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Les crimes de l’armée française de Clémenceau (vaincue par les ouvriers) en Ukraine : des tortures et du sang. L’exemple de Kherson, mars 1919

dimanche 12 février 2023, par Alex

Les travailleurs sont donc fixés sur le degré de sincérité qu’ils doivent accorder aux déclarations de nos gouvernants capitalistes.

C’est ainsi qu’Andre Marty conclut le chapitre XVII de son ouvrage « Les Révoltés de la Mer Noire » (Première édition, partie 1, 1927). Aujourd’hui, les travailleurs qui se posent des questions sur la sincérité de l’aide annoncée par le gouvernement français aux Ukrainiens qui fuient les bombardements peuvent relire le témoignage d’André Marty.

L’objectif d’A. Marty était non celui d’un historien, mais d’un militant : « Nous avons écrit cet ouvrage pour servir à l’éducation révolutionnaire des ouvriers et des paysans ».

Odessa, Kherson en Ukraine, Constanza, Galati, Braila en Roumanie. Tous ces noms de villes sont des lieux du livre de Marty où l’impérialisme français, au nom de l’aide aux ukrainiens, a organisé leur massacre, toutes classes sociales confondues.

Ces noms reviennent à la une de l’actualité : l’armée française est retournée il y a quelques jours à Constanza, sur les lieux de ses crimes de 1919. La Roumanie fût en effet le centre de commandement d’armées qui partirent réprimer les révolutions russes et hongroises.

Mais le prolétariat, sous l’uniforme du côté français, était aussi présent. L’intervention française dont l’objectif était d’écraser la révolution ukrainienne fût vaincue grâce à la résistance des soldats appuyés par des ouvriers en France.

L’extrême gauche électorale (LO, NPA) n’utilise pas la tribune donnée aux candidats lors des élections pour célébrer la mémoire et remettre à l’ordre du jours les méthodes de cette lutte de classe révolutionnaire (propagande dans l’armée, mutinerie, fraternisation avec les ouvriers de l’armée d’en face). Le livre d’André Marty est à faire circuler. Le fait que l’extrême gauche soit silencieuse sur ces crimes passés de l’impérialisme français est tout un programme : celui des réformistes.

Le chapitre ci-dessous est consacré au massacre de Kherson par l’armée franco-grecque, le 9 mars 1919.

Kherson. L’Amiral sanglant.

Odessa et Tiraspol ne furent malheureusement pas les seuls points où les Alliés se soient livrés aux actes atroces que je viens de décrire. Partout où s’installèrent les « libérateurs » il en fut de même.

Il est toutefois une ville où le crime fut consommé avec une telle froide volonté qu’elle tient du sadisme. C’est le port de Kherson.

La ville était sous le contrôle des Alliés, c’est-à-dire sous la dictature militaire. La garnison comprenait : six compagnies du 176ème d’infanterie, plusieurs régiments grecs et enfin une flottille de bâtiments de guerre français, composée des canonnières Algol et Altaïr, du mouilleur de mines Pluton et du contre-torpilleur Mameluck à bord duquel arriva le contre-amiral Lejay.

Comme à Odessa, il y régnait un régime de terreur effroyable. Plusieurs témoins (comme le soldat U. du 176ème Eugène R. du Génie) citent le cas de ce capitaine qui , en état d’ivresse, s’amusa « pour passer le temps » à tirer à coup de revolver sur plusieurs ouvriers enfermés dans une cellule de la citadelle. Un fut tué, plusieurs autres blessés. (Eugène R. dénonça plus tard ce forfait dans La Vague.) Le résultat de pareilles méthodes fut le même qu’à Odessa. La population tout entière, non seulement ouvrière, mais encore petite-bourgeoise se détourna de leurs alliés et leur devint fondamentalement hostile. Elle appelait de toutes ses forces l’aide de l’ataman Grigorieff qui tenait la campagne avec ses bandes de « partisans rouges » et constituait la seule force à tendance révolutionnaire sur laquelle ils pussent compter.

Renforcé de tous les éléments ouvriers qui avaient pu quitter la ville, poussé par eux, l’ataman Grigorieff envoya un ultimatum aux alliés d’Avoir à évacuer la ville.

