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Déclaration de Rakovsky en avril 1930

dimanche 9 octobre 2022, par Robert Paris

Christian Rakovsky, V. Kossior & N. Muralov

Les bolcheviks-léninistes russes sur la situation actuelle

(avril 1930)

introduction

Après quelque retard, nous avons enfin reçu la déclaration des camarades Rakovsky, Mouralov, Kossior et Kasparora par laquelle ces camarades s’adressaient au Parti un peu avant le XVIe Congrès. Par un hasard fatal, les copies de la déclaration qui nous ont été envoyées à l’époque ont été saisies. Malgré ce grand retard, le document que nous publions garde entièrement son importance. Malgré la concision de la formulation, le document présente des estimations claires des processus économiques et politiques, appelant par leur nom les dangers qui ne sont pas loin mais assez proches.

Cette déclaration est intimement liée à celle que Rakovsky fit à l’époque où le virage à gauche du centrisme conservait encore sa fraîcheur et n’était pas suffisamment arrêté par l’expérience. Et en même temps, ces deux documents se distinguent comme deux étapes d’étapes différentes sur une même route. La première déclaration a enregistré le virage de la direction dans le sens que l’opposition a défendu ces dernières années. En même temps, il mettait en garde contre les dangers possibles sur la nouvelle route, exigeait l’activité du Parti pour surmonter ces dangers et mettait les forces de l’opposition à la disposition du Parti. Cette manière de poser la question – dans l’esprit de la politique du front unique – est apparue à certains « capitulationnistes » ou à tout le moins semi-capitulationnistes. Être sûr,ces accusations ne venaient pas d’une source très sérieuse.[UNE]

Déjà à cette époque, nous soulignions que la politique ne consiste pas en une simple répétition de formules pouvant servir dans toutes les conditions de vie. Rakovsky ne se faisait pas la moindre illusion sur la ligne politique du centrisme à l’époque du virage à gauche. Il développe clairement et sans détour son appréciation du centrisme dans les thèses écrites en même temps que la première déclaration.

Mais la tâche ne consistait pas simplement à répéter dans la déclaration ce qui était dit dans les thèses, mais à aider le Parti, même une petite partie, à assimiler ce qui était dit dans les thèses – ou du moins une partie de celui-ci. Avec l’étouffement du PCUS, il est très difficile de vérifier quelle a été la répercussion immédiate de la première déclaration dans les rangs du Parti. Il ne fait cependant aucun doute que la déclaration de Rakovsky, qui a fait une brèche dans le mur de mensonges et de calomnies érigé par les staliniens, a été l’une des causes de la reprise de la lutte enragée contre l’Opposition de gauche devant le Congrès. Pourtant, nous avons une autre vérification vivante de la question qui nous intéresse, en dehors de l’URSS le camarade Feroci, l’un des chefs de la nouvelle opposition italienne,a raconté dans un article la grande impression produite par la déclaration de Rakovsky même sur le Comité central du Parti communiste italien, et certainement, sur sa section de gauche en particulier. Ainsi, la déclaration de Rakovsky non seulement n’amena personne à capituler, mais au contraire, servit d’une des impulsions à la formation de la nouvelle opposition italienne.

La nouvelle déclaration que nous publions maintenant pour la première fois, dresse le bilan de la politique du virage à gauche au moment même d’un nouveau demi-tour à droite. Toutes ces circonstances sont soumises dans le document à une appréciation claire à laquelle peu de choses peuvent être ajoutées aujourd’hui. Nous jugeons nécessaire de souligner seulement deux points. L’Union des Paysans Pauvres

Dans la déclaration, ils mentionnent que tout en empêchant la création de l’Union des paysans pauvres, la direction stalinienne tolère néanmoins cette organisation en Ukraine. Il faut simplement ajouter que si la tentative de Staline-Bucharin-Rykov-Kamenev et d’autres en 1924-1925, de supprimer l’organisation de la paysannerie ukrainienne pauvre n’a pas réussi, c’est uniquement grâce à la ferme opposition de l’aile révolutionnaire de le Parti ukrainien sous la direction du camarade Rakovsky.

