Accueil > 25 - TEXTES COMIQUES > Voltaire, cet humoriste, ce satiriste..

Voltaire, cet humoriste, ce satiriste..

jeudi 28 avril 2016, par Robert Paris

Voltaire a été un satiriste de talent, un humoriste, un comique. Quand il est critique, ce n’est pas sur le fond mais sur le terrain uniquement moral. Il n’est pas contre le régime, pas contre le système, pas contre l’idéologie mais contre la méthode, les moyens, les bassesses, les injustices.

Comme philosophe, comme « Lumière », Voltaire ne brille pas énormément : il est croyant, il est favorable aux monarchies éclairées, il méprise les femmes, etc….

Alors que Diderot ne craint pas d’affirmer qu’il ne croit pas en dieu, Voltaire affirme l’inverse :

« J’ai fait un peu de bien, c’est mon meilleur ouvrage. »

La monarchie ne l’affole pas et il a été attiré par de nombreux monarques :

« S’’il fallait choisir, je détesterais moins la tyrannie d’un seul que celle de plusieurs. Un despote a toujours quelques bons moments ; une assemblée de despotes n’en a jamais. »

« On peut, sans s’avilir, s’abaisser sous les dieux, les craindre et les servir. »

Aussi le mépris des hommes :

« Les hommes sont des insectes se dévorant les uns les autres sur un petit atome de boue. »

Il était surtout content d’avoir amoncelé du fric, sur le dos des serfs, des esclaves, en volant et en exploitant sa cousine et de bien d’autres manières :

« J’ai fait un peu de bien, c’est mon meilleur ouvrage. »

Qui était Voltaire

Quelques écrits philosophiques de Voltaire

Voltaire, cet humoriste, ce satiriste

« Marchez toujours en ricanant, mes frères, dans le chemin de la vérité »

Voltaire, Lettre à d’Alembert, 23 janvier 1753

Voltaire décrit par lui-même :

« Le matin je fais des projets, et le long du jour des sottises. »

« Si c’est ici le meilleur des mondes possibles, que sont donc les autres ? »

Candide, ou l’Optimisme, 1759

« L’art de la médecine consiste à distraire le malade pendant que la nature le guérit. »

« Les superstitieux sont dans la société ce que les poltrons sont dans une armée : ils ont, et donnent des terreurs paniques. »

« L’homme n’est pas fait pour travailler, la preuve c’est que cela le fatigue. »

« Si Dieu n’existait pas, il faudrait l’inventer. »

« Chaque science, chaque étude, a son jargon inintelligible, qui semble n’être inventé que pour en défendre les approches. « 

« Si Dieu nous a fait à son image, nous lui avons bien rendu. »

« Le mariage est la seule aventure ouverte aux lâches. »

Fréron prétendit piquer Voltaire en éditant des tomes d’œuvres critiques du philosophe.

Voltaire répliqua seulement par cette phrase :

« L’autre jour au fond d’un vallon,

Un serpent piqua Jean Fréron ;

Que croyez-vous qu’il arriva ?

Ce fut le serpent qui creva. »

Voltaire invente aussi des noms risibles, comme monsieur Vanderdentdur, le gouverneur de Buenos Aires, s’appellent "don Fernando d’Ibaraa, y Figueora, y Mascarenes, y Lampourdos, y Souza " ou le prêtre « Tout-à-tous ».

Voltaire fait de nombreux néologismes dans ses contes : l’ingénu déclare qu’il se « débaptise », Pangloss enseigne la « métaphysico-théologocosmolonigologie » ; dans cette expression, l’intention satirique apparaît avec la sonorité « nigaud ».

Voltaire se moque des stéréotypes des romans d’amour et d’aventure au 18e siècle, ainsi que de la bible, des vies de saints, des contes orientaux, des récits de voyage réels et imaginaires.

