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Poésies contre l’esclavage

jeudi 23 avril 2015, par Robert Paris

Poésies contre l’esclavage

Antoine Dupré :

Si un jour sur tes rives

Reparaissent nos tyrans

Que leur horde fugitive

Serve d’engrais à nos champs

Alain Phoebé Caprice :

PÉYI AN MWEN (mon pays)

S’il me fallait te dire mon pays

je te dirais :

Il est dans la sagesse du volcan.

Mais ne t’y fies pas trop !

Car un volcan qui dort

N’est pas un clochard îvre-mort

Et dans le réveil des laves incandescentes

Le spectre en furie

de Delgres

Déjecté en scories de la bouche de feu

Tel mon pays

Il est dans la forêt

Frémissant sous les caresses du vent

Mais ne t’y fies pas trop !

La forêt parle !

Elle dit à nos enfants

Le halètement des marrons dans leur fuite éperdue

Couvert par l’aboiement des chiens
Tel de mon peuple

La morsure

Il est dans le chuintement

Du va et vient incessant de la vague

Léchant à perdre vie

Les grains de sable à l’infini

Mais ne t’y fies pas trop !

Elle peut-être furie

Frappant à les faire choir

Falaises

Du haut de leur superbe

Il est dans les diamants de pluie

Enrichissant la terre

Mais ne t’y fies pas trop !

Car la pluie certains jours

Est de gouttes de sang

Qui inondent la terre à la faire dégorger

Tel mon pays

Noyé

Il est comme le vent

Qui sussure des vocables sucrés

Aux oreilles des femmes

Sous les robes des femmes

A les faire rougir

Sous leur peau noire

Mais qui aussi

Cyclones

Vomit des sons grossiers et lourds

Sans aucune mesure

Il est dans le soleil

Sans lequel

L’éclair fulgurant des lames des coupeurs

Ne serait qu’étincelle éphémère

Il est dans le son lancinant du tambour

Annonciateur de mort

A travers mornes et fonds

Mais ne t’y fies pas trop !

Car la peau peut être frappée

Battant l’appel

A la faire éclater

Tel de mon peuple

Le cri !

Il est dans les femmes

Il est dans les hommes de ma terre

Humiliés et meurtris

Jusqu’à plus mal

Mais ne t’y fies pas trop !

Car

Tout comme le volcan

Un jour

Comme l’éclair du soleil

La vague en furie

La tempête de pluie

La fougue des cyclones

La parole des arbres

La force essentielle du tambour

ILS SE DÉCHAINERONT !

Et ce jour-là …

Ah ! Etranger !

Si tu pouvais entendre cette terre !

Gontran Damas :

Le Blanc à l’Ecole du Nègre

tout à la fois

gentil

docile

soumis et singe

Jamais le Blanc ne sera nègre

car la beauté est nègre

et nègre la sagesse

car l’endurance est nègre

et nègre le courage

car la patience est nègre

et nègre l’ironie

car le charme est nègre

et nègre la magie

car l’amour est nègre

et nègre le déhanchement

car la danse est nègre

et nègre le rythme

car l’art est nègre

et nègre le mouvement

car le rire est nègre

car la joie est nègre

car la paix est nègre

car la vie est nègre

T’EN SOUVIENT-IL

Antoine Dupré (assassiné avec Dessalines) :

« Hymne à la liberté »

Défenseurs de la liberté,

Quittons nos foyers, nos compagnes ;

Du nord le tigre ensanglanté

Parait encore dans nos montagnes ;

Courons vaincre pour la patrie

Ou mourir comme des héros

Avec gloire on sort de la vie

Lorsqu’on tombe sous les drapeaux.

Volons, volons aux champs de Mars :

La liberté conduit nos étendards.

« Le dernier soupir d’un Haitien »

Soleil, Dieu de mes Ancêtres,

O toi de qui la chaleur

Fait exister tous les êtres,

Ouvrage du Créateur,

Près de finir ta carrière,

Que ton auguste clarté

Eclaire encore ma paupière

Pour chanter la liberté

II

Par les lois de la nature,

Tout nait, tout vit, tout périt.

Le palmier perd sa verdure :

Le citronnier perd son fruit ;

L’homme vit pour cesser d’être ;

Mais, dans la postérité,

Ne devait-il pas renaître,

S’il aimait la liberté.

Cet hymne finit ainsi :

Le poète, s’adressant à Haiti, lui dit :

Entends mes derniers adieux !

Si, quelque jour, sur tes rives,

Osent venir des tyrans,

Que leurs hordes fugitives

Servent d’engrais à nos champs !

Jacques Roumain :

Nègre colporteur de révolte

tu connais les chemins du monde

depuis que tu fus vendu en Guinée

une lumière chavirée t’appelle

une pirogue livide échouée

dans la suie d’un ciel de faubourg.

