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L’état d’urgence vise le mouvement ouvrier

mardi 15 décembre 2015

Tandis que l’état d’urgence sert depuis plusieurs semaines de prétexte au gouvernement pour accroître la répression visant des secteurs combatifs du monde du travail en France, la bureaucratie de Pékin lance à son tour une offensive répressive contre les militants ouvriers combatifs en Chine. Depuis début décembre, des dizaines de militants ouvriers ont ainsi été assignés à résidence, arrêtés ou tout simplement portés disparus. Avec l’objectif affiché de faire taire une contestation ouvrière grandissante dans un contexte de ralentissement économique et d’intensification des tensions sociales.

Ivan Matewan

Des dizaines de militants ouvriers combatifs réprimés dans le Guangdong

Une vague de répression contre le mouvement ouvrier déferle sur la Chine. Entre les 3 et 9 décembre, dans le Guangdong, province dans le sud du pays, les militants Zeng Feiyang, Zhu Xiaomei, Deng Xiaoming He Xiaobo, Peng Jiayong et Tang Jian ont été arrêtés, alors que Meng Han a disparu et Chen Huihuai a été assigné à résidence. Leur point commun ? Être tous des militants combatifs défendant les droits des travailleurs.

Zeng Feiyang et Zhu Xiaomei sont des figures reconnues dans la lutte des ouvriers migrants, notamment dans les zones rurales. Ils aident les ouvriers à obtenir les salaires impayés, les primes et les cotisations sociales garanties par la loi mais dont le versement est peu respecté par les employeurs. Deng Xiaoming, Peng Jiayong, Tang Jian et Meng Han sont d’éminents militants de la lutte pour l’établissement de branches syndicales au sein des entreprises et la défense de la négociation collective. Chen Huihuai est à la tête de l’une des plus influentes ONG de défense des intérêts des travailleurs dans la province du Guangdong.

Certains, comme Zeng Feiyang et Zhu Xiaomei sont aujourd’hui accusés d’avoir « assemblé une foule pour perturber l’ordre social ». Notamment pour leur participation à une grève au printemps, qui a vu des milliers de salariés d’une usine de chaussures Lide, dans la ville de Panyu, exiger le versement de leurs salaires. D’autres, comme He Xiaobo, responsable d’une association aidant les victimes de blessures professionnelles à Foshan, sont accusés de « détournement de fonds ». Les autres n’ont pas encore vu de charges portées à leur encontre.

La répression : réaction de la bureaucratie de Pékin face à la montée des tensions sociales

Le durcissement de la politique de la bureaucratie de Pékin à l’égard du mouvement ouvrier est une réaction aux difficultés économiques que connaît le pays depuis près d’une année. Ces difficultés ont provoqué de nombreuses fermetures ou relocalisations d’usines. Le Guangdong, foyer de la production manufacturière chinoise, souvent qualifié « d’atelier du monde », n’a pas été épargné par ce ralentissement de l’économie du pays.

Face à la dégradation économique, les employeurs tentent de faire payer l’addition aux travailleurs, ce qui n’est pas sans mécontenter ces derniers. Selon le China Labor Bulletin, le nombre de grèves a plus que triplé depuis trois ans, et ce taux a atteint un nouveau record en novembre 2014 avec plus de 301 grèves enregistrées. Cette agitation ouvrière s’est justement concentrée dans la province du Guangdong où plus de 56 grèves ont eu lieu dans l’industrie manufacturière, le bâtiment et les mines. Dans la plupart des cas, les travailleurs réclamaient le paiement de leurs salaires après la fermeture ou la relocalisation de leurs usines. Devant la volatilisation de leurs employeurs, les travailleurs n’hésitaient pas à encercler les bureaux gouvernementaux afin d’exiger leur restitution.

En permettant à la police chinoise de sévir de plus en plus contre les militants du mouvement ouvrier, la bureaucratie de Pékin espère garder la main sur les travailleurs. Cependant, ses relais dans la classe ouvrière – le syndicat unique officiel – ont de plus en plus de mal à contenir la colère des salariés qui voient leurs conditions de travail et de vie se dégrader dans la nouvelle phase de la crise économique mondiale. Le syndicat unique et ses variantes sont contrôlés par la bureaucratie et se rangent toujours du côté du patronat contre les intérêts des travailleurs qu’ils sont censés défendre.

