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Le monde de demain ne sera pas celui d’hier
dimanche 6 janvier 2019, par
Ce qui est certain c’est que le monde de demain ne sera pas celui d’hier mais on ne sait pas encore dans quel sens !
Il est clair que la journée d’hier a été un succès de plus du mouvement des gilets jaunes qui fait taire tous ceux qui l’avaient enterré, même les média les plus hostiles, même s’ils voudraient bien le cacher. Cela n’est pas fait pour étonner ceux qui participent au mouvement et qui voient bien que les actions se remettent en place, que les réunions sont remplies, débattent activement, ne diminuent pas en discussions ni en radicalité. Le mouvement se structure et s’approfondit. Son soutien parmi les travailleurs n’a pas baissé. Les manœuvres du pouvoir, de tous nos adversaires ou de certains prétendus porte-paroles autoproclamés ne peuvent pas décourager ni détourner les gilets jaunes. Nos adversaires voudraient bien que le mouvement tourne aux classiques revendications purement économiques et certains pensent que c’est une bonne perspective. Mais le mouvement est resté porteur de quelque chose de bien plus profond : nous voulons tout changer, nous ne voulons plus de pauvreté d’un côté et de richesse de l’autre, nous ne voulons plus d’un Etat au service des seuls milliardaires.
Dans le mouvement des gilets jaunes, on vient d’assister à une manœuvre qui n’en est pas moins révélatrice : la lettre ouverte à Macron de la part du groupe Facebook « La France en colère » de Drouet et Ludosky, qui s’intitulent eux-mêmes porte-paroles du mouvement. En effet, cette lettre qui répète plusieurs fois vouloir discuter avec Macron, faisant ainsi preuve d’une modération et d’une volonté de collaboration qui tranche avec le mouvement, reconnaît cependant un fait très important : c’est une véritable lutte de classes qui s’engage et ceux qui le disent ne le souhaitent pas du tout !
« Comprenez-vous que vous appelez à une véritable lutte des classes néfaste à l’unité et à la cohésion de la France ? » écrivent-ils…
Nous assistons en effet à des événements historiques dans cette reprise de la lutte des classes et nous ne pouvons continuer à vivre nos vies comme s’il n’en était rien.
Souvent, en lisant des ouvrages sur l’Histoire, il a pu nous sembler que nos prédécesseurs avaient pu vivre de telles périodes où le monde bascule brutalement dans un changement radical, dans un sens étonnant, des millions d’hommes et de femmes se mettant à agir collectivement de manière tout à fait inattendue, à se comporter d’une façon qui n’avait aucun antécédent proche, comme s’ils étaient poussés par une force incompréhensible, et commençaient au travers de leurs expériences d’action et de discussion collectives à développer une conscience qui n’avait semble-t-il aucun antécédent connu. Comment les peuples opprimés entrent en révolution, nous nous étions souvent posé la question sans avoir de réponse. Certes, nous devisions sur les conditions objectives mais sans comprendre comment celles-ci pouvaient suffire à amener les opprimés à prendre confiance en eux-mêmes, si bien que les meilleurs militants pour ce changement en venaient à le mettre en doute, à perdre confiance dans les capacités collectives des prolétaires, trouvant de multiples explications pour justifier que les prolétaires n’allaient plus savoir comment on fait pour s’organiser en masse de manière révolutionnaire, comment on fait pour entrer dans une lutte de classes déterminée, radicale, s’en prenant aux racines mêmes de la société de classe et du pouvoir des classes possédantes.
Eh bien, l’effondrement du capitalisme, retardé en 2008 par des interventions massives des banques centrales et des Etats de toute la planète, revient en boomerang et les peuples travailleurs de la planète, eux aussi, prennent conscience que l’affrontement fondamental approche.
La révolte des gilets jaunes pourrait n’être qu’un feu follet, qu’une péripétie française, qu’un accident, qu’un fait divers, si elle ne se déroulait pas dans ce cadre mondial, gigantesque, historique, celui de la chute inéluctable du capitalisme mondial.
C’est l’état complètement déliquescent du capitalisme qui a permis que la lutte des plus démunis en France ait d’emblée un tel impact mondial, à la fois entraînant des répliques dans un grand nombre de pays et provoque des affolement planétaires aux classes possédantes, celles-ci ayant des visions et des cauchemars de gilets jaunes aux quatre coins du monde…
Bien des gens en étaient encore à la vieille idée selon laquelle le capitalisme était indépassable, un horizon mettant le monde au taquet, impossible à doubler en termes économiques, sociaux, politiques, moraux, humains, en étaient à croire que les gens ne pourraient jamais, après les expériences éprouvantes de la trahison stalinienne, reconcevoir une autre société que l’on commence à voir apparaître de manière brutale la capacité des plus démunis de se révolter, de s’insurger, de s’organiser par eux-mêmes, de débattre entre eux, de prendre leurs propres décisions, et, du coup, de faire trembler les classes possédantes, au moment même où celles-ci prétendaient qu’il suffisait qu’elles soient fermes pour s’attaquer davantage aux exploités.