René Bélance :

Geôle - poème dédicacé à feu Daniel Arty

Absurde l’air de croire

qu’un peu de sève

coule dans la veine de l’arbre

Voir clair

Absurde si le geste joue à faux

dans la danse des momies

Pourtant le sang giclant de tes mains

germera

Ton cri passera l’orage

mais ce n’est pas de nos cœurs

desséchés par la peur

que surgira l’écho

Je crois fertile tout sacrifice

même si nous tournons en rond

quand ton dire séditieux

appelle une levée de bras

Nous avons gréé sur la peur

Je ne chante pas dans l’orage

de nos jours absurdes

Lâcheté ou peur de vivre l’horreur des fauves

Je savais déjà que ta voix dans la houle

ignore les chemins de la moisson

Ils ont fermé la ville

pour torturer des ombres

L’amour est interdit

Car il n’est pas juste d’aimer

parmi les contempteurs du rêve

Déjà nous avons reçu l’ordre d’incinérer la joie

(...)

J’ai vu le jeune piquet taciturne

Il ose parler

Son casque rutile

Laissez souffler le vent

Ligoté

ulcéré

épiant l’heure du lancer

Ses yeux distillent le feu

Sa voix nue retentira

Nous n’avons pas eu peur

de dormir sous les clous du mépris

Tous les bras cinglants...

Jean Métellus :

Au pipirite chantant le paysan haïtien a foulé le seuil du jour et dessine dans l’air, sur les pas du soleil, une image d’homme en croix étreignant la vie

Puis bénissant la terre du vent pur de ses vœux, après avoir salué l’azure trempé de lumière, il arrose l’oraison de la montagne oubliée, sans faveur, sans engrains

Au pipirite chantant pèse la menace d’un retour des larmes

Au pipirite chantant les heures sont suspendues aux lèvres des plantations

Et si revient hier que ferons nous ?

Et le paysan haïtien enjambe chaque matin la langue de l’aurore pour tuer le venin de ses nuits et rompre les épines des cauchemars

Et dans le souffle du jour tous les loas sont nommés.

Au pipirite chantant le paysan haïtien, debout, aspire la clarté, le parfum des racines, la flèche des palmiers, la frondaison de l’aube

Au pipirite chantant chaque goutte de rosée, chaque branche frémissante, le vent caressant les tonnelles sont messagers des esprits

Au pipirite chantant la tristesse peint le cœur

L’espoir lui même est sulfureux

La campagne avive les mystères

Elle traque déjà ses morts

Son ventre est gros de portées de soucis

Les morts grandissent sous les vivants

Et la plaine d’Haïti a reçu son brin d’eau

L’eau de la source amenée par les canaux

L’eau du ciel comme un toit de rosée

L’eau des yeux d’un enfant sans pain

Le sang d’une mère happée par le délire

Couleur, saveur, odeur ont voltigé sous la machette du paysan

(.....)
Au pipirite chantant avec l’eau vive de mes rêves j’efface les graves promulgations issues des rives du profit

Et mon propos, lié à ma source, bâillonne l’écume de toutes les eaux étrangères , de tous les cris de convenance et chausse l’irrévérence pour fouler le brouhaha de tous les mots d’ailleurs.

Paul Laraque :

La saison des comptes

…les blancs ont débarqué

le petit soldat est tué

le pays conquis

les blancs sont repartis

les rois nègres

sont les loas de la mort

démasqués

les rois nègres

ne sont plus rois

seuls le sont les étrangers

après la danse

les tambours sont lourds

la femme a cassé les eaux

mais ne peut pas accoucher

il faut le couteau

pour que naisse la liberté

organisation et résistance

sont les seules clés de la délivrance

la révolution n’aura pas avorté

contes à faire dormir debout

ou rêver les yeux ouverts

voici venir votre saison

la saison des comptes

le temps de briser notre croix

le temps pour Bouki de récolter

le temps de changer le temps

et de transformer le rêve en réalité.

Nicolas Guillen :

Couper les têtes comme les cannes

Clac, clac, clac !

Brûler les cannes et les têtes

Et faire monter jusqu’aux nuages la fumée

Oh quand sera-ce, quand sera-ce !

Nègre, petit nègre

Violet et frisé.

Debout ! dans la rue !

Car le soleil darde ;

Dites réveillé

Ce que vous pensez

Que meure le maître !

Qu’il meurre grillé !

François Sengat-Kuo :

Ils m’ont dit

tu n’es qu’un nègre

juste bon à trimer pour nous

j’ai travaillé pour eux

et ils ont ri

Ils m’ont dit

tu n’es qu’un enfant

danse pour nous

j’ai dansé pour eux

et ils ont ri

Ils m’ont dit

tu n’es qu’un sauvage

laisse-là tes totems

laisse-là tes sorciers

va à l’église

je suis allée à l’église

et ils ont ri

Ils m’ont dit

tu n’es bon à rien

va mourir pour nous

sur les neiges de l’Europe

pour eux j’ai versé mon sang

l’on m’a maudit

et ils ont ri

Alors ma patience excédée

brisant les noeuds de ma lâche résignation

j’ai donné la main aux parias de l’Univers

et ils m’ont dit

désemparés

cachant mal leur terreur panique

meurs tu n’es qu’un traître

meurs...

pourtant je suis une hydre à mille têtes.

Guy Régis :

Atteint

Inquiétant. Ça devient inquiétant.

Comment, pourquoi inquiétant ?

De n’avoir jusqu’à présent pas été atteint.

Atteint. Atteint de quoi ?

D’une balle.

De quoi ?

