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Mahatma Gandhi, révolutionnaire ou contre-révolutionnaire ?

samedi 24 décembre 2022, par Robert Paris

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Evelyne Roy

Mahatma Gandhi, révolutionnaire ou contre-révolutionnaire ?

Réponse à Romain Rolland et Henri Barbusse

LES savants articles de la plume de M. Romain Rolland, parus récemment dans la revue mensuelle Europe , et leur réponse dans Clarté d’Henri Barbusse, au sujet du Mahatma Gandhi, chef de file du non-violent "Non-Co-operation Movement of India" dans les années 1920-1922, ont ouvert un nouveau champ de discussion entre les deux camps opposés de l’intellectualisme radical européen. M. Rolland, le protagoniste de la Non-violence, a offert au monde un nouvel argument et, tel qu’il le conçoit, une nouvelle preuve de l’efficacité de cette doctrine appliquée aux luttes politiques. Il découvre M. Gandhi un an après que ce dernier a été envoyé aux oubliettes d’une peine de six ans de prison, et dans un langage éloquent et poétique décrit et interprète sa carrière de leader du mouvement de non-coopération, afin de prouver sa propre théorie selon laquelle la non-violence, basée sur la souffrance, le sacrifice de soi et l’amour fraternel,

M. Barbusse, appartenant au camp opposé de ceux qui croient à l’opposition de la force à la force, de la dictature à la dictature et à la survie ultime du plus fort, répond aux articles de M. Rolland en tentant de bouleverser tout le fond de la thèse de ce dernier. quant au véritable rôle de Gandhi dans le mouvement indien. M. Gandhi, affirme-t-il, n’est pas ce que M. Rolland imagine qu’il soit : un apôtre de l’amour, du sacrifice et de la souffrance, venu racheter le monde par un nouvel évangile et une nouvelle expiation par procuration. Au contraire, M. Gandhi est un révolutionnaire pour qui la non-violence n’est qu’une tactique magistrale face à une situation difficile. Si Lénine avait été à la place de Gandhi, il aurait parlé et agi comme ce dernier, déclare M. Barbusse ; les deux sont pour la contrainte ; les deux sont réalistes. Gandhi a pris soin de s’appuyer sur les masses ouvrières et paysannes. Il a toujours défendu les pauvres et les opprimés. Le mouvement révolutionnaire de l’Inde est plus une lutte sociale qu’une lutte nationaliste, et la lutte contre la bureaucratie britannique est une forme caractéristique de la lutte des classes.

Ainsi écrit Henri Barbusse dans un vaillant effort pour réfuter les arguments de Romain Rolland et pour vaincre son objectif d’utiliser Gandhi comme un nouveau bâton pour battre le programme et la tactique du bolchevisme. Il n’est peut-être pas inutile pour ceux qui ont parlé et écrit de manière critique sur le mouvement non-violent de non-coopération en Inde, au cours des deux dernières années, d’ajouter quelques mots à cette controverse dans le but de jeter un nouvel éclairage sur ce que est, après tout, un sujet sombre pour la majorité des intellectuels européens. Notre objectif actuel n’est pas d’analyser ici le mouvement de non-coopération ; cela a été fait de manière exhaustive dans deux livres de Manabendra Nath Roy, publiés en 1922 et 1923 ( India in Transition et One Tear of Non-Co-operation ; from Ahmedabad to Gaya [1]). Les forces sociales qui sous-tendent le mouvement Gandhi, ainsi que la signification et le rôle de ce dernier sur la vie indienne dans son ensemble, y ont été traitées du point de vue du matérialisme historique. Notre objectif immédiat est de prendre les articles de M. Rolland et d’y souligner certaines inexactitudes de fait et les conclusions erronées qui en résultent, qui sont en elles-mêmes suffisantes pour nier toute la force de son argument sans aller à l’extrême opposé de déclarer Gandhi à être ce qu’il n’est pas et ne sera jamais – un « vrai révolutionnaire », qu’il soit violent ou non violent.

