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Pour Hegel, qu’est-ce que la philosophie ?

jeudi 7 mars 2019, par Robert Paris

Pour Hegel, qu’est-ce que la philosophie

Hegel dans « Introduction à la Petite Logique » :

« La philosophie peut d’abord se définir, d’une manière générale, par l’investigation des choses par la pensée… La philosophie constitue un mode particulier de la pensée, mode à l’aide duquel la pensée devient connaissance, et connaissance qui pénètre dans l’intimité des choses, la pensée philosophique a, par cela même, un caractère spécial qui la distingue de toute autre activité humaine, bien que les produits de la pensée humaine soient les produits d’une seule et même pensée… Il y a, à ce sujet, une erreur qui a bien souvent prévalu, et qui consiste à considérer la pensée réfléchie comme la condition, ou plutôt comme la seule source de la connaissance… Comme si l’on disait qu’on ne peut manger que lorsqu’on connaît la composition chimique, végétale et zoologique des aliments, ou qu’on ne doit pas faire la digestion avant d’avoir achevé l’étude de l’anatomie et de la physiologie…

Comme les sentiments, les intuitions, les désirs, les volitions, etc., lorsqu’ils ne dépassent point les limites de la conscience, peuvent être nommés des représentations, l’on peut dire, en général, que la philosophie a pour objet de mettre à la place des représentations, des pensées, des catégories et surtout des notions…

Ainsi la philosophie aura d’abord pour objet, relativement à la conscience vulgaire, de démontrer la nécessité de son mode spécial de connaître, et d’en réveiller le besoin…

D’un autre côté, il est important de se bien pénétrer de ce principe, que le contenu de la philosophie n’est autre que celui qui se produit dans le domaine de l’esprit vivant pour former le monde, le monde extérieur et le monde intérieur de la conscience ; en d’autres termes, que le contenu de la philosophie est la réalité même.

La conscience immédiate de ce contenu, nous l’appelons expérience. Une observation attentive du monde distingue déjà ce qui, dans le vaste domaine de l’existence interne et externe, n’est qu’une apparence fugitive et insignifiante d’avec ce qui a une vraie réalité.

Comme la philosophie ne diffère que par la forme de la conscience vulgaire, et de la manière dont elle saisit ce contenu, elle doit montrer l’accord de la réalité et de l’expérience.

Sans doute, cet accord peut être regardé comme une justification extérieure d’une doctrine philosophique, mais l’on peut aussi, à un point de vue supérieur, poser en principe que la fin la plus haute de la science consiste à opérer par la connaissance de cet accord la conciliation de la raison réfléchie, de la raison vulgaire, et des l’expérience. »

Hegel dans « Grande Logique » :

« Il faut considérer comme un progrès infini le fait que les formes de la pensée aient été libérées de la matière où elles sont immergées dans l’intuition consciente, dans la représentation, dans notre désir et notre volonté… le fait que ces universels aient été dégagés pour eux-mêmes et qu’ils soient devenus objets de l’analyse indépendante…

En fait, le besoin de s’occuper de la pure pensée présuppose un long chemin parcouru par l’esprit humain ; on peut dire qu’il est le besoin du besoin déjà satisfait, de la nécessité de ne pas avoir de besoins, - il doit être parvenu au stade du besoin de l’abstraction de la matière, de l’intuition, imagination, etc., des intérêts concrets de l’appétit, des instincts, du vouloir, - matière dans laquelle les déterminations de la pensée restent enveloppées. »

Hegel dans « Cours d’histoire de la philosophie » :

« Pour que la philosophie apparaisse il faut la conscience de la liberté, et le peuple dans lequel la philosophie commence doit avoir la liberté comme principe ; pratiquement, cela est lié à l’épanouissement de la liberté réelle, la liberté politique. Celle-ci commence seulement là où l’individu se sait comme individu pour soi, comme universel, comme essentiel, comme ayant une valeur infinie en tant qu’individu ; où le sujet a atteint la conscience de la personnalité, où donc il veut affirmer sa valeur absolument pour soi. La libre pensée de l’objet y est incluse, - de l’objet absolu, universel, essentiel. Penser, cela veut dire mettre quelque chose dans la forme de l’universalité ; se penser veut dire se savoir comme universel, se donner la détermination de l’universel, se rapporter à soi. Là est contenu l’élément de la liberté pratique… Dans l’histoire, la philosophie apparaît donc seulement là où et en tant que se forment de libres constitutions. »

Hegel dans « Phénoménologie de l’Esprit » :