En réprimant les secteurs les plus combatifs du monde du travail, la bureaucratie chinoise cherche à tout prix à empêcher l’émergence d’un mouvement ouvrier qui serait indépendant à la fois du Parti communiste chinois et de l’État chinois et capable d’en finir avec les conditions d’exploitation draconiennes qui règnent actuellement dans le pays. Et ce alors même que la crédibilité de la bureaucratie du Parti communiste chinois commence à craquer sous la pression des difficultés économiques. Ainsi, la répression vise en dernière instance à tuer dans l’œuf toute contestation sociale plus grande, afin de garantir la poursuite de la restauration capitaliste dans le pays.

source : Révolution Permanente

Messages

  • Dans un rapport publié le 3 février, l’ONG internationale, Human Rights Watch (HRW), a dénoncé les abus commis par la police et l’État français sous l’état d’urgence. Le rapport souligne le refus systématique et arbitraire de droits démocratiques fondamentaux par la police française, non contrôlée par le pouvoir judiciaire en vertu de l’état d’urgence, et le ciblage des personnes d’origine musulmane.

    HRW déclare, « La France a effectué des perquisitions et des assignations à résidence abusives et discriminatoires contre des musulmans dans le cadre de sa nouvelle loi à vaste portée sur l’état d’urgence. Ces mesures ont créé des difficultés économiques, ont stigmatisé les personnes ciblées et ont traumatisé des enfants. »

    Selon les données de HRW, étayées par de nombreuses informations des médias français, les attaques contre les droits démocratiques se produisent sur une vaste échelle. En plus de 3.289 perquisitions sans mandat de maisons et de bâtiments, des équipes SWAT de la police et des gendarmes sont entrées par effraction, ont attaqué les occupants, les ont menottées et agressés. Elles ont régulièrement et arbitrairement endommagé les portes, les meubles et les biens des personnes visées ; celles-ci doivent ensuite réparer les dégâts sans espoir de compensation par l’État.

  • Le lendemain du rapport de HRW, Amnesty International (AI) a publié son propre rapport, « Des vies bouleversées, l’impact disproportionné de l’État d’urgence en France ». Il précise : « Ce rapport passe en revue un certain nombre de cas illustrant les dérives de la mise en œuvre des mesures d’urgence, en particulier les ordres de perquisition de domiciles et les arrêtés d’assignation à résidence, et conclut que ces mesures ont été appliquées de façon bien trop généralisée et, dans certains cas, arbitrairement. Les autorités françaises ont notamment restreint les droits humains, et en particulier les droits à la liberté, à la vie privée, à la liberté de réunion et le droit de circuler librement au-delà des exigences que la situation impose. »

    « De plus, dans certains cas, ces mesures ont été appliquées de façon discriminatoire. Certains musulmans ont été ciblés principalement du fait de leur pratique religieuse, en l’absence totale d’éléments indiquant qu’ils avaient commis une quelconque infraction pénale. »

    AI, comme HRW, détaille de nombreux cas de violence et de discrimination, principalement contre la population musulmane, par les forces de l’État. Dans un exemple, « Un membre de l’association dirigeant la mosquée d’Aubervilliers (région parisienne), perquisitionnée le 16 novembre, a déclaré : ‘La perquisition a été très violente, c’était une profanation. Ça nous a fait mal et ça nous a fait peur […] Le responsable de la mosquée a été aussi mis en garde à vue après la perquisition… mais cela n’a rien donné, ils n’ont rien trouvé. Le pire c’est que s’il y avait de véritables soupçons, ils lanceraient des enquêtes… mais là c’est comme s’ils nous punissaient pour rien.’ »

  • Les milliers de perquisitions sans mandat et les centaines d’assignations à résidence imposées depuis novembre ont un impact dévastateur. Plus de 407 assignations à résidence ont été imposées et HRW rapporte qu’en date du 2 février, 303 étaient toujours en vigueur. De telles mesures, qui imposent de se présenter à un commissariat 3 ou 4 fois par jour, font qu’il est impossible aux gens de travailler. Beaucoup ont perdu leur entreprise ou leur emploi.

    Il est remarquable que des 488 enquêtes supplémentaires ouvertes relatives aux perquisitions, aucune d’entre elle n’est liée au terrorisme. Seules cinq enquêtes liées au terrorisme ont été lancées, ainsi que 21 enquêtes pour « apologie de terrorisme » qui n’impliquent pas cependant une activité terroriste quelconque.

    L’échec d’une opération anti-terroriste massive, opérant sans restrictions judiciaires et ayant à sa disposition tous les moyens technologiques de l’espionnage électronique de masse, de trouver plus d’une poignée de gens suspects de terrorisme, soulève de sérieuses questions quant au développement des moyens policiers ayant lieu actuellement en France.

    Après les attaques contre Charlie Hebdo, les services de renseignement et les programmes d’espionnage de masse ont été renforcés par des milliers de nouvelles recrues. Le fait que leur activité n’ait découvert que cinq personnes soupçonnées de terrorisme soulève la question de savoir quel est l’objectif réel de leur espionnage.

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