M. Rolland doit être félicité pour son étude louable de la polémique gandhienne et pour sa connaissance plus ou moins précise du cours principal des événements de la vie politique indienne jusqu’au moment de l’incarcération de M. Gandhi. Une telle connaissance est rare chez un Européen, et trahit un réel intérêt pour le sujet de la part de ce savant et littérateur distingué. Ce n’est pas sa connaissance des principaux événements de la carrière spectaculaire de M. Gandhi que nous remettons en cause, mais son interprétation de ces événements en fonction de ses propres objectifs. Nous regrettons que les deux premiers articles sur Mahatma Gandhi qu’il a écrits ne nous soient pas parvenus. Nous n’avons que les deux derniers, mais ils contiennent assez pour prouver que M. Rolland, dans son enthousiasme pour le nouveau prophète qui doit sauver le monde, a trop tenu pour acquis le rôle de M.

Abordons brièvement quelques-uns des fils de l’argumentation de M. Rolland qui tendent tous vers la conclusion principale. En premier lieu, il surestime largement le succès du programme de non-coopération en ce qui concerne le boycott des écoles, des tribunaux, des postes et des titres gouvernementaux. Le nombre de ceux qui ont démissionné de leurs places et titres sous le gouvernement était infinitésimal ; l’abandon de la pratique par les avocats a été confiné à un nombre limité de politiciens du Congrès et de patriotes, pour un temps très limité. La majorité a repris sa pratique avant la fin de l’année. Ce n’est que dans les écoles qu’il y a eu une réponse notable de la part des étudiants jeunes, enthousiastes et idéalistes, et cela a été reconnu plus tard comme l’une des plus grandes erreurs de toute la campagne visant à éloigner ces milliers de jeunes hommes de leurs études sans leur fournir d’autres moyens d’étudier ou de gagner leur vie. Toute cette partie du programme de non-coopération a été un échec tellement reconnu qu’on n’en parle plus ni ne la considère comme faisant partie des activités nationales, bien qu’en théorie elle n’ait jamais été abandonnée.

Le boycott des draps étrangers et des marchands d’alcools eut plus de succès, parce qu’ici M. Gandhi et le Congrès trouvèrent un moyen d’attaquer directement le trésor public à sa source. Le boycott de l’alcool n’est pas, comme l’observe à tort M. Rolland, une mesure de "discipline salutaire" et "d’hygiène nécessaire". Au contraire, c’était une tentative de couper l’une des grandes sources de revenus du gouvernement indien, qui conserve le contrôle du trafic de l’alcool et en tire d’énormes profits. Le boycott et le piquetage des magasins d’alcool ont si largement réussi à couper cette source de revenus du gouvernement que d’énormes déficits ont été admis dans ce département, et le gouvernement s’est énergiquement opposé à ce côté de la campagne dès le début. Comme le fait remarquer avec raison M. Rolland, M. Gandhi mérite qu’on se souvienne de lui comme d’un réformateur social longtemps après que ses triomphes et ses échecs politiques aient été oubliés. Son plaidoyer pour la suppression de l’intouchabilité était juste, mais nous ne pouvons pas dire avec vérité qu’il ait atteint une mesure d’accomplissement pratique parmi les orthodoxes hindous qui constituaient les principaux disciples du Mahatmaji. Les révolutions sociales ne se font pas d’en haut, mais d’en bas par le jeu inexorable des lois économiques. L’intouchabilité et la caste disparaîtront de la société indienne, et disparaissent, non sous l’effet des plaidoiries passionnées d’un Mahatma, mais à cause de l’avènement de l’industrialisme et de l’éclatement des traditions patriarcales. mais nous ne pouvons pas dire avec vérité qu’il ait atteint une mesure d’accomplissement pratique parmi les orthodoxes hindous qui constituaient les principaux disciples du Mahatmaji. Les révolutions sociales ne se font pas d’en haut, mais d’en bas par le jeu inexorable des lois économiques. L’intouchabilité et la caste disparaîtront de la société indienne, et disparaissent, non sous l’effet des plaidoiries passionnées d’un Mahatma, mais à cause de l’avènement de l’industrialisme et de l’éclatement des traditions patriarcales. mais nous ne pouvons pas dire avec vérité qu’il ait atteint une mesure d’accomplissement pratique parmi les orthodoxes hindous qui constituaient les principaux disciples du Mahatmaji. Les révolutions sociales ne se font pas d’en haut, mais d’en bas par le jeu inexorable des lois économiques. L’intouchabilité et la caste disparaîtront de la société indienne, et disparaissent, non sous l’effet des plaidoiries passionnées d’un Mahatma, mais à cause de l’avènement de l’industrialisme et de l’éclatement des traditions patriarcales.