« De toutes les sciences, arts, techniques et habiletés manuelles, on admet qu’un effort complexe d’apprentissage et d’exercice est nécessaire pour les posséder. Par contre, en ce qui concerne la philosophie, le préjugé semble régner que – bien qu’il ne suffise pas d’avoir des yeux et des doigts, du cuir et des outils pour faire des souliers – chacun sait tout de suite philosopher et juger la philosophie du seul fait qu’il a un étalon de mesure dans sa raison naturelle. Comme s’il n’avait pas également avec son pied la mesure de son soulier ! Il semble qu’on mette le secret de la philosophie dans le manque de connaissances et d’études, et celle-ci semble commencer où les autres finissent. »

Hegel dans « Introduction à la Petite Logique » :

« Le rapport de la connaissance spéculative avec les autres sciences consiste en ce qu’elle ne néglige pas le contenu que celles-ci puisent dans l’expérience, mais qu’elle l’admet et l’emploie. Il consiste aussi en ce qu’elle s’empare du général, des lois et des genres que contiennent ces sciences, et en fait, pour ainsi dire, sa matière propre, mais en leur communiquant un sens et une valeur élevés, et en y ajoutant d’autres catégories. »

Hegel dans « Introduction à l’Encyclopédie des sciences philosophiques » :

« Le nom de philosophie a été donné à tout ce savoir qui s’est occupé de la connaissance de la mesure fixe et de l’universel dans l’océan des singularités empiriques. »

Hegel dans « Principes de la philosophie du Droit » :

« La philosophie est le fondement du rationnel, elle est l’intelligence du présent et du réel et non la construction d’un au-delà qui se trouverait Dieu sait où. »

Hegel dans son introduction de son cours de Heidelberg sur l’histoire de la philosophie :

« Je ne réclame rien sinon que vous m’apportiez la confiance en la science et la confiance en vous-mêmes. La première condition de la philosophie c’est le courage de la vérité et la foi en la puissance de l’esprit humain. (…) Les actes de la pensée paraissent tout d’abord, étant historiques, être l’affaire du passé et se trouver au-delà de notre réalité. Mais en fait, ce que nous sommes, nous le sommes aussi historiquement ou plus exactement : comme dans ce domaine, l’histoire de la pensée, le passé n’est qu’un des aspects, de même que dans nous sommes, l’élément impérissable commun à tous est lié indissolublement à ce que historiquement nous sommes. Le trésor de raison consciente d’elle-même qui nous appartient, qui appartient à l’époque contemporaine, ne s’est pas produit de manière immédiate, n’est pas sorti du sol du temps présent, mais pour lui c’est essentiellement un héritage, plus précisément le résultat du travail et, à vrai dire, du travail de toutes les générations antérieures du genre humain. (…) Or, cette tradition n’est pas seulement une ménagère qui se contente de garder fidèlement ce qu’elle a reçu et le transmet sans changement aux successeurs ; elle n’est pas une immobile statue de pierre, mais elle est vivante et grossit comme un fleuve puissant qui s’amplifie à mesure qu’il s’éloigne de sa source. (…) L’esprit universel ne sombre pas dans un calme indifférent. Sa vie est action. L’action présume une matière existante qui est son objet ; non seulement elle l’amplifie, l’agrandit en y ajoutant de la matière, mais essentiellement elle l’élabore et la transforme. (…) Notre position et notre activité – et celles de tous les temps - consiste à appréhender la science existante, à se former par elle et en elle-même, continuer à la former et à la faire s’élever plus haut. En nous l’appropriant, nous en faisons quelque chose qui nous appartient et qui s’oppose à ce qu’elle était précédemment. »

Hegel, dans « Eléments de Philosophie de Droit » :

« Chacun est un fils de son temps et donc la philosophie est elle aussi une époque telle qu’elle est appréhendée dans la pensée de ce temps. »

« Chaque philosophie est la philosophie de son époque, elle est un maillon dans toute la chaîne du développement spirituel ; elle ne peut donc satisfaire que les intérêts de son temps. (...) C’est pourquoi il ne peut y avoir de nos jours des platoniciens, des aristotéliciens, des stoïciens, des épicuriens. Les ressusciter signifierait vouloir ramener à un degré antérieur... On peut regarder un tel retour en arrière ... comme le refuge de l’impuissance incapable de faire face à la riche matière du développement qui exige d’être maîtrisée par la pensée et saisie en profondeur - impuissance qui cherche son salut dans la fuite et dans l’indigence. »

Hegel dans l’ « Introduction aux Leçons sur l’histoire de la philosophie » :

