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La contre-révolution triomphe au Mali

jeudi 10 octobre 2013, par Robert Paris, Tiekoura Levi Hamed

IBK POUR LE BONHEUR DES RICHES MALIENS...

La contre-révolution triomphe au Mali

L’élection du nouveau président malien IBK n’aura pas tardé à montrer ses fruits : le Gal Dahirou, le chef d’Etat major général des armées, a envoyé des hommes pour neutraliser les responsables de la révolte des petits soldats de Kati. Il a notamment fait désarmer le Capitaine Sanogo, qui n’est pas arrêté mais devra quitter Kati, et, parmi les soldats arrêtés, on site Youssouf Traoré et Amadou Konaré, anciens chefs de la révolte des petits soldats qui a fait chuter le président ATT.

Le désarmement des hommes du général Sanogo, l’arrestation d’une trentaine de mutins, auxquels s’ajoutent certains chefs putschistes…est un message fort mais ce n’est pas tout : lors de l’intronisation du nouveau président, plusieurs messages forts ont été lancés :

 les négociations avec les touarègues sont interrompues et la guerre reprend au nord. Le pacte de paix signé ne servait qu’à justifier l’élection présidentielle...

 la France revient en colonisateur et Hollande, venu féliciter le nouveau président le jour même a déclaré que c’est la France qui avait gagné la guerre au Mali, guerre de recolonisation donc...

 le nouveau président modifie les accords avec les compagnies minières afin que les avantages et prébendes reviennent dorénavant à ses copains et que les contrats soient signés avec les pays impérialistes qui l’ont mis au pouvoir et particulièrement la France...

 dans son discours d’intronisation, le nouveau président IBK a tenu à saluer en premier l’ancien dictateur déchu Moussa Traoré, balayé par la révolution populaire et sociale, et notamment la révolte des femmes, de 1991. Et Moussa Traoré avait été invité pour la circonstance et a été fêté par les participants. Donc IBK, c’est le retour de Moussa....

C’est donc tout un cycle de révolutions qu’IBK prétend conclure ainsi... ATT avait détourné la révolution sociale et IBK l’assassine !

Pour certains, la démocratie aurait eu le dernier mot au Mali. Ah oui ! Parce qu’on aurait pu choisir un président entre une série de serpents politiciens pleins de promesses et de mensonges. Mais quand le serpent promet qu’il ne piquera plus, le sage s’arme d’un bâton fourchu, dit le proverbe….

On a eu des serpents qui s’étaient d’abord engagés à ne pas faire venir des troupes étrangères à Bamako, à ne pas pactiser avec la France et la Cédao, à obtenir l’immunité pour les révoltés de Kati, etc…

L’un d’entre eux, Sanogo, avait ainsi obtenu d’être considéré par les serpents, lui-même comme un ancien… serpent !

Eh bien, toutes promesses trahies, nous voilà arrivés au moment des actes : ceux qui avaient affirmés que les soldats de la révolte contre la dictature ne seraient pas accusés, pour leur ancienne révolte, viennent de les faire arrêter. Et non pas pour les anciens événements, disent-ils, mais en les accusant tout simplement de nouveaux actes de rébellion ! C’est si simple…

Une trentaine de militaires maliens soupçonnés d’être impliqués dans des incidents cette semaine dans la ville garnison de Kati, près de Bamako, ont été arrêtés et étaient, vendredi 4 octobre, "à la disposition de la gendarmerie", a indiqué le porte-parole de l’armée malienne.

Qui sont-ils ? Eh bien ce sont justement tous les anciens révoltés de Kati sauf Sanogo. Quel hasard !

Parmi les militaires arrêtés, figurent deux membres de l’ex-junte militaire, le capitaine Amadou Konaré et le colonel Youssouf Traoré, selon le lieutenant-colonel Maïga. "Ils ont attenté à la sûreté de l’Etat, ils sont en fait à la base du soulèvement à Kati", a-t-il ajouté.Il n’a pas souhaité identifier le lieu de détention des militaires arrêtés, dont certains pourraient tomber sous le coup de sanctions "statutaires et judiciaires pour séquestration de personnes et usage illégal d’armes".