Le deuxième point dont nous voulons parler ici concerne les capitulateurs. La déclaration établit, avec une parfaite Justice et sans pitié, que ces personnes ont perdu « aucun droit à la confiance du Parti et de la classe ouvrière ». En lien naturel avec cela, la déclaration répète qu’aucune persécution n’empêchera l’opposition léniniste de remplir son devoir jusqu’au bout.

22 octobre 1930

L. Trotski

Dans sa déclaration faite au Comité central et à la Commission centrale de contrôle le 4 octobre 1929, l’Opposition bolchévique-léniniste a souligné la nécessité d’une unification de toutes les forces communistes et révolutionnaires autour du plan quinquennal d’industrialisation, pour la lutte contre capitalisme agraire et contre la droite. Une telle unification, embrassant aussi les centralistes démocratiques, sur la base d’une reconnaissance d’un Parti monolithique, est encore aujourd’hui des plus indispensables alors que les solides rangs prolétariens doivent s’opposer à un thermidor en marche. Dans la mesure cependant où la réalisation du mot d’ordre d’unification de toutes les forces communistes signifie la fin de la période du monopole politique du centrisme, la bureaucratie centriste luttera contre lui avec la même fureur que par le passé.Le mot d’ordre de l’unification de tous les communistes révolutionnaires ne peut être réalisé que par les masses du Parti dans la lutte contre la bureaucratie centriste.

Les relations de classe

Quelles sont les relations de classe à l’intérieur du pays ? La situation politique est caractérisée par la méfiance du Parti – tout à fait méritée – envers sa direction, et la croissance de la méfiance de la classe ouvrière, de la paysannerie pauvre et moyenne envers le Parti et la dictature du prolétariat, qui n’est pas méritée. . La direction s’est discréditée en manifestant par des preuves matérielles le caractère sans scrupules de sa politique qui a changé tant de fois en quelques semaines (par exemple : la résolution du Comité du Parti de Moscou sur l’abolition de la Nouvelle Politique Economique, elle-même abolie au bout de quelques semaines car, nous a-t-on dit plus tard, c’était une erreur de la... dactylo). Aux yeux des masses ouvrières, la direction du Parti a discrédité le Parti et les syndicats.Ni le premier ni le second n’ont pu donner au prolétariat aucune défense contre les bureaucrates. Au contraire, le Parti et les syndicats semblaient soutenir les bureaucrates contre les ouvriers.

La paysannerie pauvre a traité la collectivisation complète avec une grande méfiance. Les faits en témoignent. Il y a vu, d’une part, une privation des exonérations fiscales dont il bénéficiait jusqu’alors, et d’autre part, le danger d’être soumis aux paysans moyens et aux koulaks qui se ralliaient aux kolkhozes. (Les faits montrent que même dans les fermes communales, les cartes sont jouées sur le propriétaire paysan). Les soi-disant groupes de paysans pauvres sont une fiction analogue à ce que sont, pour les ouvriers, l’autocritique, l’épuration du Parti, le favoritisme et les autres substituts bureaucratiques de mauvaise qualité du Parti et de la démocratie ouvrière.

Les ouvriers agricoles devaient, bon gré mal gré, entrer dans les fermes collectives, car il n’y avait pas d’autre issue pour eux.

Un rôle particulier sera joué dans la période à venir par le paysan moyen. Il redevient la figure centrale de la lutte des classes. L’amour des centristes (et de la droite) pour la paysannerie moyenne était de la pure démagogie, un moyen de traquer les oppositionnels bolchéviques-léninistes. En effet, les centristes et les droites ont donné à la paysannerie moyenne un appareil dont la bouche prononce plus de menaces que de paroles, menaces qui influencent par la violence et l’arbitraire, et à propos desquelles Lénine prétendait qu’il humilie les citoyens soviétiques qui sont obligés de être en contact avec elle.