N’ayant pas de réponse, il encercla la ville et, le 2 mars au matin, tenta d’y pénétrer d’abord avec un train blindé, puis par détachements d’infanterie. Alertés pour partir en contre-attaque, deux compagnies du 176ème qui venaient d’arriver d’Odessa refusèrent de marcher. Nous détaillerons la scène dans le tome II. En hâte, le commandement appela de Nikolaief des renforts de troupes grecques et la bataille prit aussitôt un caractère acharné : les rouges étaient obligés de prendre chaque maison, chaque ruelle, une à une de haute lutte.

***

Pour gêner l’arrivée des contingents rouges, les navires français tiraient sans arrêt sur la gare avec leurs pièces de 16 c/m. (dont une éclata à bord de l’Altaïr tuant plusieurs marins) ; naturellement, les coups courts tombaient sur la ville.

Peu à peu, ne voyant pas arriver de renfort français, les Grecs démoralisés cédaient du terrain. Le 7 mars, un peu partout, ils refluaient vers le port, dans un désordre épouvantable après de violents corps à corps. Mais avant d’évacuer les rues, ils enlevaient de force des maisons tous ceux dont ils pouvaient se saisir, les qualifiants d’« otages » ; ils les conduisaient au port et enfermaient toute cette population inoffensive dans un grand hangar à grains sur le quai, sévèrement gardé, laissant ces malheureux 24 heures sans une goutte d’eau ni la moindre nourriture. Le 9 mars au soir, il y avait dans le hangar au moins un millier de personnes composées presque uniquement de vieillards, de femmes et d’enfants. Depuis longtemps déjà de nombreuses gerbes d’herbes de rivières qui servent de chauffage dans la contrée étaient placées le long des parois extérieurs et arrosées de pétrole...

Le 10 mars à 6 heures, les derniers détachements grecs quittaient les maisons aux abords du port du port et se repliaient sur les quais. les poursuivants rouges tiraillaient, quelques balles sifflèrent au-dessus des navires français. C’était l’occasion attendue par le sinistre amiral Lejay qui redressait sa taille de dégénéré sur la passerelle du Mameluck. Un pavillon monta et, 30 secondes plus tard, tous les navires ouvraient le feu à bout portant. Les premiers obus à la mélinite furent dirigés sur le hangar « pour déblayer le champs de tir », devait dire plus tard un officier de marine. On devine la suite. En quelques minutes cette construction de bois ne fut qu’un immense brasier qui s’écroulait sur les têtes des malheureux qui y étaient enfermés.

Ceux qui n’étaient pas morts sous les obus ou sous l’asphyxie profitèrent de la chute des parois et par instinct de conservation coururent vers les quais, vers les navires au pavillon tricolore. Alors les mitrailleurs crépitèrent et abattirent impitoyablement ceux qui ne se couchèrent pas aussitôt... Trois jours après le soviet de Kherson faisait photographier l’emplacement du hangar. On n’y peut voir qu’un tas de décombres fumants et d’ossements carbonisés...

« Les civilisateurs bourgeois avaient passé par là ... » Et ce ne fut pas tout ! Dans les photos prises par les soins du soviet de Kherson aussitôt après l’évacuation, figurent des spectacles horribles, par exemple celui d’un « partisan rouge » dont le visage est entièrement écorché et le coeur arraché d’une poitrine défoncée ; des femmes, des enfants gisent mutilés. Des copies de ces photos furent expédiées à la croix rouge internationale, et dans son radio quotidien le Commissaire du peuple aux affaires étrangères de la République des Soviets de Russie l’invitait à envoyer d’urgence, sur place, une mission pour se rendre compte des atrocités accomplies (bien entendu cette mission n’est jamais venue).

De son côté le président du Conseil des commissaires du peuple et commissaire aux affaires étrangères de la R.S.S.U. envoyait dès le 13 mars, un long radio au ministre des affaires étrangères de France, M. Pichon, avec copie à la Conférence de la paix.

***

Certains croiront peut-être mon récit exagéré. Nous avons donc publié dans l’appendice le rapport de la commission d’enquête nommée par le soviet de Kherson et comprenant un représentant de l’ancien parquet et un de l’ancienne municipalité.

Le gouvernement français connaît d’ailleurs les faits, car un opérateur de la section photographique de l’armée, neveu d’un colonel à ce moment en service au 2ème bureau du ministère de la guerre (contre-espionnage) a pris des vues de Kherson aussitôt après le tir.

Malgré cela, les gouvernants successifs n’ont cessé pendant 4 ans d’accuser les bolchevicks d’être des criminels. Les travailleurs sont donc fixés sur le degré de sincérité qu’ils doivent accorder aux déclarations de nos gouvernants capitalistes.

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