La caserne de Kati était le quartier général d’Amadou Sanogo, capitaine récemment promu général en août et auteur d’un coup d’Etat qui, le 22 mars 2012, avait précipité la chute du Nord du Mali aux mains de groupes islamistes en grande partie chassés depuis par une intervention armée franco-africaine.

Le 30 septembre, plusieurs dizaines de jeunes soldats proches des putschistes avaient bruyamment revendiqué, en tirant en l’air, des promotions comme celles accordées à Sanogo. Ils avaient blessé un de ses proches, un officier supérieur séquestré plusieurs heures avant d’être relâché. Car cet été, Sanogo a été bombardé général de corps d’armée par le président par intérim Diacounda Traoré. Les jeunes soldats qui l’ont aidé dans son putsch en mars 2012 ont voulu lui rappeler qu’ils existaient. Ils ont même blessé et pris en otage son directeur de cabinet, un colonel, que Sanogo venait de leur envoyer comme médiateur.

Dans un discours à la nation mercredi soir, le président malien Ibrahim Boubacar Keïta avait qualifié de "honteux" et de "camouflet à la nation" malienne ces incidents à Kati, en affirmant son "inébranlable détermination" à neutraliser les fauteurs de troubles au sein de l’armée.

"Kati ne fera plus peur à Bamako, en tout cas pas à Koulouba", siège de la présidence malienne, "que la hiérarchie prévale ! Que les chefs militaires s’assument ! Que la chaîne de commandement se fasse obéir ou qu’elle s’avoue impuissante (...), ce qui doit être fait le sera, et ce sans délai", avait-il dit.
Ce n’est pas seulement Kati qui faisait peur aux classes dirigeantes et aux hommes politiques à leur service, c’est tout le peuple travailleur du Mali.

Mais Sanogo n’a pas choisir d’engager la révolte dans cette direction, vers le pouvoir des travailleurs. Il a choisi de s’entendre avec les puissances dictatoriales africaines de la Cédéao. Il a choisi de s’entendre avec la France et de cautionner son intervention militaire, alors que peu avant il déclarait refuser toute intervention étrangère et proclamait zéro soldat étranger à Bamako !

Une révolte de petits soldats, on en trouve dans toutes les révolutions (avec la révolte de la garde nationale dans la Commune de Paris de 1871, par exemple), mais il ne suffit pas d’une révolte de petits soldats pour faire une révolution sociale. Il ne suffit pas du pseudo radicalisme de petits gradés comme Sanogo pour renverser les classes dirigeantes. Car tous les Sanogo du monde sont incapables d’un tel radicalisme.

Il faut aussi que les masses populaires s’emparent de la situation pour s’organiser et remettre en cause l’ordre établi. Il faut dire que, dans ce cas, une partie des leaders ouvriers étant des dirigeants syndicalistes, ils avaient, comme les politiciens, pactisé avec le régime de corruption d’ATT…

La chute du pouvoir d’Etat n’a donc pas servi d’occasion pour remettre en cause l’oppression et l’exploitation. Encore une fois, c’est partie remise. Et si encore les leçons des luttes précédentes étaient tirées....

A l’origine de cette révolte comme de toutes les prédécentes, il y a les femmes du Mali, organisées et décidées. Ce sont elles qui ont initié la révolution sociale de 1991 et fait chuter Moussa Traoré. Ce sont elles qui ont manifesté les premières de Kati à Bamako. Ce sont encore elles qui, au nord, avaient organisé des manifestations contre les troupes islamistes quand elles ont commencé à occuper le nord.

