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La démocratie des Cantons suisses, née d’une lutte de classe révolutionnaire en plein Moyen Age européen

9 septembre 2013, 16:01

Le premier congrès ouvrier suisse réunissant notamment le parti socialiste, la société du Grütli, les syndicats fut tenu à Olten en 1873. Il en sortit une association d’ouvriers qui se transformera plus tard en Union syndicale suisse. Le nombre des adhérents ne cessait de croître dans un mouvement adhérant très nettement à la lutte des classes et au marxisme, chapeauté politiquement par le parti socialiste. En 1874, le parti socialiste demandait la révision de la Constitutions de 1848. Entre 1890, date de son entrée au Conseil national, et 1914, le parti socialiste put accroître sa députation à 17 parlementaires fédéraux.

Au cours de la Première Guerre mondiale, le parti socialiste suisse, sous l’influence forte du marxisme, réaffirma le programme de l’avènement politique du socialisme par la révolution. Lénine, réfugié en Suisse de 1914 à avril 1917, était alors membre du parti socialiste suisse et entretenait des liens étroits avec l’aile gauche dirigée par son ami Platten. Sa présence en Suisse était marquée par de nombreuses interventions publiques. En 1917, Lénine retourna en Russie pour la révolution avec l’aide de ses amis Robert Grimm et Platten. Les éléments socialistes révolutionnaires exploitaient le mécontentement social résultant du rationnement et des privations causés par la guerre et sa longueur, intensifiant les menées anti-mililtaristes. En 1917, en pleine guerre mondiale, le parti socialiste suisse refusait le budget militaire et appela au refus de servir. La même année, de connivence avec le Conseiller fédéral Arthur Hoffmann des membres du parti socialiste tentèrent de faciliter une paix séparée entre l’Allemagne et la Russie révolutionnaire. Cette manœuvre outragea l’opinion publique suisse et conduisit à la démission de Hoffmann et son remplacement par le Genevois Gustave Ador. En 1918, cette politique de la confrontation sociale culmina dans la grève générale décrétée par le Comité d’Olten, impliquant 250 000 grévistes.

En effet, le Comité d’Olten, le conseil supérieur de l’Extrême gauche sous la présidence de Robert Grimm et la légation des Soviets à Berne sous la direction de Ian Antonovitch Berzin (pseudonyme : "Winter") chef de mission de l’URSS à Berne et secondé de Zalkinde (parent de Leon Trotsky), encouragés par la révolution russe collaboraient activement à la subversion du régime constitutionnel et du gouvernement suisse afin de permettre l’avènement de la dictature rouge en Suisse. La révolution socialiste suisse devait éclater le 10 novembre 1918 sur l’ordre de Moscou. Il s’ensuivit une propagande intense dans les milieux ouvriers et dans l’armée conduisant à des émeutes fréquentes à travers le pays. L’audace des révolutionnaires socialistes, appuyés par la présence de 30’000 déserteurs et réfractaires à la guerre de 14-18 et ayant trouvé refuge en Suisse, s’engagèrent dans de nombreux coups de force, dont la tentative de s’emparer des arsenaux de Zurich et Berne, de bâtiments publics, d’usines électriques et de banques les 6-7 novembre 1918. Le 6 novembre, les troupes militaires furent mises en état d’alerte et repoussèrent les actions révolutionnaires. Le 10 novembre, le Comité d’Olten, gouvernement révolutionnaire parallèle en marge des institutions, proclama la grève générale, exigeant la démission du Conseil fédéral et la dissolution du parlement, le droit de vote des femmes, le travail obligatoire et la socialisation de l’armée. Le 11 novembre, le Conseil fédéral donna mission à l’armée de rétablir l’ordre intérieur. Dans les jours qui suivirent, l’armée dut faire face aux émeutes, sièges décrétés dans les principales villes et aux combats de rue. Le 13 novembre, le Conseil fédéral ordonna l’expulsion vers l’Allemagne de la légation des Soviets y compris du plénipotentiaire soviétique Ian Antonovitch Berzin. (Certains historiens voient dans l’expulsion de la légation des Soviets davantage le résultat de pressions des alliés qui refusaient de voir la Suisse tomber dans la révolution communiste que le résultat d’une implication de la légation dans les agitations de novembre dont la réalité est controversée7.) Le Comité d’Olten capitula le 14 novembre et lendemain la révolution fut stoppée, permettant au travail de reprendre à travers le pays. S’ensuivit une campagne médiatique haineuse dans les journaux socialistes vis-à-vis des institutions et l’armée de milice (cf. par exemple l’article du 18 novembre 1918 "La grippe [qui avait décimé les rangs de l’armée] venge les travailleurs" anonyme mais attribuable au révolutionnaire Humbert-Droz8 publié dans le journal "La Sentinelle" dirigé par Paul Graber).

Malgré l’échec de la grève générale, celle-ci conduisit au renouvellement anticipé du Conseil national en 1919 sur la base du système proportionnel qui venait ainsi remplacer le système majoritaire prévalant jusqu’alors. Ce changement de régime permit au parti socialiste de prendre 41 mandats.

Toutefois, les meneurs de la grève générale, 3500 personnes, en particulier les dirigeants du comité d’Olten, seront jugés et 147 d’entre eux seront condamnés. Robert Grimm verra son immunité parlementaire levée et sera condamné à 6 mois de prison, période pendant laquelle il écrira son ouvrage "Histoire de la Suisse en termes de lutte des classes". L’épisode de la grève générale servira pendant des décennies à diaboliser la gauche suisse. L’histoire revisitée dans la foulée de 1968 permettra l’avènement d’un œil bienveillant sur ces évènements de 1918 qui constituent le plus grand évènement social de l’histoire de la Suisse.

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