Le boycott du tissu étranger constituait la clause la plus importante du programme de non-coopération, non seulement parce qu’il coïncidait avec la philosophie sociale réactionnaire de M. Gandhi qui dénonçait l’avènement de la civilisation moderne et prêchait le culte du rouet et du bure, mais parce que l’épine dorsale du mouvement de non-coopération fondé sur le sacrifice, la souffrance et la force de l’âme était les propriétaires de moulins indigènes, dont la concurrence avec les produits du Lancashire était immensément stimulée par la prédication de la doctrine du boycott des tissus étrangers et la port de Swadeshi(produits artisanaux). Ce sont les moulins de Bombay, Calcutta et Madras qui ont financé le mouvement de non-coopération, qui, avec les propriétaires terriens de l’Inde, représente la bourgeoisie montante qui revendique avec insistance une place au soleil. Le fonds du Congrès d’un million de roupies levé en 1921-22 a été en grande partie donné par la classe capitaliste montante de l’Inde, à qui les réformes Montagu-Chelmsford n’ont pas accordé l’expansion économique dont elle aspirait. Ce fonds, en grande partie sur le papier, constituait la ficelle qui contrôlait les activités et dictait la tactique du Mahatmaji dans les moments critiques ; c’était derrière son « adresse aux hooligans de Bombay et de Madras » ; elle se trouvait sous son exhortation « à ne pas faire d’usage politique des ouvriers d’usine ;

Nous ne faisons pas ces déclarations pour désillusionner M. Rolland quant au rôle spirituel de son nouveau Messie, mais dans l’intérêt de la vérité et de l’interprétation correcte des événements historiques. La preuve de ces déclarations peut être trouvée en se référant à la liste des contributeurs au Fonds Tilak-Swaraj, et à certaines révélations très intéressantes faites par des membres de l’opposition du Congrès sur la manipulation du Fonds Tilak-Swaraj dans l’intérêt du capitalisme indien. . On répondra que M. Gandhi n’était pas responsable des péchés de ses partisans, mais M. Gandhi s’en est rendu responsable à d’innombrables reprises ; M. Rolland lui-même ne s’écrie-t-il pas : « Il était devenu en vérité la conscience de l’Inde. C’était à l’occasion de l’émeute de Chauri Chaura, lorsque M.

L’émeute de Chauri Chaura et la volte-face droite de M. Gandhi du chemin qui a conduit à la révolution jusqu’à l’impasse du réformisme constituent le tournant de sa carrière et l’épreuve décisive par laquelle toute sa philosophie sera jugée. par les générations à venir. M. Gandhi, après avoir déclaré pour la troisième fois l’inauguration de la désobéissance civile de masse, que les masses indiennes attendaient avec impatience, a pour la troisième fois rétracté son ordre et désavoué ces simples partisans qui l’avaient pris au mot. Non seulement il a exhorté les paysans émeutiers à se livrer au jugement et à faire des aveux, mais il porte personnellement la responsabilité de l’adoption des résolutions Bardoli face à l’opposition de ses compatriotes qui a dénoncé, une fois pour toutes, toute forme d’agression action et limité les activités nationales au tissage, tourner et prier. Ici se tient le révolutionnaire exposé sous ses vraies couleurs en tant que réformateur social timide, terrifié par la grandeur du mouvement qu’il était appelé à diriger et s’efforçant vainement de l’écraser dans les limites de sa propre philosophie réactionnaire.