Le changement est tellement rapide et radical que la plupart des protagonistes ne veulent pas croire que la page est tournée, que nous ne sommes plus tout à fait dans le même monde, que la révolution sociale a pointé son nez, que l’histoire tourne, que nous ne verrons plus le même monde…
Les gouvernants sont les premiers à tenter dans leur tête de s’accrocher à l’ancien monde. Ils essaient la méthode Coué et affirme qu’on va revenir en arrière. Misérable tentative de nier la réalité… quand elle change aussi rapidement et radicalement.
Les partis de tous bords, les syndicats, les associations, les « spécialistes », les commentateurs, les médias, les institutions, les classes possédantes et tous leurs représentants essaient encore d’aligner des mots pour ne pas sembler perturbés, pour avoir l’air de comprendre ce qui se passe, pour prétendre savoir comment tout cela va s’arrêter, comment la société va finir par absorber tranquillement ce qui s’est passé, alors que c’est exactement le contraire : rien ne sera plus comme avant… Et toutes les interprétations de ces gens-là, qui essaient de les faire passer pour des gens encore dans le coup, encore en prise sur les événements, capables de décider du cours des choses, montrent exactement l’inverse : une incapacité à gérer la situation, une impuissance à faire face au tremblement de terre social qui parcourt la population, qui s’approfondit, qui s’enracine, qui prend conscience de lui-même, qui entre en débat avec lui-même.
Certains diront : « mais où est la révolution, le pouvoir n’est pas menacé, le gouvernement n’est même pas tombé, la classe possédante n’a jamais été directement mise en cause, les forces de répression sont bien loin d’être bousculées, et encore moins battues, les bastilles ne sont pas du tout renversées, c’est simplement une petite révolte de ceux qui restent en marge du fonctionnement essentiel de la société et pas l’affrontement entre deux forces principales du système social, les gros bataillons de la classe ouvrière, celle des grandes entreprises privées et publiques, n’étant pas entrées massivement dans la danse. »
Ceux-là s’en tiennent aux apparences, ils ne voient pas ce qui fait la solidité d’une société fondée sur l’exploitation et l’oppression et c’est, avant tout, le fait que les exploités et les opprimés ne comptent pas sur leur propre force, ne se réunissent pas, ne débattent pas, n’aient pas envie d’échanger des avis avec d’autres opprimés et exploités, de s’unir à eux pour changer le monde. Du simple fait que cela est changé justement pour les plus démunis, c’est un changement radical qui annonce un vrai tremblement de terre social…
Le pouvoir aimerait bien faire comme s’il s’agissait d’un coup de colère passager, fondé sur des demandes limitées, résoluble par des petites concessions économiques et politiques, par un petit jeu de la démocratie capitaliste, eh bien ce n’est pas la réalité !
Il y a une grande différence entre un petit coup de colère et un soulèvement des opprimés et la suite va le montrer.
Cela ne signifie pas que la situation soit pavée de roses et mène de manière inéluctable au renversement de la classe possédante ou du régime. Tout d’abord parce que les classes possédantes ne vont pas se laisser faire. Et ensuite parce que le fait que les opprimés décident par eux-mêmes ne dit pas ce qu’ils vont décider, qui va les influencer et dans quel sens… Il y a bien des forces politiques et sociales qui agissent sur le mouvement et les forces qui voudraient agir consciemment dans le sens du pouvoir aux travailleurs sont bien loin d’être nombreuses et influentes…
Le fait qu’une grande partie des organisations se revendiquant de la classe ouvrière, du socialisme, de la révolution sociale, se dise défavorable aux gilets jaunes ou soient réticente joue en défaveur de la perspective de la révolution sociale se tournant contre les classes possédantes.
Cependant, nombre d’exemples historiques nous montrent que les organisations vraiment révolutionnaires ne seront pas nécessairement présentes dès le début d’un soulèvement social et qu’elles peuvent parfaitement se construire au cours de celui-ci.