D’une balle.

Tu sais, un projectile qui court...

il court, il court et il rentre ;

il court, il court, il court, il ravage ; il court, il court tout ravager ;

il ravage tes muscles, tes os ; il court, il rentre et tout ravage en toi ;
tu ne le sens pas qui court ;

c’est le feu en toi ; cette chose brûle tout en toi, et toute cette chaleur qui monte subitement, tout ça, tout ça te bouleverse, tout ça, tu ne comprends pas ;

tu ne penses même pas à comprendre, tu n’es pas habitué, tu parles, personne n’est habitué à cette chose-là, mais elle est là, là, rigide, tenace, téméraire ;

elle arrête même de courir pour bien se loger dans un de tes muscles ;
elle est même faite pour être logée en toi, dedans toi, oui, pense ; pense à ça, pense que c’est normal qu’elle se fiche dedans, dedans l’un de tes organes, pense, pense, vas-y, mais tu ne peux ;

bien qu’elle soit là dans toi, tu ne peux pas, même ça, tu ne le peux pas, penser, la chose, la vérité de cette chose, elle est là, plantée dans ton corps même, elle l’est, oui, oui, oui, dedans même, elle s’installe, elle s’incruste, elle se plante, mais vas-y, défends-toi, défie-la, ose la défier, cette chose-là ;

cette chose, à la vérité, elle finira en arrêtant de courir par t’arrêter toi-même ;

toi, oui, toi-même ;

les gens courent vite te transporter, tu saignes, tu perds ton liquide ; ça dégouline, ta sueur, ta morve, tout ton sang tu le vois se verser ;
ça te bouleverse, et toi, pour l’instant, ce n’est pas ce qui compte, ce n’est pas ce qui compte pour toi, d’être bouleversé ;

tu ne penses pas ;

tu ne peux pas, tant que ça coule, tant que ça dégouline ; les gens sont bouleversés ;

les gens, ceux qui te transportent, ils ne peuvent pas, ils n’osent pas te regarder ;

mais pour l’instant, une fois de plus, ce n’est pas ce qui compte ; pour toi, ce n’est pas ce qui compte vraiment ;

les gens et toi vous ne pouvez même vous regarder, même pas ; vos yeux expriment déjà une trop grande désolation ;

une grande désolation s’abat sur vous, sur eux, sur les gens ;
s’abat sur eux, sur tout le pays ;

une grande désolation s’abat sur tout pour tous nous ravager ;
pense, vas-y, pense ;

je te défie de penser ;

impossible pour l’instant ;

ça, ça ne compte pas ;

même les gens ne comptent pas pour toi ;

même les gens, même le quartier, même la ville, même le pays tout entier ne compte pas ;

pour l’instant ce qui compte vraiment pour toi c’est d’être sauvé ;

tu les effaces les gens, malgré leurs yeux éteints par la désolation, tu les effaces, tu les éteins ;

toi, tu voudrais être sauvé, tu voudrais garder ton souffle, respirer, respirer, respirer, encore, encore, respirer, vivre, voir, encore, encore, respirer, entendre, vivre, pouvoir encore bouger, respirer, respirer, vivre, exister, exister encore, être encore, être en vie ;

malgré eux, les gens, malgré tout, malgré nous tous, être encore capable de bouger ;

pense, vas-y, pense, pense à pourquoi tu tiens tant à respirer encore ;
pense, pense, pense ;

non, tu ne sais même pas trop pourquoi tu voudrais continuer à respirer, à durer, à continuer à faire bouger ce corps qui finalement sera toujours cible dans cette ville, dans ce pays, où tout est déjà cible ;

les murs, les fils électriques, les pylônes électriques, les gens, les femmes, les enfants, les militaires, les lâches, les braves, les défenseurs, les défendus, les policiers, les protecteurs, les protégés, les assaillants eux-mêmes, les murs, les fils électriques, les pylônes électriques, les gens encore, les femmes encore, les gosses encore, les assaillants encore eux-mêmes, les policiers encore, leurs bras encore, leurs mains encore, leurs ventres encore, leurs têtes encore ;
pense, vas-y ;

non, ce n’est pas bien d’être une cible, quoi que l’on fasse, qui que l’on soit, de quelque nature que l’on soit ;

non, pas tentant du tout ; mais, pour l’instant, toujours et toujours, ce n’est pas ce qui compte pour toi ;

pour toi, non, toujours pas ;

toi, tu voudrais vivre ;

tu voudrais respirer, respirer, encore, encore, encore, garder ton souffle, entendre, voir, toucher, respirer, encore, encore, voir, entendre, respirer, respirer, respirer encore, encore ;

que la ville meure, que le pays se carbonise, s’enterre, s’incinère ; que le pays se carbonise, s’enterre, s’incinère ;

que le pays se carbonise, s’enterre, s’incinère ;

toi, tu veux planter ton mât, ton digne étendard d’homme ;
toi, tu veux vivre ;

pourquoi, mais pourquoi tu voudrais vivre, planter ton mât, ton digne étendard d’homme, ce pays encore se carbonise, s’enterre, s’incinère ;
se carbonise, s’enterre, s’incinère ; se carbonise, s’enterre, s’incinère ;
mais pourquoi, mais pourquoi, mais pourquoi pendant que toi tu voudrais vivre, respirer, ce pays se carbonise, s’enterre, s’incinère ; pourquoi mais pourquoi, mais pourquoi ce pays, mais pourquoi ce pays, mais pourquoi, mais pourquoi, mais pourquoi... ce pays...