Le résultat de Chauri Chaura et de la honteuse retraite de Bardoli, que M. Rolland décrit comme « un acte d’une valeur morale exceptionnelle », fut la condamnation à mort par pendaison de 228 paysans pour le crime d’avoir tenté d’améliorer leur misérable condition (un peine dont la barbarie a fait honte même au gouvernement britannique en Inde et a ensuite été réduite à dix-neuf condamnations à mort) ; et la dislocation temporaire de l’ensemble du mouvement de non-coopération, suivie de l’arrestation de son chef, et d’une répression gouvernementale et d’un terrorisme policier massifs dans toute l’Inde. Mais M. Gandhi n’a jamais reculé devant sa résolution et le "programme constructif" de Bardoli, qui enjoint aux paysans indiens de payer un loyer aux Zemindars (propriétaires),

« Pourquoi le gouvernement a-t-il arrêté Gandhi ? » demande naïvement M. Rolland. Et il répond : « Parce que sa non-violence était plus révolutionnaire que toute violence ». M. Rolland se trompe encore une fois. Le gouvernement britannique en Inde a arrêté M. Gandhi parce qu’il s’est rendu compte que son emprise sur le pays, et par pays nous entendons les masses rebelles, était si affaiblie qu’il pouvait l’enfermer en toute sécurité sans éveiller un grand ressentiment populaire. Et tel est bien le cas. Le silence qui tomba sur l’Inde lors de l’arrestation du Mahatmaji n’était pas la justification triomphale de la philosophie de la force de l’âme, ni l’obéissance disciplinée des masses aux injonctions de leur chef, mais l’acquiescement des multitudes à l’arrestation d’un chef qui avait cessé de les diriger ;

Jamais M. Rolland n’a parlé avec plus de justesse que lorsqu’il a qualifié les vastes bouleversements du prolétariat et de la paysannerie indienne "d’avoir le moindre lien avec le mouvement de non-coopération". Le grand réveil de masse qui a secoué le continent indien à la fin de la guerre, et qui est le résultat de nombreux facteurs mondiaux ainsi que des forces économiques internes, a coïncidé avec la montée de la campagne agressive de la non-coopération non violente. , mais n’en était pas synonyme, ni même identifié jusqu’à ce que M. Gandhi, à force de sa personnalité irrésistible et de sa sagacité politique instinctive, réussisse à souder les deux ensemble en une unité temporaire et artificielle, tout comme il réussit à lier ensemble le Communautés hindou-musulmanes. Pas au moyen d’un honnête,

Mais de telles tactiques, dépendant de la personnalité convaincante d’un homme et de la frénésie religieuse des multitudes, étaient bâties sur du sable. Après des trahisons répétées et innombrables de la part de leurs dirigeants bourgeois, les ouvriers et paysans indiens se sont éloignés de la lutte nationaliste et ont repris leur lutte interrompue pour de meilleurs salaires, moins d’heures de travail, de meilleures conditions de vie et l’amélioration de leurs conditions désespérées. situation économique. Le divorce de l’énergie de masse d’avec le Mouvement de non-coopération, signé et scellé par les décisions Bardoli répudiant toute tactique agressive et interdisant la déclaration de désobéissance civile, a entraîné l’effondrement de ce dernier et l’a livré en proie facile. entre les mains du gouvernement en attente. La seule force du mouvement avait résidé dans son soutien aux masses rebelles ; c’était la menace d’une action directe à l’échelle nationale, dont les manifestations etles hartals pendant la visite du prince de Galles n’étaient qu’un avant-goût, qui fit que le gouvernement retint si longtemps la main. Ce n’est que lorsque le mouvement s’est rendu impuissant en répudiant toute action de masse que le gouvernement a levé la main et frappé avec une férocité mortelle.

A la suite de la retraite de Bardoli, le mouvement indien a été replongé dans une confusion sans espoir, dont il se remet à peine, lentement et péniblement. L’arrestation de M. Gandhi a contribué à cette reprise en supprimant ce qui s’était avéré être une force de réaction et en laissant le champ libre à de nouveaux dirigeants pour prendre sa place. M. Rolland se trompe en observant que "le Mouvement a résisté victorieusement à l’épreuve redoutable de la première année sans guide". Il y a eu des guides, capables et compétents, qui ont pris la place de ceux qui étaient éloignés de la scène d’action. MCR Das, ancien président du All-Indian National Congress et fondateur du parti Swaraj, est le successeur reconnu de M. Gandhi en tant que leader de toute l’Inde. Il a arraché l’étendard déchu et le fait avancer dans la lutte entre le nationalisme bourgeois indien et l’impérialisme britannique, lutte qui est destinée à être longue et que M. Rolland est beaucoup trop optimiste en déclarant : « Il paraît certain que L’Indian Home Rule n’est plus en cause ; sous une forme ou une autre, c’est inévitable. L’Inde a conquis... moralement !