Il est important cependant de remarquer que, sans parti politique, les opprimés sont privés d’une arme essentielle. Il ne suffit pas d’auto-organisation même si c’est un élément essentiel de la prise de conscience et de la construction d’une perspective de changement en profondeur de la société, une condition nécessaire mais pas suffisante de la révolution sociale…
La démocratie révolutionnaire des comités qui réunissent les opprimés et les exploités en masse est absolument indispensable à un changement radical en profondeur contre les classes possédantes, mais pour que ce changement soit possible il convient aussi que les exploités disposent d’un parti politique entièrement fondé dans la perspective de ce changement radical qi renverse le pouvoir des exploiteurs.
Sans l’arme du parti politique, aucune classe sociale ne peut diriger sa propre révolution d’une manière consciente. La bourgeoisie elle-même a été amenée au cours de sa révolution à construire un grand nombre de partis politiques, au fur et à mesure des grands problèmes posés par la révolution, des avancées et des reculs de celle-ci.
Certains opposent le parti aux comités, comme ils opposent le syndicat aux comités, mais ces formes d’organisation ne sont réellement opposées aux comités que parce que les organisations qui se réclamaient des travailleurs se sont adaptés à la société bourgeoise, y ont trouvé leur place, ont développé leur importance en son sein au point de la défendre, consciemment ou inconsciemment. Mais cela ne signifie nullement qu’il faille au mouvement spontané et auto-organisé se détourner de tous les militants politiques et de tous les militants syndicalistes, et au moins de ceux qui acceptent la démocratie révolutionnaire des comités.
Le discrédit des partis politiciens bourgeois ne signifie pas que les prolétaires aient intérêt à se passer de construire des partis prolétariens révolutionnaires et c’est même une étape essentielle des révolutions : que celles-ci mènent au développement large et démocratique de véritables partis exclusivement au service des intérêts politiques, sociaux, historiques des prolétaires, de parti militant ouvertement et clairement pour en finir avec le pouvoir des exploiteurs et la mise en place du pouvoir des opprimés.
Nous en sommes encore bien loin mais ce que démontre déjà la situation actuelle en France, c’est que les choses peuvent changer rapidement et à grande échelle…
Nous voyons bien que d’autres forces sociales et politiques agissent au sein du mouvement social et insurrectionnel, des forces petites bourgeoises, des courants politiques hostiles au prolétariat même s’ils s’en cachent. Le seul moyen de les combattre, c’est de construire des partis prolétariens révolutionnaires qui se battent ouvertement pour la perspective de la révolution sociale, celle du communisme révolutionnaire, du pouvoir aux travailleurs, au sein du mouvement insurrectionnel.
Du moment que les exploités ne comptent que sur leurs propres forces, ils peuvent tout à fait devenir les bâtisseurs d’une société nouvelle, renvoyant au musée des choses anciennes la société d’exploitation et l’Etat au service des exploiteurs.
Bien sûr, c’est seulement le premier pas qui vient d’être fait et on est loin d’avoir atteint le bout du chemin. Cependant, aller jusqu’au bout est une nécessité vitale car il n’y a pas pire crime que de débuter une révolution et la laisser sans aller à son terme car c’est la livrer à ses massacreurs comme toute l’histoire le rappelle…
Messages
1. Le monde de demain ne sera pas celui d’hier, 6 janvier 2019, 06:12
Il est clair que des gens se revendiquant des gilets jaunes vont essayer de négocier dans le dos du mouvement et que d’autres, toujours au nom des gilets jaunes, vont essayer de former des mouvements politiques qui ne vont pas dans le sens du mouvement de masse, comme on l’a vu notamment à Marseille, mais jusqu’à présent le mouvement de masse ne s’est laissé tromper par personne.
2. Le monde de demain ne sera pas celui d’hier, 6 janvier 2019, 06:14, par toto
Il est clair que le gouvernement n’entend pas combattre des minorités de gilets jaunes qui seraient violents, ou des minorités qui seraient des casseurs, ou qui seraient racistes, homophobes ou qui sait quoi d’autre, non, il entend en finir totalement et immédiatement avec toute manifestation gilets jaunes, tout rassemblement, toute réunion, toute occupation des ronds-points, toute expression gilets jaunes.
Cela signifie non la défense de la démocratie mais sa mort, tout simplement !!!
Bien entendu, en agissant ainsi, le gouvernement n’est pas assez bête pour croire que le mouvement va s’arrêter de lui-même, mais il espère, face à un mouvement qui se radicaliserait, regrouper derrière lui toutes les forces hostiles au mouvement et ainsi le vaincre par la force, par la violence, par la répression tout en ne perdant pas le soutien des classes possédantes.