L’avenir est à l’union des femmes, des jeunes, des travailleurs et des petits soldats. Mais il ne faudra plus faire confiance à aucun bourgeois ni chef militaire...

Il ne faudra plus suivre des gauches, des extrême gauche, des syndicats qui nous disent "vive l’armée malienne", ou encore vive les patrons qui vont relancer l’économie du pays, pour des nationalistes qui veulent nous faire croire que le Mali des pauvres serait le même que le Mali des riches ni que l’Etat bourgeois serait au service du peuple...

Quant à IBK, il aura été rapide pour mener des actions dans le sens des riches, des puissants, du pouvoir mais pour les populations victimes de la guerre et de la misère, il ne sera pas rapide du tout...

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La crise sociale et politique au Mali

Messages

  • Un millier de personnes se sont rassemblées jeudi 10 octobre à Gao, plus grande ville du nord du Mali, pour dénoncer "l’insécurité" qui y règne après des tirs à l’arme lourde revendiqués par le Mouvement pour l’unicité et le djihad en Afrique de l’Ouest (Mujao), un groupe islamiste armé.

    "Nous étions aujourd’hui un millier de personnes sur la place de l’Indépendance, qui se trouve en centre-ville, pour dénoncer l’insécurité qui règne ici", a déclaré Moussa Yoro, de l’Association des jeunes de Gao, une des organisations ayant appelé au rassemblement. Selon lui, "l’Etat malien doit prendre ses responsabilités, parce que c’est à lui d’abord d’assurer la sécurité des biens et des personnes".

    Une représentante des femmes de Gao a demandé au gouvernement "de les défendre, elles qui ont payé un lourd tribu pendant la crise, notamment en étant victimes de nombreux viols."

    Les organisations à l’initiative de cette manifestation regrettent "la complicité des autorités maliennes avec l’opération militaire française Serval dans la gestion de la crise du Nord". Les manifestants ont en outre dénoncé, pêle-mêle, "la cherté de la vie", "le manque d’électricité" et "la corruption des forces de l’ordre, favorisant l’intrusion de matériel de guerre dans la ville ".

    Le Mujao, qui a occupé le nord du Mali pendant neuf mois en 2012 avant d’en être chassé par une intervention militaire franco-africaine lancée en janvier et toujours en cours, a revendiqué des tirs à l’arme lourde sur Gao lundi dernier. Un soldat malien a été blessé.

    Le groupe islamiste a également revendiqué le dynamitage d’un pont mardi dans une localité située à une centaine de kilomètres au sud de la ville.

    Les présidents français et malien, François Hollande et Ibrahim Boubacar Keïta, qui se sont réunis mardi 1er octobre à Paris, ont souligné la nécessité de rester "vigilants" face à la menace terroriste, et "de renforcer les solidarités et la coopération entre les pays de la zone saharo-sahélienne, qui doivent faire face à des enjeux communs en matière de sécurité".

    A l’Elysée, on juge "normal" que des "tensions" et des "poches sporadiques de terrorisme" persistent au Mali, un pays "convalescent en train de se reconstruire". Ces tensions, veut-on croire, "vont progressivement se résorber au fur et à mesure du processus de réconciliation".

    Le même jour, une "dizaine" de combattants d’un "groupe armé terroriste" ont été tués à Tombouctou, au nord du Mali, à la suite d’un accrochage de plusieurs heures dans lequel ont notamment été engagées les forces spéciales françaises. Il s’agit là d’un des incidents les plus meurtriers survenus entre militaires français et combattants djihadistes depuis la fin du gros des opérations Serval, au printemps.

  • À Kidal et Tombouctou, les habitants n’ont pas organisé de grand rassemblement, contrairement à ceux de Gao qui étaient un millier à manifester jeudi pour dénoncer l’attitude des politiques et des militaires. Neuf mois après la libération néanmoins, l’impatience commence à se faire sentir dans les villes du nord du Mali.

