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Les tensions de classes en Europe au point de rupture

vendredi 8 mars 2013, par Robert Paris

Les tensions de classes en Europe au point de rupture

Par Peter Schwarz

Les tensions de classes en Europe s’intensifient rapidement. La classe dirigeante ne s’arrêtera pas tant qu’elle n’aura pas imposé à la classe ouvrière tout le poids de la crise financière internationale. Son but est de détruire les acquis sociaux de la période d’après-guerre et de réduire les salaires dans toute l’Europe à un niveau comparable à ceux de la Chine et de l’Inde.

La Grèce, où cinq plans d’austérité successifs ont réduit de larges couches de la population au chômage et à la pauvreté, n’est que le début. Le Portugal, l’Irlande, la Slovénie, la Roumaine, l’Espagne et l’Italie sont déjà soumis à la même politique d’austérité.

Le Süddeutche Zeitung [le principal quotidien allemand, de centre-gauche, ndt] a remarqué sur un ton suffisant que depuis son élection au printemps dernier, le président français François Hollande avait « radicalement changé de paradigme ». Son prédécesseur Nicolas Sarkozy, commente le journal, parlait beaucoup de « réformes » sociales, mais ne faisait pas grand-chose. Le nouveau président issu du Parti socialiste, à l’opposé, a lancé des « réformes » significatives, c’est-à-dire des attaques contre la classe ouvrière, sans en faire toute une histoire.

Le gouvernement de Hollande a réduit les coûts du travail de 20 milliards d’euros, commencé à rendre le marché du travail plus « flexible », et s’est décidé à réduire les dépenses publiques de 12 milliards d’euros chaque année. Cela, cependant, d’après le Süddeutche Zeitung, n’est que le début. « La tâche est de mener à bien toute une liste de réformes attendues depuis des dizaines d’années. »

En Allemagne, la chancelière Angela Merkel de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) et Peer Steinbrück du Parti social-démocrate (SPD), les deux candidats les plus en vue pour les élections législatives de septembre prochain, sont tous deux des partisans inconditionnels des attaques contre la classe ouvrière européenne et engagés pour en lancer de nouvelles après les élections.

Allant de pair avec cette contre-révolution sociale, on assiste à un regain du militarisme. Là où par le passé les puissances continentales européennes intervenaient dans le sillage des États-Unis, ou restaient souvent neutres, comme pour les guerres d’Afghanistan et d’Irak, elles sont maintenant les principaux agresseurs dans la nouvelle « ruées vers l’Afrique. » La guerre contre la Libye a été largement une initiative française, et au Mali, la France a agi unilatéralement. La Grande-Bretagne et l’Allemagne veulent urgemment faire partie de l’aventure quand il est question de recoloniser ce continent riche en ressources et ont promis leur soutien militaire à la France.

En politique étrangère, comme à l’intérieur, Hollande a suivi un « changement radical de paradigme. » Durant sa campagne électorale, il avait promis de rompre avec la politique de la « Françafrique », c’est-à-dire la politique consistant à soutenir des potentats corrompus dans les ex-colonies françaises. Au Mali, il enfile maintenant les habits d’un conquérant colonial.

Des considérations d’ordre intérieur comme international jouent un rôle considérable dans cette volte-face. Le Nouvel Observateur écrit, faisant part de son approbation, qu’avec son intervention au Mali, Hollande a montré ses vraies qualités de président et renforcé son autorité à l’intérieur.

Les travailleurs cherchant à résister à la contre-révolution sociale et à défendre leur emploi et leurs acquis sociaux passés, sont confrontés au fait que cela n’est pas possible sur la base de méthodes de lutte utilisées au cours des décennies précédentes.

Ce n’est pas seulement le Parti socialiste français, mais tous les partis sociaux-démocrates, un temps associés aux réformes sociales, qui sont maintenant entièrement acquis à l’austérité et à la destruction de ces réformes passées. La piste inaugurée par le chef du Parti travailliste Tony Blair en Grande-Bretagne et le chef du SPD Gerhard Schröder en Allemagne a été empruntée à leur suite par José Zapatero en Espagne et George Papandreou en Grèce.

De même, les syndicats, qui ont été transformés en appendices des entreprises et de l’Etat, fonctionnent comme une branche de la direction des grands groupes dans l’imposition des licenciements et des réductions de salaire. Dans le domaine politique, ils veillent à ce que la résistance sociale soit supprimée ou limitée à des manifestations symboliques qui ne présentent aucune menace pour l’Etat.

