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Intuition et connaissance chez Kant

11 janvier 2014, 13:54

Il me semble qu’il y a un hiatus à explorer entre la conception kantienne de l’intuition et celle de la raison. Ce que dit Kant, et qui est parfaitement confirmé par la physique quantique, c’est que notre intuition (c’est à dire notre capacité à percevoir les phénomènes dans le temps et dans l’espace) est structurée par des formes a priori : la géométrie euclidienne pour l’espace et la causalité mécanique pour le temps. Or ce que nous montrent les expériences de la physique relativiste et de la mécanique quantique, ce sont des entorses à ces structures a priori : espaces non-euclidiens déformables ("mollusque quadri-dimensionnel" selon la formule d’Einstein), causalité à distance ou spontanéisme pour la physique quantique, ect... Et le fait est que les objets décrits par ces expériences nous restent absolument contre-intuitifs : on ne peut pas, par exemple, se représenter un espace riemannien ou un espace a 7 dimensions, on peut simplement l’admettre et faire une série de calculs à partir de lui, de même qu’il nous est impossible de concevoir un objet - la lumière - qui aurait à la fois des propriétés contradictoires, ondulatoires et corpusculaires. Ainsi, ce que Kant nomme les structures à priori de notre intuition est toujours valable, même après la rupture que caractérise la physique contemporaine.
Or le fait que l’on puisse calculer à partir de ces "phénomènes contre-intuitifs" relève d’un autre pouvoir que Kant admet : celui qu’à la raison de raisonner au delà des limites de l’expérience : un espace à n dimensions étant donné, il nous est possible de calculer l’évolution d’un objet en son sein, la spontanéité dans la fission de chaque atome acceptée on peut prévoir l’évolution générale d’un système sans connaître celle de ses parties, ect...
Là se situe le hiatus : là ou Kant acceptait la capacité de calcul de la raison au delà des cadres de notre intuition mais lui refusait toute capacité à produire une connaissance objective, la physique quantique met en lumière d’une part que ces cadres existent - puisque les objets ne s’y conformant pas ne sont donc pas représentables ; d’autre part que la capacité calculatoire de la raison dépasse ses cadres (puisqu’il existe une mécanique quantique qui ne se limite pas à la constatation empirique de la nature contre-intuitive de ces phénomènes, mais produit une connaissance positive), ces deux points étant en accord avec la théorie kantienne ; et enfin - et c’est là que la physique quantique enjoint à dépasser Kant - que si l’"objet" est ce qui entre sous les cadres de notre intuition et/ou de notre entendement, par exemple la loi de non-contradiction, alors la physique quantique nous met face à des "choses" en elles-mêmes, c’est à dire à des objets qui, par leurs caractères contradictoires ou contre-intuitifs, explosent les cadres a priori de notre connaissance et ne procèdent donc pas d’eux.

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