Un autre des procédés que Voltaire utilise est d’attribuer aux personnages des paroles qui les rendent ridicules tel la réplique de Pangloss, qui refuse d’avoir tort « car enfin je suis philosophe : il ne convient pas de me dédire. »

Voltaire fait des récits comiques d’événements tragiques :

Ici dans « Zadig, ou La Destinée » :

« Dès ma plus tendre jeunesse, reprit le seigneur : j’étais valet d’un Arabe assez habile ; ma situation m’était insupportable ; j’étais au désespoir de voir que, dans toute la terre, qui appartient également aux hommes, la destinée ne m’eût pas réservé ma portion. Je confiai mes peines à un vieil Arabe, qui me dit : Mon fils, ne désespérez pas : il y avait autrefois un grain de sable qui se lamentait d’être un atome ignoré dans les déserts ; au bout de quelques années, il devint diamant, et il est à présent le plus bel ornement de la couronne du roi des Indes. Ce discours me fit impression : j’étais le grain de sable, je résolus de devenir diamant : je commençai par voler deux chevaux ; je m’associai des camarades ; je me mis en état de voler de petites caravanes : ainsi je fis cesser peu à peu la disproportion qui était d’abord entre les hommes et moi ; j’eus ma part aux biens de ce monde, et je fus même dédommagé avec usure : on me considéra beaucoup ; je devins seigneur brigand ; j’acquis ce château par voie de fait. Le satrape de Syrie voulut m’en déposséder ; mais j’étais déjà trop riche pour avoir rien à craindre ; je donnai de l’argent au satrape, moyennant quoi je conservai ce château, et j’agrandis mes domaines. Il me nomma même trésorier des tributs que l’Arabie Pétrée payait au roi des rois. Je fis ma charge de receveur, et point du tout celle de payeur. »

Ici, dans « L’Ingénu » :

« A peine l’Ingénu était arrivé, qu’ayant demandé à une vielle servante où était la chambre de sa maîtresse, il avait poussé fortement la porte mal fermée, et s’était élancé vers le lit. Mademoiselle de Saint-Yves, se réveillant en sursaut, s’était écriée : « Quoi ! C’est vous ! Ah ! C’est vous ! Arrêtez-vous, que faites-vous, » Il avait répondu : « Je vous épouse », et en effet il l’épousait, si elle ne s’était pas débattue avec toute l’honnêteté d’une personne qui a de l’éducation.

L’Ingénu n’entendait pas raillerie ; il trouvait toutes ces façons-là extrêmement impertinentes. « Ce n’était pas ainsi qu’en usait mademoiselle Abacaba, ma première maîtresse ; vous n’avez point de probité ; vous m’avez promis mariage, et vous ne voulez point faire mariage : c’est manquer aux premières lois de l’honneur ; je vous apprendrai à tenir votre parole, et je vous remettrai dans le chemin de la vertu. »

L’Ingénu possédait une vertu mâle et intrépide, digne de son patron Hercule, dont on lui avait donné le nom à son baptême ; il allait l’exercer dans toute son étendue, lorsqu’aux cris perçants de la demoiselle plus discrètement vertueuse accourut le sage abbé de Saint-Yves, avec sa gouvernante, un vieux domestique dévot, et un prêtre de la paroisse. Cette vue modéra le courage de l’assaillant. « Eh, mon Dieu ! Mon cher voisin, lui dit l’abbé, que faites-vos là ? - Mon devoir, répliqua le jeune homme ; je remplis mes promesses, qui sont sacrées. ».