« La philosophie est donc un système en son développement ; il en est de même de l’histoire de la philosophie et c’est là le point principal, la notion fondamentale que ce traité présentera en cette histoire. »

Hegel dans « La Raison dans l’Histoire » :

« Chaque époque, chaque peuple se trouve dans des conditions si particulières, forme une situation si particulière, que c’est seulement en fonction de cette situation unique qu’il doit se décider… »

« En tant que pensée du monde, elle (la philosophie d’une époque) n’apparaît qu’à l’époque où la réalité effective a achevé son processus de formation et en a fini avec lui. »

Hegel, dans « Introduction aux Leçons d’histoire de la philosophie » (cours de Heidelberg) :

« Le trésor de raison consciente d’elle-même qui nous appartient, qui appartient à l’époque contemporaine, ne s’est pas produit de manière immédiate, n’est pas sorti du sol du temps présent, mais pour lui c’est essentiellement un héritage, plus précisément le résultat du travail, et à vrai dire, du travail de toutes les générations antérieures du genre humain. De même que les arts de la vie extérieure, la quantité de moyens et procédés habiles, les dispositions et les habitudes de la vie sociales et politiques sont un résultats de la réflexion, de l’invention, des besoins, de la nécessité et du malheur, de la volonté et de la réalisation de l’histoire qui précède notre époque, de même ce que nous sommes en fait de sciences et plus particulièrement de philosophie nous le devons à la tradition qui enlace tout ce qui est passager et qui est par suite passé, pareille à une chaîne sacrée, ... et qui nous a conservé et transmis tout ce qu’a créé le temps passé. Or, cette tradition n’est pas seulement une vieille ménagère qui se contente de garder fidèlement ce qu’elle a reçu et le transmet sans changement aux successeurs, elle n’est pas une immobile statue de pierre, mais elle est vivante et grossit comme un fleuve puissant qui s’amplifie à mesure qu’il s’éloigne de sa source. »

Hegel, dans « Leçons sur l’histoire de la philosophie » :

« Pour que la philosophie apparaisse il faut la conscience de la liberté, et le peuple dans lequel la philosophie commence doit avoir la liberté comme principe ; pratiquement, cela est lié à l’épanouissement de la liberté réelle, la liberté politique. Celle-ci commence seulement là où l’individu se sait comme individu pour soi, comme universel, comme essentiel, comme ayant une valeur infinie en tant qu’individu ; où le sujet a atteint la conscience de la personnalité, où donc il veut affirmer sa valeur absolument pour soi. La libre pensée de l’objet y est incluse, - de l’objet absolu, universel, essentiel. Penser, cela veut dire mettre quelque chose dans la forme de l’universalité ; se penser veut dire se savoir comme universel, se donner la détermination de l’universel, se rapporter à soi. Là est contenu l’élément de la liberté pratique [...]. Dans l’histoire la philosophie apparaît donc seulement là où et en tant que se forment de libres constitutions. L’Esprit doit se séparer de son vouloir naturel, de son immersion dans la matière. »

Hegel, dans « La Phénoménologie de l’esprit » :

« Il paraît particulièrement nécessaire de faire de nouveau de la philosophie une affaire sérieuse. Pour toutes les sciences, les arts, les talents, les techniques, prévaut la conviction qu’on ne les possède pas sans se donner de la peine et sans faire l’effort de les apprendre et de les pratiquer. Si quiconque ayant des yeux et des doigts, à qui on fournit du cuir et un instrument, n’est pas pour cela en mesure de faire des souliers, de nos jours domine le préjugé selon lequel chacun sait immédiatement philosopher et apprécier la philosophie puisqu’il possède l’unité de mesure nécessaire dans sa raison naturelle - comme si chacun ne possédait pas aussi dans son pied la mesure d’un soulier. Il semble que l’on fait consister proprement la possession de la philosophie dans le manque de connaissances et d’études, et que celles-ci finissent quand la philosophie commence. »

Hegel dans « Encyclopédie des sciences philosophiques » :

« Non seulement la philosophie ne peut être qu’en accord avec l’expérience naturelle, mais la naissance et la formation de la science philosophique ont la physique empirique pour présupposition et condition. »

« Philosophie et science sont deux termes inséparables : car le propre de la pensée philosophique est de ne pas considérer les choses par leur côté extérieur et superficiel, mais dans leurs caractères essentiels et nécessaires. »

Hegel dans « Préface de la Logique » :