Arrête.

Arrête de penser.

Oublie. Dors.

Il est minuit dehors.

Oublie. Dors.

Referme à nouveau les yeux. Referme-les.

Dors. Dors.

Tranquillement.

Coupigny :

CHANT D’UNE ESCLAVE AFFRANCHIE PAR LE DECRET DE CONVENTION NATIONALE, SUR LE BERCEAU DE SON FILS.

Au jour plus pur qui t’éclaire

Ouvre les yeux, ô mon fils !

Toi seul consolais ta mère

Dans ses pénibles ennuis ;

Si, du sommeil qui te presse,

Elle interrompt la douceur,

C’est qu’il tarde à sa tendresse

De t’éveiller au bonheur.

Quoi ! libre des ton aurore

Mon fils, quel destin plus beau !

De l’étendard tricolore

Je veux parer ton berceau

Que cet astre tutélaire

Brille à tes regards naissants ;

Qu’il échauffe ta carrières,

Même au déclin de tes ans !

En ton nom, à la patrie

Je jure fidélité :

Tu ne me dois que la vie,

Tu lui dois la liberté.

Sous le ciel qui t’a vu naître,

Rétabli dans tous tes droits

Tu ne connaîtras de maître

Que la nature et les lois.

Dieu puissant ! à l’Amérique

Ta main donna des vengeurs ;

Répands sur la République

Tes immortelles faveurs ;

Fais dans les deux hémisphères

Que ses appuis triomphants,

Forment un peuple de frères,

Puisqu’ils sont tous tes enfants !

Jacques Roumain :

Pourtant

je ne veux être que de votre race

ouvriers paysans de tous les pays...

ouvrier blanc de Detroit péon noir d’Alabama

peuple innombrable des galères capitalistes

le destin nous dresse épaule contre épaule

et reniant l’antique maléfice des tabous du sang

nous foulons les décombres de nos solitudes

Si le torrent est frontière

nous arracherons au ravin sa chevelure

intarissable

Si la Sierra est frontière

nous briserons la mâchoire des volcans,

affirmant les Cordillères

et la plaine sera l’esplanade d’aurore

où rassembler nos forces écartelées

par la ruse de nos maîtres

Comme la contradiction des traits

se résout en l’harmonie du visage

nous proclamons l’unité de la souffrance

et de la révolte

de tous les peuples sur toute la surface de la terre

et nous brassons le mortier des temps fraternels

dans la poussière des idoles.

Tristan L’Hermite :

La belle esclave more

Beau Monstre de Nature, il est vrai, ton visage

Est noir au dernier point, mais beau parfaitement :

Et l’ébène poli qui te sert d’ornement

Sur le plus blanc ivoire emporte l’avantage.

Ô merveille divine, inconnue à notre âge !

Qu’un objet ténébreux luise si clairement ;

Et qu’un charbon éteint, brûle plus vivement

Que ceux qui de la flamme entretiennent l’usage !

Entre ces noires mains je mets ma liberté ;

Moi, qui fus invincible à toute autre Beauté,

Une More m’embrase, une Esclave me dompte.

Mais cache-toi Soleil, toi qui viens de ces lieux

D’où cet Astre est venu, qui porte pour ta honte

La nuit sur son visage, et le jour dans ses yeux.

Carl Brouard :

Vous

Vous,

Les gueux,

les immondes,

les puants :

paysannes qui descendez de nos mornes avec un gosse dans le ventre,

paysans calleux aux pieds sillonnés de vermines, putains,

infirmes qui traînez vos puanteurs lourdes de mouches.

Vous

tous de la plèbe,

debout !

pour le grand coup de balai.

Vous êtes les piliers de l’édifice :

ôtez-vous

et tout s’écroule, châteaux de cartes.

Alors, alors,

vous comprendrez que vous êtes une grande vague qui s’ignore.

Oh ! vague,

assemblez-vous,

bouillonnez,

mugissez,

et que sous votre linceul d’écumes,

il ne subsiste plus rien,

rien

que du bien propre

du bien lavé,

du blanchi jusqu’aux os.

Heredia (les Trophées) :

L’esclave

Tel, nu, sordide, affreux, nourri des plus vils mets,

Esclave - vois, mon corps en a gardé les signes –

Je suis né libre au fond du golfe aux belles lignes

Où l’Hybla plein de miel mire ses bleus sommets.

J’ai quitté l’île heureuse, hélas !... Ah ! si jamais

Vers Syracuse et les abeilles et les vignes

Tu retournes, suivant le vol vernal des cygnes,

Cher hôte, informe-toi de celle que j’aimais.

Reverrai-je ses yeux de sombre violette,

Si purs, sourire au ciel natal qui s’y reflète

Sous l’arc victorieux que tend un sourcil noir ?

Sois pitoyable ! Pars, va, cherche Cléariste

Et dis-lui que je vis encor pour la revoir.