Il y a très peu de chances pour que ce scénario là réussisse, mais cela peut permettre à la classe possédante de diviser le mouvement, de négocier avec une partie de celui-ci un accord de sortie de crise, et il existe une fraction des gilets jaunes capable de trahir ainsi.
Rien n’est donc sûr pour la suite du mouvement mais tout est dans le noir pour la classe possédante, plus frappée et tétanisée que les opprimés. Cela change !!!
3. Le monde de demain ne sera pas celui d’hier, 7 janvier 2019, 17:37
La participation massive des femmes aux gilets jaunes, comme vient encore de le montrer la journée des femmes de dimanche, est un élément important des nouvelles luttes de classes qui s’expriment dans l’action des gilets jaunes.
4. Le monde de demain ne sera pas celui d’hier, 7 janvier 2019, 17:40
On remarquera que le gilet jaune qui est accusé de boxer les policiers a été interpelé mais pas le commissaire de police de Toulon qui a cogné des manifestants. Pourtant, les deux sont accusés sur la base de films et accusés de la même chose !!!
5. Le monde de demain ne sera pas celui d’hier, 9 janvier 2019, 06:46, par Olivier
Oui en avant pour les Conseils, excellente année.
Avez-vous écouté cette intervention à Commercy (Meuse) pour la création d’assemblée de discussion partout ? Et l’on voit les participants parler tous les uns après les autres en lisant leur appel. Personne ne représente les autres !
https://www.youtube.com/watch?v=dfLIYpJHir4&t=8s
Il vient d’y avoir un autre appel à Commercy pour une assemblée générale. Ce serait bien si l’on pouvait y aller au moins pour voir et prendre des contacts et plus si c’est possible.
6. Le monde de demain ne sera pas celui d’hier, 20 septembre 2020, 06:42, par une infirmière
UN MONDE D’AVANT ET UN MONDE D’APRES A L’HOPITAL ?
Plus rien ne sera comme avant à l’hôpital public, nous a-t-on dit. Pourtant, du monde d’avant, il reste le manque d’effectifs, le manque de moyens, le manque de lits. Il reste aussi des soignants épuisés tant psychiquement que physiquement. Dans tous les services, les arrêts de travail se multiplient. Ceux qui, au moment du pic, ont eu le Covid gardent des séquelles physiques, ils sont en attente d’une reconnaissance de maladie professionnelle qui tarde à être officiellement établie. On ne sait même pas si la maladie professionnelle sera admise seulement pour les malades à venir ou pour les précédents. Aucune embauche n’est prévue dans aucun des services de l’APHP. Les moyens de remplacement n’ont pas permis à l’ensemble des personnels hospitaliers de prendre leurs trois semaines de congés payés minimum dont ils avaient besoin. Il semble bien que les personnels qui auraient eu le covid ne seront reconnus en maladie professionnelle qui s’ils ont été sous oxygénothérapie. On apprend aussi que les personnels qui ont ou ont eu le covid seront autorisés à continuer à travailler, en risquant d’infecter patients et personnels, tout cela pour maintenir l’objectif permanent et inchangé de ne pas embaucher !!! En somme, les promesses d’un monde meilleur par les politiciens n’engagent que ceux qui y croient et le seul monde meilleur sera celui que nous bâtirons, nous travailleurs, en renversant les classes dirigeantes.
7. Le monde de demain ne sera pas celui d’hier, 20 septembre 2020, 06:44, par Florent
Un monde nouveau, nous promettent les gouvernants !!!
Bruno Le Maire déclarait : « Il faut un nouveau capitalisme, qui soit plus respectueux des personnes, plus soucieux de lutter contre les inégalités et plus respectueux de l’environnement. »
« Il nous faudra demain tirer les leçons du moment que nous traversons, interroger le modèle de développement dans lequel s’est engagé notre monde depuis des décennies et qui dévoile ses failles au grand jour […] Les prochaines semaines et les prochains mois nécessiteront des décisions de rupture en ce sens. Je les assumerai » déclarait le 16 mars Macron.
Dans une allocution, le 12 mars à 20 heures, Macron prétendait tirer la leçon de la crise du coronavirus : « c’était une folie que de déléguer notre alimentation, notre protection, notre capacité à soigner, notre cadre de vie au fond, à d’autres... Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché, […], c’est que la santé gratuite, […] notre Etat-providence ne sont pas des coûts ou des charges, mais des biens précieux, des atouts indispensables quand le destin frappe… Il faudra des décisions de rupture, pour reprendre le contrôle dans une France et une Europe souveraines ».
Le monde du lendemain était celui d’après la fin du virus… Maintenant, les mêmes nous disent simplement que nous n’aurons qu’à… vivre avec le virus !