    À Tombouctou, le réseau électrique fonctionne désormais de 18h30 à une heure du matin. Il y a dix jours l’électricité était coupée dès minuit. Le bac fonctionne de nouveau, les moteurs ont été remplacés.

    En revanche, comme à Gao, des habitants dénoncent le comportement de certains soldats de l’armée malienne qui rackettent les agriculteurs en route vers les plaines ou revendent une partie de leur dotation en carburant. De nombreux Tombouctiens sont en colère également, car ils sont tenus écartés des chantiers de reconstruction confiés à des ouvriers qualifiés venus du sud.

    La plupart des enseignants et fonctionnaires sont revenus, encouragés par une prime de transport et de réinstallation. À Kidal en revanche, ils se font attendre. L’horloge tourne, la rentrée est prévue le 17 octobre. Le réseau électrique fonctionne de 17 heures à minuit. Dans plusieurs quartiers, les familles dépendent de citernes pour l’approvisionnement en eau, mais les fûts coûtent chers.

    Des habitants, qui font part d’un ras-le-bol, se plaignent aussi des coupeurs de route sur les tronçons Kidal-Tessalit et Kidal-Gao. Et puis ils peinent à comprendre qui, entre la Minusma, le MNLA et l’administration, est réellement en charge de Kidal. « Nous sommes au travail, les gens doivent comprendre que le retour à la vie normale prendra un peu de temps », plaide Adama Kamissoko le gouverneur de Kidal.

    À l’appel de plusieurs associations de jeunes et de femmes, environ un millier de personnes se sont rassemblées hier, jeudi 10 octobre, à Gao pour dénoncer pêle-mêle l’insécurité, l’absence de perspectives pour la jeunesse, neuf mois après la libération de ce carrefour économique du nord du Mali.

    À Gao, l’état de grâce est bel et bien terminé pour le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, à peine élu. Les populations locales ne demandent plus seulement le renforcement des mesures de sécurité pour faire face à certains jihadistes qui sont toujours à la périphérie de la ville.

    Les revendications sont désormais aussi d’ordre social. Au cours de la manifestation qui a regroupé environ un millier de personnes, jeudi, l’autre thème débattu est la cherté de la vie. Localement, le panier de la ménagère est de plus en plus vide. Et l’État malien doit prendre ses responsabilités, a-t-on entendu.

    Les problèmes de l’éducation nationale ont été également évoqués au cours de ce rassemblement. Les jeunes de la ville veulent désormais la construction d’une université sur place. Ils réclament aussi un enseignement de qualité. À côté des étudiants, les jeunes chômeurs de la ville haussent également le ton : ils veulent du travail.

    Les habitants de la principale ville du nord du Mali réclament par ailleurs à l’État malien une desserte suffisante en électricité.

    Et puis enfin, les populations locales exigent la nomination d’hommes neufs à la tête de plusieurs services de l’État malien.

  • Toujours en termes de retour du Mali dans le giron de la France, c’est la présence très remarquée et très significative de Mohamed VI, venu dans les bagages du président français lui aussi fêter la "victoire". Cela ne pouvait pas ne pas se produire. Le Makhzen est un incontournable symbole de l’influence hexagonale, dans la région, et un modèle d’allégeance sans borne au fait colonial. Pour la galerie, il serait venu apporter son assistance au gouvernement malien. Et il l’a apportée. Enfin, celle qu’il a pu, sachant le sort économique et social qui est réservé aux populations marocaine et sahraouie. Le royaume va former 500 imams maliens et installer un "hôpital temporaire de campagne", à Bamako, où des médecins marocains vont soigner gratuitement "tous ceux qui le souhaiteront". La satisfaction du roi a été d’avoir été gratifiée de la non-invitation du président du Front Polisario, premier pas supposé vers le retrait de la reconnaissance malienne de la république sahraouie, sous les prescriptions évidentes de François Hollande. En attendant d’autres modifications dans la gestion des positions maliennes.

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