entier – pour un gouvernement ouvrier et paysan. Un tel gouvernement exproprierait les banques et les industries essentielles et les placerait sous propriété publique et sous contrôle ouvrier, pour que l’économie puisse être organisée pour répondre aux besoins sociaux, non pour enrichir une poignée de capitalistes.

Les travailleurs doivent rompre avec les partis staliniens et leurs syndicats et former de nouvelles organisations de lutte dans leurs lieux de travail et leurs communes. Ces organisations mèneraient la résistance aux attaques des employeurs et du gouvernement et construiraient un mouvement politique de la classe ouvrière indépendant contre la classe dirigeante, contre tous ses représentants politiques et l’appareil d’état. Le rôle du gouvernement, de la police, et des tribunaux dans l’application de l’exploitation misérable voulue par la bourgeoisie indienne a été mis en évidence par le sort des travailleurs persécutés e l’usine automobile Maruti Suzuki à Manesar.

La classe ouvrière doit apporter une direction aux paysans pauvres et aux autres sections des masses opprimées, en présentant un programme socialiste pour les mobiliser contre les propriétaires terriens, les prêteurs sur gage et le monde des affaires.

Surtout, la classe ouvrière a besoin d’un nouveau parti, s’appuyant sur le programme et les perspectives du socialisme international pour mener la lutte contre la bourgeoisie indienne et l’impérialisme mondial. Seul le comité international de la Quatrième internationale – le parti mondial de la révolution socialiste fondé par Léon Trotsky, le co-dirigeant de la révolution russe de 1917 et infatigable opposant à la bureaucratie stalinienne privilégiée qui a usurpé le pouvoir de la classe ouvrière dans un contexte d’isolement du premier état ouvrier – lutte pour construire une telle direction révolutionnaire de la classe ouvrière internationale.

Messages

  • La colère populaire se développe dans la ceinture industrielle de Manesar-Gurgaon, à la périphérie de Delhi, capitale de l’Inde, après qu’un tribunal a infligé des peines d’emprisonnement à 13 travailleurs qui ont été accusés à tort de meurtre après une confrontation de la direction avec les travailleurs de juillet 2012 à l’usine de montage la plus importante du pays.

    Juste quelques heures après la lecture des sentences dans au tribunal du district de Gurgaon District, 30 000 travailleurs des usines Maruti Suzuki et des usines fournisseurs de Manesar et autour de Manesar ont mené une grève d’une heure, malgré les menaces de la direction d’une réduction de salaire de huit jours. L’action a arrêté la production à l’usine de montage de Maruti Suzuki à Manesar, scène de la confrontation de juillet 2012, et aussi à une deuxième usine de montage à Gurgaon, Maruti Suzuki Powertrain, à Suzuki Moto Inde et à deux sociétés de pièces automobiles.

    Les six syndicats locaux qui ont appelé la grève de samedi ont annoncé un rassemblement de protestation le 23 mars à Manesar, au mépris d’une interdiction de tous les rassemblements de 5 personnes ou plus que les autorités ont imposée à Gurgaon jusqu’au 25 mars, précisément parce qu’ils craignent l’opposition de masse des travailleurs au coup monté des travailleurs Maruti Suzuki.

    Le Syndicat des travailleurs de Maruti Suzuki (MSWU), formé par les ouvriers de l’usine de Manesar dans une rébellion contre un syndicat de marionnettes de la compagnie, rapporte également qu’il prépare une journée nationale de protestation le 4 avril.

    Le président du MSWU, Ram Meher, et les onze autres membres exécutifs du syndicat figurent parmi les 13 condamnés à la prison à perpétuité.

    L’avocat Rajendra Pathak, avocat de la défense pour certains des travailleurs faussement accusés a dénoncé les peines, disant à un journaliste du World Socialist Web Site : « Le pouvoir judiciaire est composé des gens qui ont l’esprit des capitalistes. Les riches ont tous les moyens dans cette société capitaliste, les juges aussi. »

    Pathak a déclaré que les travailleurs vont faire appel de leurs sentences et condamnation à la Haute Cour. « Il n’y a aucune preuve dans le dossier pour justifier les accusations de meurtre contre les 13 travailleurs condamnés », a déclaré Pathak. « Mais puisque la lutte est contre la société capitaliste, je ne peux pas dire avec certitude quel sera le résultat d’un tel cas. Il pourrait être prolongé pendant des années [...] et les 13 seront obligés de rester en détention jusqu’au jugement final. »

    Exprimant l’opposition croissante des travailleurs, un ouvrier d’une usine fournisseur de Maruti Suzuki a déclaré au Hindustan Times : « Aujourd’hui, c’est Maruti, demain c’est nous qui pourrions être en prison. Nous voulons que nos camarades soient libérés, mais Maruti a déjà unifié plus de travailleurs que n’importe quel syndicat n’aurait pu le faire. »

    Outre Ram Meher, les autres qui font face à des peines de prison à perpétuité sont Sandeep Dhillon, Ram Bilas, Sarabjeet Singh, Pawan Kumar, Sohan Kumar, Ajmer Singh, Suresh Kumar, Amarjeet, Dhanraj Bambi, Pradeep Gujjar, Yogesh et Jiyalal.

    Les travailleurs sont victimes d’un coup monté impitoyable perpétré par la Suzuki Corporation, la police et les autorités judiciaires, avec la pleine complicité des principaux partis politiques de l’Inde - le Parti du Congrès et le parti suprématiste hindou le Bharatiya Janata Party (BJP).

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