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Un débat dans l’extrême gauche sur le Forum Marxiste Révolutionnaire

19 janvier 2012, 18:52, par Robert Paris

Vals, voulant défendre LO, nous a bien aidé à comprendre en écrivant ce qui suit :

Robert Paris a écrit : La question de départ était quelle campagne électorale pour des révolutionnaires ? Et je disais que parler d’interdiction des licenciements et de contrôle ouvrier sans mettre en avant la nécessité de comités de travailleurs était réformiste et pas révolutionnaire.
Où est la réponse de LO dans tout cela ?
A part nous balancer des noms d’oiseaux, ce qui n’a rien de gênant en soi, il faudrait quand même répondre sur le fond de la question posée.

Et parler de comités ouvriers, ce n’est pas seulement parler de comités de grève. C’est donner une perspective aux luttes mais c’est aussi donner une perspective sociale à la société. Donner comme perspective « le communisme » nécessite d’affirmer que la classe ouvrière doit s’organiser politiquement en masse et pas dans des syndicats.
C’est gauchiste ? La période ne s’y prête pas ? Les révolutionnaires ne sont pas assez nombreux ?
Et en 1971 ? La période était révolutionnaire ? Les révolutionnaires étaient plus nombreux ?
Et pourtant dans la campagne de 1971 on l’avançait. J’y étais et je m’en souviens parfaitement.
Pour le rappeler, de courtes citations d’une brochure de Lutte ouvrière, celle du meeting de LO du 3/12/1971 : « le programme de gouvernement du PCF ».

Je cite ces passages :
Les fondements d’un programme des travailleurs
(…) Eh bien voilà la différence entre le programme des révolutionnaires et celui du Parti communiste français. Le Parti communiste français nous dit : pour résoudre la crise du logement, il faut avoir un bon gouvernement qui construise 70.000 logements par an. Nous disons : la solution à la crise du logement commence par des mesures immédiates. Il faut que les mal-logés forment partout des comités, enquêtent sur la situation réelle, s’emparent des logements inoccupés et les réquisitionnent au profit des plus nécessiteux d’entre eux. (…)
Le contrôle ouvrier sur l’entreprise
(…)
La seule manière, c’est d’instituer le contrôle ouvrier sur l’entreprise. C’est que dans chaque usine existe un comité de travailleurs élus par l’ensemble de leurs camarades, rendant des comptes à chaque moment et révocables à tout instant, qui contrôle toute la marche de l’entreprise et veille à ce qu’elle ne se fasse pas aux dépens des travailleurs, qui contrôle l’embauche, les licenciements, les livres de compte, les prix, les cadences, etc…
(…) A cette condition, et à cette seule condition (…) (des mesures comme) « aucune suppression de poste sans création au préalable d’un poste équivalent » pourrait peut-être être imposé aux entreprises. (…) Et finalement ce contrôle des travailleurs sur l’entreprise par leur comité élu et révocable, à un échelon plus large par les représentants élus et aussi révocables de ces comités, c’est bien aussi la seule manière pour que le plan et tous les projets (…) soient au service des travailleurs.

Pour une union et une mobilisation des travailleurs

Mais justement de tels comités de travailleurs appelés à se prononcer sur le programme qu’ils veulent, serait le moyen de mobiliser les masses populaires. Ce serait le moyen de les organiser et de leur permettre ensuite, au cas où le gouvernement qui se réclamerait des travailleurs viendrait au pouvoir, non seulement d’appliquer le programme (…) mais aussi de contrôler (…) »

En somme pas de contrôle sans comités. Pas de programme électoral des révolutionnaires sans comités…

ET AUJOURD’HUI ?

Et Vals répond :

Eh bien, fais encore un effort et tu comprendras peut-être qu’un PC de centaines de milliers de militants et sympathisants et représentant la grande majorité de l’electorat, c’est un peu différent de la situation actuelle...
Et que s’adresser aux travailleurs qui trois ans avant ont connu une immense grève générale, c’est aussi quelque peu différent ...

alors, si tu veux militer comme en 1971, ne te prive pas et garde ton calendrier arrêté avec une propagande intangible....
Mais d’autres pensent, que stratégie et tactiques se construisent et évoluent en fonction d’un contexte et de la conscience REELLE des travailleurs au moment où on s’adresse à eux...!

Cela signifie qu’au PCF on peut écrire que les revendications sans l’organisation politique de masse des travailleurs sous forme de conseils ouvriers, de comités de travailleurs, de soviets en somme, c’est du réformisme, mais LO aujourd’hui peut se permettre de mettre en avant son programme en les éliminant.

Et il prétend que je garde mon calendrier arrêté alors que LO fait croire à ses militants qu’il n’a pas changé de programme par rapport au programme de transition qui ne cesse de souligner le caractère indispensable des conseils ouvriers.

Rappelons en quels termes Trotsky définissait, dans "Le programme de transition", le rôle des révolutionnaires :

"’- orienter de façon critique à chaque nouvelle étape et lancer les mots d’ordre qui appuient la tendance des ouvriers à une politique indépendante, approfondissent le caractère de classe de cette politique, détruisent les illusions réformistes et pacifiques, renforcent la liaison de l’avant-garde avec les masses et préparent la prise révolutionnaire du pouvoir."

"- notre époque (banqueroute et désagrégation des vieux partis bourgeois, faillite de la démocratie, montée du fascisme, aspiration croissante des travailleurs à une politique plus active et plus offensive). C’est pourquoi chacune de nos revendications transitoires doit conduire à une seule et même conclusion politique : les ouvriers doivent rompre avec tous les partis traditionnels de la bourgeoisie pour établir, en commun avec les paysans, leur propre pouvoir."

