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Mali : la « guerre asymétrique » de l’impérialisme français

4 mai 2013, 10:57

À la sale guerre des groupes islamistes au nord vient désormais se rajouter la sale guerre de la France et des troupes maliennes. Exactions contre exactions et les populations civiles, loin d’être sauvées, sont doublement menacées. Ceux qui ont échappé aux uns vont être la cible des autres, accusées de complicité, volées, violées, bombardées. Les troupes maliennes n’ont de cesse que de démontrer leur capacité de violence, elles qui avaient été accusées de molesse, quitte à prendre des victimes comme accusés et à les fusiller sans jugement pour augmenter leur tableau de chasse. Délit de faciès de touareg, délit de contestation sociale, délit de détention d’une arme, délit de désir de se déplacer, tout est devenu un délit dans ce pays en guerre pris entre deux feux, entre islamistes et anti-islamistes. L’anti-terrorisme a bon dos pour justifier de terroriser en réalité les populations civiles.

L’armée française et l’armée malienne ne valent pas mieux en matière de défense des populations civiles que les armées islamistes et touaregues. Il suffit de rappeler que le général commandant l’opération de la France au Mali est un ancien officier supérieur commandant l’opération de la France au Rwanda, commandant le génocide donc puisque la France de Miterrand-Léotard était l’organisateur du massacre de 1994. Les bombardements par avions rafale n’ont pas cessé et les habitations civiles peuvent aussi bien en faire les frais que de vrais camps des bandes armées du nord. Et ce n’est qu’un début…
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Les Maliens ont parfaitement conscience que toutes les interventions armées étrangères en Afrique se sont soldées par une aggravation des violences, de la misère et de la dictature. Elles en ont vu le résultat tout récemment en Côte d’Ivoire où résidaient de nombreux maliens. Les troupes françaises et américaines avaient réussi à changer de dictateur pour mettre le leur mais n’ont pas supprimé la dictature et la misère est plus grande que jamais.
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La première chose qu’il aurait fallu dire, c’est que ce désert du nord Mali intéressait la France parce que sa partie ouest, c’est le gaz et le pétrole et que sa partie est, c’est l’uranium, celui qui est frontalier de l’uranium du Niger et qu’exploite le trust français Areva ! Ce n’est pas tout à fait secondaire dans l’intervention militaire de la France… Et ce n’est pas les seuls buts de guerre qui en font une intervention impérialiste !
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Quand le gouvernement français a choisi d’envoyer l’armée au Mali, il ne répondait pas seulement à la nécessité pour lui de sécuriser ses profits dans la région, en particulier l’uranium d’Areva. Il avait aussi un objectif et social : faire face à la situation sociale et politique explosive à Bamako et dans les villes maliennes, avec l’effondrement de l’Etat, le discrédit des chefs militaires imposant leur dictature et détournant les profits, la haine montante des classes dirigeantes dévouées à l’impérialisme. Cette situation sociale explosive a pris un tour nouveau avec l’envahissement du nord Mali par des bandes armées islamistes venues de Libye et des groupes armés touarègues. Cette attaque n’a fait que dévoiler le pourrissement et l’effondrement de l’Etat malien.
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Ainsi, peu avant l’action militaire des troupes françaises, la capitale Bamako a connu une grève spontanée et explosive des transports de bus, bloquant la ville. Se saisissant de l’appel des dirigeants syndicaux de la Sotrama, les travailleurs ont transformé les deux heures de débrayage prévues en grève générale illimitée, sans que les bureaucrates syndicaux puissent dire leur mot. Les chauffeurs de bus tenaient à exprimer ainsi leur ras-le-bol du rançonnage exercé par les forces de l’ordre sous prétexte de contrôle des papiers. Cette grève spectaculaire des transports dans la capitale, débordant les cadres syndicaux, est symptomatique de la crise sociale et politique à Bamako. Ceux qui dirigent d’habitude sans difficulté les luttes étaient eux-mêmes débarqués comme le sont les partis politiques classiques et les organisations religieuses, elles-mêmes remises en question.
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Si la relative popularité, au début, de l’intervention militaire française a permis de faire accepter l’occupation militaire de Bamako, alors que la population s’était opposée violemment à une telle occupation même par des troupes africaines et plus encore par des troupes françaises, rien ne prouve que l’opération de remise à l’ordre dans la capitale soit facile. Sanogo, le capitaine qui s’était fait connaitre en prenant la tête de la révolte des petits soldats refusant l’autorité de la hiérarchie militaire, a lui-même tenu à cautionner publiquement l’intervention française, laissant croire que la France allait réussir à sauver le peuple malien des bandes armées. Mais, là encore, rien n’est moins sûr. Même si l’intervention française contre les bandes armées du nord peut garder une certaine popularité, un certain temps, l’intervention au sud contre la révolte, pour remettre en selle l’Etat, l’armée, la hiérarchie, les classes dirigeantes, risque d’être beaucoup plus délicate. Rien ne dit que les bérets verts (les révoltés) et les bérets rouges (favorables à la hiérarchie) se réconcilient aisément. Rien ne dit que les classes dirigeantes reviennent facilement au pouvoir.
17/01/2013, Une guerre au Mali et de l’uranium au Niger : des islamistes très utiles au pouvoir français, Le Grand Soir
De la même façon qu’au moment de l’intervention militaire contre Kadhafi en Libye, il est insupportable de se retrouver sommé de soutenir une intervention militaire déployée par ceux qui sont largement responsables de la gravité de la situation.
Qui plus est, qui peut vraiment croire qu’il s’agit d’une opération "pour la démocratie au Mali" ? Cela fait des décennies qu’elle est bafouée dans ce pays par des régimes corrompus largement soutenus par la France. Alors, pourquoi cette subite urgence "démocratique" ?De même, qui croira qu’il s’agit de "sécuriser la région" ? En réalité, il s’agit de sécuriser l’approvisionnement des centrales nucléaires françaises en uranium : ce dernier est en effet extrait dans les mines du nord du Niger, zone désertique seulement séparée du Mali. par une ligne sur les cartes géographiques.
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La France a soutenu avec la plus grande constance les gouvernements corrompus qui se sont succédé au Mali, aboutissant à un délitement total de l’État. C’est probablement cet effondrement qui a amené les groupes islamistes à s’enhardir et à avancer vers Bamako.
De même, la France a maintenu depuis 40 ans le pouvoir du Niger dans un état de faiblesse et de dépendance par rapport à l’ancienne puissance coloniale et son entreprise d’extraction de l’uranium, la Cogéma devenue Areva. Alors que les dirigeants nigériens essaient tant bien que mal de contrôler ce que fait Areva, la France reprend totalement la main avec son intervention militaire.

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