C’est dans ce dernier mot que réside tout le nœud du litige en cause. Pour M. Rolland, la lutte gigantesque qui secoue aujourd’hui le continent indien est une bataille morale entre les forces du bien et du mal, entre l’Adversaire et les Hôtes du Ciel. M. Gandhi est le nouveau Messie qui est apparu pour mener cette guerre spirituelle, menée non seulement au nom de l’Inde, mais du monde entier. Le triomphe de l’Inde sera un triomphe mondial des forces de la lumière sur les ténèbres, de l’esprit sur la matière, de Dieu sur Satan. Avec une telle conception de la lutte indienne pour la liberté, nous n’avons rien à faire ; il incarne le subjectivisme exagéré de l’intellectuel désabusé de l’après-guerre, s’envolant vers le domaine de la métaphysique pour échapper à la cruelle logique des faits et des réalités. Pour le marxiste scientifique, qui conçoit le monde comme bâti sur les forces économiques, soumise aux lois matérielles, une telle conception a tout le médiévalisme grotesque de la gargouille, et nous concevons l’esprit de ces idéalistes sentimentaux comme plein de telles gargouilles irréelles, grimaçantes et en désaccord avec l’époque où nous vivons. Elles cessent d’être des curiosités romantiques et deviennent dangereuses lorsqu’elles cherchent à mettre leurs conceptions à usage politique - et l’exploitation de M. Gandhi dans l’intérêt du pacifisme contre-révolutionnaire est une telle application politique de ces idées. M. Rolland et toute l’école des impérialistes spirituels, qui soutiennent que le monde doit être racheté par la force de l’âme, le sacrifice de soi et la souffrance, s’efforcent d’utiliser M. Gandhi comme preuve de leur propre thèse selon laquelle l’Europe a apporté de son propre anéantissement par l’usage de la violence, dont le bolchevisme est la forme finale et concentrée menant à la destruction ultime de tout ce qui reste de la culture et de la civilisation européennes. L’Inde, déclarent-ils, a été sauvée par l’utilisation d’armes spirituelles – que l’Europe suive l’exemple de l’Inde et se sauve elle-même.