Les gouvernements européens réagissent à toute expression d’opposition de la classe ouvrière, qui pourrait avoir des conséquences plus sérieuses sur les profits privés et la politique du gouvernement, en imposant l’interdiction des grèves et en employant des méthodes de violence d’Etat traditionnellement associées aux dictatures.

Il y a deux ans, le gouvernement social-démocrate de Zapatero en Espagne a mobilisé l’armée pour briser une grève des contrôleurs aériens.

En France, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls a donné la consigne à la police et aux services de renseignement de suivre « au plus près » les évolutions dans les entreprises en difficulté où risquent d’éclater des conflits sociaux et de faire attention aux « menaces sur l’outil de production en cas de radicalisation d’un conflit ». Des métallurgistes qui manifestaient récemment à Strasbourg contre les licenciements massifs ont été retenus par la police, fouillés, et attaqués aux lacrymogènes.

En Grèce, le gouvernement a forcé les employés des ferries en grève à reprendre le travail la semaine dernière en imposant la loi martiale pour la quatrième fois depuis le début des mesures d’austérité. Par la menace de longues peines d’emprisonnement, le gouvernement a brisé la grève des travailleurs qui n’ont pas été payés depuis plusieurs mois. Deux semaines avant cela, le gouvernement grec invoquait les mêmes pouvoirs d’urgence pour briser une grève des travailleurs du métro d’Athènes.

Le droit démocratique de faire grève a été aboli en pratique. Toute grève efficace est illégale. Seules des manifestations et des grèves purement symboliques sont permises.

Dans ces conditions, la lutte pour défendre les droits sociaux et politiques mettent la classe ouvrière en face de nouvelles tâches politiques. Lorsque tous les vieux mécanismes de compromis et de concession ne parviennent pas à résoudre les conflits sociaux, lorsque les gouvernements répondent à la pression sociale par la répression d’Etat, et que les syndicats forment un front uni avec les employeurs contre les travailleurs, alors la lutte des classes doit inévitablement prendre un caractère insurrectionnel et révolutionnaire.

Il n’est plus possible de défendre les emplois, les salaires et les acquis sociaux en faisant pression sur les entreprises et le gouvernement. La classe ouvrière est appelée à prendre dans ses propres mains le contrôle de la société et de l’économie. Cela requiert un mouvement de masse indépendant, international, de la classe ouvrière luttant pour un programme socialiste et la mise en place de gouvernements ouvriers dans le cadre des États socialistes unis d’Europe.

Un obstacle crucial sur le chemin d’une telle politique est la pléthore de partis de la pseudo-gauche – SYRIZA en Grèce, Die Linke en Allemagne, le Parti communiste, le Parti de gauche et le Nouveau Parti anticapitaliste en France. Ces organisations s’opposent à l’établissement de l’indépendance politique de la classe ouvrière par rapport à toutes les sections de la classe capitaliste et cherchent à bloquer une mobilisation indépendante de la classe ouvrière. Ils défendent les syndicats, encouragent les illusions dans la sociale-démocratie, et soutiennent l’Union européenne. Ils incarnent une section prospère de la classe moyenne qui cherche à dissimuler ses positions politiques droitières derrière une rhétorique de gauche.

Pour établir l’indépendance politique de la classe ouvrière et préparer les grandes luttes sociales à venir, il est nécessaire pour les travailleurs de s’opposer à ces fausses organisations de gauche et de révéler leur rôle réactionnaire aux yeux de toute la classe ouvrière.

Messages

  • Pas moins de 54 défilés sont prévus dans le pays. Tous les secteurs d’activité sont touchés, public comme privé. Les manifestants sont très remontés contre le "Jobs Act", la réforme du marché du travail adoptée la semaine dernière, qui prévoit de faciliter les licenciements et de réduire les droits des salariés au début de leur travail.

    "Ca ne va pas comme ça !" , tel est le mot d’ordre de la grève générale qui a débuté ce matin en Italie. Des administrations à la santé, des écoles en passant par les transports, tous les secteurs d’activité, public comme privé, sont touchés, de 9h à 17h. Un service minimum est tout de même prévu, notamment dans les transports publics - le ministre a renoncé à réquisitionner des employés, après que les syndicats ont accepté de réduire leur grève de 9h à 16h.

    Cette grève générale est initiée par la principale confédération syndicale, la CGIL, de gauche, et soutenue par l’UIL, modérée. L’UGL, de droite, est venue se joindre à eux ; la CISL, catholique modérée, n’y est pas, en revanche.

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