Tu la reconnaîtras, car elle est toujours triste.

Jacques Roumain :

Sales Nègres

Eh bien voilà ;

nous autres

les nègres

les niggers

les sales nègres

nous n’acceptons plus

c’est simple

fini

d’être en Afrique

en Amérique

vos nègres

vos niggers

vos sales nègres

nous n’acceptons plus

ça vous étonne

de dire : oui missié

en cirant vos bottes

oui mon pé

aux missionnaires blancs

ou maître

en récoltant pour vous

la canne à sucre

le café

le coton

l’arachide

en Afrique

en Amérique

en bons nègres

en pauvres nègres

que nous étions

que nous ne serons plus

Fini vous verrez bien

nos yes Sir

oui blanc

si Senor

et

garde à vous, tirailleur

oui, mon commandant,

quand on nous donnera l’ordre

de mitrailler nos frère Arabes

en Syrie

en Tunisie

au Maroc

et nos camarades blancs grévistes

crevant de faim

opprimés

spoliés

méprisés comme nous

les nègres

les niggers

les sales nègres

Surprise

quand l’orchestre dans vos boites

à rumba et blues

vous jouera tout autre chose

que n’attendait la putainerie blasée

de vos gigolos et salopes endiamantées

pour qui un nègre

n’est qu’un instrument

à chanter, n’est-ce pas,

à danser, of course

à forniquer natürlich

rien qu’une denrée

à acheter à vendre

sur le marché du plaisir

rien qu’un nègre

un nigger

un sale nègre

Surprise

jésusmariejoseph

surprise

quand nous attraperons

en riant effroyablement

le missionnaire par la barbe

pour lui apprendre à notre tour

à coups de pieds au cul

que nos ancêtres

ne sont pas des Gaulois

que nous nous foutons

d’un Dieu qui

s’il est le Père

eh bien alors c’est que nous autres

les nègres

les niggers

les sales nègres

font croire que nous sommes pas que ses bâtards

et inutile de gueuler

jésusmariejoseph

comme une vieille outre de mensonges débondée

il faut bien

que nous t’apprenions

ce qu’il coûte en définitive

de nous prêcher à coups de chicote (fouet à lanières nouées) et confiteors

l’humilité

la résignation

à notre sort maudit

de nègres

de niggers

de sales nègres

Les machines à écrire mâcheront les ordres de répression

en claquant des dents

fusillez

pendez

égorgez

ces nègres

ces niggers

ces sales nègres

Englués comme des mouches à viande affolées

dans la toile d’araignée des graphiques de cours de bourse effondrés

les gros actionnaires des compagnies minières et forestières

les propriétaires de rhumeries et de plantations

les propriétaires

de nègres

de niggers

de sales nègres

et la TSF délirera

au nom de la civilisation

au nom de la religion

au nom de la latinité

au nom de Dieu

au nom de la Trinité

au nom de Dieu nom de Dieu

des troupes

des avions

des tanks

des gaz

contres ces nègres

ces niggers

ces sales nègres

Trop tard

jusqu’au coeur des jungles infernales

retentira précipité le terrible bégaiement

télégraphique des tams-tams répétant infatigables

répétant

que les nègres

n’acceptent plus

n’acceptent plus

d’être vos niggers

vos sales nègres

trop tard

car nous aurons surgi

Des cavernes de voleurs des mines d’or du Congo

et du Sud-Afrique

trop tard il sera trop tard

pour empêcher dans les cotonneries de Louisiane

dans les Centrales sucrières des Antilles

la récolte de vengeance

des nègres

des niggers

des sales nègres

il sera trop tard je vous dis

car jusqu’aux tams-tams auront appris le langage

de l’internationale

car nous aurons choisi notre jour

le jour des sales nègres

des sales indiens

des sales hindous

des sales indo-chinois

des sales arabes

des sales malais

(***)

des sales prolétaires

Et nous voici debout

Tous les damnés de la terre

tous les justiciers

marchant à l’assaut de vos casernes

et vos banques

comme une forêt de torches funèbres

pour en finir

une

fois

pour

toutes

avec ce monde

de nègres

de niggers

de sales nègres.

Vigny (Poèmes antiques et modernes) :

Le Bain d’une dame romaine

Une Esclave d’Egypte, au teint luisant et noir,

Lui présente, à genoux, l’acier pur du miroir ;

Pour nouer ses cheveux, une Vierge de Grèce

Dans le compas d’Isis unit leur double tresse ;

Sa tunique est livrée aux Femmes de Milet,

Et ses pieds sont lavés dans un vase de lait.

Dans l’ovale d’un marbre aux veines purpurines

L’eau rose la reçoit ; puis les Filles latines,

Sur ses bras indolents versant de doux parfums,

Voilent d’un jour trop vif les rayons importuns,

Et sous les plis épais de la pourpre onctueuse

La lumière descend molle et voluptueuse :

Quelques-unes, brisant des couronnes de fleurs,

D’une hâtive main dispersent leurs couleurs,

Et, les jetant en pluie aux eaux de la fontaine,

De débris embaumés couvrent leur souveraine,

Qui, de ses doigts distraits touchant la lyre d’or,

Pense au jeune Consul, et, rêveuse, s’endort.