Le Moyen Paysan dans les Collectivités

Dans la collectivisation complète, le paysan moyen a vu avant tout un moyen de s’extorquer du pain et d’autres produits et d’accabler de bonne volonté la paysannerie pauvre à l’aide de son bétail vivant et mort (Instruments, bêtes, etc.) exemple dont parlent Lénine et le programme de notre Parti – l’exemple vivant qui devrait convaincre et persuader le paysan moyen des avantages des collectifs – on lui offre un nœud coulant. A une telle collectivisation, il a répondu par sa procédure habituelle : la grève active et passive, ou entrée dans le collectif pour le briser de l’intérieur, par le désarmement technique (destruction de bêtes, etc.)

La tâche politique confiée maintenant au Parti consiste à rétablir la confiance dont le manque facilite le travail des forces souterraines thermidoriennes. Aucune lutte sérieuse contre l’avancée du capitalisme n’est imaginable à moins que les principales positions du Parti n’aient d’abord été consolidées – le prolétariat et la paysannerie pauvre.

Théoriquement, ce problème se résout avec une relative facilité dans la mesure où il s’agit de la classe ouvrière et des journaliers agricoles. L’affaire est plus difficile avec le paysan moyen. Se contentera-t-il du rétablissement de la NEP et de la légalité révolutionnaire, ou demandera-t-il la Néo-NEP et des revendications complémentaires incompatibles avec l’existence de la dictature prolétarienne ? Comment satisfaire la paysannerie moyenne sans cesser la lutte contre les Koulaks ? C’est déjà une question qui peut être résolue avec clarté dans la pratique. Nous ne pouvons qu’affirmer avec précision que l’instauration de la démocratie du Parti et des travailleurs et de l’Union des Paysans Pauvres contre laquelle se révolte la bureaucratie,est le moyen par lequel les revendications de la paysannerie moyenne peuvent être maintenues dans des limites compatibles avec les fondements de la dictature du prolétariat. La démocratie dans le Parti, ainsi que la démocratie soviétique dans le pays, seront le bouclier contre l’arbitraire bureaucratique débridé. Sans l’instauration d’un régime libre au sein du Parti, la paysannerie moyenne ne croira pas que la légalité révolutionnaire soit réellement établie.

La période des slogans politiquement trompeurs est passée. Seule une politique communiste honnête et consciencieuse peut sauver la dictature prolétarienne. Le seizième congrès du parti prend une importance exclusivement sérieuse. Il est fort probable, cependant, que la direction centriste cherchera à en faire le congrès le plus insignifiant jamais organisé. Même si le Congrès est déjà sur le seuil, quelles que soient les discussions au sein du Parti, nous ne pouvons pas nous faire d’illusions. Le Parti ne peut permettre un tel mépris de ses droits. Surtout doit-elle la rejeter à un moment aussi critique.

Les revendications de l’opposition

Le monde entier a vu la bureaucratie de centre-droit à l’œuvre. Les résultats sont à portée de main. Chaque membre du Parti les voit autour de lui. Nous exigeons une discussion libre au sein du Parti et des élections libres au Congrès. Dans les discussions et les élections, toutes les nuances de l’opposition devraient participer qui reconnaissent les principes du Parti uni et la voie de la réforme.

Nous exigeons la libération des opposants incarcérés, et le retrait de l’application de l’article 58. Nous exigeons le rappel de LD Trotsky d’exil et sa réintégration dans le Parti. Nous exigeons que le Comité central publie les documents existants de l’opposition dans la période 1927-1930, ainsi que les articles de Lénine sur la question nationale ainsi que son testament politique. Ces demandes ne sont que préliminaires. La question du Parti et de la démocratie ouvrière doit être posée dans toute son ampleur devant le Congrès lui-même.

Sans Parti et démocratie ouvrière, toutes les corrections se transformeront inévitablement en déformations. Seul le contrôle révolutionnaire des masses est en mesure de tenir l’appareil sous sa main. Nous jugeons indispensable la réorganisation du Comité central et de la Commission centrale de contrôle et la restitution au Congrès et au Parti des droits qui leur ont été formellement arrachés et transférés au CC et au CCC

Nous jugeons indispensable la suppression du poste de secrétaire général et de diminuer le rôle du secrétaire du Parti à l’exercice de fonctions techniques, avec le transfert des fonctions politiques à l’ensemble du Bureau politique.

