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L’opinion publique est-elle le moyen de changer la société ?

mardi 18 septembre 2018, par Robert Paris

LA VOIX DES TRAVAILLEURS

« Travailleurs de tous les pays unissez-vous »

Karl Marx

édito

L’opinion publique n’est pas une boussole mais une démagogie et un alibi pour les pires politiques

Dans la « démocratie » capitaliste, on le sait, c’est une infime minorité qui détient l’essentiel des richesses et du pouvoir, mais on prétend gouverner en suivant la « volonté indiquée par l’opinion publique ». C’est soi-disant la « loi de la majorité », et ce que veut cette prétendue majorité serait indiqué par les sondages d’opinion et diffusé par les grands média et les hommes politiques. Bien entendu, c’est entièrement bidon. Un gouvernement n’a nullement besoin que sa politique soit populaire ou réellement majoritaire, au moins jusqu’aux élections suivantes. Un gouvernement n’est nullement sous la pression de l’opinion, mais il l’est sous celle des grands financiers mondiaux qui pèsent d’un poids nul en termes de pourcentage de la population.

D’ailleurs, que révèlent les prétendus « choix de l’opinion » ? Qu’ont-ils montré dans le passé et que montrent-ils actuellement ? En France, où on croit beaucoup au poids de l’opinion publique, on a assisté à des renversements d’opinion rapides et peu glorieux. Et c’est vrai aussi bien en termes de popularité d’une personnalité ou d’une politique.

Ainsi, la France de 1905 à 1910 est massivement pour la paix, dans le mouvement ouvrier comme dans les milieux populaires et la France de 1914 s’embrase en faveur de la guerre soi-disant pour sauver l’Alsace et la Lorraine, les mêmes régions qui vont être massivement bombardées par tous les belligérants ! La France de 1936-1937 a connu un grand mouvement d’opinion en faveur du Front populaire, de la gauche de l’époque en somme. La France de 1938-1939 connaît par contre une vague d’opinion à l’extrême droite avec un raz de marée en faveur de Pétain et Laval ! Et ce ne sont que deux exemples marquants de l’histoire de France mais c’est vrai à toutes les époques et dans toutes les régions du monde.

A l’époque récente, un des exemples marquants est le passage d’une Amérique prétendument novatrice d’Obama à l’Amérique de Trump et il n’est pas besoin de préciser la différence d’image. Toutes deux se prévalent d’une opinion publique américaine !

C’est en se prévalant de l’opinion publique qu’on casse les services publics, en prétendant que les fonctionnaires croquent les finances publiques, en cassant les emplois publics, en privatisant massivement santé, transports, énergie, communications, recherche, enseignement, services sociaux, etc.

C’est encore en se prévalant de l’opinion publique qu’on expulse les Roms, les migrants, les sans papiers, que l’on fait des guerres aux quatre coins de la planète, que l’on rend la société de plus en plus policière et militaire, que l’on durcit partout la répression, que l’on réduit les libertés publiques, que l’on s’attaque de plus en plus durement aux plus démunis, etc.

C’est encore au nom de l’opinion publique que l’Etat distribue l’argent publics aux prétendus « entrepreneurs » qui ne sont autres que les profiteurs, que ce soit au nom de la construction, de la santé, de la recherche, des exportations, du soutien à l’activité économique et aux innovations !

C’est au nom de l’opinion publique, soi-disant alarmée du danger climatique, que l’on soutient les centrales nucléaires, pourtant elles-mêmes entraînant un grand danger écologique !! C’est encore au nom d’un soi-disant soutien de l’opinion à l’écologie que les gouvernants financent les trusts automobiles qui produisent des voitures électriques, alors que les batteries des automobiles usagées vont devenir l’une des pires pollution de la planète et que l’électricité n’est nullement non polluante.

C’est au nom de l’opinion publique qu’agissent les gouvernants mais ils ne se préoccupent que des intérêts de moins d’un pourcent de la population, c’est-à-dire les possesseurs de capitaux, et pas ceux des petites actions mais du grand capital, des trusts, des banques, des assurances et des bourses.