Mademoiselle de Saint-Yves se rajusta en rougissant. On emmena l’Ingénu dans un autre appartement. L’abbé lui remontra l’énormité du procédé. L’Ingénu se défendit sur les privilèges de la loi naturelle, qu’il connaissait parfaitement. L’abbé voulut prouver que la loi positive devait avoir tout l’avantage, et que sans les conventions faites entre les hommes, la loi de nature ne serait presque jamais qu’un brigandage naturel. « Il faut, lui disait-il, des notaires, des prêtres, des témoins, des contrats, des dispenses. » L’Ingénu lui répondit par la réflexion que les sauvages ont toujours faite ; « Vous êtes donc de bien malhonnêtes gens, puisqu’il faut entre vous tant de précautions. »

Ici, dans « Candide, ou lOptimisme »

COMMENT ON FIT UN BEL AUTO-DA-FE POUR EMPECHER LES TREMBLEMENTS DE TERRE, ET COMMENT CANDIDE FUT FESSE.

Après le tremblement de terre qui avait détruit les trois quarts de Lisbonne, les sages du pays n’avaient pas trouvé un moyen plus efficace pour prévenir une ruine totale que de donner au peuple un bel auto-da-fé[1] ; il était décidé par l’université de Coïmbre que le spectacle de quelques personnes brûlées à petit feu, en grande cérémonie, est un secret infaillible pour empêcher la terre de trembler.

On avait en conséquence saisi un Biscayen convaincu d’avoir épousé sa commère, et deux Portugais qui en mangeant un poulet en avaient arraché le lard : on vint lier après le dîner le docteur Pangloss et son disciple Candide, l’un pour avoir parlé, et l’autre pour l’avoir écouté avec un air d’approbation : tous deux furent menés séparément dans des appartements d’une extrême fraîcheur, dans lesquels on n’était jamais incommodé du soleil : huit jours après ils furent tous deux revêtus d’un san-benito, et on orna leurs têtes de mitres de papier : la mitre et le san-benito de Candide étaient peints de flammes renversées, et de diables qui n’avaient ni queues ni griffes ; mais les diables de Pangloss portaient griffes et queues, et les flammes étaient droites. Ils marchèrent en procession ainsi vêtus, et entendirent un sermon très-pathétique, suivi d’une belle musique en faux-bourdon. Candide fut fessé en cadence, pendant qu’on chantait ; le Biscayen et les deux hommes qui n’avaient point voulu manger de lard furent brûlés, et Pangloss fut pendu, quoique ce ne soit pas la coutume[2]. Le même jour la terre trembla de nouveau avec un fracas épouvantable[3].

Candide, épouvanté, interdit, éperdu, tout sanglant, tout palpitant, se disait à lui-même : « Si c’est ici le meilleur des mondes possibles, que sont donc les autres ? Passe encore si je n’étais que fessé, je l’ai été chez les Bulgares ; mais, ô mon cher Pangloss, le plus grand des philosophes ! faut-il vous avoir vu pendre, sans que je sache pourquoi ! Ô mon cher anabaptiste, le meilleur des hommes ! faut-il que vous ayez été noyé dans le port ! ô mademoiselle Cunégonde ! la perle des filles, faut-il qu’on vous ait fendu le ventre ! »

Il s’en retournait, se soutenant à peine, prêché, fessé, absous et béni, lorsqu’une vieille l’aborda, et lui dit : « Mon fils, prenez courage, suivez-moi. »

1 • Après le tremblement de terre de Lisbonne, on y fit en effet un auto-da-fé, le 20 juin 1756 ; voyez, tome XV, le chapitre XXXI du Précis du Siècle de Louis XV.

2 • Voyez, sur la pendaison de Pangloss pour cause d’optimisme, la lettre de Voltaire à Vernet, mars 1759.

3 • Il y eut en effet d’autres secousses en 1756.

Voltaire se moque des grands personnages qu’il a fréquenté comme dans Micromegas, il dit de Frédéric II de Prusse dont il a fait la cour :

« Je ne doute pas que si quelque capitaine des grands grenadiers lit jamais cet ouvrage, il ne hausse de deux grands pieds au moins les bonnets de sa troupe ; mais je l’avertis qu’il aura beau faire, que lui et les siens ne seront jamais que des infiniment petits. »

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.