Poète haïtien anonyme :

Ils sont le choléra du monde

La nuit est mauve dans mon cœur

Les troncs noirs sur le soleil couchant

Il pleut dans mon âme

Les branches mortes gouttent

Sur la terre rouge

L’heure est tendre et triste

Mon corps git au sol

Jeté par les soldats

Des forces internationales

Venues de partout

Pour nous sauver de la vie

Pour nous assassiner

Pas de sépulture

Pas de pitié

Pas de regrets

Ne m’oublie pas mon ami

Mon camarade

Prolétaire du monde

Mais, surtout, n’oublie pas

Que ces soldats sont là aussi

Pour préparer ta mort

Comme ils ont organisé la mienne

Pas de haine, pas de regrets

Mais n’oublie rien

N’aie pas de pitié pour cet ordre inique

Qui opprime et qui tue....

Emile Roumer :

Merci quand même

Vous avez ravagé fruits, lambourdes et fleurs

depuis noix, corossols jusqu’aux oranges aigres ;

tandis qu’en vos jardins rose, oeillet, staphysaigre

charment les yeux, merci pour la tonte coiffeurs !

Merci pour les dollars dont nous sentons l’odeur

mais qu’au léger de main vos poches réintègrent,

en quarante cinq ans l’esclavage des nègres

vous a donné profits et plaisirs sans douleurs.

Merci pour notre sol ravagé, les compères

qui pour notre bonheur s’emparent de nos terres,

merci pour votre usure, effroyables békés.

Merci pour nos enfants déguenillés et blêmes,

merci pour tous ces maux et quand vous extorquez

le Montant de vos prêts, merci, merci quand même !

Derek Walcott (The sea is history) :

Memory

“Where are your monuments, your battles, martyrs ?

Where is your tribal memory ? Sirs,

in that gray vault. The sea. The sea

has locked them up. The sea is History.”

“Où sont vos monuments, vos batailles, martyrs ?

Où est votre mémoire tribale ? Messieurs,

dans ce gris coffre-fort. La mer.

La mer les a enfermés. La mer est l’Histoire.”

Paul Laraque :

Tanbou libète,

Ce tambour

c’est le feu dans les champs de cannes

ce tambour

c’est le tambour de la révolution

le tambour

de la liberté »

Axel Gauvin, La Réunion :

Bèf Banna,

“In ! zot té i kri. Yaho, gli !

Epi klak sabouk desi nout do

Epi ronf zirman dan nout zorèy.

Tan la nou té bèf

Banna

Le pli malfondé

Té i sèr laryaz dan la monté

Té i done la rou dan la désant

Te asir dési le zouk

Tan la nou té bèf

Banna”

“Hue ! Ils criaient ! Et claquaient les fouets sur notre dos.

Et ronflaient des jurons dans nos oreilles.

En ce temps nous étions les bœufs de ces gens-là.

Les plus cruels serraient le frein dans la montée,

Poussaient à la roue dans la descente

S’asseyaient sur le joug.

En ce temps nous étions les bœufs

De ces gens-là.”

Marceline Desbordes :

L’esclave

Pays des Noirs, beacreau du pauvre Arsène,

Ton souvenir vient-il chercher mon cœur ?

Vent de Guinée, est-ce ta douce haleine

Qui me caresse et charme ma douleur ?

M’apportes-tu les soupirs de ma mère ;

Ou la chanson qui console mon père ?

Jouez, dansez, beaux petits Blancs ;

Pour être bons, restez enfants !

Nègre captif couché sur le rivage

Je te vois rire en rêvant à la mort ;

Ton âme libre ira sur un nuage,

Où ta naissance avait fixé ton sort ;

Dieu te rendra les baisers de ta mère,

Et la chanson que t’apprenait ton père…

Jouez, dansez, beaux petits Blancs ;

Pour être bons, restez enfants !

Pauvre et content, jamais le Noir paisible

Pour vous troubler n’a traversé les flots.

Et parmi vous, sous un maître inflexible,

Jamais d’un homme on n’entend les sanglots.

Jouez, dansez, beaux petits Blancs ;

Pour être bons, restez enfants !

Marceline Desbordes-Valmore :

L’esclave et l’oiseau

Ouvre ton aile au vent, mon beau ramier sauvage,

Laisse à mes doigts brisés ton anneau d’esclavage !

Tu n’as que trop pleuré ton élément, l’amour ;

Sois heureux comme lui : sauve-toi sans retour !

Que tu montes la nue, ou que tu rases l’onde,

Souviens-toi de l’esclave en traversant le monde :

L’esclave t’affranchit pour te rendre à l’amour ;

Quitte-moi comme lui : sauve-toi sans retour !

Va retrouver dans l’air la volupté de vivre !

Va boire les baisers de Dieu, qui te délivre !

Ruisselant de soleil et plongé dans l’amour,

Va-t-en ! Va-t-en ! Va-t-en ! Sauve-toi sans retour !

Moi, je garde l’anneau ; je suis l’oiseau sans ailes.

Les tiennes vont aux cieux ; mon âme est devant elles.

Va ! Je les sentirai frissonner dans l’amour !

Mon ramier, sois béni ! Sauve-toi sans retour !