"Les syndicats, même les plus puissants, n’embrassent pas plus de 20 à 25 % de la classe ouvrière et, d’ailleurs, ses couches les plus qualifiées et les mieux payées. La majorité la plus opprimée de la classe ouvrière n’est entraînée dans la lutte qu’épisodiquement, dans les périodes d’essor exceptionnel du mouvement ouvrier. A ces moments là, il est nécessaire de créer des organisations ad hoc, qui embrassent toute la masse en lutte : les COMITÉS DE GRÈVE, les COMITÉS D’USINES, et, enfin, les SOVIETS. En tant qu’organisation des couches supérieures du prolétariat, les syndicats, comme en témoigne toute l’expérience historique, y compris l’expérience toute fraîche des syndicats anarcho-syndicalistes d’Espagne, développent de puissantes tendances à la conciliation avec le régime démocratique bourgeois. Dans les périodes de luttes de classes aiguës, les appareils dirigeants des syndicats s’efforcent de se rendre maîtres du mouvement des masses pour le neutraliser. Cela se produit déjà lors de simples grèves, surtout lors des grèves de masse avec occupation des usines, qui ébranlent les principes de la propriété bourgeoise. En temps de guerre ou de révolution, quand la situation de la bourgeoisie devient particulièrement difficile, les dirigeants syndicaux deviennent ordinairement des ministres bourgeois.

C’est pourquoi les sections de la IV° Internationale doivent constamment s’efforcer, non seulement de renouveler l’appareil des syndicats, en proposant hardiment et résolument dans les moments critiques de nouveaux leaders prêts à la lutte à la place des fonctionnaires routiniers et des carriéristes, mais encore de créer, dans tous les cas où c’est possible, des organisations de combat autonomes qui répondent mieux aux tâches de la lutte des masses contre la société bourgeoise, sans même s’arrêter, si c’est nécessaire, devant une rupture ouverte avec l’appareil conservateur des syndicats. S’il est criminel de tourner le dos aux organisations de masse pour se contenter de fictions sectaires, il n’est pas moins criminel de tolérer passivement la subordination du mouvement révolutionnaire des masses au contrôle de cliques bureaucratiques ouvertement réactionnaires ou conservatrices masquées ("progressistes"). Le syndicat n’est pas une fin en soi, mais seulement un des moyens dans la marche à la révolution prolétarienne.

Les comités d’usine

Le mouvement ouvrier de l’époque de transition n’a pas un caractère régulier et égal, mais fiévreux et explosif. Les mots d’ordre, de même que les formes d’organisation, doivent être subordonnés à ce caractère du mouvement. Rejetant la routine comme la peste, la direction doit prêter attentivement l’oreille à l’initiative des masses elles-mêmes.

Les grèves avec occupation des usines, une des plus récentes manifestations de cette initiative, sortent des limites du régime capitaliste "normal". Indépendamment des revendications des grévistes, l’occupation temporaire des entreprises porte un coup à l’idole de la propriété capitaliste. Toute grève avec occupation pose dans la pratique la question de savoir qui est le maître dans l’usine : le capitalisme ou les ouvriers.

Si la grève avec occupation soulève cette question épisodiquement, le COMITÉ D’USINE donne à cette même question une expression organisée. Élu par tous les ouvriers et employés de l’entreprise, le Comité d’usine crée d’un coup un contrepoids à la volonté de l’administration.

A la critique que les réformistes font des patrons de l’ancien type, ceux qu’on appelle les "patrons de droit divin", du genre de Ford, en face des "bons" exploiteurs "démocratiques", nous opposons le mot d’ordre des comités d’usine comme centres de lutte contre les uns et les autres.

Les bureaucrates des syndicats s’opposeront, en règle générale, à la création de comités d’usine, de même qu’ils s’opposeront à tout pas hardi dans la voie de la mobilisation des masses. Il sera, cependant, d’autant plus facile de briser leur opposition que le mouvement aura plus d’ampleur. Là où les ouvriers de l’entreprise, dans les périodes "calmes", appartiennent déjà tous aux syndicats (closed shop), le comité coïncidera formellement avec l’organe du syndicat, mais il en renouvellera la composition et en élargira les fonctions. Cependant, la principale signification des comités est de devenir des états-majors de combat pour les couches ouvrières que le syndicat n’est, en général, pas capable d’atteindre. C’est d’ailleurs précisément de ces couches les plus exploitées que sortiront les détachements les plus dévoués à la révolution.

Dès que le comité fait son apparition, il s’établit en fait une DUALITÉ DE POUVOIR dans l’usine. Par son essence même, cette dualité de pouvoir est quelque chose de transitoire, car elle renferme en elle-même deux régimes inconciliables : le régime capitaliste et le régime prolétarien. L’importance principale des comités d’usine consiste précisément en ce qu’ils ouvrent, sinon une période directement révolutionnaire, du moins une période pré-révolutionnaire, entre le régime bourgeois et le régime prolétarien. Que la propagande pour les comités d’usine ne soit ni prématurée ni artificielle, c’est ce que démontrent amplement les vagues d’occupations d’usines qui ont déferlé sur un certain nombre de pays. De nouvelles vagues de ce genre sont inévitables dans un prochain avenir. Il est nécessaire d’ouvrir à temps une campagne en faveur des comités d’usine pour ne pas se trouver pris à l’improviste."

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