L’argument semble convaincant jusqu’à ce que nous examinions ses prémisses et les trouvions fausses. L’Inde n’est pas encore sauvée ; elle lutte toujours pour se sortir du bourbier du retard économique ; dégénérescence sociale et sujétion politique, toutes plus ou moins contingentes l’une de l’autre. Sa lutte actuelle est très matérielle pour la terre et le pain. C’est pour cela que les paysans du Pendjab, des Provinces-Unies, du Bengale, de Madras et de toute l’Inde ont versé leur sang ; c’est pour cela que le prolétariat montant a organisé de grandes grèves de plusieurs mois, souvent au prix de la liberté et même de la vie. C’est pour cela que les ouvriers et paysans indiens ont suivi le Mahatmaji, et lorsqu’il a renié ce but, c’est pour cela qu’ils l’ont quitté, pour reprendre la lutte sur le terrain économique, en évitant l’action politique. La lutte politique, qui intronisera la bourgeoisie indienne dans un partenariat vivant avec le suzerain impérial, est loin d’être terminée ; mais les lignes de clivage de classe dans la société indienne deviennent chaque jour plus marquées, et le développement de la lutte de classe parallèle à la lutte nationaliste, et souvent antagoniste à celle-ci, est de plus en plus visible. Dans cette lutte, M. Gandhi s’est définitivement rangé du côté de la bourgeoisie ; et aussi grand qu’il soit prophète religieux, aussi grand qu’il puisse figurer comme réformateur social, et malgré sa très grande contribution au progrès du nationalisme indien dans le domaine de l’agitation et de l’organisation dans le développement futur du mouvement révolutionnaire indien, M. Gandhi doit être compté parmi les contre-révolutionnaires et non, comme le suppose à tort M. Barbusse, parmi les vrais révolutionnaires. C’est lui qui a conçu la brillante tactique de la non-coopération agressive, basée sur le non-paiement des loyers et des impôts ; c’est lui qui a trouvé un débouché au mouvement par le mot d’ordre de la Non-violence ; c’est lui qui, pour la première fois, a porté l’idée de Swaraj parmi les masses indiennes. Mais ce fut également lui qui, effrayé par l’ombre de la révolution qui planait sur le pays ; alarmé par la menace pour l’ordre établi qu’impliquait une telle révolution ; terrifié à l’idée d’effusion de sang et de sa propre incapacité à contrôler les forces d’énergie de masse une fois éveillées - c’est également lui qui a cherché à repousser cette marée montante de révolution en répudiant ces mêmes forces qu’il était appelé à diriger. c’est lui qui a trouvé un débouché au mouvement par le mot d’ordre de la Non-violence ; c’est lui qui, pour la première fois, a porté l’idée de Swaraj parmi les masses indiennes. Mais ce fut également lui qui, effrayé par l’ombre de la révolution qui planait sur le pays ; alarmé par la menace pour l’ordre établi qu’impliquait une telle révolution ; terrifié à l’idée d’effusion de sang et de sa propre incapacité à contrôler les forces d’énergie de masse une fois éveillées - c’est également lui qui a cherché à repousser cette marée montante de révolution en répudiant ces mêmes forces qu’il était appelé à diriger. c’est lui qui a trouvé un débouché au mouvement par le mot d’ordre de la Non-violence ; c’est lui qui, pour la première fois, a porté l’idée de Swaraj parmi les masses indiennes. Mais ce fut également lui qui, effrayé par l’ombre de la révolution qui planait sur le pays ; alarmé par la menace pour l’ordre établi qu’impliquait une telle révolution ; terrifié à l’idée d’effusion de sang et de sa propre incapacité à contrôler les forces d’énergie de masse une fois éveillées - c’est également lui qui a cherché à repousser cette marée montante de révolution en répudiant ces mêmes forces qu’il était appelé à diriger. alarmé par la menace pour l’ordre établi qu’impliquait une telle révolution ; terrifié à l’idée d’effusion de sang et de sa propre incapacité à contrôler les forces d’énergie de masse une fois éveillées - c’est également lui qui a cherché à repousser cette marée montante de révolution en répudiant ces mêmes forces qu’il était appelé à diriger. alarmé par la menace pour l’ordre établi qu’impliquait une telle révolution ; terrifié à l’idée d’effusion de sang et de sa propre incapacité à contrôler les forces d’énergie de masse une fois éveillées - c’est également lui qui a cherché à repousser cette marée montante de révolution en répudiant ces mêmes forces qu’il était appelé à diriger.

Les intellectuels fatigués d’Europe peuvent se tourner vers l’Orient à la recherche d’un nouveau Messie, destiné à apparaître miraculeusement pour les sauver des griffes de la réalité. Mais pour tous les révolutionnaires honnêtes qui comprennent les forces réelles qui sous-tendent des mouvements aussi importants que les révolutions russe et indienne, tous les discours sur la « guerre spirituelle » et le triomphe de la non-violence sur la violence sont rejetés comme du babillage d’enfants ou de la fièvre. éloquence de la dégénérescence intellectuelle à la recherche de nouvelles illusions. M. Gandhi a cherché à opposer sa philosophie individuelle et ses scrupules moraux à la puissance armée de la plus grande puissance qui existe – l’Empire britannique – et il a inévitablement échoué. Mais il n’aurait pas échoué aussi lamentablement s’il avait été doué de la compréhension révolutionnaire qui place les forces économiques et les lois matérielles au-dessus de la faiblesse de l’individu, et avait compté sur le pouvoir irrésistible des masses indiennes pour se frayer un chemin vers la liberté. M. Gandhi a cherché à interposer sa propre volonté entre les masses indiennes et cette lutte inévitable, et a été balayé pour faire place à d’autres plus aptes à interpréter les besoins impératifs du mouvement. Eh bien pour lui qu’il est canonisé par l’intellectualisme désabusé de l’après-guerre de l’Occident.
Remarques

1. The Vanguard Bookshop, Post Box 4336, Zurich, Suisse.

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