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En souvenir de 1943, une révolution il y a 70 ans !

13 août 2013, 09:09

Il y a plus de soixante ans, le ghetto de Varsovie entrait en révolte contre l’occupant nazi. De nombreux ouvrages ont été écrits sur le sujet. Le meilleur parfois (note 1), le moins bon souvent. Selon certains auteurs, les insurgés luttaient pour sauver l’honneur du peuple juif. Pour d’autres, il y avait le futur État juif à l’horizon. Toujours est-il qu’il faut beaucoup chercher pour trouver les raisons de cette insurrection dans les enseignements des rabbins.

Soyons clairs, les religieux n’étaient pas vraiment présents parmi les révoltés, et pas davantage les sionistes purs et durs. La majorité des combattants et des dirigeants de la lutte des juifs du ghetto de Varsovie appartenaient au Bund, mouvement socialiste révolutionnaire juif de Pologne. Quant aux jeunes sionistes qui lutteront à leur côté, la plupart venait du mouvement Hashomer Hatzaïr, nettement situé dans la gauche révolutionnaire.

Au-delà, il faut quand même savoir que les hommes et les femmes qui, le 19 avril 1943, allaient créer une surprise, mêlée d’un début de panique dans les unités de SS, étaient minoritaires parmi les survivants du ghetto, déjà en voie de liquidation. Tous étaient voués à une mort inéluctable, et en tout cas programmée. Sur près de 500 000 juifs enfermés dans le ghetto depuis le mois d’octobre 1940, il ne restait plus guère que quelque 50 000 survivants à l’heure du soulèvement.

Cette guérilla du désespoir, cette volonté de survie, quelques jours, quelques semaines encore, n’était pas une révolution. Il ne pouvait y avoir d’autre objectif que de mourir debout. La révolte, à l’état pur, qui s’exprimait depuis ces maisons en ruines, d’où partaient sporadiquement des coups de feu, prenait peut-être ses racines dans le soulèvement de Spartacus - le refus de subir plus longtemps, et la certitude d’une mort horriblement préparée. Le 19 avril 1943, alors qu’éclate la révolte dans le ghetto de Varsovie, il y a déjà beau temps que la volonté génocidaire des nazis est connue des juifs de Pologne. L’alternative se situe entre la résignation obligée et le sursaut difficilement envisageable, tant est grand l’abattement des victimes désignées. A l’extérieur des murs du ghetto, la population est rien moins que solidaire...

Pourtant, depuis près de deux ans, quelques petits groupes de jeunes militants du Bund, très décidés, ne pouvaient se résoudre à cette mort promise aux parias. L’un des dirigeants de la révolte, Marek Edelman, rappelle, dans ses Mémoires du ghetto de Varsovie, que cette volonté de survie était accompagnée d’une autre forme de résistance, par la création d’universités clandestines, d’écoles souterraines, de journaux même au faible tirage et à la diffusion difficile. Le combat contre la barbarie n’avait donc pas qu’un caractère violent.

Comme l’explique fort bien Wladimir Rabi : « la décision de prendre les armes n’est née que quand (...), tout espoir de survie s’est trouvé dissipé... Du fond de l’abîme, la dignité humaine s’exprimait malgré tout, ne pouvant imaginer que la barbarie puisse rester sans réponse. »

C’est encore Marek Edelman, l’un des rares survivants parmi les combattants du ghetto de Varsovie qui, répondant à une interview dans Libération, le 18 avril 1988, expliquait : « Il n’y a jamais eu d’insurrection. Il y avait bien quelque chose mais ce n’était pas une insurrection. Une insurrection a un début, une fin et, surtout, un espoir de victoire. En avril 1943, il n’y avait pas de début et surtout il n’y avait aucun espoir ! »

Terrible réflexion, simple et tragique rappel à une histoire trop récupérée à des fins inavouables. Et Marek Edelman poursuivait : « Nous n’avions même pas choisi le jour. Les Allemands l’ont imposé en pénétrant dans le ghetto pour chercher les derniers juifs. Nous n’avions que le choix de la manière de mourir. »

Déjà, le Conseil juif du ghetto de Varsovie et sa police juive, mise en place par les nazis, devenus inutiles, avaient été dissous et ses dirigeants déportés. La seule question que les survivants pouvaient se poser était tragiquement simple : jusqu’à quand ?

La chronologie de cette révolte est nécessairement pathétique. Comment 250 hommes et femmes (chiffre fourni par Marek Edelman) peu armés, ont-ils pu s’opposer à la force brutale des SS, puissamment armés ?

Maurice Rajsfus

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