« Une philosophie qui ne repose pas sur une connaissance systématique ne constitue pas une science, mais bien plutôt une forme, une manière de sentir individuelle et contingente quant au contenu. (...) Ce à quoi je me suis appliqué et m’applique dans mes recherches philosophiques, c’est à arriver à la connaissance scientifique de la vérité. C’est la voie la plus difficile, mais la seule qui possède un intérêt et une valeur pour l’esprit qui, une fois placé sur le terrain de la pensée, ne se laisse pas détourner de son but par de vaines apparences, et qui possède la volonté et le courage que donne l’amour de la vérité. (...) Quant à la science, elle a devant elle ce riche contenu qu’on amené des centaines et des milliers d’années d’activité scientifique (...) La pensée, dans le droit absolu de sa liberté, s’obstine et avec raison à se réconcilier avec le riche contenu qui est devant elle, en apprenant à le revêtir de sa forme essentielle, qui est la forme de la notion, la forme de la nécessité qui lie tout contenu comme toute pensée (...). »

« La connaissance, c’est l’approche sans fin vers l’objet, par la pensée. Il faut comprendre le "reflet" de la nature dans la pensée humaine non pas d’une façon "morte", "abstraite", non pas sans mouvement, non pas sans contradictions, mais dans un processus sans fin de mouvement, de naissance de contradictions et de leur résolution. »

Hegel dans « Phénoménologie de l’Esprit » :

« Nous n’avons conscience de nos pensées, nous n’avons des pensées déterminées et réelles que lorsque nous leur donnons la forme objective, que nous les différencions de notre intériorité, et que par suite nous les marquons de la forme externe, mais d’une forme qui contient aussi le caractère de l’activité interne la plus haute. C’est le son articulé, le mot, qui seul nous offre une existence où l’externe et l’interne sont si intimement unis. Par conséquent, vouloir penser sans les mots, c’est une tentative insensée. Mesmer en fit l’essai, et, de son propre aveu, il en faillit perdre la raison. Et il est également absurde de considérer comme un désavantage et comme un défaut de la pensée cette nécessité qui lie celle-ci au mot. On croit ordinairement, il est vrai, que ce qu’il y a de plus haut c’est l’ineffable... Mais c’est là une opinion superficielle et sans fondement : car en réalité l’ineffable c’est la pensée obscure, la pensée à l’état de fermentation, et qui ne devient claire que lorsqu’elle trouve le mot. Ainsi, le mot donne à la pensée son existence la plus haute et la plus vraie. Sans doute on peut se perdre dans un flux de mots sans saisir la chose. Mais la faute en est à la pensée imparfaite, indéterminée et vide, elle n’en est pas au mot. Si la vraie pensée est la chose même, le mot l’est aussi lorsqu’il est employé par la vraie pensée. Par conséquent, l’intelligence, en se remplissant de mots, se remplit aussi de la nature des choses. »

« Le concept de l’objet se supprime dans l’objet effectivement réel, ou la première représentation immédiate se supprime dans l’expérience ; ainsi la certitude se trouve perdue dans la vérité. »

Messages

  • Hegel : "

    "un fruit avant d’apparaître comme un fruit, a d’abord été une fleur et encore avant un bouton.."

    « La manière commune de penser conçoit l’opposition mutuelle du vrai et du faux avec d’autant plus de rigidité qu’elle a coutume d’attendre dans une prise de position à l’égard d’un système philosophique donné, ou une concordance, ou une contradiction, et dans une telle prise de position elle sait seulement voir l’une ou l’autre. Elle ne conçoit pas la diversité des systèmes philosophiques comme le développement progressif de la vérité ; elle voit plutôt seulement la contradiction dans cette diversité. Le bouton disparaît dans l’éclatement de la floraison, et on pourrait dire que le bouton est réfuté par la fleur : à l’apparition du fruit, également, la fleur est dénoncée comme un faux être-là de la plante, et le fruit s’introduit à la place de la fleur comme sa vérité. Ces formes ne sont pas seulement distinctes, mais encore chacune refoule l’autre, parce qu’elles sont mutuellement incompatibles. Mais en même temps leur nature fluide en fait des moments de l’unité organique dans laquelle elles ne se repoussent pas seulement, mais dans laquelle l’une est aussi nécessaire que l’autre, et cette égale nécessité constitue seule la vie du tout. Au contraire, la contradiction à l’égard d’un système philosophique n’a pas elle-même coutume de se concevoir de cette façon ; et, d’autre part, la conscience appréhendant cette contradiction ne sait pas la libérer ou la maintenir libre de son caractère unilatérale ; ainsi dans ce qui apparaît sous forme d’une lutte contre soi-même, elle ne sait pas reconnaître des moments réciproquement nécessaires. »

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