Or, le fossé entre les intérêts du grand capital et celui de la majorité de la population, non seulement le prolétariat mais même la petite bourgeoisie, n’a jamais été aussi grand. Pour préserver le plus longtemps possible le système de la « crise systémique », c’est-à-dire d’un effondrement brutal, massif, mondial et définitif, il faut au système mettre la main sur les fonds publics, sur l’argent de toutes les banques, centrales, sur les épargnes et les comptes des particuliers, sur les biens mobiliers et immobiliers des particuliers, sur les entreprises et les emplois !!!! Et le grand capital est prêt à couler tout cela pour gagner des… jours d’existence supplémentaires quand le grand château de cartes mondial s’effondrera !!!! Et il dispose pour cette politique de tous les gouvernants du monde, non seulement les gouvernements « démocratiques », mais les gouvernements ouvertement dictatoriaux, ce qui montre à quel point l’opinion publique n’entre en rien dans leurs choix…

Sur ce plan, il n’existe aucune divergence entre la politique des gouvernants chinois, indiens, russes et ceux des gouvernants américains ou européens !!!! Il n’y a qu’un seul système capitaliste qui domine le monde et il n’a que faire de l’opinion publique, des intérêts des peuples.

Il ne fait appel de cette opinion publique que pour justifier des grands crimes sociaux et politiques, comme la casse de la société, des droits sociaux et démocratiques, de la paix et de la sécurité des peuples. Plus il s’en prévaut, plus il les casse. La preuve, c’est le bien-être du peuple irakien, syrien libyen, yéménite qui était la justification première des interventions armées occidentales dans ces pays et il est inutile de préciser que le bien-être de ces peuples s’est trouvé détruit massivement par ces guerres des grandes puissances occidentales !!! Et cela s’est fait sans nullement améliorer la sécurité des populations occidentales, sans supprimer ni diminuer le terrorisme qui a servi de prétexte à ces interventions armées.

On dit aux peuples qu’il faut plus de police, plus d’armée, plus d’arrestations, plus d’interdits, plus d’espionnage, plus de violence d’Etat, soi-disant parce que les peuples ont réclamé plus de sécurité mais, à chaque aggravation de la violence des classes possédantes et de leurs Etats, les peuples se retrouvent avec moins de droits, moins d’influence sur la politique intérieure comme extérieure des gouvernants.

Ce ne sont pas les velléités petites-bourgeoises ou de la jeunesse d’influer dans un sens soi-disant progressiste sur l’opinion publique par le biais des réseaux sociaux qui changent radicalement la donne.

Tout d’abord parce que ces couches sociales intermédiaires n’ont pas de perspectives propres à offrir, qu’elles sont incapables d’indépendance réelle par rapport à la société capitaliste. Le prolétariat lui-même, tant que sa couche supérieure reste attachée à cette société du profit capitaliste et de la propriété privée des moyens de production, est coupé en deux et affaibli idéologiquement, politiquement et organisationnellement, et ne peut dès lors développer ses propres perspectives de classe, les rendre publiques, les défendre au cours de ses luttes, les organiser par lui-même.

Le premier pas de l’œuvre de libération des exploités consistera donc à se libérer du poids étouffant de ses liens avec la vieille société dépassée par l’Histoire, ce qui nécessite de comprendre que le monde capitaliste vit ses derniers instants. On ne s’en sortira qu’à ce prix. Ce sont les événements à venir des crises de la société capitaliste qui donneront le branle, mais il est aussi nécessaire que les éléments les plus conscients du prolétariat ne craignent pas de donner le signal : celui de la fin de la vieille société d’exploitation de l’homme par le grand capital !

Et, dans ce domaine comme dans d’autres, il ne suffira pas que l’opinion publique change, qu’elle se détourne du capitalisme, pour que la société change.

Il faudra que les prolétaires s’arment non seulement d’une opinion révolutionnaire mais aussi s’arment tout court, d’armes bien réelles dont la première consiste à s’organiser en tant que classe, par la formation de comités de masse, contrôlant progressivement toute la société et ôtant tout pouvoir à la minorité capitaliste.

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