Nous jugeons indispensable le changement de la méthode actuelle d’attribution du travail aux membres du Parti.

Nous exigeons la réorganisation complète du Bureau d’organisation, qui est aujourd’hui le principal soutien de la dictature de l’appareil.

Nous demandons l’extension à tous les organes électifs du Parti du système existant aux élections du Comité central et de la Commission centrale de contrôle.

Nous exigeons une réduction substantielle de l’appareil du Parti, ainsi que celui des syndicats, des coopératives, de l’État, - afin de libérer des ressources et de les destiner à des investissements supplémentaires dans la construction de fermes soviétiques et collectives, et pour des investissements fondamentaux. dans l’industrie.

Nous réitérons notre revendication du 4 octobre 1929 : l’ajustement en profondeur du plan quinquennal, quant à ses parties internes et quant aux besoins de la classe ouvrière – la révision des conventions collectives dans le sens d’une amélioration des conditions matérielles de la classe ouvrière, l’examen scrupuleux des résultats de la semaine de travail ininterrompue considérée comme une mesure temporaire, exceptionnelle, recevable uniquement avec l’accord des travailleurs, l’établissement d’un lien entre le salaire nominal et l’augmentation du budget, la rétablissement de l’activité réelle des syndicats.

La politique du Parti dans le pays : abolition formelle de la collectivisation complète, arrêt de la dékoulakisation en masse, et expulsion des Koulaks des campagnes, sauf cas isolés prévus par la loi, mais sans amener les déjà expulsés Les Koulaks retournent dans leurs anciennes localités.

Les syndicats de paysans pauvres

Attention exceptionnelle de l’Etat aux mouvements des collectifs, en leur accordant l’aide financière et technique nécessaire, création d’Unions de Paysans Pauvres. Cette mesure est indispensable pour créer une base politique pour le mouvement des kolkhozes et comme support politique à la fois pour les politiques de crédit et la culture sociale dans le pays. [1]

La question de régler le problème de l’approvisionnement du pays en produits alimentaires et en matières premières agricoles, en consolidant la construction de collectivités, tout en conservant le rythme du développement industriel, est désormais posée au Parti. C’est une tâche incontestablement lourde, mais elle se convertit en tâche pratique, voire technique, si les prémisses politiques de sa solution sont créées.

Nous ne proposons aucun nouveau programme au Parti, nous luttons seulement pour le rétablissement de l’ancien programme éprouvé dans des combats acharnés et dans des victoires glorieuses, et de la ligne tactique du Parti communiste (bolcheviks).

avril 1930

Christian Rakovsky
V. Kossior
N. Muralov

Note de bas de page de l’introduction de Trotsky

A. Le caractère assez maigre de cette critique était surtout marqué par le fait qu’à sa tête était inscrit Paz, pour qui l’accusation de capitulation contre Rakovsky n’était nécessaire que pour abandonner les rangs révolutionnaires, dont il n’était qu’un oiseau. de passage. On ne peut cependant pas oublier que dans un bloc avec Paz contre Rakovsky, on a aussi trouvé le camarade Treint, qui, avec toutes les erreurs qu’il a commises et commet encore, n’est encore, nous l’espérons, aucune figure du hasard dans l’arène de la lutte révolutionnaire.

Note de bas de page du texte principal

1. En attendant, la direction centriste, qui n’autorise pas les unions de paysans pauvres dans une partie du territoire de l’URSS, est obligée de les admettre en Ukraine, et de mettre entre leurs mains l’œuvre de collectivisation. Les Comités de paysans pauvres d’Ukraine ont été maintenus parce qu’ils savaient se défendre et n’ont pas permis à la politique de liquidation des années 1924-1925 d’aller plus loin que de les transformer d’organisations de type semi-obligatoire en organisations de genre libre.

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