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Le capitalisme peut-il s’effondrer de lui-même définitivement ?

17 décembre 2013, 07:47

Pierre Yves Cossé, ancien commissaire au Plan écrit dans le journal patronal « La Tribune » :

Les réformistes, dont je suis, se sont comportés comme si la société pouvait être transformée sans que les acteurs comprennent exactement l’ampleur des transformations qui la secouaient. Et lorsque nous soupçonnions leur ampleur, nous avons trouvé plus sage de jeter un voile de peur d’inquiéter et de démobiliser les bonnes volontés. D’où un certain nombre d’erreurs. Voici quelques exemples de réalités que nous avons plus ou moins esquivées… Nous avons parlé seulement de crise économique et financière, à caractère conjoncturel, et non de changement de monde. Nous avons renoncé de fait à tout « grand récit » sur notre nouvelle place dans ce monde nouveau… La classe politique s’est tue, en partie par incompréhension du fait de son hexagonalité et surtout par prudence. Les Français seraient incapables de comprendre cette nouvelle donne. Il était urgent de gagner du temps.
Le diagnostic économique est pourtant clair : un pays en croissance faible qui ne peut durablement équilibrer sa balance des paiements courants vit au-dessus de ses moyens. Il lui faut produire plus et mieux, travailler davantage et répartir les « sacrifices » de façon équitable. Qui le dit clairement dans ce pays ?
Les réformistes on cru qu’ils pouvaient développer leurs « fonds de commerce » indépendamment de cette bascule du monde et de ce déséquilibre majeur. Cela ne leur a guère réussi car ils ont peu avancé sur des problèmes exclusivement franco-français comme le logement, l’école, la protection sociale, soit que les fonds publics aient manqué, soit que la peur croissante et diffuse engendrée par le changement du monde ait accru les blocages et les conservatismes... Lorsque le président de la Société Générale annonçait un objectif de retour sur capital (ROE) supérieur à 15%, qui impliquait une déconnexion de l’économie réelle et des prises de risques dans des opérations de marché, ni le ministre de l’Économie, ni le gouverneur de la Banque de France n’ont mis en garde. Pour ma part, m’inquiétant auprès d’un conseiller de Dominique Strauss- Kahn, je m’entendis répondre « il ne faut pas inquiéter la bourse. La « création de valeur (quelle valeur ?) » était la panacée. Toujours, la priorité à l’immédiat… Nous nous sommes réjouis de la montée de l’individualisme : effacement des contraintes sociales et familiales, émancipation des femmes, des jeunes et des groupes les plus ignorés. A titre personnel, nous sommes tous devenus plus individualistes, sans en voir toutes les implications… Cet effacement du collectif est pour une part la résultante d’une inquiétude généralisée sur l’avenir et d’un renoncement à tout projet de transformation de la société. Si demain sera pire qu’aujourd’hui, ne nous préoccupons que du présent et de l’économie.

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