Va demander pardon pour les faiseurs de chaînes ;

En fuyant les bourreaux, laisse tomber les haines.

Va plus haut que la mort, emporté dans l’amour ;

Sois clément comme lui... sauve-toi sans retour !

Auguste Lacaussade :

A la mémoire de Robinet de La Serve

Nous sommes les enfants, l’attente d’un autre âge,

De l’opprimé sur nous que les pleurs soient puissants !

Vengeons un séculaire outrage !

Du crime des aïeux nous sommes innocents !...

Combattez donc, amis, sans relâche et sans trêve !

De toute énigme obscure un jour l’homme a le mot.

Non ! sa foi n’était point un rêve,

Et ce qu’il a prédit, nous le verrons bientôt.

Pressons de tous nos vœux l’aube qui doit éclore,

Hâtons l’avènement d’un jour pour tous meilleur,

E tvers l’horizon, vague encore,

Levons incessamment nos yeux et notre cœur.

A ses jeunes clartés l’avenir vous appelle ;

Détournez vos regards d’un présent déjà vieux,

Et semblables à l’hirondelle,

Pour trouver la lumière allez sous d’autres cieux.

La lutte vous attend ; dans la mêlée austère,

Vos mains se couvrirons de sanglantes sueurs.

Hélas ! pour féconder la terre

Les cieux ont leur soleil, l’homme n’a que ses pleurs.

Mais la lutte grandit, mais la lutte a ses charmes !

La pensée est un fruit que l’éclair doit mûrir.

Nous n’enfantons que dans les larmes :

Du présent en travail jaillira l’avenir.

Eh ! qu’importent la haine et la clameur jalouse !

D’un passé qui s’éteint les sarcasmes moqueurs !

Le malheur que la gloire épouse

Est un malheur, amis, fait pour de nobles cœur.

Marchez donc et luttez ! du vieux monde qui croule

Brisant les dieux, brisant la vieille iniquité,

Bâtissez un temple où la foule

Puisse abriter enfin sa féconde unité !

De la stérile nuit de nos haines premières

Que pour l’homme nouveau surgisse un nouveau jour !

Émancipez par les lumières,

Semez dans les esprits la moisson de l’amour !

Oh ! de l’amour surtout alimentez les flammes !

Rappelez cet amour que le méchant proscrit !

Enseignez sans cesse à nos âmes

Cette fraternité qu’enseignait Jésus-Christ !

Éteignez dans les cœurs les feux de la vengeance !

L’esprit affranchit mieux que le glaive irrité.

L’étoile de l’intelligence

Sur nos mœurs doit éclore la liberté.

Dites à ceux pour qui le destin fut sévère,

A ceux pour qui le sort n’a jamais eu d’affronts,

Que les eaux saintes du Calvaire

Ont indistinctement coulé pour tous les fronts ;

Que, maudit dans les cieux et maudit en ce monde,

Pauvre de tout le sang dont il est inondé,

L’esclavage est un sol immonde

Que les regards de Dieu n’ont jamais fécondé.

Qu’est-ce que la poésie engagée ?

Poésie engagée d’Haïti

Auteurs contre l’esclavage

C’est la révolution des esclaves et non la prise de conscience des esclavagistes qui a supprimé l’esclavage

Lire intégralement « Toussaint Louverture » d’Alphonse Lamartine

Lire encore sur l’esclavage

African or African american militant poetry

Portfolio

Messages

  • Esclavage, colonisation : pas de "repentance" pour François Fillon, pas plus que pour Sarkozy, Valls ou Le Pen ! La bourgeoisie fière de ses oeuvres passées et de ses massacres actuels !!!

  • CHANT D’UNE ESCLAVE AFFRANCHIE PAR REVOLUTION FRANCAISE SUR UN DECRET DE CONVENTION, SUR LE BERCEAU DE SON FILS.

    PAR COUPIGNY

    Au jour plus pur qui t’éclaire

    Ouvre les yeux, ô mon fils !

    Toi seul consolais ta mère

    Dans ses pénibles ennuis ;

    Si, du sommeil qui te presse,

    Elle interrompt la douceur,

    C’est qu’il tarde à sa tendresse

    De t’éveiller au bonheur.

    Quoi ! libre des ton aurore

    Mon fils, quel destin plus beau !

    De l’étendard tricolore

    Je veux parer ton berceau

    Que cet astre tutélaire

    Brille à tes regards naissants ;

    Qu’il échauffe ta carrières,

    Même au déclin de tes ans !

    En ton nom, à la patrie

    Je jure fidélité :

    Tu ne me dois que la vie,

    Tu lui dois la liberté.

    Sous le ciel qui t’a vu naître,

    Rétabli dans tous tes droits

    Tu ne connaîtras de maître

    Que la nature et les lois.

    Dieu puissant ! à l’Amérique

    Ta main donna des vengeurs ;

    Répands sur la République

    Tes immortelles faveurs ;

    Fais dans les deux hémisphères

    Que ses appuis triomphants,

    Forment un peuple de frères,

    Puisqu’ils sont tous tes enfants !

