Accueil > ... > Forum 1207

Pourquoi l’annonce de Tepco d’un arrêt à froid de Fukushima n’a rien de rassurant ?

21 décembre 2011, 07:24

Reste une autre réalité : les raisons de l’accident. Le réacteur le plus irrémédiablement touché, bien qu’il soit difficile de discerner une différence dans leur triste état 9 mois après l’accident, a été le réacteur numéro 1 de 460 Mw : il était opérationnel depuis 1970 et prévu pour fonctionner 40 ans. Le mois précédant l’accident, à la demande de la Tepco, l’opérateur privé qui l’a fait construire, le gouvernement japonais avait prolongé, de dix ans sa durée de fonctionnement sans consulter qui que ce soit en dehors d’un petit cercle d’économistes et d’ingénieurs pro-nucléaire. Les deux autres réacteurs datent de 1973 et de 1974. Contrairement à ce qui a été expliqué pendant des mois, l’entrée en fusion des trois réacteurs n’a pas été provoquée par le tsunami. L’arrivée d’une grande vague de 13 mètres de hauteur, plusieurs heures après le séisme, n’a inondé que la partie basse des bâtiments. Selon une procédure automatique prévue à l’avance, les réacteurs (le numéro 6 étant en révision depuis plusieurs semaines) ont été brusquement mis à l’arrêt au moment du séisme de force 8,9 sur l’échelle de Richter alors que les prévisions et les précautions de l’opérateur n’avaient envisagé, avec l’accord des autorités de sûreté japonaises, qu’un tremblement de terre de force 7. Pour faire des économies lors de la construction qui avait d’ailleurs été effectuées par des compagnies différentes pour chaque installation.

Selon de nombreux spécialistes japonais qui en discutent depuis plus d’un mois, la faille de sécurité ne se situe donc pas vraiment dans la violence de la secousse, mais dans son caractère inopiné. Nul ne sait jamais, malgré les automatismes mis en place, comment un réacteur peut réagir à un brusque arrêt : bien ou mal, cela ressemble à une loterie technologique. En effet, le fonctionnement d’un réacteur et son refroidissement – essentiel – reposent sur un équilibre technique fragile qui peut être rompu par le moindre événement intérieur ou extérieur. Lorsqu’il s’arrête brusquement de fonctionner, il subit un choc brutal, comme si l’on arrêtait un véhicule ou un train lancés à grande vitesse. C’est exactement ce qui s’est produit dans les réacteurs 1, 2 et 3 et dans leurs organes auxiliaires, les générateurs de secours par exemple.

La situation a évidemment été aggravée par la vague du tsunami qui a privé la centrale d’une alimentation électrique extérieure. Les groupes électrogènes endommagés ne pouvant pas prendre le relais qu’ils avaient refusé dès la secousse tellurique. Or, en cas d’incident, un réacteur a besoin d’électricité pour que les systèmes de secours fonctionnent, notamment pour alimenter les circuits de refroidissement. L’enquête de la Commission gouvernementale, difficile politiquement et techniquement, lancée à contre-cœur par les autorités japonaises et dont les conclusions ont été partiellement publiques à la fin du mois de décembre 2011, a montré que le séisme a mis à mal la tuyauterie des systèmes de refroidissement...

Malgré cette réalité, la « fable » de la responsabilité du raz-de-marée a été utilisée en France, y compris par le gouvernement. Ce qui a permis d’expliquer au public que rien de tel ne pouvait survenir dans les réacteurs français puisque la plupart ont été construits loin de la mer et se trouvent donc hors de portée d’un tsunami. En oubliant de mentionner qu’à la fin de 1999, la centrale du Blayais, noyée par la tempête et la montée de la mer, avait failli connaître le même sort et donc un accident majeur. Mais le lobby nucléaire est à la fois sourd, aveugle et piégé par ses mensonges.

Un message, un commentaire ?

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.