  • Ils m’ont dit

    tu n’es qu’un nègre

    juste bon à trimer pour nous

    j’ai travaillé pour eux

    et ils ont ri

    Ils m’ont dit

    tu n’es qu’un enfant

    danse pour nous

    j’ai dansé pour eux

    et ils ont ri

    Ils m’ont dit

    tu n’es qu’un sauvage

    laisse-là tes totems

    laisse-là tes sorciers

    va à l’église

    je suis allée à l’église

    et ils ont ri

    Ils m’ont dit

    tu n’es bon à rien

    va mourir pour nous

    sur les neiges de l’Europe

    pour eux j’ai versé mon sang

    l’on m’a maudit

    et ils ont ri

    Alors ma patience excédée

    brisant les noeuds de ma lâche résignation

    j’ai donné la main aux parias de l’Univers

    et ils m’ont dit

    désemparés

    cachant mal leur terreur panique

    meurs tu n’es qu’un traître

    meurs...

    pourtant je suis une hydre à mille têtes.

    François Sengat-Kuo

  • Il neigeait…

    Du blanc s’étendait doucement

    Sur la terre rouge, ocre et poussiéreuse

    Elle tombait lentement en tourbillonnant

    Pas par grandes rafales ni avec violence,

    Non, doucement, comme en se promenant dans les airs,

    Elle recouvrait tendrement la terre.

    Mais la terre avait changé de couleur

    La vie avait changé de couleur.

    De la neige en Haîti !

    C’était aussi doux et aussi étonnant

    Qu’un printemps des peuples esclaves

    Où ceux-ci auraient cessé de se soumettre

    Et secoueraient enfin l’ordre établi.

    « Il n’y pas de neige en Haïti »,

    Disaient les anciens,

    D’une manière aussi sentencieuse que fataliste

    Comme ils disaient :

    « Il n’y aura pas de liberté pour les esclaves d’Haïti ».

    Mais il neigeait…

    La neige recouvrait tout.

    Il neigeait.

    La neige changeait tout.

    Il neigeait dans le cœur des esclaves.

    Il neigeait dans l’intelligence des esclaves.

    Il neigeait dans la pensée des esclaves.

    Il neigeait et la neige leur faisait oublier qu’ils n’étaient que des esclaves.

    Il neigeait et tous ceux qui riaient, qui pleuraient, qui souffraient,

    Mais qui croyaient qu’ils seraient toujours esclaves,

    S’apercevaient qu’ils se mentaient, se trompaient, s’enchaînaient eux-mêmes.

    Car il neigeait en Haïti !

    Poète haïtien anonyme

  • Le Dernier soupir de l’Haïtien

    Soleil, dieu de mes ancêtres

    Ô toi de qui la chaleur

    Fait exister tous les êtres,

    Ouvrage du Créateur !

    Près de finir ma carrière,

    Que ton auguste clarté

    Éclaire encor ma paupière

    Pour chanter la liberté !

    Liberté, vierge chérie !

    Quand mon oeil s’ouvrit au jour,

    Pour t’aimer, j’aimai la vie

    Et toi seule eus mon amour,

    Le tombeau détruit la flamme,

    Le sentiment, le désir,

    Ah ! brûle encore mon âme

    Après mon dernier soupir.

    Par les lois de la nature,

    Tout naît, tout vit, tout périt,

    Le palmier perd sa verdure

    Le citronnier perd son fruit.

    L’homme vit pour cesser d’être

    Mais, dans la postérité

    Ne devait-il pas renaître,

    S’il aimait la Liberté ?

    Haïti, mère chérie,

    Reçois mes derniers adieux ;

    Que l’amour de la patrie.

    Enflamme tous nos neveux,

    Si quelque jour sur tes rives

    Reparaîssent nos tyrans

    Que leurs hordes fugitives

    Servent d’engrais à nos champs !

    Antoine Dupré

  • Peut-on connaître la poésie de Antoine Dupré en entier ?

  • Le Dernier soupir de l’Haïtien

    Soleil, dieu de mes ancêtres

    Ô toi de qui la chaleur

    Fait exister tous les êtres,

    Ouvrage du Créateur !

    Près de finir ma carrière,

    Que ton auguste clarté

    Éclaire encor ma paupière

    Pour chanter la liberté !

    Liberté, vierge chérie !

    Quand mon oeil s’ouvrit au jour,

    Pour t’aimer, j’aimai la vie

    Et toi seule eus mon amour,

    Le tombeau détruit la flamme,

    Le sentiment, le désir,

    Ah ! brûle encore mon âme

    Après mon dernier soupir.

    Par les lois de la nature,

    Tout naît, tout vit, tout périt,

    Le palmier perd sa verdure

    Le citronnier perd son fruit.

    L’homme vit pour cesser d’être

    Mais, dans la postérité

    Ne devait-il pas renaître,

    S’il aimait la Liberté ?

    Haïti, mère chérie,

    Reçois mes derniers adieux ;

    Que l’amour de la patrie.

    Enflamme tous nos neveux,

    Et si jamais sur tes rives*

    Se remontrent nos tyrans*,

    Que leurs hordes fugitives

    Servent d’engrais à nos champs !

    *autre version :

    Si quelque jour sur tes rives

    Reparaîssent nos tyrans

    Antoine Dupré

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